116. De l’île au lac

Un joli parcours depuis la dernière publication qui nous a amenés du point le plus austral de notre parcours italien jusqu’à la région des grands lacs. Nous avons découvert des merveilles, pas tant dans les paysages un peu ternis par l’hiver qu’au coeur des villes et d’édifices religieux ou encore dans des musées. Sienne, Florence, San Gimignano, Bologne, Milan, Modène, Côme nous ont comblés. J’espère que vous aussi serez conquis.

Nous en étions là…


10 mois où ?

Après sa première abdication en 1814, Napoléon fut contraint à s’exiler. On lui donna le choix entre Corfou et Elbe. Comme il n’avait pas envie d’aller se faire voir chez les Grecs, il choisit la seconde, peut-être aussi pour la ressemblance avec sa Corse natale.

Curieusement, alors qu’il avait annexé de force l’Italie, il fut plutôt bien reçu par les habitants qui y voyaient là une manière de se faire connaître. Imaginez que Napoléon ait séjourné à Saint-Paterne Racan, vous auriez entendu parler de Saint-Paterne-Racan, alors que là, non.

En arrivant là-bas, dans ce qui était devenu son royaume, il entreprit d’emblée de grands travaux pour moderniser l’île, notamment construire des routes et un hôpital (ben oui, pour les accidentés de la route, tiens) Les taxes et les impôts grimpèrent d’un coup et la sympathie des habitants descendit d’autant. Ils auraient bien bloqué les routes, mais elles n’étaient pas encore finies. Le temps que tout ça se mette en place et qu’ils constituent des stocks de lisier-à-projeter, Napoléon s’était déjà fait la malle puisqu’il ne resta dans l’île que 10 mois.

Il eut tout de même le temps d’acheter 2 maisons, que nous avons visitées. La résidence d’été est la plus spectaculaire, affichant un peu partout les symboles de l’Empereur, comme le N, l’aigle ou l’abeille. On y trouve bien sûr les pièces à vivre et du beau mobilier, ainsi que de nombreux tableaux. (suite au prochain épisode)


Tour de l’île

L’île d’Elbe fait 28 km sur 19 et possède un relief assez tourmenté. Roberto s’est fait plaisir en parcourant les petites routes parfois très étroites ou en corniche qui en font le tour. Au gré des criques et des arêtes montagneuses, on découvre de jolis petits villages, hébergeant qui un port de pêche qui une plage et quelques hôtels à taille humaine. La végétation est dominée par les pins parasols et les cactus raquettes, rappelant la Corse à ceux qui y sont allés (ses côtes sont à moins de 50 km de là). Nous sommes passés devant un étonnant télécages (comment appeler autrement cette sorte de télécabine utilisant un genre de cages à oiseaux pour transporter les gens) que nous aurions bien essayé s’il n’était pas fermé. Enfin, le climat est doux, tempéré par la mer Tyrrhénienne. Il a l’air de faire bon vivre ici. Napoléon aurait mieux fait d’y rester au lieu d’aller faire le malin à Waterloo. (suite au prochain épisode)


La fuite organisée

Le départ de l’Empereur était un peu expliqué dans la seconde résidence de Napoléon, que nous avons visitée à Portoferraio. C’est de là qu’il dirigeait son île, accompagné d’une cour de fidèles, et soutenu dans la logistique (euphémisme pour parler des bals, banquets et autres teufs) par sa sœur Pauline. Comme dans la résidence d’été, on y trouve du mobilier d’époque, de nombreux livres ramenés de France, et l’on admire la décoration à l’italienne où tout du sol au plafond est en trompe-l’œil.

Loin de l’évasion sophistiquée de Franck Morris à Alcatraz, le départ de Napoléon était tout de même réfléchi. Il profita du départ de son surveillant anglais, parti rejoindre sa maîtresse à Livourne et des réparations d’un navire de 18 mètres qui s’était échoué dans la rade de Portoferraio la capitale de l’île. Il réarma le navire de canons et de vivres, fit grimper à bord une armée réduite (sic) de 673 hommes et quitta les lieux un soir, acclamé par la population et après avoir serré la main du maire… 3 jours après, il abordait à côté de Cannes et filait à la capitale pour reprendre le pouvoir. Pour un CDD de 100 jours comme chacun sait.


Sienne de vie

Je ne connaissais jusqu’ici de Sienne que la couleur de terre figurant sur mes tubes de gouache au collège ou au lycée, sans d’ailleurs me poser la question de l’origine à cette époque. Il faut dire que les cours de dessin ne m’ont jamais intéressé. Ça ne doit pas être génétique parce que mon frère cadet a fait toute sa carrière comme prof de dessin ! Toujours est-il que nous voilà rendus à Sienne, en Toscane, et que la couleur de la terre récemment labourée dans les champs est effectivement d’une belle couleur marron. Cela dit, il parait qu’aujourd’hui on utilise davantage des oxydes de fer synthétiques qui ont à peu près la même couleur. Ça permet d’éviter de piquer de la terre aux agriculteurs, ils ont assez de problèmes comme ça.

C’est donc plutôt la ville que nous allons visiter. Encore une cité médiévale très haut perchée et piétonnisée. La forte pente des ruelles pourrait être dissuasive, aussi la municipalité met-elle à disposition des touristes et des habitants des escalators en chaînes afin qu’ils puissent parvenir au sommet. Il y a aussi pas mal de défibrillateurs au cas où…

Le point fort de la visite, loin devant tout le reste, est la superbe cathédrale, dont on découvre d’abord la façade de marbre principalement blanc qui éclate au soleil de ce début d’après-midi. D’allure plutôt plane, elle est ornée d’une multitude de sculptures très détaillées sur les angles et autour des portes. Il faut se déplacer sur le côté pour apercevoir le grand campanile noir et blanc et le dôme qui surplombe la nef. A l’intérieur, l’émerveillement se poursuit : grandes colonnes noires et blanches, mosaïques de marbre au sol, grandes fresques murales sur les parois. La bibliothèque en est totalement revêtue, des murs au plafond. Vraiment du beau boulot. Éclipsant les autres attraits proposés par la ville.


Dis-moi qui a la plus grosse…

Oui, San Gimignano est encore une cité médiévale haut perchée et piétonnisée comme la précédente. Mais chacune à sa particularité qui fait qu’on s’y arrête. Là, ce sont les tours qui dominent, 13 sur les 75 d’origine, provenant de cette époque du XIè – XIIème siècle ou les notables construisaient des tours au-dessus de leur palais, voulant montrer chacun aux autres qu’ils avaient la plus grosse. Orgueil mal placé ne profite jamais, la peste et la crise économique du siècle suivant ont fait partir beaucoup d’habitants, vers le cimetière pour les uns et vers la riche Florence voisine pour les autres. Quand on se balade dans les rues étroites de la petite ville, on se demande bien comment on avait pu faire tenir 62 tours supplémentaires. En tout cas, le caractère médiéval est bien conservé et pas trop perverti par le tourisme.


Cachez ce Saint…

Un autre point d’intérêt à San Gimignano est l’église Santo Agostino, ou plutôt ses fresques bien mises en valeur par une grande luminosité qui fait souvent défaut dans nombre d’édifices religieux. Et dans le détail, notre guide papier pointe une curiosité : sur le tableau appelé « Saint Sébastien miséricordieux », au-dessus du Saint en question la Vierge Marie a les seins nus, ce qui est assez rare dans les images liturgiques. Et le plus étonnant parait-il (le second lieu était fermé), dans la cathédrale de San Gimignano figure un autre tableau réalisé par le même artiste, Benozzo Gozzoli, un an plus tard où cette fois c’est Saint Sébastien qui est (presque) nu. La raison est que cette fois il joue le rôle de martyr pour implorer Dieu de protéger les hommes de l’épidémie de peste qui est en cours (1465).


Canem fabula


Fierté


Bellissima Firenza

En se baladant au cœur de Florence, on a l’impression d’être dans une œuvre d’art. Les façades des immeubles et surtout des palais ont un style mi-médiéval mi-renaissance, affichant volontiers des statues dans de petites niches, tandis que les édifices publics comme religieux sont couverts de fresques sur leurs murs comme sur leurs plafonds. Comme nous l’avons déjà constaté ailleurs dans le pays, plus l’aspect extérieur des bâtiments est richement décoré, plus l’intérieur est sobre et réciproquement. Ainsi, l’immense et merveilleuse cathédrale toute de marbres polychromes vêtue est presque vide à l’intérieur. Au contraire, le Palazzo Vecchio, assez sobre à l’extérieur, est presque totalement couvert de fresques sur plusieurs étages à l’intérieur. Nous verrons bien sûr quelques incontournables, comme le Ponte Vecchio, la Galerie des Offices, où l’un des David de Michel-Ange sur la place du même nom offrant un panorama sur toute la ville. Nous dégusterons quelques spécialités locales dans une petite osteria (auberge) du quartier historique. Pour éviter de perdre du temps dans les embouteillages, nous avons trouvé un petit parking tranquille au nord de Florence et pris le tramway 2 jours de suite pour gagner le centre. Florence mérite sans doute un séjour plus long, mais nous avons un long chemin devant nous.


Florence côté face


Jeu d’arcades et tours en péril

Nous quittons Florence et la Toscane pour Bologne, une jolie ville de la région d’Émilie-Romagne. Belle harmonie de façades aux dominantes ocres, grand centre historique aux rues presque entièrement bordées d’arcades, population jeune grâce à son université renommée de longue date, palais et églises richement décorés : la ville n’a pas grand-chose à envier à Florence. Ni à Pise d’ailleurs, grâce à ses deux tours qui penchent méchamment. Certes l’inclinaison de la plus penchée (3,8°) est plus faible que celle de Pise (5,6°) mais, à l’inverse de cette dernière, elle continue de s’aggraver au point que les abords immédiats du site sont fermés depuis cet automne.


Le mythe des spaghettis bolognaise

Levons tout de suite un mythe, la grande spécialité culinaire de la ville n’est pas les spaghettis bolognaise. Je n’en ai trouvé sur aucun menu et il paraît que ça viendrait des américains, ce qui ne m’étonne pas. La sauce bolognaise par contre existe bien. Elle est la base des lasagnes (dire lasagnes bolognaises est un pléonasme) et peut aussi traditionnellement accompagner des tagliatelles. A Bologne, nous avons vu aussi fabriquer un autre mets local, les tortellinis, sortes de raviolis savamment tordus. En cherchant d’autres plats typiques sur un site internet, je tombe d’abord sur un étrange message : « ce site héberge des cookies »… Non non ! les cookies ne sont pas bolognais ! Trève de plaisanterie, j’apprends que la mortadelle, la soupe anglaise (un dessert fait d’un biscuit cuiller trempé dans une liqueur à la cannelle et aux clous de girofle, auquel on adjoint crème pâtissière et chocolat noir) et le gâteau de riz sont aussi des spécialités de Bologne.


La vengeance du sculpteur

Sur la Plazza Maggiore de Bologne trône une statue de Neptune dont l’histoire mérite d’être contée : Elle fut commandée au XVIème siècle par le pape Pie IV au sculpteur Giambologna. Jugeant que l’artiste avait un peu exagéré la taille des organes génitaux, le pape lui ordonna de les rendre plus modestes. Le sculpteur fut bien obligé de s’exécuter mais trouva le moyen de se venger. En effet, lorsque l’on se place à l’arrière droit de la statue, le bras de Neptune brandi à l’horizontale lui redonne une belle virilité !


Ma nuit au musée

Certes, il ne faisait pas réellement nuit, mais après une belle matinée ensoleillée, le ciel s’était bien obscurci l’après-midi et nous nous sommes consolés en entrant visiter un musée un peu spécial dans la vieille université de sciences de la ville. Dans des locaux très sombres accompagné de sons bizarres (je dirais des baleines un peu enrouées pour vous donner une idée) nous longeons des vitrines dont le contenu semble avoir été choisi pour être dérangeant : animaux chimériques ou bicéphales, parties effrayantes d’animaux comme cet intestin d’éléphant ou cette tête toute tordue avec des dents de requin. La pièce suivante est consacrée aux humains, squelettes plus ou moins couverts de muscles comme on peut en voir dans les salles d’anatomie, mais toujours mis en scène : avec une faux, avec des yeux brillants, etc. On y trouve aussi dans un bocal de formol l’avant-bras d’un moniteur d’anatomie accidentellement tranché, selon les dires de l’étiquette, lors d’une séance de dissection. A côté, une tête en cire avec un œil exorbité est censée avoir un intérêt pédagogique, que l’on retrouve d’ailleurs un peu plus loin avec tous les muscles autour de l’œil épinglés sur une planche comme on le ferait pour des insectes. Dans une autre vitrine, une femme pose devant un crâne ouvert le cerveau apparent, avec cette légende : « Auto-portrait »… Il s’agit bien d’une scientifique réputée de l’université ! Last but not least, on découvre dans la dernière salle des dizaines d’utérus en poterie montrant l’évolution des bébés à tous les stades de la grossesse, que celle-ci soit normale, gémellaire ou pathologique, ainsi que les différentes interventions manuelles ou instrumentales pour se sortir des situations difficiles. J’ai adoré, mais je ne suis pas sûr que ce soit pour tout public !


Les ténors de Modène

Tous deux sont originaires de la ville mais ont choisi d’habiter en périphérie, tous deux ont travaillé le moteur de leur carrière, en cherchant à marier au mieux la puissance et la souplesse, tout en développant leurs gammes. Tous deux étaient passionnés de chevaux, l’un comme cavalier et comme organisateur de courses d’obstacles, l’autre en fondant une écurie de course, et tous deux ont accumulé les grands prix. Et tous deux bien sûr aimaient les belles italiennes. Vous avez reconnu Luciano Pavarotti et Enzo Ferrari, dont nous avons visité la maison pour le premier, pleine d’émotion et de souvenirs, et l’exposition-musée pour le second, riche de l’histoire peu commune de l’entreprise et de modèles magnifiques.


I have a dream


J’ai deux Milan

Alors, Claudie et le fan de Michel Sardou que je suis, comme le titre l’indique, avons visité Milan en 6 heures chrono. D’abord parce que nous étions un dimanche et que tout n’était pas forcément ouvert. Et puis parce que nous voulions sortir avant le lundi matin de la ZTL, alias Zone à Trafic Limité, qui, à l’image de nos ZFE limite l’accès des véhicules au centre-ville. Le problème est que les limites sont aussi floues que leurs caméras sont redoutables pour flasher les contrevenants ? Beaucoup de touristes s’en plaignent, bien que l’envoi de la contravention en France ne serait pas aussi systématique que pour les excès de vitesse. En tout cas nous n’avons pas voulu prendre de risque. Et puis nous avons voulu fuir la foule dense qui se pressait dans le quartier historique.

Cela dit, nous avons vu des édifices magnifiques, comme la cathédrale plus jolie en extérieur qu’en intérieur mais dont on peut accéder aux toits, l’église San Maurizio, dont le béton austère de la façade cache, à l’inverse de la cathédrale, un intérieur merveilleux presque totalement couvert de fresques de qualité. Nous avons traversé le célèbre passage Victor Emmanuel, couvert d’immenses verrières. Nous avons visité le musée de la tout aussi célèbre Scala de Milan. Et une bonne partie de la zone historique en marchant une dizaine de kilomètres. L’attraction la plus célèbre, la Cène originale de Léonard de Vinci, n’était visible que sur rendez-vous, avec 3 semaines de délai… Tant pis !




Sauvées de Napoléon

Lorsque l’Empereur de Français envahit l’Italie, bouffeur de curé qu’il était, il fit dégrader nombre d’ouvrages religieux, bâtiments comme œuvres d’art. Parmi ceux-ci, deux ont réchappé à l’Empereur d’une façon singulière.

La statue du pape Grégoire XIII sur le palais municipal de Bologne, trônant là depuis deux siècles, fut déguisée en Saint-Pétrone, le saint patron de la ville, qui attirerait moins l’attention qu’un pape. On lui rajouta une mitre et une crosse en bronze, et on inscrivit au-dessus pour parfaire le stratagème la mention « Divus Petronius Protector et Pater » (Saint-Pétrone Protecteur et Père). La statue du pape échappa ainsi à la fonte et à la transformation en boulets de canon. Aujourd’hui les attributs du Saint ont été retirés mais la mention relative à Saint-Petrone est toujours là. On ne sait jamais.


La Cène de Plautilla Nelli à Florence fut une tout autre histoire. D’abord parce qu’il s’agit de la première Cène peinte par une femme, une religieuse qu’on avait trouvé douée dans ce domaine et à qui l’on avait demandé de peindre une Cène sur un mur du réfectoire de son couvent, à l’instar de la célèbre version de Léonard de Vinci. Mais elle n’avait toujours peint que des tableaux sur toile et ne se sentait pas de réaliser une fresque. Alors elle composa son œuvre à l’huile sur une grande toile et l’accrocha au mur du réfectoire, au côté de fresques classiques. Quand deux siècles et demi plus tard Napoléon ordonna la démolition de son couvent, toutes les fresques furent perdues, mais la toile put être sauvegardée puis restaurée pour être aujourd’hui exposée au public. Ouf !


