76. Autour de Yellowstone

C’est un long parcours qui nous emmènera de Missoula à Laramie en passant par l’exceptionnel parc Yellowstone, les états du Montana, du Wyoming et du Dakota du Sud jusqu’au célèbre Mont Rushmore. Une dizaine de jours intenses et inoubliables.

Missoula et son carrousel solidaire

Cette attraction est particulière par son histoire : un jour un menuisier du pays est allé voir le maire et lui a dit « I have a dream… » Il a proposé en fait de construire un carrousel pour la ville, à la seule condition qu’on lui promette que le manège ne sera jamais vendu ou déplacé. La ville a accepté, et désormais tout le monde se plaint du grincement infernal du manège, de la musique lancinante du limonaire, des enfants qui tombent ou qui se plaignent de violents maux de tête peu après avoir chevauché l’engin… Non non je blague, tout le monde est ravi, les enfants vont tous bien, le carrousel est magnifique et décoré dans les moindres détails y compris le bâtiment qui l’abrite. Ce qui est surtout marquant, c’est que la générosité de l’homme qui avait un rêve s’est étendue comme par contagion à une grande partie de la ville. Plusieurs milliers de personnes ont ainsi donné un coup de main pour que le projet se réalise, aussi bien pour sculpter et peindre les chevaux, carrosses et autres figurines que pour restaurer et remonter pièce par pièce le mécanisme que le menuisier avait récupéré, ou encore lever les fonds nécessaires aux travaux. Près de 100 000 heures de travaux bénévoles ont été comptabilisées. Le carrousel de Missoula est en service depuis 1995. 4000 volontaires se déclarèrent encore présents en 2001 lorsque le projet se présenta de construire un jardin d’enfants en forme de dragon juste à côté. Avec autant de bras, il ne fallut que 9 jours pour le montage. Un bel exemple de solidarité.


Nuit en forêt près de Garnet

C’est véritablement notre emplacement nocturne préféré car nous y avons en général une paix royale. Les forêts sont loin d’être toutes accessibles, souvent privées ou alors non équipées de voies de circulation. Mais aux USA, les forêts nationales relèvent du domaine public. Il suffit de les repérer sur la carte quand les emplacements de choix n’ont pas déjà été repérés par d’autres voyageurs sur les applications comme iOverlander. On nous demande parfois si nous ne craignons pas pour notre sécurité d’être autant isolés. Mais nous avons plutôt la sensation inverse. Tant mieux, il en faut pour tout le monde !


Garnet, le village fantôme

Vers 1890, des prospecteurs ont découvert de l’or dans la région, attirant de nombreux chercheurs, et, chose inhabituelle, leurs familles. La ville de Garnet a poussé comme un champignon, hébergeant jusqu’à 1000 personnes vers 1895, et disposant alors de 4 magasins généraux, 7 hôtels, 13 saloons, 3 écuries, 2 barbiers, 1 médecin, 1 école, 1 boucher et 1 boutique de confiseries (des familles vous dis-je). Pourtant, rien de tout cela n’a fait long feu. Les filons ont commencé à s’épuiser vers 1900, les exploitants ont commencé à louer à des gogos leurs mines en déclin, et les familles sont parties peu à peu. En 1905, il ne restait plus que 150 habitants. En 1912 un grand incendie en a encore chassé un grand nombre et le peu qu’il restait a été enrôlé dans la 1ère guerre mondiale. Même si la ville a connu quelques réveils provisoires par la suite, elle a fini par s’éteindre et est aujourd’hui abandonnée. Bien entendu, les autorités ont saisi le filon et tentent de maintenir en état les différents bâtiments pour la préservation de l’histoire, ce qui nous permet de les visiter aujourd’hui. Une poignée de baraques en bois dont une partie du mobilier est restée en place, suffisamment pour que l’on s’imprègne de l’ambiance de l’époque. Un petit sentier parcourt aussi la zone minière où l’on trouve du matériel abandonné et des puits de mine condamnés par sécurité mais dont rien que l’entrée en dit long sur les conditions de travail de l’époque.


