En contraste avec les pays précédents, le Costa Rica s’affirme d’emblée comme orienté vers la nature. Le tourisme vert est d’ailleurs sa première source de revenus. De fait, après une dizaine de jours, 90% de nos activités auront eu pour thème la nature, une heureuse exception dans notre parcours.
Frontière chaotique
L’entrée au Nicaragua avait déjà été un peu chaotique, mais la sortie encore plus, confirmant la bureaucratie intense dans ce pays. Sans vouloir entrer dans les détails, la procédure pour quitter le pays aura nécessité 2h40 tandis que l’entrée au Costa Rica ne prendra que 20 mn. Bon, chaque pays fait comme il veut, et la procédure parait plus simple pour les véhicules particuliers, mais nous plaignons les chauffeurs de poids-lourds qui, d’après les longues files de plus d’un kilomètre que nous avons pu observer de part et d’autre de la frontière ont dû perdre au moins une demi-journée à la traverser.
Sur la photo à droite, on peut voir une file de chauffeurs de poids-lourds qui attendaient le passage de leur véhicule au scanner. Assez résignés, ils m’ont gentiment laissé passer devant eux (c’est le cas aussi pour le passage en douane, nous sommes autorisés à doubler les camions). Ils trouvaient d’ailleurs bizarre qu’avec mon véhicule particulier j’aie dû y passer aussi. Apparemment, un petit billet au policier aurait permis d’éviter cette tracasserie, mais nous ne nous sommes pas pliés à ça !
Premières impressions
Quelquefois, l’entrée dans un nouveau pays se traduit par un choc culturel, comme lorsque l’on passe des USA au Mexique par exemple, mais entre le Nicaragua et le Costa Rica, formalités administratives exclues, c’est le sentiment de continuité qui prédomine. Même végétation abondante, mêmes routes en relativement bon état, même circulation tranquille. Il a fallu attendre de parcourir à pied la première ville, Liberia, pour voir quelques différences. C’est bizarre à dire, mais ce qui frappe le plus est de voir des vitrines devant les magasins, alors que depuis plusieurs mois nous côtoyions des boutiques donnant directement sur la rue ou en en étant séparées d’une simple grille. La plus grande richesse se confirme par la présence de bus électriques, même si les vieux bus scolaires américains retapés sont encore légion, et nous sommes ravis aussi de voir notre carte bancaire refonctionner après un black out au Nicaragua. A l’inverse, les couleurs du pays précédent ont presque disparu, l’église (moderne) est hideuse et le parc central est loin d’être verdoyant. Nous espérons que ce ne seront que des exceptions, la réputation du pays est au-dessus de tout cela.
Sous l’arbre à oreilles d’éléphant
Une première pause dans un petit camping à Liberia, sous les arbres et bien aérés, nous a permis de retrouver une semi-fraîcheur qui nous manquait depuis une quinzaine de jours. Le lendemain, nous avons grimpé à 650m d’altitude vers un premier volcan, pour nous installer sur le parking d’un « lodge » (hôtel isolé en pleine nature) acceptant les voyageurs nomades. De là, nous avons suivi un petit chemin de randonnée dans la forêt tropicale sèche, menant à une source chaude soufrée. Un endroit étonnant où un petit cours d’eau transparent devient brusquement blanc laiteux à la rencontre d’une source chaude émanant du volcan voisin. La balade était bien agréable malgré les 8 km aller-retour, dans l’ombre de la forêt mais accompagnés d’une multitude d’oiseaux, toujours difficiles à photographier. En raison de leur fugacité d’une part et de la modicité de notre équipement (smartphones) d’autre part. Les clichés seront rares mais les souvenirs resteront marqués dans notre tête. Nous avons aussi ramassé quelques fruits dont celui (en étoile) du pommier baumier). Il y a de la post-production à prévoir ! En tout cas, la nuit à l’ombre de notre « guanacaste » (l’arbre national du Costa Rica, appelé aussi arbre à oreilles d’éléphant en raison de la forme de ses fruits) et avec une température descendant enfin sous les 25°C (21° même au plus frais) a été des plus réparatrices.
2 ans !