Côme ci Côme ça

C’est bien la première fois que ça nous arrive en presque 3 ans de voyage : nous avons failli abandonner la visite d’une ville faute de pouvoir y stationner. Après presque une heure à tourner en rond, nous avions renoncé et décidé de poursuivre jusqu’à la ville suivante quand une place de parking s’est soudain libérée sur notre route. Ce qui nous a permis d’apprécier la  jolie ville de Côme, au pied du lac éponyme, et de grimper sur les hauteurs grâce à un funiculaire. Le petit temple au bord du lac et le phare tout en haut sont dédiés à Volta, inventeur de la pile électrique et honoré par l’utilisation de son nom comme unité internationale de tension. Autant dire que les Comasques sont fiers de cet enfant du pays !


Surprise

Faisant le tri parmi mes photos, j’allais jeter le cliché ci-dessous quand soudain…

… mon attention a été attirée par quelque chose de bizarre :

Mais oui, il y avait bien une baleine sur ma photo, créée fortuitement* par la superposition exacte d’un candélabre, d’un arbre taillé en cylindre et d’un cyprès qui dessinaient respectivement la tête, la bouche, le corps et la nageoire caudale de l’animal ! Comme quoi faites toujours gaffe avant de supprimer vos photos.

* certes j’aurais pu vous dire que c’était totalement calculé, mais il faut être honnête de temps en temps !


C’est avec cette heureuse superposition que se termine cet article. Nous allons poursuivre la route vers l’Est en direction de Trieste, ville qui clôturera notre périple italien avant de passer en Croatie. Ci-dessous pour les amateurs de cartes le parcours suivi dans cet article. A très bientôt !

115. Cap Sud-Est

C’est reparti ! Après cette longue pause métropolitaine, nous entamons la 3ème boucle de notre périple vers le Sud-Est de l’Europe. Partant d’une petite excursion au pays de Cervantes, il nous faudra d’abord traverser toute la France pour rejoindre l’Italie, avec forcément au passage quelques visites intéressantes malgré le temps plutôt froid et maussade. Au fait, c’est quand le réchauffement climatique ?

Escapade ibérique

cap sud-est à partir de maintenant
La baie et la plage de San Sebastian

Stationnés au Pays Basque pour le réveillon, nous avons profité de l’unique journée de beau temps – bien qu’un peu frisquet – pour faire un rail-trip en Espagne jusqu’à San Sebastian. Le soleil qui nous a attirés a eu malheureusement même effet sur les (autres) touristes. N’ayant pas prévu initialement de nous baigner pour cause de mer gelée, nous avons tout de même été contraints de nager dans la foule. Avec pour effet de pénaliser la beauté du lieu.


Réveillon gastronomique

Entre amis, à St Jean de Luz, au restaurant L’instinct où travaille notre grande fille – c’était l’occasion de tout de même la voir ce soir-là, nous avons dégusté un délicieux repas gastronomique. Il ne fallait pas se laisser impressionner par le menu, bien plus axé sur la qualité que la quantité. Un délice. Et une très bonne adresse si vous passez par là 😋

port de st jean de luz
Le port de pêche de Saint-Jean-de-Luz

Bonne année !

voeux roberto 2024
Bonne Année 2024 à tous les nomades, à tous ceux qui rêvent de le devenir,
et à tous ceux qui voyagent avec nous via les réseaux !

Roberto en redemande

Iveco Fiat Cayla S.A. Rodez
J’adore le style de la salle d’attente d’Iveco-Fiat à Rodez. En plus ils sont super gentils

Nous avons rendez-vous à 8h ce matin-là au garage Iveco-Fiat de Rodez pour une dernière réparation avant notre boucle sud-est-européenne. Lors d’une précédente révision à Agen, le garage Fiat de là-bas avait décelé une « importante fuite d’huile » et proposé comme seule solution de déposer le moteur pour voir d’où ça venait, rien que ça. N’ayant rien remarqué jusqu’ici, un peu suspicieux sur la réparation proposée (un peu comme si un médecin disait à son patient : vous avez un peu de tension, il faudrait sortir votre cœur pour voir si ça ne vient pas de là) et surtout ayant d’autres projets à court terme, nous avions décliné et repris la route. Tout en surveillant un peu le sol après nos stationnements et en surveillant le niveau d’huile. Sans remarquer de d’anomalie après plusieurs mois. Toutefois, lors de la précédente visite à Rodez, nous en avions parlé et ils ont confirmé un certain degré de fuite. Habitués à entretenir les camping-cars basés sur Ducato, ils avaient déjà rencontré le problème, qui venait selon eux d’un bouchon du carter d’huile qui s’était partiellement dévissé. L’accès en était difficile, il fallait démonter un phare et puis un autre truc dont je ne me souviens plus, mais en tout cas pas le moteur ! La réparation a été faite en 2h30, pendant lesquelles on nous a gentiment proposé d’attendre dans une petite salle au chaud (températures négatives dehors ce jour-là), café à disposition si besoin. Roberto est maintenant fin prêt pour la 3ème boucle de son tour du monde.


Intermède vanlife


Poète poète stéphanois

Il ne faut pas s’mentir,
Avec ce temps neigeux
Pas trop envie d’sortir.
Nous avons préféré
Aller voir c’était mieux
l’expo des passementiers

Il ne faut pas s’mentir
Les passementiers d’Saint-É
Plutôt que de mourir
Dans les mines de charbon
Ont su bien exploiter
Un tout autre filon

La passementerie c’est l’art
De tresser quelques fils
Pour en faire des Damart,
Des ceintures, des rubans,
Des franges torses graciles.
Et même des sous-vêtements

exposition rubans
Le tissage des rubans aujourd'hui

Romans-photos

! rûr neib seloivar sel


De boulanger à cordonnier…

…ou l’histoire étonnante du facteur Cheval, architecte de l’étrange. Il consacra 35 années de sa vie à bâtir son extravagant « Palais idéal » à l’aide de matériaux qu’il trouvait pendant ses tournées quotidiennes de 43 km et qu’il ramenait après son travail avec une brouette. Le palais fut achevé en 1914, mais il fallut attendre 1969 pour que l’oeuvre soit classée aux Monuments historiques. Ferdinand Cheval n’a pas toujours été facteur. Il commença sa vie active comme boulanger, et c’est peut-être le pétrissage de la pâte qui l’incita à malaxer les différents mélanges composant son palais. Contrairement à ce que pourrait suggérer mon titre, il ne fut jamais cordonnier. C’est juste que, malgré avoir fait plusieurs fois le tour du Palais, je n’y ai pas trouvé de boîte aux lettres. Et comme on dit, les cordonniers sont les plus mal chaussés…


On termine par la boutique, avec une récupération un rien tendancieuse de l’un des textes du palais. Jugez-en…


Plutôt dessous que dessus.

Le pont d'Avignon
Le Pont Benezet à Avignon

Visiter Avignon sans voir le pont si célèbre était impensable. Maintenant je mourrai moins bête en sachant que ce pont n’atteint plus l’autre côté du Rhône depuis longtemps, avec seulement 3 arches subsistantes sur les 22 d’origine, et surtout qu’on n’y a jamais dansé tous en rond, l’étroitesse du passage ne le permettant pas. Par contre il est probable qu’on y ait dansé au-dessous, au niveau de l’île centrale qui abritait une guinguette. La comptine mériterait d’être corrigée, mais tant qu’elle permet d’attirer 400 000 visiteurs par an, la ville d’Avignon ne se presse pas. Les beaux messieurs et les belles dames du conseil municipal font cooomme ça.

Le pont d'Avignon

Retenue à la source

Voilà une expression qui conviendrait bien à ce lieu étonnant que nous a fait découvrir Françoise, notre amie l’isloise. Nous sommes à Fontaine de Vaucluse, à l’endroit précis où nait la Sorgue, pas si connue mais pourtant la 1ère source de France métropolitaine et même la 5ème mondiale avec un débit moyen équivalent à 17 800 litres de rhum par seconde. Ou d’eau si vous voulez, mais ça fait tout de suite plus impressionnant avec le rhum 😉

Au pied d’une falaise, un gouffre qui n’a pas encore fini d’être exploré laisse apparaître une jolie nappe vert émeraude qui semble tranquille. L’eau passe ensuite sous des rochers avant de laisser place à un fort courant aussi vert que limpide.

Françoise nous montre des photos prises 3 semaines auparavant, où l’on voit que l’eau du gouffre était plus haute d’une dizaine de mètres et que les rochers aujourd’hui à sec étaient noyés sous un vif courant. Dès qu’il a plu un peu ou beaucoup, toute l’eau du coin se retrouve retenue ici.

J’espère qu’à vous aussi mon petit topo aura plu un peu ou beaucoup.


Argent public


France-Italie


San Remo sans Milan


Hemingway sur le carreau


Peinture à l’eau

D’abord, la petite ville de Portofino, surnommée la perle de la Riviera italienne, se mérite. Une première tentative d’y accéder avec Roberto a échoué : bien que respectant le gabarit autorisé (max. 6m de long et 2m30 de large) nous avons été sans ménagement invités à faire demi-tour, les places de parking étant peut-être déjà complètes à 10h du matin. Nous avons alors rejoint, par la petite route aussi étroite que sinueuse, le parking le plus proche, à 5 km de la ville, rejoignant cette dernière en bus.

Mais le désagrément est vite oublié devant cette merveille : autour d’un petit port aux eaux bleu-vert se dresse une ceinture de façades alternant les couleurs chaudes et munies de volets verts comme c’est classique en Italie. Mais là, c’est la tranquillité du lieu qui fait la différence (précisons que nous sommes en basse saison) et les petits sentiers sillonnant la forêt alentour, menant qui au Château Brun qui au phare, avec des vues magnifiques sur le port et la baie.

Au retour de balade, nous fêtons dignement mon anniversaire dans l’un des rares restaurants du port, appréciant de notre table, outre des mets délicieux, la vue sur les façades colorées et leurs reflets ondoyant sur la rade. Vraiment un bel endroit, qui nous fait réaliser la chance que nous avons de pouvoir voyager.


Ne pas tomber dans le panneau

Où ne pas se laisser impressionner par le paysage !


Un bisou s’il vous plaît !

Assis à la terrasse de ce café à Gênes, ça m’a fait bizarre de demander au serveur un bisù (prononcer bisou) et il a eu d’ailleurs un petit sourire en coin…

C’était notre premier contact avec la pâtisserie italienne, plutôt raffinée et appétissante. Nous en avons aperçu bien d’autres par la suite, dans les vitrines des pasticcerie, mais difficile de goûter à tout !


La terre du milieu


À Élisa et Achille

Cette dédicace n’est pas pour la seule Élisa que je connaisse (désolé @elisaroland mais je te promets de t’en rédiger une lorsque je serai au Brésil) mais elle est bien pour Achille mon fils, passionné de Napoléon. Car l’Élisa en question, c’est bien la sœur de Napoléon, à qui il a offert la ville de Lucques en 1809 après avoir annexé la Toscane en 1805. À l’époque, les habitants les plus riches de la ville, comme ailleurs en Toscane, faisaient construire une tour sur leur palais, la plus haute possible évidemment. Le problème est qu’elles étaient particulièrement ciblées lors des différentes attaques, et aujourd’hui il n’en reste plus que 9 sur les 250 initiales. La Tour Guinigi, avec ses 45 m de haut, a été choyée par la grande-duchesse de Toscane, Élisa, sans doute en raison de son jardin au sommet qu’elle a bien entretenu. Les chênes qui y poussent font la fierté de la ville et représentent une attraction étonnante, pour peu qu’on veuille bien gravir les 230 marches qui mènent au sommet. Avec une vue époustouflante à la clef bien sûr.



Transition

L’évocation de la sœur de Napoléon me permet une transition facile avec notre étape suivante : Piombino, port d’embarquement pour une destination spéciale, que vous découvrirez dans la prochaine publication… A bientôt !

Et la carte du trajet, ne perdons pas nos bonnes habitudes ! Vous pouvez avoir une version zoomable en cliquant ici

114. Fêtes seulement

Les fêtes de fin d’année sont l’acmé des relations familiales et amicales. Le temps qui y est consacré réduit d’autant la rédaction du blog, limitée à quelques articles ce mois-ci. Mais c’est pour mieux rebondir l’année prochaine, promis !

À couteaux tirés

Sur fond d’une neige tombante, qui est probablement la première que rencontre Roberto, une énorme main munie d’une arme blanche émerge d’un brouillard à couper au couteau. Elle signale l’entrée du musée que, joie du tourisme hors saison, nous sommes les premiers à visiter ce matin.

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On nous montre d’abord une petite vidéo où un présentateur à l’humour bien aiguisé nous fait l’historique de la marque, de la découverte du concept en 1829 jusqu’aux ateliers d’aujourd’hui. Pour couper court, le laguiole (oui, c’est bien de lui dont on parle et oui, c’est bien devenu un nom commun) est né du mariage entre le capuchadou, un petit couteau à lame fixe fabriqué localement, et la navaja au manche courbé que les scieurs de long du pays ramenaient d’Espagne après leur saison.

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La visite se poursuit par l’ancienne forge, où l’on découvre les faibles moyens dont disposaient les couteliers au XIXème siècle, puis par les ateliers modernes, fonctionnant en open space car chaque artisan fabrique son couteau de A à Z, se déplaçant de poste en poste. Dans des vitrines sont exposés des couteaux Laguiole de différentes périodes ou de différentes fonctions (de l’œuvre d’art pure aux couteaux de chasseurs).

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La boutique est magnifique, les lames de centaines de couteaux étincelant sous les leds, sur des présentoirs où toutes les matières des manches sont décrites, de la corne de buffle à la dent de mammouth en passant par de multiples essences de bois. Un certificat d’origine est remis pour chaque achat, préservant du risque de tomber sur une des nombreuses contrefaçons, qui émanent majoritairement d’entreprises chinoises contre lesquelles les deux ateliers laguiolais luttent …à couteaux tirés.


Intermède météo


IA IA OH !

Si vous ne connaissez pas la comptine « Dans la ferme de Mathurin » qui tourne en boucle sur le jouet électronique de ma petite fille d’un an, alors c’est tant mieux, parce que vous ne vous endormirez pas avec la ritournelle « iha iha oh » dans la tête (pour les incrédules, allez écouter ça sur YouTube) et parce que, malgré la similitude phonique, ça n’est pas du tout le sujet.

Nous allons parler ici d’intelligence artificielle (IA pour les intimes) que je me suis laisser tenter à essayer. Je connais bien sûr le fameux ChatGPT, outil intéressant mais qui ne produit que du texte. Or depuis le mois d’octobre, le moteur de recherche de Microsoft, Bing, intègre une IA performante appelée DALL-E 3. Il suffit d’avoir un compte Microsoft, genre une adresse Outlook, pour commencer à s’amuser. Les photos ci-dessous montrent les différentes requêtes que j’ai pu faire, et les images (4 propositions à chaque fois) créées en quelques secondes. Même si les propositions sont encore perfectibles, c’est bluffant, non ?



Le quizz du mois


L’énigme du mois

La scène se passe à Issoire, une jolie cité d’Auvergne célèbre pour son abbatiale que vous trouverez photographiée plus bas. Un médecin de famille installé là depuis longtemps se rend d’abord à Hérange, un hameau voisin pour y consulter Sam, un petit garçon de 3 ans qui s’est tordu le poignet en jouant trop fort à la console. Dans la même journée, l’après-midi à son cabinet, il reçoit un autre petit garçon étonnamment du même âge et portant le même prénom que celui du matin. Sauf que celui-ci a 39° C de température depuis 4 jours et que cela inquiète bien sa maman. Sans même avoir encore examiné l’enfant, le médecin a déjà sa petite idée… Et vous ? (réponse à la fin de l’article suivant)

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Une crèche sympathique dans l’autel mais surtout des colonnades et des vitraux très fouillés

Réponse au quizz du mois : il s’agissait de Clermont-Ferrand, le chef-lieu du Puy-de-Dôme. Vercingétorix, en bon Gaulois résistant, y a vaincu les Romains (en fait à Gergovie, juste à côté). Le pape Urbain II a été le premier du genre à y lancer une croisade pour défendre les chrétiens d’Orient. Blaise Pascal y est né. Les indices étaient les pierres volcaniques des édifices, le musée Bargoin, en service depuis 1905 et le numéro du département sur une plaque minéralogique.