Nuit au camping, près de Townsen

Après avoir traversé les jolis paysages du Montana, moyennes montagnes recouvertes d’une herbe jaune qu’on croirait sèche et parsemées de quelques sapins, ou champs ondulés de céréales à perte de vue, nous cherchons comme chaque soir un coin tranquille pour dormir. Nous avions repéré un camping gratuit près de la ville de Townsen, mais en faisant le tour de cet emplacement pourtant sympathique, nous découvrons que le seul occupant, une caravane sans son véhicule tracteur, est équipé d’un groupe électrogène en fonctionnement. Pas du tout envieux de supporter cela toute la soirée et encore moins la nuit, nous filons un peu plus loin. Comme il est déjà tard, nous nous rabattons sur un petit camping tout proche, dénué de tout personnel comme nous en avons déjà vu (on met le paiement dans une urne à l’entrée). Pas de groupe électrogène cette fois, mais un groupe de tondeuses à gazon entourant Roberto. Relativement silencieuses, ces vaches noires ne nous laisseront que quelques bouses avant de s’éloigner et nous permettre une nuit paisible.


Allez les bleus !

Sur une colline bordant l’autoroute qui mène à Three Forks dans le Montana, on peut apercevoir un troupeau de chevaux semblant brouter tranquillement l’herbe jaune du coin. Tout de même, quelque chose cloche : ces chevaux semblent d’une taille quelque peu inhabituelle et, si leur crinière vole au vent, eux-mêmes sont immobiles. Qui plus est, en se rapprochant un peu, on distingue une couleur bleutée. S’il est possible de s’arrêter sur un petit terrain vague bordant l’autoroute, rien ne permet d’approcher davantage le troupeau. Il faut sortir les jumelles pour apprécier les 39 sculptures en métal prenant des positions aussi diverses que réalistes, et s’apercevoir que la couleur bleutée est celle de taches peintes sur chaque « animal ». Renseignement pris, il s’agit de l’œuvre d’un artiste local à qui une entreprise de céréales a offert un sommet de colline qu’elle ne pouvait sans doute cultiver. Et il parait que les vrais chevaux bleus, ça existe. Pas comme les éléphants roses.


Il nous en a fait voir de toutes les couleurs

Je parle bien sûr de cette merveille qu’est le parc de Yellowstone. On entre ici dans la cour des grands question parc naturel, le plus ancien du monde d’ailleurs car il a été créé en 1872. Pour les passionnés de thermalisme que nous sommes, c’est un grand waouh toutes les 10 minutes. Nous sommes en effet dans l’immense cratère d’un volcan dont la dernière éruption date de 620 000 ans, gardant depuis une activité géothermique intense. On voit des fumeroles partout, des lacs d’eau ou de boue en ébullition, et bien sûr des geysers. Les 2/3 des geysers du monde sont ici ! Le tout est joliment dispersé, comme si cela ne suffisait pas, dans un décor montagneux époustouflant, grandiose et diversifié. Ce qui a marqué le plus notre première journée, ce sont les couleurs magnifiques des différentes sources que nous avons rencontrées, liées aux micro-organismes qui parviennent miraculeusement à vivre dans ces eaux très chaudes (le record est à 240°C !). Paradoxalement, plus la couleur est froide, plus la température de l’eau est élevée.

A noter que nous avons fait la rencontre d’une famille française ayant tout quitté il y a 4 mois pour partir vivre au moins un an leur rêve de parcourir l’Amérique du Nord. Bien qu’ayant beaucoup voyagé avec nos enfants, nous n’avons jamais dépassé les 2 mois et demi de voyage continu, aussi nous ne pouvons qu’être admiratifs. Leur aventure est très bien racontée sur leur compte Instagram @lilybaroud, n’hésitez pas à jeter un œil.