Le 19 avril 2021, nous découvrions notre Roberto pour la première fois chez notre aménageur. Les premiers kilomètres parcourus avec furent un mélange d’appréhension et d’euphorie. L’appréhension de la conduite d’un véhicule de ce format et peut-être celle de réaliser qu’il allait devenir notre nouvelle maison pour plusieurs années. L’euphorie de cette liberté nouvelle et du grand voyage qui nous attendait.
Ce 19 avril 2023, nous avons fêté les 2 ans de Roberto, nos 2 ans de vie nomade, et si l’on ne peut plus parler d’appréhension ni d’euphorie, nous restons dans une dynamique très positive. Ces deux années se sont écoulées à un rythme intense, parfois trop même au point que nous ressentons régulièrement le besoin de ralentir, de nous poser quelques jours sur un point de notre parcours pour souffler, pour digérer nos découvertes quotidiennes, pour nous reposer physiquement aussi des kilomètres de marche et même des kilomètres de route. Nous restons heureux de vivre notre rêve, notre seul manque étant l’éloignement de la famille et des amis, que nous essaierons de compenser avec des retours peut-être un peu plus fréquents. Le retour technique de Roberto en Europe va sans doute arranger un peu les choses, mais ne changera absolument rien à notre désir de poursuivre notre vie nomade.
Le sentier des casseroles
Nous sommes dans le parc national du volcan Rincon de la Vieja, le premier que nous explorons au Costa Rica. L’organisation est un peu à l’américaine, avec « rangers » à l’entrée, plan des randonnées, parcours parfaitement délimités et cimentés avec points d’observation clairement indiqués, boutique de souvenirs à la sortie. Nous choisissons une boucle de 3 km traversant en grande partie une superbe forêt tropicale avec des arbres magnifiques et quelques animaux, dont des iguanes, quelques oiseaux, des tapirs, des singes araignées et d’autres à tête blanche. L’attraction tourne autour du volcanisme secondaire et nous observerons beaucoup de ces « casseroles » géantes et fumantes emplies de boue ou d’eau en ébullition, dans lesquelles on cuirait bien ses spaghettis ou ses œufs, et qui justifient parfaitement en tout cas l’appellation du sentier (sendero de las pailas). Nul doute que l’activité géothermique est intense ici, et l’on comprend très bien l’installation récente d’une usine pour l’exploiter sur le site. Vraiment un bel endroit, et une fréquentation très raisonnable.
Pura vida
riche en animaux sauvages…
et en phénomènes naturels
N’est-elle pas belle notre pura vida ?
Le Rio Celeste
La tentante traduction française, « rivière céleste », pourrait faire penser à une combinaison exceptionnelle du mah-jong ou encore au plat n° 116 du restaurant chinois d’à côté, mais « celeste » en Espagnol signifie bleu ciel. Et le qualificatif n’est en rien usurpé. C’est en traversant un pont que nous découvrons cette rivière d’un bleu étonnant, tranchant sur la végétation environnante. Forcément la couleur attire, et le lieu est quelque peu envahi de touristes et locaux qui viennent s’y rafraîchir, discuter ou même méditer. La concentration humaine et la localisation sous le pont ne sont pas très glamour, nous nous contenterons de deux ou trois photos. Car nous avons prévu de visiter le lendemain le parc national traversé par cette rivière, l’hébergeant sous ses meilleurs aspects. Et nous ne sommes pas déçus ! Un sentier de 6 km aller-retour mène jusqu’à l’origine de la couleur bleue, apparaissant étonnamment à la rencontre de 2 rivières transparentes, l’acidité de l’une se conjuguant aux particules en suspension de l’autre pour les faire gonfler et leur faire réfléchir ainsi la lumière bleue du spectre solaire. Mais vous préférerez peut-être la version plus poétique qui dit que la rivière aurait pris cette couleur lorsque Dieu y trempa ses pinceaux après avoir peint le ciel… Tout au long du sentier traversant une forêt exubérante, nous admirons les méandres bleutés, les petits lacs d’un bleu extraordinaire, des zones en ébullition et une magnifique cascade. Nous croisons aussi un petit lézard dont la queue est aussi bleue que la rivière. Je l’aurais volontiers baptisé « lézard céleste » mais pas sûr que les herpétologues soient d’accord !