Question à deux balles

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Il y a ceux qui sont dans le trou et les autres. Alors, une petite idée ? Réponse à la fin de l’article suivant

Réponse à l’énigme du mois : Il s’agissait bien sûr de la fièvre du Sam d’Issoire


Roberto retrouve son lieu de naissance

Nous avions depuis plusieurs mois remarqué que notre batterie cellule ne se rechargeait plus en roulant. Nous n’étions plus alimentés que par les panneaux solaires, c’est à dire pas grand chose en hiver (soleil bas, mauvais temps, etc.). Le câble venant de l’alternateur montrant une tension correcte, le problème ne pouvait survenir que du chargeur incorporé à notre batterie. Nous profitons de l’occasion pour aller faire une petite visite à notre aménageur de Rodez, Stephan de Loisirs 12. Après rapides vérifications, il conclut que notre alternateur devenu moins vigoureux au fil du temps ne fournit plus à notre batterie cellule une tension suffisante pour déclencher le fonctionnement du chargeur. Heureusement, le cas est prévu : il « suffit » de relier un « plus après contact » au chargeur pour l’informer qu’il faut charger la batterie cellule dès que le moteur est en marche. J’ai mis « suffit » entre guillemets, car le passage de ce petit câble une fois l’aménagement terminé a donné un peu de fil à retordre – c’est le cas de le dire – à la concession Fiat/Iveco voisine à qui nous avons confié l’opération. Mais depuis, nous avons le bonheur de voir notre batterie se charger de nouveau, même pour 10mn de circulation en ville. Il n’y a pas de petit plaisir, lorsqu’on vit en fourgon aménage, l’autonomie est vitale.

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La jolie ville de Rodez
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Réponse à la question à deux balles : Nous sommes à Bozouls, en Aveyron, célèbre pour son cirque en fer à cheval, appelé Trou de Bozouls, dû à la lente érosion du calcaire par un petit affluent du Lot, le Dourdou.


La découverte culinaire du mois

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On n’arrête pas le progrès, les oignons qui ne font plus pleurer sont bien là sur les étalages ! Mais pourquoi n’y avait-on pas pensé plus tôt ?

Cela dit, ça m’a donné une idée pour un autre produit, pour l’instant encore dans mon imagination :

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M. et Mme ont une grande famille

Allez, juste pour le plaisir, et notamment parce que la seconde est d’actualité, je vous retransmets ces deux devinettes qui ne sont bien sûr pas de moi. Mais je m’y mettrai peut-être un jour, qui sait.

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Betty, Baba, Noëlle, Candice et Sandra

La trêve des voyageurs

Encore une quinzaine de jours et nous terminerons cette longue pause métropolitaine en reprenant la route en direction de l’Europe du Sud-Est. De l’Italie à la Turquie dans un premier temps, en longeant le flanc Est de la Mer Adriatique. Grâce aux polos superbement imprimés avec notre logo, cadeau attentionné reçu à Noël, la team Roberto est parée pour de nouvelles aventures. Rendez-vous fin janvier pour les premières étapes. En attendant, nous souhaitons à tous nos lecteurs une joyeuse et festive fin d’année.

112. La révolution d’Octobre

Loin de nous poser lors de cette phase française de notre voyage, nous avons encore avalé pas mal de kilomètres au cours de ce mois d’octobre. La relative dispersion des membres de notre famille ou de nos amis nous a donné l’occasion de découvrir ou redécouvrir quelques jolis coins de notre pays.

a) Miroir ô beau miroir, dis-moi qui est la plus belle…

J’adore les effets miroir. Le reflet parfait d’un paysage sur un plan d’eau tout aussi parfaitement lisse. Ces derniers temps nous avons été gâtés, principalement le matin avant que la brise ne se lève. Voici quelques clichés récents. Saurez-vous reconnaître celui qui volontairement a été placé à l’envers ?

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Les réponses aux différents quiz sont groupées en fin d’article


b) Cyrano de Paris

Les apparences sont trompeuses lorsqu’on visite Bergerac : les effigies et allusions au héros de Rostand sont partout. On pourrait croire que les habitants ignorent que le vrai (Savinien de) Cyrano de Bergerac n’a jamais mis les pieds dans leur ville. Il est né et a grandi dans les Yvelines. Mais ça les arrange quand même bien, car ça fait venir le touriste et c’est plus glorieux que le vrai fonds de commerce de la ville : le tabac et l’alcool. Bon, j’exagère un peu, j’aime bien les vins de la région, la ville ne produit plus de tabac depuis 2015 (mais son musée du tabac en retrace toute l’histoire) et elle possède de vrais attraits touristiques : balades en gabarres sur la Dordogne, centre historique médiéval tout en ruelles tortueuses et maisons à colombages, restaurants gastronomiques, festivals de théâtre, etc.

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Quiz : Le vrai Cyrano de Bergerac fut :
1°) auteur de science-fiction
2°) mousquetaire
3°) navigateur au long cours
Laquelle de ces affirmations est fausse ?


c) Le musée qui fait un vrai tabac

Je ne sais pas vous, mais moi, j’ignorais que Bergerac avait été un haut lieu de production du tabac en France pendant les deux derniers siècles, grâce à des conditions climatiques favorables (hivers doux, étés chauds et humides) et un port bien placé sur la Dordogne. La production était bien sûr très encadrée par l’État. Au musée du tabac de Bergerac, qui n’incite en rien les gens à fumer, on vous raconte toute l’histoire de la plante à nicotine depuis son usage longtemps exclusif par les populations d’Amérique du Sud et d’Océanie jusqu’à ce que Christophe Colomb a ramène le tabac en Europe et pourrisse ainsi les poumons de milliards de personnes. Les différents usages du tabac ont conduit à la réalisation de nombreux accessoires (râpes, pipes, enseignes, porte-cigarettes, etc.) dont certains hautement artistiques sont exposés dans ce musée.

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une pipe créée spécialement pour le musée

Quiz : que signifient les lettres du sigle SEITA ? Ne trichez pas, essayez sans Google…


d) Cantal de Monaco

Ce titre a un petit air de princesse monégasque, mais c’était bien avant Steph de Monac. En 1643 précisément. Louis XIII avait donné à Honoré II de Grimaldi et ses successeurs le droit de percevoir les impôts du Comté de Carlat (encore un fromage et une chanteuse mais je n’y suis pour rien) dont la capitale était Vic-sur-Cère. Et un hôtel particulier en prime. L’affaire dura jusqu’en 1789 jusqu’à ce que les révolutionnaires y mettent fin. Bons princes (c’est le cas de le dire), ils laissèrent tout de même aux monégasques l’hôtel particulier que Louis XIII leur avait offert en prime. Rainier III en 1951 et Albert II en 2014 sont venus y séjourner brièvement. Peut-être pour marquer leur territoire en faisant pipi dans les toilettes, qui sait ?


e) Vic-les-Bains

Si vous connaissez cette ville, vous êtes démasqué(e) : vous êtes un(e) voyageur(euse) du temps. Parce que la ville n’existait qu’au XVIIème siècle. En ce temps-là, la source d’eau minérale aux propriétés fabuleuses attirait du grand monde. Comme par exemple Anne d’Autriche, épouse de Louis XIII, qui après 22 ans de mariage n’avait toujours pas d’enfant. Elle vint faire une cure à Vic-les-Bains en 1637. Louis XIV naquit l’année suivante ! Reconnaissant, il fit embouteiller l’eau dix ans plus tard et s’en faisait livrer à domicile.

Aujourd’hui, la ville est devenue Vic-sur-Cère. L’eau thermale n’est plus exploitée. Au kiosque où elle sourd encore, avec la même composition physico-chimique qu’autrefois, un panneau indique qu’elle n’est pas potable. Certains minéraux auraient déplu aux députés ou aux lobbyistes européens. On me dit que les vicois(es) voteraient volontiers pour un Louis XIV s’il venait à se présenter aux élections…

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f) Cantal’architecture, parlons-en !

A l’occasion d’un week-end réunissant une partie de la famille et des amis, nous avons pu apprécier l’architecture si particulière du Cantal. Notre location était assez typique de la région avec ses murs en pierres volcaniques, son toit pentu couvert de lauzes taillées en écailles de poisson, et sa grande pièce centrale unique qui s’est avérée idéale pour notre petit groupe. La visite du centre-ville de Vic-sur-Cère nous a permis de retrouver beaucoup d’autres éléments construits sur le même modèle. Un régal pour les yeux. Et c’est sans parler de l’environnement montagneux alentour.

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g) L’homme qui inventa la vache rouge

A Salers en Haute Auvergne, le climat d’altitude et les pentes conviennent mieux aux pâturages qu’aux cultures. Vers 1850, une race de vache aux longs poils et aux cornes en forme de lyre, descendante de l’aurochs, pourtant bien adaptée aux conditions locales, perdait peu à peu ses caractéristiques en raison d’un métissage excessif. Un éleveur dynamique de la ville de Salers, Ernest Tyssandier d’Escous s’inspira des Anglais et restaura la race en faisant se reproduire entre eux les meilleurs animaux préalablement sélectionnés. Il organisa même un concours annuel pour récompenser les meilleurs mâles reproducteurs.

Des troupeaux de vaches rouges paissent maintenant partout dans la région, la race s’exporte dans 25 pays du Monde et le buste d’Ernest trône sur la place principale de sa ville reconnaissante.

Quiz : Quelle est la particularité de la vache de Salers (une seule bonne réponse)
1) elle ne se trait qu’en présence de son veau
2) elle ne se nourrit que de foin monté en graines
3) elle rit


h) Avons-nous perçu le bon Salers ?

Le village de Salers, dans le Cantal, est l’un des « plus beaux villages de France ». Même s’il en existe 175 autres, nous ne pouvions le rater. Nous y avons retrouvé la jolie architecture auvergnate de ces derniers jours, rassemblée sur une petite colline de pierre volcanique. Les ruelles étroites, le caractère moyenâgeux, les points de vue sur les volcans d’Auvergne et les spécialités de la région attirent malheureusement les boutiques de souvenirs, les bars, les restaurants et tout le petit monde qui va avec. Même si ce n’était pas la grande foule hors saison, cela enlève de l’authenticité au lieu et, personnellement, j’ai préféré les anonymes petits villages voisins. La rançon du succès.

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i) Derniers à Ré tout le monde descend

C’est tout l’avantage du hors saison que de pouvoir visiter tranquilles des sites habituellement bondés le reste du temps. C’est ainsi que nous avons traversé sans crainte le pont qui mène à l’île de Ré. La circulation très espacée dans la partie la plus proche du continent est devenue presque nulle à l’autre extrémité. Nous avons dormi dans un silence parfait sur un parking en pleine nature près du Phare des Baleines, auprès duquel nous nous sommes rendus le lendemain. Accompagnés de quelques autres visiteurs, nous l’avons vu se dévoiler progressivement de sa brume de mer matinale, tout en appréciant la côte sauvage à cet endroit.

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Plus tard, de passage dans le joli village d’Ars-en-Ré, nous avons encore trouvé des rues désertes. Dommage pour un site faisant partie des « plus beaux villages de France ». Mais tant mieux pour nous !

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Quiz : le clocher de l’église du village est inhabituellement bicolore, avec la pointe noire et la base blanche. Pourquoi ?
1) en hommage à Nicéphore Niépce, enfant du pays, inventeur de la photographie
2) pour être vu de loin par les bateaux
3) parce que la partie noire en haut attire moins la foudre que la partie blanche
4) en souvenir du couvreur qui est tombé du toit après avoir posé la moitié des ardoises



j) Spectacle au format PDF

Claudie y était allée il y a une quinzaine d’années. Pour ma part c’était une première. J’étais resté sur l’idée d’un grand son et lumière régional où les habitants du coin, tous bénévoles, défilaient vêtus en paysans devant un château en feu. J’étais vraiment loin de la réalité et remercie vivement nos amis Dominique et Christophe de nous avoir conduits dans ce lieu magique et remis en place nos idées préconçues. Vous avez peut-être reconnu dans le descriptif le Puy Du Fou, un parc à thème créé il y a plus de 40 ans, qui a su se développer au fil des années sans jamais vouloir ressembler aux parcs d’attraction classiques basés sur des dessins animés ou des bandes dessinées.

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Nos enfants étant maintenant de jeunes adultes, nous n’avions pas fréquenté ce genre de parcs depuis longtemps, et nous avons été véritablement scotchés par les progrès technologiques et l’inventivité de la mise en scène des différents spectacles présentés. Il est bien difficile de décrire une journée aussi intense en une dizaine de lignes ou en quelques photos et vidéos, mais soyez-sûr(e)s d’être conquis par une visite sur place et d’être converti(e)s au format PDF.

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k) La ville qui s’appelait Napoléon

Une des premières décisions de Napoléon après s’être autoproclamé empereur a été de destituer de son statut de préfecture de la Vendée la ville de Fontenay-le-Comte au profit d’un petit bourg appelé La Roche-sur-Yon. La nouvelle préfecture, développée et équipée selon les préceptes napoléoniens, porta le nom de l’empereur à plusieurs reprises au cours de son histoire. Des savants de retour de la campagne d’Égypte, sans doute impressionnés, choisirent de conserver dans la ville des modèles mécaniques d’animaux afin de mieux les étudier. Perdus pendant plus d’un siècle, ils ont fini par être retrouvés et furent remis à la disposition du public sur la place principale appelée naturellement « Place Napoléon ». C’est le seul endroit qui porte encore la marque de l’empereur car, curieusement, après Waterloo, la ville reprit son nom original.

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l) On se fait un McDo ?


m) Une bonne base pour Dali

De passage à Bordeaux, nous avons découvert le Bassin des Lumières, une reconversion étonnante d’une base sous-marine germano-italienne construite pendant la guerre en espace de spectacles numériques. Les artistes à l’honneur le jour de notre visite étaient Dali et Gaudi. Nous avons pu apprécier leurs œuvres qui, projetées sur les immenses murs, sols et bassins de l’édifice, enrichies par la pénombre, l’animation et l’accompagnement musical (Pink Floyd pour Dali) étaient vraiment magnifiées par le lieu. Une expérience que nous espérons revivre prochainement avec les futurs invités : Tintin et ses acolytes.

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n) L’effet papillon

Dans nos critères de choix pour notre futur Roberto, la discrétion était importante : une couleur autre que le blanc pour ne pas ressembler à un camping car, et plutôt foncée pour se fondre dans l’environnement. Ici sur ce parking à Agen, l’intégration au décor était maximale, notre sticker de morpho bleu ajouté au Costa Rica étant parfaitement en phase avec la vitrine du magasin devant lequel nous étions garés.


o) Le Karaboudjan, le Requin et la Licorne

Hergé pouvait-il imaginer qu’un jour ses bateaux fétiches se retrouveraient dans une base sous-marine à près de 900 km de sa Belgique natale ? Et pas seulement, puisque, de retour au Bassin des Lumières de Bordeaux, nous avons vu défiler tout l’univers de Tintin, des couvertures aux personnages, jusqu’aux jurons du Capitaine Haddock. En cette période de vacances scolaires, si les enfants étaient nombreux et généralement peu attentifs, le public était majoritairement adulte, chacun retrouvant les lectures de son enfance ou d’une période plus récente. Personnellement, j’ai adoré lire les BD de Tintin. Peut-être que mon envie de voyager et de découvrir le monde vient de là ? Je me souviens encore du premier album que j’ai lu et relu : l’Étoile Mystérieuse. Et vous, vous souvenez-vous de votre tout premier Tintin ?

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p) Faites-le vous-même, mais pas tout seul

Ce slogan d’une grande enseigne de bricolage tombe à pic pour légender ma photo. Petite surprise en démontant un luminaire dans la maison que viennent de louer mon fils et sa compagne. Ces punaises dérangées pendant leur sommeil ont retrouvé la liberté après un transport dans une tasse à café, le premier récipient à portée de main. Aucun animal n’a été maltraité, comme ils disent à la fin des films où l’on pourrait en douter.

Quiz : De quelle enseigne est le slogan du titre ?
1. Mr Bricolage ?
2. Leroy Merlin ?
3. Castorama ?
4. Brico Dépôt ?


C’est avec ces peu sympathiques mais inoffensives bébêtes que se termine le parcours d’octobre de Roberto et de ses occupants, que l’on peut qualifier de révolution tellement nous tournons autour du même secteur. Et puis la révolution d’Octobre, ça sonne bien, non ? A bientôt !

P.S. Les solutions des différents quiz : a2 ; b3 ; g1 ; i2 ; p1

110. On the road again

Entre la sortie d’hibernation de Roberto et les petites routes du Portugal, entre une partie de la famille et des amis, notre mois d’Août a été bien occupé. Le rythme des publications s’en est ressenti, mais le blog aussi avait besoin de vacances, que voulez-vous !

Le grand retour

Nous sommes au 4ème jour de l’arrivée du Titus dans le port de Zeebrugge, un vendredi, et, sans nouvelles de notre intermédiaire, nous envisageons de passer un week-end supplémentaire sur place puisqu’aucune livraison ne se fait les samedis et dimanches. Mais le mail tant attendu arrive enfin : Roberto est prêt à être réceptionné à l’adresse qui nous est indiquée. Cela dit, notre intermédiaire nous demande la date à laquelle nous souhaitons y aller, afin qu’il puisse prévenir la compagnie maritime de notre arrivée, et cela 24h à l’avance. Ce qui signifie pour nous une réception pas avant lundi. Inenvisageable ! Nous contactons directement la compagnie qui, elle, nous donne le feu vert. En toute allégresse, nous remballons nos affaires et quittons notre logement pour nous rendre à Zeebrugge à 15 km de là. Aux bureaux de Wallenius Wilhelmsen (la compagnie), nous signons quelques papiers et attendons qu’on aille nous chercher Roberto.