Yellowstone J2

Ce grand parc mérite au moins 3 jours de visite, davantage si l’on souhaite parcourir d’autres sentiers que ceux qui se présentent tout le long des routes principales pour aller voir les points d’intérêts classiques. Ce qui n’est déjà pas si mal : rien qu’en empruntant ces sentiers, pour la plupart des passerelles en bois pour éviter de s’enfoncer dans les boues très chaudes, nous avons parcouru aujourd’hui 11 kilomètres. Comme hier, nous sommes allés d’émerveillements en émerveillements. Difficile de se lasser devant ces panaches de vapeur qui parsèment l’horizon, ces bassins en ébullition entourés de couronnes multicolores, ces fontaines crachotantes issues de cônes aux formes improbables et cette odeur de soufre omniprésente. Nous avons pu voir ce jour deux des attractions majeures du parc : le fabuleux Grand Prismatic Spring, un lac d’eau thermale formant une sorte de grand œil bleu entouré d’un halo de dégradés oranges du plus bel effet, et le célèbre geyser Old Faithful, dont l’intérêt réside surtout dans la fréquence relativement rapprochée et régulière des éruptions. C’est en conséquence autour de lui que l’on a construit toutes les infrastructures du sud du parc, comme les hôtels, les restaurants, les boutiques de souvenirs et bien entendu le centre des visiteurs. Les horaires probables des éruptions y sont annoncés, mais qu’on ne s’y trompe pas, les fourchettes sont assez larges. Ainsi, pour l’Old Faithful qui jaillit en moyenne toutes les 90 mn, la prochaine éruption était annoncée entre 13h40 et 14h (le spectacle a démarré à 13h40, mieux valait ne pas être en retard), tandis que pour le suivant, le Riverside geyser, c’était entre 15h05 et 16h35 (demandant donc un peu plus de patience). Pour d’autres geysers, l’intervalle entre deux éruptions est annoncé comme pouvant varier entre quelques heures et …quelques années ! Nous avons joué la simplicité en nous contentant de voir l’Old Faithful expulser 20 000 litres d’eau bouillante à une trentaine de mètres de hauteur, pendant environ 2 minutes. Confiants dans les organisateurs, nous n’avions même pas pris de parapluie !

Dans la série des rencontres, nous avons fait connaissance avec 2 autres familles de voyageurs français, chacune avec 2 enfants, parties pour un an à la conquête de l’Amérique du Nord et de l’Amérique centrale et complètement conquises par l’expérience. Ceux qui rêveraient d’en faire autant pourront se délecter de leurs aventures sur leurs comptes Instagram @prenezlapause et @nous_5_en_amerique.


Le zoo-camping du parc

Le camping sauvage étant interdit dans tout le parc, nous avons passé la nuit dans l’un de ses « campgrounds ». Les installations sanitaires sont basiques, limitées à des wc et lavabos, mais sans douches. Les emplacements sont par contre agréables avec, comme la plupart du temps en Amérique du Nord, table de pique-nique et foyer de cuisson individuels. Partout des panneaux préviennent de la présence fréquente d’animaux sauvages, ours et bisons entre autres. Nous n’aurons pas eu l’honneur de leur visite, mais en quittant le camping le matin nous sommes tombés sur ce cerf qui broutait tranquillement dans les allées, entre deux caravanes.


Gris et pastel

Troisième et dernier jour à Yellowstone. Nous commençons notre visite le matin par un secteur de géothermie boueuse. Ici, les sources dégagent volontiers de l’hydrogène sulfureux que des bactéries vont transformer en acide sulfurique, capable de dissoudre les roches autour et formant donc de la boue. Dès l’approche de la zone, bien avant de voir ces chaudrons bouillonnants, on sent bien l’odeur caractéritique d’œuf pourri et on entend les échappées de vapeurs, les bruits d’ébullition, et les bulles qui éclatent à la surface. Des geysers de boue, heureusement pour nous non actifs actuellement, ont aspergé puis grillé toute la végétation alentour, créant une grande clairière gris-blanc au milieu de la forêt. Le dernier bassin de boue que nous verrons n’est plus gris mais jaune. C’est de l’acide sulfurique presque pur, avec un pH proche de 1. Il est 10 fois plus acide que le jus de citron par exemple. A ne surtout pas consommer, même avec modération !