Aux pieds du volcan Arenal
Ce volcan à l’imposante silhouette cônique est né il y a 7000 ans. Il est considéré comme l’un des plus actifs du Costa Rica. Sa plus grosse manifestation remonte à 1968, comme en France d’ailleurs, alors que de gros pavés incandescents ont été projetés à plus de 5 km, d’où l’expression costaricienne bien connue « sous les pavés la lave » qui a été reprise, un peu déformée, dans l’hexagone à la même époque. Lol. Entre 1968 et 2010, les explosions et coulées pyroclastiques ont été très fréquentes. Depuis, le volcan semble souffler un peu (des fumerolles surtout) mais ne demande qu’à se réveiller, ce qui ne semble inquiéter en rien les villages installés à ses pieds, profitant tous de la manne touristique attirée par la riche faune et flore locale et par les nombreuses sources chaudes.
Nous avons trouvé à nous loger pour la nuit dans un camping en cours d’aménagement, mais déjà riche en faune et flore. Le patron nous a montré quelques paresseux accrochés assez haut dans les branches au-dessus de nous et une petite grenouille rouge vif qu’il a tranquillement posée sur son bras tout en nous expliquant qu’elle était vénéneuse. Il suffirait de ne pas la manger et de ne pas mettre les mains à la bouche ou se frotter les yeux pour ne pas avoir d’ennuis… Nous avons aussi rencontré un Français qui fait le chemin du Mexique à la Colombie …en vélo. De quoi donner matière à réflexion à tous ceux qui pensent que nous sommes des aventuriers !
Le lendemain matin, c’était étape sources chaudes. Mais plutôt que d’aller nous tremper comme la plupart de nos congénères dans les bassins artificiels d’un grand hôtel, nous avons choisi la version naturelle en allant tester la rivière Tabacón, plus connue des locaux que des touristes, notamment pour son caractère gratuit. Au premier abord, l’aspect est celui d’un torrent de montagne, assez vif. Mais la grosse différence c’est que l’eau avoisine les 30°C et que se baigner dans ce courant assez puissant est à la fois tonifiant (autant qu’un torrent alpin à 10°C…) et relaxant (comme tout bain chaud). Le réchauffement brusque de la rivière Tabacón avait été l’un des premiers signes de l’éruption de 1968.
Alors nous avons trouvé cette rivière d’accès libre, juste à côté d’un grand hôtel, tonifiante de part son courant et relaxante grâce à sa chaleur. Et totalement naturelle bien sûr !
L’après-midi a été euh …canopique. C’est-à-dire consacrée à la canopée (j’avoue découvrir l’adjectif). Le Costa Rica recueille 6% de la biodiversité mondiale, soit davantage que les USA et énorme par rapport à sa superficie (0,03% de la planère). Les arbres ne sont pas en reste avec 295 espèces différentes au km² contre 35 en Colombie et 6 au Brésil. Alors se promener dans une forêt, c’est déjà écarquiller les yeux devant tant d’espèces végétales que nous n’avons pas l’habitude de voir. Et se tordre le cou pour regarder vers les cimes des arbres souvent très hauts, compétition vers la lumière oblige. Mais il est possible d’agrémenter encore tout cela en regardant la forêt du dessus, à l’aide de passerelles traversant ou surplombant la canopée. C’est très en vogue dans le pays et, même si nous avions déjà vécu ce genre d’expérience, nous avons souhaité la renouveler. Dans ce parc près du superbe volcan Arenal, un parcours de 3 km compte 12 ponts et 6 passerelles suspendues pour observer la nature sous un angle différent. Si nous avons apprécié ces différences de vues et découvert de nouvelles fleurs dont ces héliconies poilus, nous avons bizarrement été déçus par cette attraction, par le manque de faune et flore visible notamment, trouvant que les installations ne justifiaient pas le droit d’entrée assez élevé. Peut-être avons-nous été trop gâtés dans les jours qui ont précédé ?
Puis nous avons repris la route sur les rives du Lac Arenal, de jolis lacets asphaltés et en bon état qui nous ont amenés à un parc accessible gratuitement au public et à tout véhicule en fait. Nous y avons passé une nuit très tranquille, sans personne autour, avec un joli spectacle au réveil.