Et puis, le grand moment arrive enfin, nous voyons Roberto franchir la porte de la zone sécurisée du port et venir se garer juste devant nous. L’employé nous remet les clefs avec un grand sourire, nous souhaitant bon voyage. Voici maintenant venu le temps de l’inspection. Notre véhicule a-t-il été visité, dévalisé, voire vandalisé pendant ce voyage ? Nous entrons avec un brin d’inquiétude. Mais nous sommes vite rassurés : tout a l’air intact, tel que nous l’avions laissé. Les placards sont rangés, les petites cachettes où j’avais dissimulé quelques outils sont toujours occupées. Nous poussons un soupir de soulagement et nous installons à bord. Nous sortons avec joie des installations portuaires et reprenons la route. Un vrai moment de bonheur !

Après 15 mn d’attente, Roberto fait son entrée
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Une rapide inspection nous rassure : pas de vandalisme

Cap Sud-Ouest

Il n’est pas question de reprendre notre tour du monde de suite, nous allons pendant quelques mois retrouver nos familles et amis quelque peu délaissés avant de reprendre le large. Mais ce que nous reprenons à 100%, c’est notre vie nomade qui nous a beaucoup manqué pendant ces deux derniers mois. Plaisir de rouler, de s’arrêter au moment choisi, de bivouaquer chaque jour dans un site différent et tout simplement de vivre dans notre petite maison sur roues. Nos premières étapes sont plus familiales que touristiques et les publications sur le blog se sont raréfiés d’autant. Lui aussi a droit à quelques congés !

Roberto on the road again
Roberto enfin libre à Bruges (ci-dessus) puis sur une aire d’autoroute et tout près d’Agen (ci-dessous)

Mais nous voilà repartis vers le Sud-Ouest avec deux étapes consacrées prioritairement à deux de nos enfants, à Agen puis St Jean de Luz.

Plage de Saint Jean de Luz
La plage de St Jean de Luz (non ne cherchez pas, Roberto n’y est pas !)

Bidart, vous avez dit Bidart ?

C’est dans cette commune située entre St-Jean-de-Luz et Biarritz que l’on découvre en suivant le sentier du littoral l’étrange Château d’Ilbarritz au sommet d’une petite colline. Il fut construit entre 1895 et 1897 dans le but principal d’abriter le plus grand orgue privé jamais conçu. Un coup de folie ou de génie du Baron Albert de l’Espée qui venait d’acheter le terrain.

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Le château d’Ilbarritz à Bidart (64)

L’aventure ne dura que 4 ans, et en 1903 le château fut revendu et l’orgue déménagea à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre où l’on peut encore le voir aujourd’hui. Le château connut une histoire mouvementée, transformé tour à tour en sanatorium, hôpital de guerre, casino, garnison allemande, hôtel Relais et Châteaux avant d’être classé en 1990 pour ne pas finir en centre de thalassothérapie. Sauf que l’argent manque et la lente dégradation se poursuit. Une âme charitable pour le sauver ?

A propos d’orgue, saviez-vous que lorsqu’on parle de « grandes orgues » il ne s’agit que d’un seul instrument alors que les « grands orgues » en concernent plusieurs ? Bidart, non ?


Une faille de Google Traduction

Si vous demandez au célèbre traducteur en ligne la traduction en Espagnol du mot français « Auchan », en bon élève sur le caractère invariable des noms propres, il vous répondra « Auchan ». Mais c’est méconnaître l’origine du nom commercial de cette enseigne de supermarchés.

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Le magasin Alcampo à Irun (Espagne)

La marque Auchan provient du quartier des Hauts Champs de Roubaix, où a été ouvert le premier magasin de l’entreprise en 1961. Une fois franchie la frontière franco-ibérique comme nous venons de le faire, la marque se transforme en Alcampo, ce qui est tout simplement la traduction de « au champ » en Espagnol.

A l’intérieur, pas de grande particularité par rapport à l’enseigne française, si ce n’est l’imposant rayon de jambons entiers et l’agréable odeur qui va avec.

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Rayon des jambons entiers dans l’hypermarché

L’Espagne sans la foule

En plein cœur du mois d’Août, que le ciel soit gris ou bleu, la grande majorité des touristes se concentre sur les plages ou dans l’étroite zone maritime adjacente, celle où l’on a pied. Étrange communion estivale qui se retrouvera quelques jours ou semaines plus tard sur les routes du retour.

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La foule sur la côte, même un jour de mauvais temps. Mais comment font-ils ?

Autant vous dire que ce n’est pas la tasse de diesel de Roberto que de rouler pare-chocs contre pare-chocs, surtout après avoir traversé les grands espaces américains. Et quant à nous, les seules plages qui nous font rêver sont désertes ou presque, avec une eau au-delà de 26°C dans laquelle nagent quelques tortues et autres poissons multicolores.

Nous avons donc rapidement fui la zone côtière pour rejoindre des zones plus paisibles. Nous avons ainsi traversé de jolis petits villages aux maisons de pierres, des champs parsemés de moutons, des ponts étroits que frôlent les rétroviseurs de Roberto, des routes de montagne quasi désertes.

A quelques exceptions près, la masse touristique s’est évaporée comme par magie. Nous avions même les spots Park4night* pour nous seuls la nuit. Ça c’est un signe !

* Application sur smartphone où les adeptes de véhicules de loisirs partagent leurs bivouacs


Vitoria-Gasteiz et Bourges-Avaricum

Contrairement à Saint-Étienne ou Bruère-Allichamps, Vitoria-Gasteiz est un pléonasme, Gasteiz n’étant que le nom basque de Vitoria. C’est comme si on appelait notre capitale Paris-Lutèce ou ma ville natale Bourges-Avaricum, encore qu’il s’agisse pour ces deux-là du nom Romain.

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Donc Vitoria-Gasteiz est la capitale du pays basque espagnol. Imaginez un centre médiéval entouré d’une zone un peu plus moderne puis d’une ceinture d’espaces verts. Une ville tranquille où il fait bon vivre, et où il fait bon se promener. Les dix mille pas enregistrés par le smartphone de Claudie nous ont permis d’apprécier une architecture assez typique d’Espagne comme ces fenêtres saillantes, ces grilles omniprésentes aux ouvertures comme aux clôtures, ces figures sculptées dans la pierre en façade, ces frontons d’églises munis de cloches, etc.

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En tout cas une balade paisible en plein mois d’août sans la foule. Un peu comme à Paris-Lutèce j’imagine.


« Veille toujours au grain, sans attendre demain »

Dans l’un des premiers villages que nous rencontrons, après avoir franchi la frontière hispano-portugaise, nous découvrons un regroupement d’une cinquantaine d’édifices sur pilotis, tout en pierre et pour la plupart surmontés d’une croix.

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Espigueiros do Lindoso, Portugal

Renseignement pris, il s’agit de greniers de stockage du maïs, remontant parfois au XVIIème siècle. Les pilotis en pierres protègent contre les rongeurs. Des fentes verticales sur les parois, en favorisant l’aération, protègent contre l’humidité. Les croix sur le toit protègent contre toute malédiction. Et le regroupement, en favorisant la surveillance, protège contre les voleurs.

Chaque famille du village possédait son grenier. Certains sont parait-il encore utilisés de nos jours.

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Une belle découverte en tout cas, idéale pour notre premier contact avec le Portugal.


Le sanctuaire du Bon Jésus du Mont

Sanctuaire du Bon Jésus du Mont à Braga
Sanctuaire du Bon Jésus du Mont à Braga, Portugal

Au sommet d’une colline près de la ville de Braga, toujours au Portugal, trône une église de style néoclassique datant du XVIIIème siècle. Jusque-là rien d’exceptionnel, mais le site est classé au patrimoine mondial par l’UNESCO. On l’atteint soit par un funiculaire, fonctionnant depuis 1882 et utilisant un système particulier de contre-poids d’eau, soit par les 577 marches d’un escalier avec 17 paliers, débutant par un chemin de croix avant de se poursuivre par le majestueux escalier des cinq sens. L’ensemble est très photogénique l’après-midi lorsqu’il est éclairé par le soleil, mais un peu moins le matin à contre-jour. Nous avons courageusement choisi les marches, sans pour autant les gravir à genoux comme le font certains pénitents. Cela nous a permis d’apprécier les sculptures et fontaines disposées tout au long et de découvrir petit à petit le panorama sur la vallée et la ville.

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Batismo

Nous avons eu le grand honneur d’être invités au baptême de la petite Julia, fille de nos amis Christelle et Nuno. Une tradition familiale bien marquée au Portugal, ayant bien plus d’ampleur que chez nous. En gros, c’est quasiment la même organisation qu’un mariage en France : cérémonie à l’église, vin d’honneur puis dîner dansant. Sans parler Portugais, nous n’avons pas pu échanger avec tous les invités, mais heureusement une partie d’entre eux était francophones. La musique et les danses étaient presque toutes portugaises, ce qui nous réjouit : tant de pays perdent une partie de leur culture en se laissant envahir par la langue anglo-saxonne. Mais heureusement pas le Portugal.

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Nous voilà au bout de notre route Sud-Ouest. Il n’y a plus qu’à reprendre le chemin en sens inverse car de nouveau la famille nous attend, nous réclame. De nouveau quelques centaines de kilomètres à parcourir. Mais ce n’est pas comme si on détestait ça… A bientôt alors !

109. En attendant Roberto

Nous voici donc de retour en France métropolitaine (oui, ceux d’outre-mer disent toujours ça pour bien faire la différence, et quand ils disent la France tout cours c’est péjoratif) le temps que Roberto traverse l’Atlantique. Contrairement au héros désespérément absent du roman de Samuel Beckett à peine évoqué dans le titre de l’article, nous espérons que notre « Godot » à quatre roues apparaîtra bien à la fin de la pièce !

Retrouvailles contrastées

Nous débarquons dans l’Hexagone en pleine période de violences urbaines. Saccages, pillages, bataillons de policiers et hélicoptères qui tournent dans la nuit. Et dire que l’Amérique centrale apparait violente aux yeux des Européens… Nous regrettons presque notre paix de là-bas ! Heureusement, il y a des compensations. Nous retrouvons avec bonheur la famille et la gastronomie française, comme ce « grand petit déjeuner » (l’emploi de l’anglicisme « brunch » est déconseillé par le ministère des finances) qui a réveillé d’un coup nos papilles gustatives un temps endormies.


Mais au fait, dans quelle ville sommes-nous ? Voici quelques indices pour la découvrir…

Mais oui, les derniers indices étaient particulièrement parlants, nous étions bien à Agen, préfecture du Lot-et-Garonne


Et pendant ce temps là, Roberto flâne tranquillement entre la Floride et les Bahamas…

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Devoir de mémoire

Après cette pause familiale à Agen, nous repartons vers la Belgique récupérer Roberto, dont l’arrivée est annoncée le 31 juillet, soit 18 jours après la date initialement prévue. La seule consolation est que nous ne sommes pas obligés de faire la route d’une traite.

Encore une petite devinette pour trouver notre première étape :

Après une nuit dans un gîte proche de la ville martyr et d’un lieu-dit au nom trompeur, avec pour voisins quelques alpagas, nous faisons effectivement cette première étape à Oradour sur Glane, un petit village près de Limoges, rendu tristement célèbre par le massacre de plus de 600 de ses habitants le 10 mai 1944 par des troupes allemandes faisant preuve d’une bestialité extrême.

Afin que jamais ne se perde la mémoire de ces atrocités, le lieu a été sanctuarisé et ouvert à la visite, dans le respect de ses habitants. Chacune des maisons en ruines – incendie criminel oblige – porte le nom de son occupant au moment du drame. Les objets laissés sur place témoignent de ces vies soudain réduites au néant. Un mémorial expose les photos des 643 victimes, toutes civiles et dont beaucoup d’enfants pendant qu’une voix monocorde égrenne leurs noms et âges.

Une visite émouvante mais nécessaire pour ne pas oublier ce dont sont capables les humains, en temps de guerre ou même en dehors.

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La place centrale du village où tous ses habitants furent rassemblés au prétexte d’un contrôle d’identité
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Et pendant ce temps là, Roberto longe les côtes de la Géorgie, de Brunswick à Savannah. Vue de l’application, la densité du trafic maritime est parfois inquiétante. Pourvu que le Titus ne se perde pas !


Restauration insolite

Appelée « Le Garage », c’est une petite auberge au milieu de nulle part, trouvée par hasard sur notre route. Après avoir traversé champs et forêts, on tombe sur un amoncellement de voitures de tous âges de part et d’autre d’un garage en apparence fermé. Au point d’avoir un doute : la restauration mentionnée sur notre plan ne concernerait-elle pas uniquement les voitures ?

Mais derrière les quelques tables désertées d’un jardinet parsemé d’objets décoratifs en tous genres, du hibou qui nous fixe de ses yeux formés de spots halogènes aux faux consommateurs en plastique, la patronne des lieux nous ouvre sa porte. Ouf, c’est bien un restaurant !

L’intérieur est tout aussi kitsch avec les toiles cirées à carreaux rouge et blanc sur les tables, les salières-poivrières en passagers de tracteurs miniatures, le vin servi en bouteilles de limonade. Et que dire de l’environnement où bananiers côtoient volières d’aras, poulailler et pigeonnier ?

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La nourriture – un menu fixe – est simple mais efficace, le prix défie bien sûr toute concurrence. Bref, un endroit comme on aime.


Et pendant ce temps-là, Le Titus déjà très en retard se permet une boucle supplémentaire (non prévue initialement) entre Baltimore et Philadelphie. Il était en rupture de stock de steak au fromage ou quoi ?


Bercy-sur-Loire

Ne cherchez pas ce lieu sur Google Maps, c’est juste que le nom m’a paru intéressant pour faire le lien entre le siège du Ministère des Finances à Paris et le château de Sully-sur-Loire, occupé quatre siècles sur les sept de son existence par le Duc de Sully, ministre des finances d’Henri IV, et ses descendants.

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Nous avons visité ce château d’architecture médiévale, nous avons admiré les vieilles pierres, la charpente en « berceau brisé », les différentes pièces bien restaurées dont celles du Duc, de la Duchesse et du Roi. Cette dernière nommée en référence à Louis XIV qui l’a occupée 2 nuits, et non pas à son grand-père Henri IV, patron de Sully, qui n’a jamais rendu visite au château.

Mais les présidents de la République mettent-t-ils parfois les pieds à Bercy ?

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Et pendant ce temps-là, nous n’avons plus aucune nouvelle de Roberto. Faute d’avoir pris la version payante des sites de suivi, nous n’avons que les positions automatiques obtenues lorsque les navires en croisent d’autres, ce qui est plutôt rare au milieu de l’Atlantique. Du coup, Le Titus semble cloué à son point de départ, mais ça n’est pas plus inquiétant que ça… Pas de nouvelles, bonnes nouvelles ?

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Notez la date estimée d’arrivée au 24 juillet. Quelques jours plus tard, elle va s’afficher au 31 !

L’Empereur en Playmobil

Napoléon Bonaparte ne parlait quasiment pas un mot de Français lorsqu’à l’âge de 10 ans il arriva de sa Corse natale à Brienne-le-Château, dans l’Aube. Il y resta 5 ans, de 1779 à 1784, pour apprendre non seulement la langue mais déjà quelques stratégies militaires, qu’il mettait en pratique avec brio dans la cour de récréation.

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Une riche iconographie accompagne la présentation de la carrière militaire de Napoléon Bonaparte
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Sur le bilan des différentes batailles, on voit à quel point la vie humaine valait peu par rapport aux prises matérielles ennemies

Nous avons visité ce musée qui retrace ce bref parcours, mais aussi les grandes lignes de la vie personnelle et politique de Napoléon, une jolie collection de soldats de plomb ainsi que de nombreuses cartes animées et interactives sur le déroulement des batailles, dont celle qui a eu lieu ici, à Brienne, en 1814.

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La généalogie et la vie familiale de l’empereur sont bien décrites, jusqu’à son lit de mort
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En cerise sur le gâteau, nous avons eu droit à l’expo temporaire « Napoléon en Playmobil » regroupant de belles reconstitutions de batailles construites par un passionné.

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Pendant ce temps-là, le Titus réapparait près de la Normandie. On aimerait bien qu’il rejoue le débarquement (enfin juste de Roberto) mais ce ne serait pas raisonnable. Et puis nous ne sommes pas équipés de plaques de désensablement.