Nous traversons ensuite des plaines à bisons (une bonne cinquantaine étaient présents) pour rejoindre le grand canyon de la rivière Yellowstone, l’un des fleurons du parc. Long de 30 km, large de 500 à 1200 m, profond de 300m, il est le résultat de 600 000 ans d’érosion par la rivière et les conditions climatiques. Les parois abruptes où pas grand-chose ne pousse ont pris de jolies couleurs pastel, jaune pâle, vieux rose ou ocre. De frêles colonnes et murs rocheux s’avancent ça et là, procurant un bel effet de relief. Au bord des falaises, que nous avons longées à pied, des arbres au bord du vide exposent leur racines nues tout en s’accochant désespérément avec les autres. Le spectacle est vraiment spendide.


Le rodéo de Cody

Nous quittons Yellowstone en fin d’après-midi, avec l’impression d’avoir vécu quelque chose d’exceptionnel. Heureusement, la jolie route qui sort du parc nous permet une transition en douceur, tout comme celle qui mène ensuite à Cody, bordée de hautes falaises rougeâtres. Cody s’ennorgueillit d’être la capitale mondiale du rodéo, et comme nous n’avons jamais vu ce genre de manifestation, nous nous garons près de l’arène et attendons l’ouverture. Jusqu’à fin août, un show a lieu chaque soir à 20 heures. Nous arrivons en avance pour avoir les meilleures places, juste devant les stalles de départ, d’où nous pouvons assister aux préparatifs. Les cow-boys en tenue complète se bandent le bras qui tiendra le harnais (pour les chevaux) ou la corde (pour les taureaux) et l’entourent d’une attelle. Ils portent des gilets de maintien et des petits coussins protégeant la nuque. Manifestement, ça va être éprouvant pour les articulations. Pour l’épreuve sur les taureaux, ils troqueront en outre leur chapeau pour un casque intégral. Pendant ce temps le public s’installe. Les porteurs de chapeaux, de blousons et bottes en cuir sont nombreux. La musique country diffusée par les haut-parleurs donne l’ambiance. Vers 20h un animateur prend la parole, qu’il partagera avec un clown placé, lui, sur la piste. Les épreuves s’enchaînent, sous les cris et encouragement des spectateurs. D’abord rodéos à cru sur chevaux, puis attrapage de veaux au lasso, en individuel ou en équipe, rodéo sur chevaux mais avec selle, course de vitesse avec obstacles et enfin l’épreuve reine, le rodéo sur des taureaux déchaînés où, je crois, le meilleur a tenu 12 secondes. Du beau spectacle et une ambiance typique far-west.

Fatigués de cette grande journée, nous ne chercherons pas bien longtemps un endroit pour passer la nuit : un supermarché Walmart est à deux pas. Pas très glamour mais il fera l’affaire. D’autant que le frigo est vide, nous serons sur place pour les courses du lendemain.


La ville de Buffalo Bill

Si le rodéo est si légendaire à Cody, c’est bien bien grâce au créateur de la ville, William Frederick Cody. Son nom ne vous dit sans doute rien parce qu’il ne s’est appelé comme ça que jusqu’à l’âge de 23 ans où il abattit en une journée 69 bisons dans une sorte de concours stupide avec un autre éclaireur de l’armée qui lui n’en tua « que » 46. A partir de ce jour peu glorieux, mais qui pourtant suscitait l’admiration des gens d’alors, on l’appela Buffalo Bill. Quasiment autodidacte puisqu’il entra dans la vie active dès ses 10 ans, à la mort de son père, il fut particulièrement entreprenant tout au long de son existence. Cavalier et tireur émérite, acteur dans l’âme, il lança à l’âge de 36 ans, en 1882, le Wild West Show, un grand spectacle composé de numéros variés faisant tous l’apologie de la conquête de l’ouest. On y voyait des démonstrations de tir de précision, des courses de chevaux, des scènes de chasse avec de vrais bisons, des attaques de diligences, des batailles historiques et des scènes de la vie quotidienne. Buffalo Bill y participait en personne, aux côtés d’invités célèbres comme Calamity Jane ou le chef indien Sitting Bull. Le succès fut retentisssant et la troupe partit en tournée nationale puis européenne, avec une logistique remarquable pour l’époque. Buffalo Bill créa aussi la ville de Cody et fit beaucoup pour développer ses infrastructures. Nous n’avons pas résisté au plaisir de déjeuner au restaurant de SON hôtel. Ambiance typique garantie pour un prix étonamment raisonnable (15€ le buffet du midi).