La cordillère de Tilarán
Nous poursuivons le tour du lac Arenal dans le sens antihoraire, en direction de cette chaîne de montagne. La route change brusquement de qualité, des trous apparaissent dans le bitume avant que celui-ci ne finisse par disparaître. Sur plusieurs dizaines de kilomètres. Il parait que les habitants s’en plaignent depuis longtemps sans jamais être entendus. Manifestement la « pura vida » n’est pas universelle au Costa Rica… Pas de surprise, nous sommes toujours dans la nature, à une altitude de 1300 m qui fait du bien, au village de Santa Elena plus précisément. C’est très touristique, malgré la difficulté d’accès, et nombreux sont les restaurants, hôtels, magasins de souvenirs et tours-organisateurs. Nous en apprécions d’autant notre liberté de mouvement et notre autonomie en logement et restauration : pas besoin de subir tout ça, nous savons ce que nous voulons et nous nous rendons directement dans les endroits concernés.
Notre premier arrêt est pour une ferme de papillons, élevés dans des serres reproduisant cinq microclimats du pays. Quelques insectes sont aussi collectionnés. Nous avons droit à une visite guidée VIP par une jeune naturaliste. Nous observons bien sûr de jolis spécimens, dont les célèbres morphos bleus, un peu plus faciles à approcher que ceux, fugaces, que nous avons croisé lors de nos balades.
L’autre attraction du jour est le « ranario », qui pourrait se traduire par « grenouillerie » en Français. Un rassemblement de terrariums où sont élevées et protégées plus de 25 espèces de batraciens locaux, souvent des grenouilles minuscules ne dépassant pas les 2 cm et aux couleurs vives indiquant aux autres espèces leur dangerosité. Le plus est la possibilité avec le même billet de réaliser une double visite permettant dans l’après-midi d’apprécier les espèces diurnes et à la tombée de la nuit celles nocturnes. Nous avons adoré ces mignonnes petites grenouilles multicolores, pas si faciles à photographier toutefois en raison de leur taille.
A trop chercher les grenouilles dans les vivariums, on en oublie parfois de regarder autour. Et là, juste devant nous, la lampe-torche tombe sur cette chose. Bon, il paraît que les scorpions costariciens ne sont pas mortels, ça rassure !
Souvenirs souvenirs (1)
Nous sommes maintenant à Sarchi, une petite bourgade à l’ouest de la capitale San Jose. Spécialisée dans le travail du bois depuis le début du XXe siècle, elle a produit beaucoup de meubles mais aussi les charrettes à traction bovine nécessaires au transport du café à l’époque, typiquement décorées de motifs géométriques en couleurs vives semblables aux mandalas. L’arrivée du train et des camions aurait pu éteindre cette production, mais les artisans ont su se reconvertir et produisent peut-être maintenant davantage de charrettes qu’avant ainsi que beaucoup d’autres objets qui plaisent aux touristes. La ville est inscrite au patrimoine mondial de l’humanité pour avoir été le berceau de l’artisanat costaricien. En tout cas, si vous cherchez des souvenirs à rapporter de votre séjour, vous n’aurez que l’embarras du choix ici !
Souvenirs souvenirs (2)
La ville suivante, Zarcero, avec son église et ses arches de cyprès si typiques, éveille en nous le souvenir de notre premier voyage au Costa Rica il y a maintenant 14 ans, en compagnie de deux de nos enfants et en mode sac au dos. En fouillant un peu dans nos archives, j’ai retrouvé le blog que nous avions réalisé alors, rédigé à quatre plumes. Sachant qu’il serait tôt ou tard retiré des serveurs faute d’être mis à jour, j’en avais fait une copie sur Word, avec une mise en page sommaire mais qui a le mérite de toujours exister. Elle est disponible en lecture ou au téléchargement ci-dessous pour ceux que cela intéresserait.
Nous avons eu plaisir pour notre part à nous replonger dans ce récit et à examiner le parcours d’alors que nous avions un peu oublié. Démontrant au passage l’intérêt au moins personnel à long terme de la rédaction d’un blog de voyage.
Mais voilà que la route nous appelle. Il nous reste encore beaucoup à découvrir au pays de la Pura Vida. Alors à très bientôt pour la suite !