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Et puis quelques heures plus tard, la joie retombe brusquement : un article du Monde fait état d’un navire transporteur de véhicules en feu près des Pays-Bas. Une vérification rapide nous permet de vérifier qu’il ne s’agit pas du nôtre, dont nous recherchons de suite la localisation. Bingo ! Il est juste à côté de celui en flammes ! Heureusement, le Titus va poursuivre sa route tranquillement pendant que l’autre continue de se consumer. Apparemment, que des véhicules neufs à l’intérieur, dont 500 voitures électriques chargées en Allemagne. La batterie de l’une d’entre elles serait-elle responsable de l’accident ?


Bienvenue chez les Ch’tis

Courte pause dodo sur notre route dans le département du Nord. Fidèle à sa réputation quant au climat…


Ypres Ypres Ypres Hourra !

Et nous voici déjà en Belgique, le plat pays qui n’est pas le nôtre. Nous visitons logiquement Ypres, dans la continuité de notre traversée historique de la France, avec cette fois pour thème la Première Guerre Mondiale. En effet, d’importantes batailles se sont déroulées ici. Les nombreux monuments commémoratifs et cimetières militaires en témoignent, tout comme le magnifique In Flanders Fields Museum. Nous nous sommes replongés un moment dans l’histoire des tranchées et des hommes qui s’y sont battus pour que nous soyons en paix aujourd’hui.

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Ci-dessus : les armes de la Première Guerre Mondiale, loin des FAMAS et autres drones
Ci-dessous : les jouets très en vogue à l’époque et un véhicule transporteur de pigeons voyageurs
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Ypres est aussi une très jolie ville au style flamand bien affirmé, avec ses bâtiments en briques multicolores, ses pignons en escalier, ses tourelles, etc. Les édifices publics (halle aux draps) ou religieux (comme la cathédrale) sont superbes, en vrai comme en Lego… Une bonne préparation à la visite prochaine de Bruges.

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Le In Flanders Fields Museum est logé dans l’ancienne halle aux draps, reproduite ci-dessous en Lego

Et pendant ce temps-là, Roberto nous a dépassés. Sa course transatlantique le fait accoster tout d’abord à Bremerhaven, en Allemagne. Nous aurions pu aller le récupérer là, cela nous aurait fait gagner 2 jours, mais avec un trajet et un coût supplémentaire qui n’en valaient pas la peine. Après une trentaine d’heures, le Titus part enfin vers Zeebrugge.

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La Venise du Nord

La ville de Bruges est indéniablement sous le signe de l’eau. Celle qui tombe du ciel tout d’abord, 199 jours par an tout de même, et qui gâche un peu les balades. Et puis bien sûr celle des canaux qui entourent et traversent la cité, la reliant d’ailleurs à la Mer du Nord à 15 km de là. Il faut dire que Bruges a commencé sa carrière comme port maritime au XIème siècle, grâce à une protection efficace contre les Vikings qui régnaient alors sur les mers. La ville est devenue alors le lieu incontournable pour les affaires en Europe au point que la première Bourse mondiale fut créée ici au XIIIème siècle. Chez les Van des Buerse, d’où le nom. Et puis le canal s’est enlisé, la ville est tombée en déclin au profit d’Anvers sa voisine. Heureusement son centre médiéval authentique remarquablement préservé a su séduire l’UNESCO qui a reconnu la ville comme patrimoine mondial en l’an 2000. Mais surtout c’est la reconstruction d’un port moderne en bord de mer, appelé Zeebrugge (Robertodrôme en Français*) qui a regonflé l’économie de la ville.

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La météo de notre semaine à Bruges. Faut-il vraiment des commentaires ?
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Beaucoup des photos ci-dessous auraient pu être comme celle-là. Mais nous avons tenté de tirer parti des quelques dizaines de minutes chaque jour où de petits morceaux de ciel bleu réapparaissent

Dans l’attente du débarquement et de la livraison de notre véhicule préféré, nous avons pris un peu de temps pour visiter la ville. Nous avons particulièrement apprécié son unité architecturale dans le style gothique flamand, son réseau de ruelles et de canaux tortueux, ses édifices religieux lançant leurs multiples flèches vers le ciel et carillonnant à tout va, ses multiples boutiques dont beaucoup incitent à la tentation. Succès oblige, nous étions loin d’être les seuls à visiter, et la cohabitation voitures-cyclistes-vélos-piétons-motos-calèches-camions de livraison dans les étroites rues qui n’ont de piétonnes que le nom s’est révélée ardue. Malgré cela, la visite est incontournable pour ceux qui traversent la Flandre occidentale, qui cherchent à agrémenter un week-end, ou qui viennent récupérer leur Roberto.

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*Bruges-sur-Mer en réalité (zee = mer en Néerlandais)


Et pendant ce temps-là, le Titus entre enfin dans le port de Zeebruges. Nous sommes probablement les seuls au monde à nous émouvoir devant les copies d’écran ci-dessous, mais bon. L’aventure n’est pas terminée pour autant, il reste la réception, qui va encore prendre quelques jours, 3 ou 4 en moyenne, parfois plus dit la compagnie. Le feuilleton à suspense continue…

A très bientôt et merci de nous suivre !

107. En route sans Roberto

Pendant que notre véhicule préféré (bah oui, nous n’en avons qu’un) attend sa croisière sur le Titus, nous arpentons les rues de Panama City, et plus particulièrement celles du Casco Viejo puisque nous y logeons. C’est le quartier où la ville initiale s’est reconstruite après le saccage par le corsaire anglais Henry Morgan en 1671. Si ses habitants ont fui en périphérie pour se réfugier dans des tours de béton, les touristes redécouvrent aujourd’hui sa belle architecture coloniale et toute son histoire, provoquant de fait sa réhabilitation progressive. Pendant quelques jours, nous vous partagerons quelques points qui ont attiré notre attention.

Le Café Coca-Cola

Le Café Coca-Cola est le plus ancien café de la ville, présent depuis 1875, et le seul au monde à porter ce nom. Tandis que Wikipédia relie cela à l’amitié entre les américains et les panaméens à cette époque (mon œil, oui), le café lui-même et d’autres sources assurent que l’établissement a gagné son procès contre la firme américaine, celle-ci ayant malencontreusement oublié de protéger sa marque au Panama (ils en étaient au tout début de leur expansion mondiale). L’établissement est resté dans son jus, parfait pour un café, et continue à servir – il fait aussi restaurant – une cuisine locale saine, copieuse et bon marché, que les locaux accompagnent bien plus souvent de café que de la boisson aux 7 morceaux de sucre par canette de 33cl.

Et c’est probablement de bon café panaméen que se sont abreuvés les hôtes célèbres du lieu, comme le couple Perón, Pablo Neruda, Fidel Castro, Ernesto Che Guevara ou encore (sans comparaison aucune) Julio Iglesias et Daniel Craig.

Mine de rien, le Café Coca-Cola est inscrit pour sa valeur historique au patrimoine mondial de l’Unesco !


La Mercedes dans l’église

Désolé pour les vanlifers qui roulent en Sprinter, nous ne parlons pas de leur véhicule favori, mais de l’église Nuestra Señora de las Mercedes, alias La Merced, du vieux quartier de Panama City.

Construite à partir de 1522 à l’entrée de la ville primitive, elle fut le seul édifice épargné par le saccage du corsaire Henry Morgan en 1671. Alors quand la capitale fut reconstruite plus loin, sur l’actuel Casco Viejo, l’église y fut transportée pierre par pierre à dos de mule et d’esclave. Du moins la façade, parce que les pierres de ses murs furent réquisitionnées pour les nouvelles constructions. C’est pourquoi les tours qui encadrent la façade sont d’aspect plus récent.

Peu reconnaissante, l’église catholique expropria deux siècles plus tard l’ordre des mercédaires (créé en 1218 pour le rachat des chrétiens captifs des musulmans) qui avait tout retapé. Sachant qu’ils ne pourraient dire que merci (traduction française du latin merces). Ils ont tout de même fini par récupérer leur bien en 1983. La morale est sauve !

À l’intérieur de l’église, on remarque la structure en bois (d’origine) qui soutient la charpente, frêle d’aspect mais apparemment efficace et le bel autel doré copie fidèle de l’original où trône la Vierge de la Miséricorde, sainte patronne du lieu. Sur les côtés sont aussi très vénérées (j’ai dû revenir pour faire les photos) la Virgen del Carmen qui protège les marins, avec son bateau dans la main, Sainte Edwige, protectrice des foyers, reconnaissable aux multiples maisonnettes déposées à ses pieds en guise d’ex-voto, et la Vierge de la Charité, sainte patronne des Cubains, avec en dessous la barque des 3 hommes qui l’ont découverte flottant près d’une île.


Réhabilitation

Le « vieux quartier » de Panama City, érigé après la destruction de la ville initiale en 1671, a connu son apogée entre 1850 et 1920, une fois le chemin de fer et le canal en service. La plupart des bâtiments reflètent le style colonial espagnol de cette époque. La fuite de la population aisée vers la périphérie vers 1970 a conduit à un appauvrissement du quartier et au développement de la criminalité qui ont encore aggravé les choses. Petit à petit, l’habitat s’est détérioré. Heureusement, après la qualification en monument historique national par le gouvernement en 1976 et surtout en patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO en 1997, le Casco Viejo a commencé à renaître. Les bâtiments restaurés ont une certaine classe et attirent maintenant les touristes aisés. Le contraste avec les anciens immeubles dont souvent ne persistent que les façades et dont les ouvertures du rez-de-chaussée ont été murées est saisissant. Mais ces vieux bâtiments aux couleurs tantôt fades tantôt vives, aux boiseries d’un autre âge, souvent décorés de peintures murales et hébergeant une population authentique ont aussi un charme fou. Je les préfère personnellement aux précédents.

A noter que pour favoriser la réhabilitation, le gouvernement offre 30 ans de taxe foncière et 10 ans d »impôts à ceux qui s’y lancent. Autant dire que les chantiers sont nombreux !


Carludovica Palmata

Ah ah, je sens que ce titre ne vous évoque pas grand-chose. Il s’agit d’un palmier qui ne pousse qu’en Équateur, dont la paille aussi fine que souple et légère était utilisée par les habitants de certaines régions du pays pour tresser des chapeaux de soleil.

Efficace et robuste, le chapeau a suscité une demande forte des autres régions puis du monde entier, accentuée peut-être par son usage chez les ouvriers du canal ou quelques personnalités comme Roosevelt ou Churchill.

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Je suis quasiment le seul sans chapeau !

Son expédition par caisses estampillées « PANAMA », puisque devant transiter par ce pays pour l’export, a fait croire à ceux qui les recevaient que le chapeau venait de là et son nom panaméen a fini par tomber dans l’usage courant. L’Équateur aurait pu se plaindre, mais comme les recettes s’envolaient…

On en trouve de toutes les qualités, mais sachez qu’un vrai panama se reconnait à son tressage très fin qui démarre par une rosace au sommet du chapeau. Autant dire que la totalité de ceux pris en photo ici sont des faux !

Enfin, le chapeau panama, équatorien donc, est inscrit au patrimoine culturel de l’humanité, comme le Café Coca-Cola d’ailleurs. Mais ça n’a rien à voir.


Cerro Ancón

Lorsque la première ville de Panama fut saccagée par les pirates en 1621, on décida de la reconstruire en un lieu plus sûr que sur une simple plage, car les plages c’est difficile à défendre, les Allemands en ont fait les frais en 44. Enfin les Alliés aussi mais ça n’est pas le propos. Donc la ville fut déplacée sur une péninsule placée au pied d’une colline qui permettrait de la surveiller tout en l’alimentant en eau potable et qui fut baptisée Cerro Ancón.

Vous le savez, j’aime bien savoir l’origine des noms. Pas besoin de lancer Google Traduction pour savoir que « cerro » signifie « colline » en Espagnol, mais nous l’avons interrogé pour « Ancón », qu’il a traduit bêtement par « ancon », ce qui pourrait désigner cette année coronavirale qui nous a pourri la vie, mais non.

J’essaie alors sur Wikipédia, qui m’en donne la définition suivante : « En géographie , un ancón est un corps aquifère navigable plus grand qu’une entrée et moins profond qu’un creux« . Misère… Je tente ma chance avec une traduction en Anglais, et oh miracle, j’obtiens le mot « cove », qui signifie « crique ».

Nous partons donc ascensionner la Colline de la Crique, un petit havre de paix végétale au cœur de la ville. Certains y rencontrent des animaux, mais les seuls troupeaux que l’on ait croisé étaient euh humains. Du haut des 199m, sous les ondulations du plus grand drapeau du pays, de jolis panoramas s’offrent sur la ville nouvelle hérissée de tours, le vieux quartier où nous reconnaissons quelques édifices religieux caractéristiques, et le canal dans toute sa splendeur avec des montagnes de containers hérissées cette fois de grues. Peu de navires circulent en revanche. Nous apercevons au loin le Titus qui aurait dû récupérer Roberto il y a 3 jours mais qui reste mystérieusement ancré à l’entrée du canal.

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Vue dégagée sur Panama City : les tours de la ville moderne à gauche, le quartier historique à droite
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Le port de commerce et une belle perspective du canal avec les écluses de Miraflores au fond

Le grand échange

Il y a un peu plus de 3 millions d’années, le Panama n’existait pas. Ou plutôt c’était un canal de grande largeur qui séparait les deux Amériques. Les porte-containers auraient pu y circuler facilement et gratuitement s’ils avaient existé. Mais à l’époque, l’espèce humaine commençait tout juste à se redresser sur ses jambes, autant dire que le porte-container était le cadet de ses soucis.

Et puis la plaque pacifique s’est glissée un peu plus sous la plaque caraïbe, provoquant un soulèvement du sol ainsi que l’éruption de volcans qui ont fini par boucher le canal. C’est ballot, puisqu’il a fallu le recreuser plus tard, mais surtout cela a permis à tout ce qui vivait au Sud de passer au Nord et réciproquement. C’est ce que l’on a appelé le grand échange. Sans cela, il n’y aurait pas de paresseux en Amérique du Nord, ni de lamas en Amérique du Sud. Le Pérou ne serait pas le Pérou. Le Costa Rica ne produirait pas d’ananas. Les Mayas auraient du se passer de cacao. Le plus étonnant dans ce grand échange, c’est que 3 millions d’années après, il n’y a toujours pas de route reliant les deux Amériques !

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Nous avons entendu parler de tout cela au Biomuseo de Panama City, qu’on repère de loin grâce à ses toits multicolores. La visite est idéale pour occuper un jour de pluie.


Yakadi va pêcher !

Yakadi, c’est le nom d’un navire de pêche panaméen parti pêcher illégalement le 6 avril dernier. L’année dernière, il aurait pu sans doute dévaliser l’océan sans vergogne, mais sous la pression de l’Union Européenne, le Panama a dû prendre des mesures, s’équiper d’une surveillance satellite et de moyens d’interpellation. Car sinon l’Europe aurait interdit toute importation de poisson en provenance de ce pays. Les États-Unis font aussi pression de leur côté. C’est comme ça, les gros imposent leur loi aux petits. Mais c’est aussi une façon de protéger les honnêtes pêcheurs locaux, qui connaissent les mêmes difficultés que partout : raréfaction de la ressource, pollution, augmentation du prix du carburant, etc.

Le petit port de pêche de Panama City, avec ses bateaux d’un autre âge ancrés devant la skyline imposante de la ville, reste assez plaisant à visiter. Et les petits restaurants du marché au poisson sont toujours bien achalandés. Il va falloir que l’on teste leur ceviche très réputé avant de quitter le pays !  

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Tomates d’arbres et soupes de pattes

A défaut de subir la malbouffe locale (c’est loin d’être une spécialité panaméenne hélas) nous restons curieux de ce qui peut être proposé sur les étals des marchés ou les menus des restaurants.

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Sur les premiers nous avons retrouvé ces « tomates d’arbres », des tamarillos en fait, que nous avions vues dans la nature au Costa Rica, des grappes de raisin aux grains très allongés et sans pépins et une multitude d’avocats. Au pays des Panama Papers, rien d’étonnant… Et un rien détonnant que cette soupe aux « municiones », non ?

Sur les seconds, nous avons repéré cette « soupe de pattes », une sorte de ragoût aux pieds de porc ou de vache, et des plats revendiqués créoles faisant la part belle au riz et aux haricots rouges, l’accompagnement pluriquotidien des repas en Amérique latine.

Et puis avouons-le, il nous est arrivé de craquer aussi pour quelques spécialités françaises, comme ce petit camembert dont l’emballage permettait une conservation d’un an (!) et tout à fait honorable au goût.