Un excellent article sur le Wild West Show ici


Cinq pour le prix d’un

Le Buffalo Bill Center of the West est le centre culturel de Cody.5 expositions sont rassemblées dans même bâtiment, avec un billet d’entrée valable 2 jours, ce qui nous a été fort utile. La première est bien sûr dédiée au héros de la ville, tandis que les autres sont consacrées à l’histoire naturelle de la région, aux indiens des plaines, à l’art régional et aux armes à feu. Cette dernière, exceptionnelle, expose 5200 pièces sur les 7000 en possession du musée. Elle semble parfaitement à sa place ici au Wyoming, l’un des états ayant la plus forte proportion de détenteurs d’armes à feu (60% contre 5% pour le Delaware et 33% en moyenne aux USA)


La Tour du Démon

Après avoir de nouveau traversé des paysages superbes, nous arrivons à la Tour du Démon, une étonnante formation rocheuse qui ne ressemble à rien de ce qui l’entoure. Comme une dent qui aurait poussé au milieu de la campagne. En s’approchant un peu, on aperçoit des rayures verticales qui, avec la forme générale en tronc de cône, donnent à la chose l’apparence d’un cannelé bordelais géant. Inévitablement, on se demande comment elle est arrivée là. Au Visitor Center, les hypothèses vont bon train. On parle d’abord d’une origine extra-terrestre. Dailleurs, un alien est exposé à l’entrée, comme s’il avait été capturé puis empaillé en guise de preuve. Plus loin, on affirme, photo et gravure 3D à l’appui, qu’une ourse immense aurait tenté de grimper au sommet de la montagne où s’était réfugié un groupe d’Indiens, provoquant les profondes rainures avec ses griffes, en glissant. La bête ayant échoué, le lieu est devenu sacré pour les tribus du coin. Après, il y a les scientifiques qui ont forcément une explication : de la lave aurait trouvé son chemin il y a 60 000 ans (facile l’hypothèse, il n’y a plus personne pour témoigner) dans des couches sédimentaires, que la rivière autour aurait ensuite érodées. La lave elle-même en séchant lentement aurait produit ces jolies colonnes polyédriques. Pas facile de savoir qui a raison. Moi j’aime bien l’histoire de l’ourse, et vous ?


Nous passons la nuit à l’orée d’une forêt près du site, évitant volontairement le camping au pied de la tour. Pas seulement en raison du risque d’éboulement mais aussi parce qu’ils diffusent encore chaque soir le film Rencontres du 3ème type. Encore qu’avec en fond le décor qui a inspiré Spielberg ce pourrait être amusant.


Des têtes bien faites

Nous poussons jusqu’à l’état du Dakota du Sud pour rendre visite au monument le plus emblématique des USA après la statue de la liberté: le Mont Rushmore. Les têtes des plus méritants présidents du pays gravées dans le granit attirent chaque année plus de 3 millions de visiteurs. Initialement, ce devaient être des personnages célèbres de l’Ouest, mais le sculpteur Gutzon Borglum en a décidé autrement. Vu que l’oeuvre est très connue, je ne vais pas trop faire le savant, mais je vous propose un petit jeu : parmi les affirmations suivantes, une seule est fausse, laquelle ?

  1. Le sculpteur a été formé en France
  2. Les nez des portraits sont de la même taille que Roberto
  3. L’une des têtes a dû être déplacée
  4. Un portrait féminin devait être ajouté mais cela n’a pas pu se faire faute d’argent
  5. Trump a demandé à ce que son portrait soit ajouté
  6. Une sculpture concurrente, plus grande, est en cours de réalisation sur une montagne proche
  7. Aucun décès n’a été à déplorer pendant le chantier
  8. Le sculpteur était membre du Ku Klux Klan

La solution en commentaire dès 5 réponses obtenues


A point ou bien cuits ?

De passage dans la ville de Hot Springs, nous n’avons pas résisté au plaisir de nous plonger dans les eaux bien chaudes d’un établissement local comportant plusieurs piscines ouvertes entourées de jardins. Rompant ainsi avec la frustration de n’avoir pu nous baigner dans les sources (trop) chaudes du parc Yellowstone. Un délice.


Nous sommes repassés maintenant dans le Wyoming et venons d’arriver à Laramie. Le voyage se poursuit sereinement. Pas d’incident mécanique à signaler, Roberto est bien vaillant, savourant sans doute comme nous le plaisir de découvrir la suite. Comme vous aussi j’espère.

75. Retour aux USA

Comme l’éclair

Les passages de frontières doivent être préparés un minimum, ne serait-ce que pour avoir nos différents documents à portée de main alors que la plupart du temps ils sont enfermés dans notre petit coffre et que nous portons sur nous des photocopies. Nous avons fait aussi un peu de vide dans le frigo, les USA étant assez sensibles aux aliments frais. Nous devons enfin prévoir les questions qui vont nous être posées, du genre « Quelle est votre prochaine destination ? » (Difficile de répondre que l’on ne sait pas – ce qui est la réalité quotidienne de notre voyage) ou « Transportez-vous des armes ? » (Surtout se retenir de plaisanter avec le sujet). Notre seule question à nous sera de savoir combien de jours nous seront octroyés sur le visa. Car la règle n’est pas simple et peut être interprétée différemment d’un douanier à une autre. Et comme nous sommes sortis du pays avant la fin des 90 jours, seule la période restante pourrait nous être accordée, ce qui serait une catastrophe (10 jours pour traverser les USA, imaginez !).

Nous voilà fin prêts, nous arrivons à la douane vers 13 heures. Trois files sont disponibles, deux pour les voitures, une pour les camions et « R.V. » (recreational vehicles). Nous empruntons cette dernière. Je tends spontanément nos passeports au douanier, qui nous dit que nous ne sommes pas dans la bonne file, que les R.V. c’est plus gros que ça et que pour lui nous sommes un « van ». J’ai envie de lui répondre que les policiers qui règlent le stationnement en ville pensent autrement mais je me tais. Nous stationnons à l’endroit qu’il nous indique et entrons dans le bâtiment. Une douanière très sympa nous interroge brièvement sur notre parcours, semblant admirative, scanne nos pupilles et nos pulpes de doigts puis nous remet nos passeports. Je vérifie rapidement le tampon : nous sommes autorisés à circuler jusqu’au 12 novembre, soit 90 jours. Yes !

L’opération aura pris 10 minutes tout au plus. Aucun papier n’aura été demandé pour Roberto qui n’aura pas non plus été fouillé. Quand on pense à tous les migrants qu’on aurait pu faire passer ! Je blague bien sûr. Hein, la NSA, je plai-san-te !


Les écluses de Ballard

Nous avons pris la route de Seattle. Dans la banlieue nord, nous nous arrêtons visiter les écluses de Ballard qui permettent de relier les lacs intérieurs de Seattle (Lac Union et Lac Washington) au détroit qui mène ensuite vers le Canada puis l’Océan Pacifique. Les touristes fluviaux sont nombreux et l’écluse est pleine à chaque remplissage, qu’il est toujours amusant d’observer. Quelques otaries se baladent dans les bassins. L’endroit s’appelle aussi la Baie des Saumons, et ce n’est pas pour rien. Nombre d’entre eux repartent vers la mer à cette époque et, comme ils ne sont pas très friands des écluses, où les attendraient d’ailleurs les otaries et les lions de mer, on leur a installé des échelles pour leur permettre le passage. Avec accessoirement une paroi vitrée pour que les touristes viennent les observer sauter de bassin en bassin. Il n’y a étonamment rien de mercantile là-dedans, l’entrée des écluses est gratuite, y compris les documents d’aide, les visites guidées et le tour d’un petit jardin botanique attenant. En fait c’est géré par la Nation américaine. Il faut bien que les taxes que l’on paye sur le gasoil et l’alimentation servent à quelque chose… Nan, en vrai, merci les USA !