Cet article aurait dû clôturer notre séjour au Panama, mais ce n’est pas tout à fait le cas. Nous avions prolongé un peu notre location pour attendre le départ de Roberto, mais à l’heure où j’écris, celui-ci attend toujours son bateau-hôte, lui-même « scotché » à l’entrée du canal depuis 9 jours sans aucune autre explication. Le départ qui était annoncé le 17 juin est maintenant reporté au 29. Nous quitterons le Panama avant. A bientôt pour la suite du feuilleton…

106. La fin des haricots

Eh oui, notre périple Nord et Centro-Américain se termine. Nous avions certes décidé initialement de franchir le Darien Gap par voie maritime, la seule possible pour un véhicule, pour poursuivre notre périple en Amérique du Sud. Et puis plusieurs éléments nous ont fait changer d’avis. En premier, les caprices de l’électronique et des systèmes antipollution de Roberto, qui risquent de s’accentuer avec les hautes altitudes de la cordillère des Andes et la piètre qualité du diesel dans certains pays. En second vient le facteur temps, dans plusieurs sens du terme : comme nous avons un peu traîné, nous risquons d’être à la fois en plein dans la saison des pluies en Colombie ou au Pérou et un peu justes pour arriver vers Ushuaia entre décembre et février, la période la plus propice. En dernier vient, avouons-le, le côté un peu répétitif de la culture latino-américaine, qui fait que les changements ne sont pas énormes d’un pays à l’autre même si tous gardent leur particularité. Et quand on dit culture, cela inclut l’alimentation. Nous sommes lassés de ne trouver dans la majorité des restaurants que des viandes frites accompagnées de riz et de haricots rouges.

La fin des haricots ?

Après plus de 50 000 km parcourus sur ce demi-continent, nous allons repasser par l’Europe. Pas « rentrer » comme certains nous disent, car se sera juste dans la continuité de notre tour du monde. Un « petit » périple en Europe du Sud avant de repartir loin, peut-être vers l’Australie et la Nouvelle Zélande. L’Amérique du Sud, ce sera pour plus tard. Et financièrement, ce n’est pas aussi pénalisant qu’il n’y parait, le shipping entre le Panama est très cher, presque le double que pour aller en Europe alors que le trajet est douze fois plus court. Mais pour l’instant, profitons du Panama, il nous reste une quinzaine de jours avant de quitter le pays.

El Valle de Antón

C’est dans ce cratère volcanique, le deuxième plus grand au monde après celui de Yellowstone, situé à 600 m d’altitude, que viennent se reposer les « capitaleños », nom donné aux habitants de la capitale située à seulement 2 heures de route. Ils viennent y chercher un peu de fraîcheur (tout est relatif) et y pratiquer des activités en extérieur. Nous avons donc suivi leur exemple, nous nous sommes mis au vert quelques jours avant de gagner Panama City.

El Valle de Anton depuis la India Dormida
El Valle de Antón. Tiens, ça m’en rappelle une autre, réservée aux cinéphiles avertis : M. et Mme Mavallée ont 2 filles… Comment se prénomment-elles ? (réponse en légende des photos suivantes)

◊ Le centre-ville

C’est une longue rue principale bordée de boutiques, de restaurants, de petits hôtels, de supérettes, d’un marché permanent et même de voitures-boutiques sur le capot desquelles on vend directement la marchandise. Tout y est à échelle humaine, les bâtiments ne dépassent pas un étage et sont relativement dispersés, laissant une part honnête à la nature. Des routes secondaires s’en éloignent, desservant les habitations plus ou moins riches puis les sentiers de randonnées. La ville recense plusieurs centaines de retraités de nationalités multiples, attirés là par le climat printanier permanent.

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Sur les allées latérales, des demeures de toutes sortes, simples aux couleurs locales ou plus huppées, mais toujours dans un environnement plus que verdoyant
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Les « voisins vigilants », ça marche ici aussi. Gare au lion qui veille !

◊ Le sanctuaire des grenouilles dorées

Cette petite grenouille de 3 à 5 cm de long ne vit qu’ici, à El Valle, où l’on sauvegarde les derniers représentants de l’espèce menacée d’extinction (elle a été filmée pour la dernière fois à l’état sauvage en 2007). Elle est principalement victime, comme d’autres batraciens, d’un champignon mortel pour cette espèce, mais aussi d’un autre parasite appelé « Homme » qui détruit et pollue son habitat. Pour la petite histoire, le centre qui les recueille est situé juste à côté d’un hôtel. Les travaux ayant pris du retard, deux chambres de l’hôtel (Campestre) ont été réquisitionnées pour héberger 300 grenouilles, avec service d’étage à la clef, jusqu’à la mise en route définitive du centre. Le gouvernement panaméen a décidé d’en faire un symbole national, en votant que le 14 août serait la journée nationale de la grenouille dorée. Sera-ce suffisant pour sauver l’espèce ?

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La grenouille dorée panaméenne, hôte VIP de l’Hôtel Campestre

Le centre ne se visite pas, à l’exception d’un petit bureau d’accueil qui possède quelques vivariums, présentés par des naturalistes qui n’hésitent pas à mettre la main euh à la patte pour nous montrer quelques spécimens intéressants. Comme par exemple cette grenouille transparente dont on voyait battre le cœur dans la poitrine.


◊ Les arbres carrés

Ces arbres sont aussi une espèce endémique d’El Valle, on ne les voit nulle part ailleurs dans le monde. Et d’ailleurs ceux qui ont tenté de les faire pousser ailleurs n’ont pu que constater un tronc circulaire. L’arbre appelé Quararibea asterolepis semble pourtant assez commun du Brésil au Costa Rica, mais il ne pousse carré qu’ici. Un vrai mystère ! Pour les découvrir, il faut emprunter un petit chemin près de l’Hôtel Campestre, celui qui a hébergé les grenouilles dorées, et marcher une petite demi-heure dans une forêt, en traversant de petites passerelles au-dessus d’un torrent. Après, difficile de les rater, ils sont munis soit d’un ruban, soit d’une pancarte. Carrément.

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C’est parti pour une randonnée à la rencontre des arbres carrés, avec notre guide improvisé. « Il aime se balader avec les gens » nous a dit le gardien à l’accueil !
Sentier agréable dans la forêt le long d’un torrent, avec quelques passerelles pas trop rouillées.
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De jolis bancs bleu délavé permettent de se reposer. Le chien préfère la méthode Rika Zarai pour se rafraîchir !
Nous arrivons dans une clairière avec des arbres à la base plutôt triangulaire…
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Et puis les voilà enfin ! Clairement identifiés au cas où l’on aurait des doutes

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Petite pause bien méritée au retour sous l’oeil vigilant de notre ange-gardien

◊ La Piedra Pintada

C’est un gros caillou accessible avec un bracelet rose qui témoigne que vous avez bien acquitté le droit d’entrée. 3 dollars qui vous donnent droit à acheter des souvenirs aux stands du couloir d’entrée, à déraper sur la boue qui traîne sur le chemin, à barboter sous l’une des cascades qui le jalonnent, à vous faire éclabousser par les autres et enfin à décrypter les pétroglyphes qui ornent l’une de ses faces, régulièrement soulignés de craie par les locaux, faute de quoi ils seraient moins apparents et risqueraient de déclencher un réflexe de demande de remboursement. On n’est apparemment sûr de rien pour ces dessins gravés. Ni de leur ancienneté (sauf pour l’inscription « Bob was here 2004 » qui n’a pas besoin d’être datée au carbone 14*) ni de leur signification. Certains parlent d’une représentation cartographique régionale du conflit entre les autochtones et les espagnols, mais s’il ne fait aucun doute que le conflit a bien eu lieu, comme partout ailleurs en Amérique, rien ne prouve qu’il ne s’agit pas du dessin d’un gamin du coin ayant représenté la tête de sa petite sœur atteinte de la variole.   


◊ La India Dormida

Ayant eu pendant 25 ans, lorsque nous habitions à St Gervais, l’Indien Endormi de la chaîne des Aravis sous nos yeux, nous n’avons pas été plus surpris que ça de trouver une compatriote allongée sur le bord du cratère d’El Valle. Une amérindienne fille de chef tombée amoureuse d’un conquistador. Le prétendant n’a pas supporté et s’est donné la mort. L’indienne bannie par son peuple est allée se réfugier dans la montagne, s’y est allongée pour toujours, imposant sa silhouette en permanence aux habitants du village et offrant son corps à parcourir à tous les randonneurs de passage. Une belle revanche finalement. Et un joli spectacle panoramique au sommet pour ceux qui se donnent la peine de réaliser l’ascension. De plus, ça ravira mon fils, passionné d’histoire de la guerre, de savoir que je suis monté au front.

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La voyez vous cette belle indienne endormie avec sa chevelure verte ondulante ?
L’ascension se fait par le bras gauche (il parait qu’elle n’a pas de bras droit, mais chut !)
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Le front est un peu plus dégarni mais offre une vue plongeante et panoramique de toute beauté
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◊ Une histoire à dormir de boue

Quoi de mieux après une longue randonnée en pleine chaleur qu’un bon bain chaud ? Et comme nous sommes ici dans le cratère d’un volcan, devinez quoi, on trouve quelques sources thermales. Les Pozos Termales d’El Valle sont à courte distance du centre-ville. Les installations sont rudimentaires, quelques bassins de taille modeste emplis d’une eau couleur ocre de 34 à 38°C et richement minéralisée. Mais avant de s’y plonger, il est recommandé d’appliquer sur le visage, ou plus si affinité, un petit pot de boue que l’on vous remet à l’entrée, et de le laisser sécher avant de tout rincer et de profiter enfin du reposant Graal aquatique.


Panama City

Nous avons troqué les vertes montagnes de notre cratère contre les tours bétonnées de la capitale. Un passage utile, pour ne pas dire nécessaire, à notre prochain shipping (je reviendrai plus tard sur ces formalités) auquel nous joindrons j’espère l’agréable, la mégapole possédant tout de même quelques attraits touristiques.

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◊ Panama Viejo

Afin de commencer par le commencement, nous visitons d’abord Panama Viejo, les ruines de la ville initiale, construite dès 1519, la toute première bâtie par les Espagnols sur la côte Pacifique de l’Amérique. Entre les conflits avec les autochtones, qui ont défendu bec et ongles leur territoire et leur culture avec la fin malheureuse que l’on connaît, les nombreuses attaques de pirates qui savaient bien que l’or du Pérou transitait par cette ville pour aller en Espagne, les incendies et les tremblements de terre, le site fut jugé insécure et la capitale fut transférée à 8 km de là, renaissant dans le quartier appelé actuellement Casco Viejo en 1671.

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Maquette de Panama Viejo telle qu’elle était au XVIIème siècle

Panama Viejo est désormais, malgré ses 500 ans à peine dépassés, un site archéologique classé. Il reste peu de choses de la ville initiale, les habitants s’étant largement servi dans ses murs pour reconstruire la nouvelle ville, mais les travaux de réhabilitation et les panneaux explicatifs permettent d’imaginer la ville telle qu’elle était avant son brutal déclin. La tour de la cathédrale, réaménagée en observatoire, permet d’apprécier le site vu de haut avec la skyline de la City en toile de fond, et de mesurer du coup le contraste saisissant de l’évolution de la technologie et de la civilisation en quelques siècles seulement. Un musée permet de compléter ses connaissances dans une fraîcheur bienvenue (40°C ressentis à l’extérieur).

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La cathédrale, dont le clocher en cours de restauration permet d’aller observer le site de haut
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Joli panorama en effet. Un dessin au-dessous permet d’imaginer la ville du même point de vue autrefois
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La nature est un peu préservée en plein coeur de la ville. Nous avons bien aimé cette visite !

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Le parking du site archéologique n’est pas prévu pour y passer la nuit. Mais nous avons tout de même tenté notre chance auprès de l’agent de sécurité. Après un refus initial et des échanges sympathiques sur notre parcours, Carlos a finalement accepté. Après, il est venu rediscuter à plusieurs reprises et est même venu nous demander le lendemain matin si nous avions bien dormi ! Ce qui était le cas avec le site pour nous seuls, une petite brise de mer rafraîchissante et une jolie vue sur la skyline de Panama City en prime
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Organisation du shipping

Ah le bon temps des traversées en ferry des fjords de Norvège, où l’on montait directement sur le pont du bateau nous attendant au bout de la route et où l’on débarquait de l’autre côté sans avoir montré le moindre papier ni sorti le moindre argent (la plaque minéralogique était scannée et le montant débité de notre carte bancaire quelques semaines plus tard).

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Traversée en ferry du Bjørnafjorden (Norvège) en route vers Bergen en septembre 2021

Ici Roberto va quitter un pays pour un autre, un continent pour un autre pour un parcours de plusieurs semaines, une tout autre logistique.

◊ Choix du mode de transport

La première étape a été de choisir le mode de transport parmi 3 possibles : le container, le flat rack et le RO-RO. La première était à la fois la moins chère et la plus sécuritaire, à condition de trouver un partenaire pour partager le container, la recherche ayant été faite par les réseaux sociaux et un prestataire panaméen. La seconde nécessitant également un partage, était la solution la plus sécuritaire pour un véhicule ne tenant pas dans un container même réhaussé (2,58m de hauteur maximum). Faute d’avoir trouvé à temps quelqu’un pour partager avec nous, nous avons dû nous rabattre sur la 3ème solution, le Roll on – Roll off, alias RO-RO. Au lieu d’expédier le véhicule verrouillé, on confie ici les clés au transporteur pour qu’il puisse le conduire lui-même dans et hors du navire. Et quand tout est ouvert, les véhicules sont malheureusement souvent fouillés et dépouillés, ce qui nous est arrivé à l’aller. Nous avons choisi cette fois de ne rien barricader et de transporter avec nous dans l’avion le plus de biens possibles.

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Choisir entre container, flat rack et RO-RO… quand c’est possible !
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C’est finalement sur un navire de ce type, de la compagnie Wallenius Wilhelmsen, que Roberto va voyager

◊ Choix du transitaire

Une fois le transport déterminé, nous avons fait faire des devis, assez facilement puisque tout se fait en ligne. Entre IVSS, Seabridge et Overland Embassy, c’est la première compagnie qui s’est révélée la plus intéressante. Après, ce sont des échanges de courriels et de documents, la procédure est plutôt bien organisée. On met à notre disposition, moyennant rémunération, un agent portuaire qui nous guidera dans toutes les étapes sur place.

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Page d’accueil de la compagnie IVSS

◊ Le certificat de non-gage

Côté paperasse, le plus pénible au Panama est l’établissement de notre équivalent de certificat de non-gage. Mais alors que chez nous l’opération se fait simplement en ligne, il faut commencer là-bas par faire vérifier l’identité de son véhicule, 2 à 3 jours ouvrables avant la date de dépôt au port.

Et il faut y être de bonne heure, entre 6 h et 7h30 du matin, car ils ne vérifient que les véhicules arrivés dans cette tranche horaire-là et pas plus de 25 par jour ! Afin d’assurer nos arrières, nous sommes arrivés à 5h45, il faisait encore nuit, sur un terrain vague devant un bâtiment à moitié délabré. 30mn plus tard, une porte s’est ouverte et j’ai pu m’inscrire sur la liste d’attente, avec le n°1. L’inspection proprement dite n’a démarré que vers 7h30 (des fois c’est plus tard). Deux agents ont sorti un bureau du bâtiment et l’ont amené sur le terrain vague. Puis les candidats du jour se sont présentés un par un pour faire valider leurs papiers. Seulement une fois que tout le monde a été enregistré, les inspections ont commencé, presque dans l’ordre des numéros (nous sommes passés en 3ème…). Vérification rapide du numéro d’identification du véhicule et de la plaque. Moins de 5mn. Après quoi nous sommes invités à revenir le lendemain 10h pour obtenir le document final. De nouveau quelques papiers à remplir et à photocopier, presque 1 heure d’attente et nous voilà en possession de notre sésame. Il paraîtrait qu’en donnant un gros billet au port on pourrait s’en passer mais chut !

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Tout ça pour ça ! Et le papier n’est valable que 8 jours. Si le bateau prend du retard, il faudra tout recommencer !

◊ Préparation de Roberto

Nous allons nous poser dans un petit hôtel sympathique entouré de verdure pour préparer Roberto au shipping. Nous prenons une chambre, ce qui va nous permettre à la fois de dormir au frais et d’avoir les coudées franches pour vider nos placards. Nous avons acheté une valise dans un centre commercial voisin pour emporter le maximum de ce qui nous tient à cœur ou qui est difficilement remplaçable. Pour le reste, la compagnie exige que le véhicule ait l’air « vide ». Donc nous enfermons tout ce qui reste dans les placards. Les réservoirs d’eau doivent être au minimum, et nous ne devons laisser qu’un quart de diesel, ce qui est très frustrant compte-tenu du prix du litre à 80 centimes d’euro !

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L’Hôtel Amador Familiar à Panama City ; 33$ la chambre, ça va
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Le tableau réservé aux visiteurs dans la salle à manger. Mais où est Charlie ?