Visite de Seattle

En vrai, la capitale de l’état de Washington n’est ni Washington (ça on le savait) ni Seattle (ça on le savait moins) mais plutôt Olympia (qui tire son nom du Mont Olympe que je pensais en Grèce mais qui existe aussi aux USA tout en n’ayant pas eu la faveur des JO d’hiver de 1960 qui ont eu lieu à Squaw Valley pas très loint de là mais en Californie). Nous avons préféré visiter Seattle pour ne pas créer de confusion et parce que le Lonely Planet lui consacre 14 pages contre une seule à Olympia. Bizarre mais ils doivent avoir leurs raisons.

  1. L’aiguille de l’espace

C’est ainsi que s’appelle la tour emblème de Seattle, comme il en existe dans beaucoup d’autres villes. Celle-ci, installée pour l’exposition universelle de 1962, culmine à 184 m. Ce qui est peu par rapport à notre Tour Eiffel, mais dans cette région à haut risque sismique il vaut mieux être prudent. Alors nous n’avons pas hésité à emprunter l’ascenseur qui mène au sommet en 41 secondes. D’abord une plate-forme fixe en extérieur, avec des parois de verre obliques sur lesquelles il faut oser s’adosser pour la photo-souvenir. Ensuite une plate-forme mobile sur laquelle il faut cette fois oser marcher car là c’est le plancher qui est transparent et permet d’observer directement sous ses pieds les microscopiques voitures et piétons se déplaçant bien au-dessous. Le seul plancher transparent mobile au monde parait-il. Et nous étions dessus !


  1. Le jardin de verre de Chihuly

Dave Chihuly est un artiste-verrier local, formé à Murano. Il présente l’œuvre de toute une vie dans une suite de pièces tantôt claires tantôt sombres mais qui attirent chacune un émerveillement renouvelé. Une débauche de couleurs et de formes improbables, de fleurs géantes, de véritables forêts de verres. Alors que l’on croit avec regret la visite terminée, la collection se poursuit, toujours aussi impressionnante, dans une grande serre puis à l’extérieur dans un jardin où le verre sublime les massifs végétaux pour le plus grand plaisir de nos yeux. Une exceptionnelle pépite de Seattle qu’il ne fallait pas manquer.

Tout ça est magnifique… faut-il vraiment des commentaires ?


  1. Troll et bus

Ce titre jouant sur les mots ne sert qu’à accrocher deux curiosités :

La première est un véritable troll, tapi sous un pont de voie rapide, pourrait effrayer les passants qui le découvrent au dernier moment. D’autant qu’en y regardant de près, il broie une coccinelle VW dans sa main. Les explications manquent sur place pour comprendre le pourquoi du comment, mais les trolls c’est comme ça.

L’autre curiosité, c’est un petit groupe de personnages attendant sous un abribus un train interurbain qui ne passera jamais, la ligne étant abandonnée depuis 1930. Ils sont là bien évidemment pour revendiquer la réouverture, mais sans grand succès apparemment. Ce qui est amusant, c’est que le chien qui les accompagne possède, lorsqu’on y regarde de près, des traits humains. Une revanche du sculpteur qui a immortalisé ainsi la tête du maire de l’époque qui s’opposait à l’installation de l’œuvre en ville. Bien fait !


  1. La ruée vers l’or de Klondike

La ville de Seattle, alors peu développée, fut touchée par un incendie géant en 1889 qui détruisit 90% des habitations alors en bois, sans faire de victime. Tout était à refaire. La ville commençait à se reconstruire, en dur cette fois, lorsqu’une seconde catastrophe, financière cette fois, la toucha : le krach de 1893 lié à un mouvement de panique des investisseurs qui voulurent soudain récupérer l’or sur lesquels leurs billets verts étaient basés. C’est dire si l’arrivée au port de Seattle d’un navire ramenant des hommes soudainement enrichis après la découverte d’un site aurifère au Yukon était un espoir pour une grande partie de la population tombée dans la misère. Plus de 100 000 personnes de la région se lancèrent soudain dans l’aventure, la plupart sans avoir aucune idée des difficultés qu’ils rencontreraient : coût élevé d’un voyage où il fallait emmener avec soi 1 an de vivres et matériaux, difficultés inimaginables sur le trajet comportant des mers gelées, des pistes enneigées et pentues et la quasi absence de toute infrastructure, durée très longue puisqu’avec les moyens de l’époque il fallait entre 6 et 18 mois pour parvenir sur les rives de la rivière Klondike, lieu de découverte de la première pépite. Pour les 40% des candidats qui parvenaient malgré tout à Dawson, la ville soudainement créée la plus proche du site aurifère, leur état d’épuisement était tel que beaucoup repartaient dégoutés ou se contentaient d’un emploi subalterne sur place. Seulement la moitié des arrivants partaient réellement chercher de l’or et au final 300 personnes seulement se sont réellement enrichies sur les cent mille partants. Les vrais gagnants, ce sont les commerçants qui ont su exploiter ce filon – c’est le cas de le dire – comme les hôteliers, les vendeurs de nourriture ou d’accessoires, les intermédiaires dans le marché de l’or et, de façon plus générale, la ville de Seattle qui était le vrai centre logistique de l’opération.