◊ Abandon des plantes vertes

Difficile de se rappeler où nous avons acheté ce mignon petit cactus dans un pot de céramique à la forme d’un combi VW, symbole parfait du voyageur nomade. Je dirais entre 6 et 12 mois. Nous l’avons choyé, arrosé avec parcimonie, préservé des chaleurs extrêmes et exposé au mieux, notamment en lui trouvant un petit restant de lumière les moments où nous avons abandonné Roberto sur des longues durées. Nous lui avons trouvé une résistance exceptionnelle, nous nous sommes félicités de notre inhabituelle main verte. Et quand il a fallu préparer Roberto pour la grande traversée, nous nous sommes résolus à lui faire nos adieux, tout importation transatlantique de plantes étant prohibée. Nous avons décidé de le remettre en pleine terre, de lui rendre sa liberté en quelque sorte, dans le jardin du petit hôtel où nous avons séjourné pour les préparatifs. Je dépote, donc et découvre sous une mince couche à l’apparence de la terre un morceau de polystyrène expansé. Géniale solution pour éviter les surplus d’eau pensais-je avant de découvrir une tige verte bien cylindrique se terminant par un bord net. Aurais-je arraché malencontreusement les racines ? Le petit être va-t-il réussir à reprendre après ça ? Et puis j’y regarde de plus près, puis, après un doute, d’encore plus près, avant de réaliser que notre cactus si résistant est …en plastique. Une prouesse d’imitation car j’ai quand même caressé le fin duvet des feuilles plus d’une fois pour vérifier sa santé, mais tout de même, une vraie déception !


◊ Dernier repas entre amis

Nous allons maintenant longer le canal du Sud au Nord pour rejoindre Manzanillo, le port de la ville de Colón où nous devons déposer Roberto. Dommage de devoir aller là alors que notre navire faisait escale à Panama City, mais pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Avant de rejoindre l’endroit où nous allons passer la nuit, nous devons encore trouver un laveur d’autos pour Roberto, qui doit être exempt de salissures et de boues comme il est précisé dans les consignes. Pas facile un dimanche soir, mais rien d’impossible ici. Notre premier choix sur Google Maps, pourtant marqué « ouvert en ce moment » semble abandonné depuis des lustres. Le second n’est pas à l’endroit indiqué, nous le trouvons grâce à un passant que nous prendrons à bord de Roberto pour nous y conduire, sur sa proposition !

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Grand lavage pour Roberto. La poutrelle du toit était bien basse, c’est passé à 2 cm du lanterneau !

Nous retrouvons sur un joli spot près de l’écluse de Gatún, la plus proche de l’Atlantique, une famille française que nous avions rencontrée pour la première fois au Nicaragua. Hasard du calendrier, ils rapatrient leur véhicule en Europe sur le même bateau que nous. Joie des retrouvailles, échanges sur nos parcours respectifs et plus largement sur nos aspirations communes, partage des restes alimentaires puisqu’il ne faut rien laisser de tel dans les véhicules. Bref un repas et une soirée en commun bien sympathiques, dans un cadre idyllique au bord de l’eau (on oubliera vite la musique forte du gros camion venu récupérer un bateau sur le bras de mer, ça n’a duré qu’un temps). Et nous ferons une partie de nos formalités ensemble le lendemain avant de nous séparer pour quelques semaines. Eux partent « tromper le temps » de la traversée en allant visiter la Namibie, super projet, tandis que nous choisissons de rester un peu plus longtemps sur le Panama avant de rejoindre la Belgique. Nous devrions nous retrouver à Zeebrugge mi-juillet.

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Merci à Julie (de l’autre côté de l’objectif) pour cette belle photo-souvenir avec Victoria, Wil et Zach.
Si vous voulez suivre leur voyage, ils sont @notre_roadtrip sur Instagram
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Notre joli spot au bord d’un bras de mer près de Gatún, avec de belles couleurs au lever du soleil
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◊ Roberto au dépôt

Nous retrouvons au port notre agent facilitateur qui fera toutes les démarches à notre place, ce qui est bien pratique quand on ne connait pas les lieux ni ne maîtrisons la langue. Après 2 heures de formalités, dont inspection douanière, chien sniffeur de drogue, annulation du permis d’importation temporaire et mention ad hoc sur nos passeports (car il y était écrit que nous n’avions pas le droit de quitter le pays sans notre véhicule), tout est réglé. Nous abandonnons Roberto et repartons à la capitale. Nous le reverrons dans un mois en Belgique. Il va voyager avec le Titus, que nous allons suivre à la trace sur le site marinetraffic.com, et qui est localisé au moment de la rédaction de cet article au large des côtes du Nicaragua.

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Roberto à la douane de Manzanillo, avec son copain Las Vegas. Nous les reverrons dans 1 mois

Notre voyage va désormais se poursuivre quelque semaines sans Roberto. Mais pas question de nous laisser aller ! Nous allons rester un peu sur Panama City et, tout en visitant la ville, réfléchir à notre parcours jusqu’à Zeebrugge. Vous saurez ça bientôt. Merci de nous lire !

Parcours Panama
Parcours Panama d’El Valle à Manzanillo via Panama City. En version zoomable ici

105. Mon Panama paper

Bienvenue au Panama, 23ème pays parcouru par Roberto (plus de 75 000 km au compteur) et dernier pays d’Amérique centrale. Nous ne nous attendons pas à une révolution paysagique ou culturelle par rapport au Costa Rica, d’autant plus que nous connaissons un peu le pays pour l’avoir visité juste avant le premier confinement. Mais c’était sac au dos et transports en commun. Notre fidèle destrier nous permettra sans doute d’élargir un peu le champ de nos anciennes découvertes. A voir…

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Comme toujours, on commence par une plaque minéralogique.
Très sobre ici. Ils auraient pu mettre une photo de nature ou du canal !
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A l’instar d’autres pays, pas de plaque à l’avant : chacun son style !

Chaud et froid

C’est en partie pour retrouver un peu de fraîcheur que nous avons quitté la côte Caraïbe du Costa Rica et même celle du Panama et pris un peu d’altitude dans la Cordillère centrale. Après plusieurs jours à 35°C et autant de nuits à 29-30°C, nous étions heureux de perdre les six degrés et demi inhérents à tout gain d’altitude de 1000 m. Quelques averses ont été aussi les bienvenues, y compris pour le nettoyage des panneaux solaires. Nous nous sommes trouvés un petit coin tranquille dans la verdure et avons savouré une nuit tranquille à 21°C dans Roberto. Le paradoxe, c’est que notre première visite du lendemain a été pour des piscines thermales naturelles, entre 35 et 42°C, et dans lesquelles nous nous sommes immergés avec plaisir. Allez donc comprendre !

Dès l’entrée au Panama, nous gagnons très vite la zone montagneuse pour prendre un peu le frais
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Nous passons la nuit bien au frais, à plus de 1000m d’altitude et seuls au monde dans cette clairière
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Du coup le lendemain, nous sommes en pleine forme et décidons – pourquoi pas – de tester des sources chaudes. C’est près de la petite ville de Caldera. La route est difficile, les ponts sont larges et sonores, et Roberto a un peu sali ses pneus

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Tout ça est sur la propriété d’une famille panaméenne, dans un cadre bucolique

La ville du printemps éternel

Près du volcan Barú, le point culminant du pays (3745m), la petite ville de Boquete jouit d’un climat printanier permanent grâce à ses 1200m d’altitude, et l’humidité élevée permet aux arbres, aux fleurs, mais aussi aux caféiers de pousser sans limites. La ville a eu le malheur d’être classée « meilleur endroit pour prendre sa retraite » par un média américain, dont les compatriotes sont laissé tenter en masse. Les résidences, restaurants et autres commerces ont poussé comme des champignons, remplaçant les champs de caféiers et les petites maisons des indiens Ngäbe, occupants initiaux devenus minoritaires. Les prix aussi ont poussé fort, au point que même les sentiers de randonnée sont payants.

Comme il n’y a pas grand-chose d’autre à faire, nous avons tout de même emprunté avec une famille de voyageurs français le « Pipeline Trail », le moins difficile d’entre eux, qui comme son nom l’indique suit une conduite d’eau venue de la montagne et qui, comme son nom ne l’indique pas permet de temps en temps d’apercevoir des quetzals, oiseaux majestueux et rares d’Amérique centrale. Nous n’aurons pas cette chance, mais la balade était tout de même sympathique, permettant de côtoyer une végétation riche, dont un arbre millénaire, et se terminant par une belle cascade.

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Boquete, ville de montagne verte et fleurie, mais sans grand charme malgré tout
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Les routes alentour sont tout de même bien fleuries, comme celle qui nous a amenés au Pipeline Trail

Les lacs de Volcán

Dit comme ça, ça peut paraître bizarre, mais Volcán est une ville. Son nom est bien lié au volcan Barú qui la surplombe, mais les lacs eux n’ont rien à voir avec une quelconque activité volcanique. Ils sont connus en tant que zone naturelle humide, la première du Panama et la cinquième de l’Amérique centrale, rien que ça. Alors comme nous étions dans le coin, nous sommes allés voir. Étonnamment, cette réserve est sur un territoire privé et nécessite la traversée d’une piste d’aviation pour la rejoindre. L’accès est malgré tout gratuit « du moment que l’on respecte les lieux et que l’on ne laisse rien traîner ».

Nous empruntons une jolie route bordée de pâturages en guettant à la fois les nuages sur le volcan  en arrière-plan, dès fois qu’il se découvrirait, et les nids-de-poule sur la chaussée. Nous arrivons bientôt à l’aéroport. Nous traversons la piste après avoir demandé l’autorisation non pas à la tour de contrôle mais à un gentil monsieur qui entretenait le jardin du café attenant. La route s’enfonce ensuite dans une forêt et prend le statut de chemin boueux tandis que les arbres peu à peu se referment sur nous. Quand les branches commencent à frotter sur la carrosserie, nous regrettons de ne pas avoir stoppé plus tôt, mais impossible de toutes façons de faire demi-tour. Nous arrivons enfin au bord du premier lac, joli mais pas extraordinaire et exempt de l’extraordinaire faune aquatique que nous espérions. Tant pis, cela aura sorti un peu Roberto de sa routine.

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Le grand bleu au réveil derrière les bancs bleus. Nous avons passé la nuit ici au parc central de Volcán
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Au loin on aperçoit le volcan Barú, point culminant du Panama
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pour aller voir ce joli lac, sous bonne garde d’une résidence privée. Malgré l’appellation de réserve naturelle, nous ne verrons pas le moindre animal

La ferme de Dracula

De 1400 m d’altitude, nous poursuivons la route principale jusqu’à 2000 m (ah ! la bonne fraîcheur) après la petite ville de Cerro Punta. L’activité agricole y est intense, grâce au climat frais et humide, et les montagnes sont ici recouvertes d’une mosaïque de champs multicolores aux motifs géométriques variés, du plus bel effet. Les bordures de routes sont particulièrement fleuries, comme s’il s’agissait des allées d’un jardin botanique géant. Des stands de vendeurs de fruits et légumes sont alignés tout du long. Avec la petite brume qui stagne sur les sommets alentour, c’est magnifique.

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L’arrivée à Cerro Punta : un environnement plus agricole que tropical
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Mais nous voilà arrivés à la ferme de Dracula. Déjà l’inscription au-dessus d’un portail à la peinture défraîchie en impose. Le portail était fermé, mais à notre arrivée il s’ouvre lentement en grinçant. Une voiture en sort. Les gens ont l’air normaux (je ne sais pas pourquoi je dis ça) et nous invitent à suivre le chemin qui s’enfonce dans une forêt dense et sombre, tandis que leur voiture disparaît et que le portail se referme derrière eux (en grinçant). Le long du sentier, tandis que des lianes nous effleurent le visage et que des feuilles géantes nous frôlent les bras, nous apercevons quelques panneaux inquiétants. L’un dit que les enfants égarés seront donnés en pâture à Dracula. Sur l’autre, apposé sur une grille rouillée et fermée, figurent une espèce de sorcier menaçant, muni d’un bâton et d’une épée, et une inscription dissuadant toute tentative de passage. Nous filons sans même ralentir vers la réception.

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Arrivée à la Ferme de Dracula : l’ambiance change soudain
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Là nous attend un bureau vide, des tables et des chaises vides, une vitrine réfrigérée (heureusement ?) vide. Nous appelons timidement, mais personne ne vient. Sauf un chien, un fox-terrier qui nous rappelle Baxter. Finalement une employée apparaît. Elle est un peu pâle pour le pays, mais sans plus.

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Après que nous ayons acquitté le droit d’entrée (à noter qu’elle n’accepte pas les billets de sang euh de cent) elle nous dit que le comte est bon (lèche-bottes, va) et nous autorise à visiter, mais seulement avec le guide et sans aller dans le couloir sombre avec les grosse feuilles qui pendent ni dans la pièce fermée par une grosse grille fermée par un cadenas et couverte de mousse verdâtre. On se demande bien ce qu’il y a à l’intérieur.

Le guide nous fait la visite de la ferme, essentiellement de grands jardins de plantes exotiques. Il est très aimable, ce qui paradoxalement nous inquiète. Sans parler de Baxter qui ne nous lâche pas d’une semelle. J’allais demander des informations sur le propriétaire des lieux quand soudain Dracula apparaît. En tenue sombre avec une note pourpre, le visage menaçant, immobile et silencieux. Le guide se racle la gorge et nous fait finalement les présentations.

Dracula, c’est le nom d’une famille d’orchidées, abhorrant tantôt une tête de chauve-souris tantôt une tête de singe et pourvue de sépales pourpres en imposant pour deux longues canines. Comme son homonyme transylvanien, l’orchidée « dort » le jour, la tête basse, et revit la nuit, se redressant.

Bon, plus de peur que de mal. Mais quand même, à aucun moment dans le jardin je n’ai vu de culture d’ail. C’est un signe, ça, non ?

Vampirisme mis à part, cette Finca Dracula regorge d’espèces végétales tropicales dans un jardin mi-aménagé, laissant une part belle mais semble-t-il partiellement contrôlée à l’improvisation de dame nature. Malgré nos visites récurrentes dans ce type d’établissement, nous arrivons toujours à trouver des plantes que nous n’avions jamais vues. Cela semble presque sans limites.

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Un tout autre San Francisco

Ce village de l’état de Chiriqui, dans ce que l’on pourrait appeler le Panama profond, n’a évidemment rien à voir avec sa mégapole homonyme américaine. Créé en 1621 par une cinquantaine d’indigènes venus exploiter des mines d’or récemment découvertes dans la région, le village s’est peu à peu agrandi autour de son église. Les huttes aux toits de paille sont devenues des maisons de béton entourées de grilles métalliques, les chemins de terre se sont transformés en routes asphaltées (avec trous), les minivans roulant à toute allure ont remplacé les chars à bœufs et les commerces ont poussé, comme ce supermarché Jean XXIII que personne chez nous n’oserait appeler comme ça.

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Une maison typique de San Francisco en 2023. Eh non, elle n’est pas bleue !
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Les maisons sont bien fleuries. Certes le climat aide un peu, mais ne fait pas tout

Mais l’église datant de 1630 est toujours là, juste devenue monument historique national entre temps. Aussi simple à l’extérieur avec ses murs en pierre et son clocher rectangulaire que riche à l’intérieur. Elle recèle de multiples sculptures baroques qui ont la double particularité d’avoir été non pas importées d’Espagne comme cela se faisait habituellement à l’époque, mais au contraire réalisées par des artistes locaux, et d’intégrer une influence indigène dans les sujets, comme ces chérubins dont les têtes représentent celles des artistes eux-mêmes. Malgré la panne d’éclairage le jour de notre passage, nous avons pu admirer ces superbes retables en bois peints, formés chacun de 120 à 480 pièces assemblées.

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L’église San Francisco de la Montaña, sobre à l’extérieur,
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San Francisco de la Montaña (son nom complet) est aussi connue pour ses bains en extérieur, comme le Balneario El Salto. Malgré une enseigne aguichante, le centre d’accueil est tout décrépit, et la zone de baignade se résume à une mare boueuse dans laquelle se déversent quelques petites cascades. Quelques gamins s’y ébattent pendant que leur mère y lave le chien. Nous ne tenterons pas l’expérience…   


Ocu-passions

Claudie notre traceuse d’itinéraire a été attirée par cette petite ville de 7000 habitants pour son artisanat. On y fabrique en effet des costumes traditionnels et des chapeaux proches du vrai panama équatorien, tout en maintenant de nombreuses pratiques folkloriques, notamment lors de la semaine du Manito Ocueño juste après le 15 août. Malheureusement, les boutiques d’artisanat traditionnel sont toutes fermées et nous ne verrons rien de tout ça. Une bonne façon d’en avoir une idée est de consulter la page Instagram de l’association @conoce_ocu.

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Festival de la Manito d’Ocu (2ème quinzaine d’août) exhibant chapeaux et costumes traditionnels
Photos extraites du site panamaamerica.com et de la page instagram @conoce_ocu
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Malheureusement rien de tel le jour de notre passage : que des marchands d’alimentation et de vêtements ordinaires

De mon côté, j’ai été inévitablement attiré par les turlupinades réalisables à partir du nom de la ville. En cherchant peu, j’ai trouvé une enseigne de supermarché, un site internet et une affiche électorale pour illustrer mon propos que vous retrouverez sur les légendes. Quant au nom du festival ci-dessus, sachant que « manito » se traduit par « petite main » et qu' »ocueño » est le gentilé d' »Ocu », je vous laisse la responsabilité de la traduction.

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La dernière, je vous la laisse. Manito ça veut dire « petite main ». A vous de traduire…
Copie d’écran du site educapanama.edu.pa

Les plus pointilleux d’entre vous souligneront volontiers que le u se prononce ou en Espagnol et que mes jeux de mots laids ne valent rien. Alors pour ceux-là, je leur ai déniché un autre document. En Espagnol puisqu’ils savent tout. Lisez donc la légende.

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Indubitablement, ce sont les accords d’Ocu ! (bien prononcer le « ou » final)

La péninsule d’Azuela

Peu visitée par les touristes en dehors du littoral, elle présente tout de même quelques attraits qui méritent le déplacement.

1. Wilfredo Pimentel Campos

C’est juste le maire d’Ocu. C’est pour voir si vous suivez et parce que Ocu fait partie de la péninsule en question.

Notez bien que la municipalité est tout à fait irréprochable financièrement et que le maire d’Ocu n’a rien à voir avec les Panama Papers…

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2. Pesé

C’est là où nous avons passé la nuit, sur un terre plein au-dessus de la route principale trouvé à la tombée de la nuit après avoir fui un autre spot qui paraissait tranquille mais qui a peu à peu été envahi de gens venus faire la fête. Nous avons eu tort – mais c’était la nuit – de ne pas être allés nous présenter aux voisins, qui du coup se sont plaints qu’un véhicule bizarre s’était garé là. Nous avons eu droit à un contrôle de police à 22h, très courtois malgré tout. Nous pensions finir la nuit tranquille mais à 6h du matin, des camions citernes se sont succédé juste au-dessous de nous pour remplir leur engin avec une bonne grosse pompe bien sonore. C’est aussi ça la vie nomade… Pesé c’est enfin le site d’une célèbre distillerie de canne à sucre, qu’on ne transforme pas en rhum ici mais en « seco ». Nous sommes allés tenter notre chance mais les visites n’ont pas repris depuis la pandémie.

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Ci-dessus : Roberto sur son terre-plein. Nuit tranquille entre 22h (passage de la police) et 6h (début du pompage)
Ci-dessous : champs de canne à sucre au bord de la route et bouteilles du produit fini (seco)


3. Los Santos

Comme nous l’apprend le petit musée de la municipalité, cette ville de nature rebelle a été la première à autoproclamer son indépendance de la couronne espagnole le 10 novembre 1821, entraînant par contagion l’ensemble du pays en moins de 3 semaines (le coronavirus a fait moins bien) puisque le 28 du même mois tout était signé. Une copie du document est fièrement affichée dans ce musée aux côtés d’une cuisine fin XIXè reconstituée et dans un joli jardin avec vue sur l’église elle-même pleine de charme.

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4. Parita

Cette ville possède la seule église du pays dont le clocher est au-dessus de la porte et non pas dans un angle pour assurer sa stabilité. Impossible de voir l’intérieur, c’était fermé et en plus la pluie commençait à tomber fort.

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5. Nata

Encore une église mais pas n’importe laquelle : construite en 1522, elle serait la plus ancienne des Amériques côté Pacifique. Bâtie dans la douleur par des esclaves amérindiens qui ont intégré, peut-être pour se consoler, plein de symboles de leur propre religion dans les sculptures catholiques : nombreux motifs floraux et fruitiers, présence de serpents à plumes, etc. Quelques fresques murales dans le centre-ville aussi, mais la pluie battante nous a poussé, là aussi, à repartir assez vite.

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Façade ensoleillée à notre arrivée mais le ciel ne présageait rien de bon !
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Intérieur tout en bois, qui parait assez frêle comme ça mais a pourtant bien résisté au temps
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Un rien de street art aussi
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Sortis de la péninsule d’Azuela, nous remontons vers Panama City. Mais pas question de s’immerger de suite dans la fournaise de la capitale, nous prenons le chemin des écoliers et allons vers El Valle, un village entouré de montagnes situé à 600 m d’altitude. Mais ça c’est pour le prochain article !

Panama Ouest
Notre parcours un peu erratique dans l’Ouest du Panama. En version zoomable ici

104. Costa Rica quatrième décade

Voici la dernière série de notre périple au Costa Rica. Des zones peu visitées du centre-est aux plages touristiques de la côte Caraïbe. Comme pour les épisodes précédents, c’est la nature qui revient en leitmotiv. Pas de problème, nous sommes loin de la saturation !

Orosi ou le tourisme discret

Il faut à la fois sortir de la route panaméricaine et s’engager dans une route secondaire en cul-de-sac pour parvenir à Orosi et sa vallée entourée de montagnes embrumées. Du coup les touristes s’y font rares. On trouve pourtant dans cette petite ville paisible de 10 000 habitants la plus ancienne église du pays, dénommée San José d’Orosi, construite en 1743 et ayant résisté à de nombreux tremblements de terre grâce à sa structure en bois et en adobe. Il en ressort un certain cachet, autant pour l’extérieur que pour l’intérieur, comme en témoignent les photos. La ville serait réputée pour ses plantations de café mais nous n’en avons curieusement vu aucune. Elle possède aussi plusieurs sources thermales, toutes privées. Nous sommes allés jeter un œil au Balneario de Aguas Termales, mais l’aménagement en piscines ordinaires ne nous a pas donné envie de nous y baigner. Les possibilités de stationnement sont réduites dans la vallée. Nous tentons le diable en nous garant pour la nuit en plein centre-ville, juste entre le stade de foot et l’église. Un samedi soir… Pas gagné d’avance !

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Mural en centre-ville sur les productions locales principales : café et bananes
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La vallée d’Orosi, vue du mirador, un parc gratuit aménagé pour le pique-nique et la détente
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L’attraction d’Orosi : son église, la plus ancienne du pays
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Intérieur en bois, sol en terre cuite, la classe ! Le lieu est très prisé pour les mariages
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Orosi est aussi connue pour ses sources thermales. Mais en piscine classique avec musique, non merci !

Un jardin botanique universitaire

Le Jardin Botanique Lankester, près de Paraiso, est en effet un centre de recherches de l’Université du Costa Rica, ayant pour mission l’étude des orchidées et des plantes épiphytes dans un but de conservation de la biodiversité de la planète. Il publie d’ailleurs une revue de référence dans le domaine, appelée Lankesteriana (site en lien) et anime le réseau mondial d’informations sur les orchidées Epidendra (site en lien). Si les plantes épiphytes ont la part belle dans le jardin, elles n’occupent qu’une petite partie de ses 21 hectares. Nous allons nous émerveiller tour à tour devant les broméliacées, les zingibérales (héliconias, oiseaux de paradis, bananiers, arbres du voyageur et gingembre), les fougères arborescentes, les palmiers, les cactus, tous bien mis en valeurs et parfaitement entretenus. Le jardin japonais est loin d’être le plus beau qu’on ait vu, mais le jardinier du crû qui l’a créé est peut-être reparti au pays du soleil levant, distant d’à peine 13 300 km. On lui pardonnera.

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L’entrée du jardin botanique, déjà gage de qualité
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C’est aussi le paradis des broméliacées, plantes caractérisées par leur structure en rosettes
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Des forêts de bambous encadrent le jardin japonais, un peu moins bien réussi que le reste
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Bien entendu, on trouve des fleurs partout

La cité abandonnée

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De l’autre côté de la vallée, la ville d’Ujarras autrefois florissante n’est plus qu’un hameau. Elle a en effet été abandonnée pour cause d’inondations dévastatrices à répétition, déplacée dans un secteur plus sûr et renommée Paraiso. La vieille église est maintenue debout tant bien que mal et un petit parc a été aménagé autour pour qu’on lui rende encore visite. Si la nature est belle au Costa Rica, il y a parfois un prix à payer.

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La maison du rêveur

Au détour d’un virage près de la petite ville de Cachi apparait soudain une petite maison de bois paraissant délabrée. Mais en s’approchant de près, on remarque vite que ce n’est pas une maison ordinaire. Ses murs et ses fenêtres sont en bambou ou en bois de caféier partiellement ébranché. La façade et le côté exposé à la route sont ornés de multiples sculptures, représentant la vie rurale et des éléments religieux typiques à la culture du café. On y trouve même une représentation de la Cène de Léonard de VInci. Tout cela est l’œuvre du célèbre sculpteur costaricien Macedonio Quesada (1932-1994), relayé un temps par ses fils. Bien que Google annonce une ouverture quotidienne de 9h à 17h, les locaux sont manifestement fermés de longue date, l’atelier et l’exposition ne se visitent plus. Dommage, nous aurions bien rêvé un peu…

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La Maison du Rêveur, à peine visible dans un virage
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Une route spectaculaire

Nous poursuivons notre exploration des régions montagneuses du pays, profitant de paysages verdoyants, entre forêts imposantes, plantations de caféiers et cultures en espalier qui épousent les reliefs irréguliers et permettent d’exploiter les sols très caillouteux. Nous traversons de petits villages aux maisons quelconques mais plutôt bien entretenues et généreusement fleuries. Question entretien, la route par contre laisse à désirer, comme souvent sur les routes secondaires. On peut passer d’un instant à l’autre d’une belle route toute neuve à un chemin de terre très orniéré, de deux larges voies à une étroite voie unique, notamment au passage des ponts. On trouve parfois de véritables marches, créées par l’effondrement du sous-sol instable ou encore des zones ondulées pour les mêmes raisons, prévenues ou pas par des panneaux explicites. Conduire ici demande beaucoup de vigilance, et nécessite d’accepter qu’à tout moment « ça ne passera pas » et qu’il faudra faire demi-tour. En contrepartie, le paysage est à la hauteur et la circulation (heureusement !) réduite.

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Des routes plutôt jolies, entre plantations de café et maisons fleuries
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Cultures en espalier : saurez-vous reconnaître ce qui pousse ici ? (réponse au bas du chapitre)

Allez, on vous emmène faire un peu de route avec nous. Imaginez-vous au volant de Roberto…

Un passage de pont un peu étroit… Il restait encore 3 ou 4 cm de chaque côté des rétroviseurs !

Là, c’est une route « normale » qui finit, comme on dit, en eau de boudin…

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Bon, nous sommes passés ! Roberto prend un repos mérité au milieu des champs, entre un hangar à vaches et un cimetière. Ça a été calme des deux côtés. Notez le carrelage sur les tombes, c’est courant ici.
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P.S. Réponse à la question plus haut : des christophines


Exit les Mayas, vive les Huetares !

Voilà plusieurs semaines que nous n’entendons plus parler des Mayas, et c’est normal car ils ne sont jamais parvenus jusqu’au Costa Rica. Ici, les civilisations précolombiennes s’appellent les Chorotegas ou les Huetares, et le moins que l’on puisse dire est qu’ils n’étaient pas de grands bâtisseurs. Les seuls restes visibles sont à Guayabo, et nous sommes allés les voir. Point de pyramides ici, mais de grandes structures circulaires qui servaient de base aux maisons, un beau réseau d’aqueducs et des chaussées pavées. On apprend peu de choses sur place à propos des tribus qui vivaient là de -1000 à 1400 et l’on reste un peu sur sa faim. Heureusement, la forêt tropicale qui englobe le site, luxuriante, sonore à souhait et parcourue de toucans et de morphos bleus rattrape le coup.

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Roberto garé juste devant le site archéologique
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De véritables chaussées pavées entrent et sortent du village. Elles reliaient sans doute les villages voisins.
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Lacrymal circus

C’est exactement à cette chanson de Renan Luce que m’a fait penser cette visite du Sanctuaire des paresseux près de Cahuita, sur la côte caraïbe. Nous en avions un souvenir émouvant lors de notre première visite en 2009, découvrant ces paisibles mammifères pour la première fois avec nos enfants dans un lieu créé 37 ans auparavant par un couple de passionnés, avec pour but louable de soigner tous les animaux qu’on leur rapportait et d’en remettre un maximum dans la nature, au pire de les garder dans l’espace naturel protégé autour de leur établissement. La visite comportait alors un tour en canoë dans ce sanctuaire avec un guide naturaliste aussi prompt à donner des explications que doué à dénicher les paresseux perchés dans les arbres. S’en suivait un inoubliable passage à la pouponnière, où nous avions pu observer des bébés prendre leur repas, les plus jeunes au biberon et les autres en croquant des bâtonnets de légumes cuits. La visite se terminait par la rencontre avec Buttercup, la mascotte du lieu, l’un des premiers bébés sauvés par le couple fondateur, trônant dans son siège suspendu en osier quand elle n’était pas dans les bras de la patronne.

Mais ça, c’était le passé.

Ce matin de mai 2023, nous étions les seuls à visiter, ce qui pour un établissement supposé exceptionnel était déjà révélateur. Un guide à la voix monocorde nous a emmené voir une dizaine de paresseux enfermés dans des cages jusqu’à la fin de leurs jours, nous expliquant qu’étant donné leurs infirmités, ils ne survivraient pas longtemps dans la nature, même dans l’espace protégé. La visite s’est poursuivie par une autre salle avec d’autres paresseux atteints d’autres infirmités … et puis c’est tout ! Pas de bébé à voir, les rares présents étant apparemment tous en incubateur. Pas de tour en canoë (à l’antifouling peut-être ?). Pas de rencontre avec Buttercup, la mascotte ayant rendu l’âme (cette fois nous acceptons l’excuse, compatible avec la trentaine d’années que vivent en moyenne les paresseux)

Nous avons juste été vivement encouragés à laisser un don à l’association qui n’aurait pas d’autre moyen de financement. Mais franchement, nous avons manqué de motivation, tellement déçus de ne pas revivre notre première expérience. En résumé, le sanctuaire des paresseux est « has been », n’y allez pas !

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Nous avons maintenant rejoint la côte Caraïbe. A nous les plages …et les 38°C à l’ombre ! Mais quand même de jolis levers de soleil
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Après ce premier spot nocturne balnéaire, notre premier arrêt est pour le Sanctuaire des Paresseux

Épilogue : Heureuse consolation de cette visite décevante : le soir même l’un de ces animaux passait sur la ligne électrique juste au-dessus de nos têtes pendant que nous étions à l’apéro avec des amis.


Fauna Rica

En écho à l’article intitulé Flora Rica de la publication précédente, voici, en vidéo s’il vous plaît, quelques exemples de la faune riche rencontrée au fil des jours.

ci-dessus : coati et agouti ; ci-dessous : bourdon et colibri

ci-dessus : autoroute de fourmis coupe-feuilles ; ci-dessous : bernard-l’ermite et grenouille dendrobate

sauterelle pourpre géante à ailes rouges (ne se voient que quand elle vole, comme sur la vidéo de droite : c’est un moyen d’effrayer les prédateurs)


Cahuita, la nature version Caraïbes

Comme beaucoup des villages côtiers le long de la Mer des Caraïbes, à l’Est du Costa Rica donc, Cahuita est peuplée en grande partie d’afro-caribéens venus de Jamaïque leur culture sous le bras. Mais de plus en plus d’étrangers s’installent ici, souvent après avoir découvert la région en tant que touristes, en raison de l’ambiance aussi tranquille en journée qu’animée le soir et bien sûr en raison des plages. Les plus belles sont dans le parc national, ce qui permet heureusement de les préserver et d’en limiter la fréquentation. Pour les découvrir, il suffit de suivre l’un des sentiers longeant le littoral. En tendant bien l’oreille et en restant attentif, on découvre encore ici, outre ces paysages de cartes postales avec la triade sable blanc/mer turquoise/cocotier qui penche, une faune et une flore abondante. Une mention spéciale pour les singes capucins peu farouches, qui viennent volontiers extraire les pique-niques des touristes de leur sac à dos à la moindre inattention, et aux bernard-l’ermite qui jouent à 1-2-3-soleil sur le sentier, s’immobilisant à l’approche de nos pas.

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La Playa Blanca du Parc National de Cahuita
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C’est par ces beaux paysages de cartes postales que se termine notre périple au Costa Rica. Nous retiendrons de ce pays la richesse exceptionnelle de la nature mais – est-ce à cause d’elle ? – une indifférence générale des habitants, ce qui nous change profondément des pays précédents, Guatemala en tête. Aussi curieux que cela puisse paraître, nous sommes pressés de passer au Panama pour aller rejoindre la fraîcheur des montagnes centrales. Les côtes et les plaines, en cette fin de saison sèche, sont vraiment torrides et la chaleur nocturne (toujours pas de clim dans Roberto… ça n’est pas impossible, mais il faudrait être branché tout le temps) ne permet pas au sommeil d’être réparateur. Donc on se revoit très bientôt au Panama ?

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Parcours relatif à cet article, en version zoomable ici