Re-verre dans le port de Tacoma

C’est tout près du célèbre port chanté par Hugues Aufray et par moi-même en colonie de vacances – c’est dire si c’est vintage – que Claudie nous a déniché un YAGM (yet another glass museum). Si vous ne savez pas que nous sommes fans de l’art du verre, reprenez la lecture du blog depuis le début 😉. Nous avons trouvé de belles pièces, mais il ne sera pas dans notre top 10. Je vous mets quelques photos pour marquer le coup.

Quelques oeuvres parmi d’autres…


A fond la gomme

Roberto nous a bien roulés, il nous avait caché que ses pneus avant étaient presque lisses. Pour s’en apercevoir, il a fallu un stationnement roues tournées d’un côté, car l’usure se fait au centre. Je ne sais pas à quoi c’est dû. Je pensais à un surgonflage mais la pression est celle recommandée. Le premier jeu avait fini comme ça, après 25 000 km, et là nous en sommes à 50 000. Une certaine règle semble s’installer. Nous trouvons facilement un spécialiste du pneu dans cette grande zone commerciale qu’est la banlieue de Seattle, possédant en stock le modèle que nous souhaitions, ce qui n’était pas donné d’avance avec notre véhicule français. Ce qui est amusant et motive l’écriture de ce chapitre, c’est que l’ouvrier qui a changé les pneus de Roberto s’appelait lui-même …Roberto ! Vous n’aurez pas sa photo car il a refusé mais je vous assure que c’est vrai.


Les chutes sèches

En plein cœur de l’état de Washington, entre les villes de George (on imagine le patronyme à l’origine) et de Coulee City (une coulée est ici un ravin glaciaire), nous sommes presques seuls à suivre cette belle route panoramique n°17 circulant au fond d’un canyon bordé de falaises ocres et abruptes. L’Ouest américain tel que nous l’imaginions. Nous cédons à l’invite d’un panneau à nous arrêter pour observer un point de vue. Et quel point de vue ! Un encorbellement de plus de 5 km de falaises surplombe de 120 m quelques plans d’eau. Aurions-nous l’occasion de nous téléporter au moment ou les cascades se déversaient du haut de ces falaises, il y a vingt mille ans, que nous nous trouverions devant les plus grandes chutes d’eau ayant jamais existé, dix fois la taille de celles du Niagara et dix fois le débit actuel de toutes les rivières du monde réunies. Ça laisse rêveur, mais aussi rageur de ne pas avoir la machine (à téléporter)


Au grand dam

Quelques dizaines de kilomètres plus loin, après avoir longé le lac Bank, une grande retenue d’eau dédiée à l’irrigation de cette région aride, nous parvenons à la 7ème merveille du génie civil américain, le barrage de Grande Coulée. C’est l’une des plus grandes structures jamais construites par l’humanité. Un kilomètre et demi de large sur 170 mètres de hauteur, 12 millions de mètres cube de béton, soit la quantité nécessaire pour fabriquer une route qui relierait Seattle à Miami. Après 8 années de travaux, le barrage (dam en anglais) a commencé à produire de l’électricité en 1942. En raison de la guerre, ce fut sa seule fonction pendant plusieurs années, mais par la suite les aménagements furent complétés pour que l’installation assure aussi le contrôle des inondations provoquées par la rivière Columbia et l’irrigation de la région grâce à la retenue du lac Bank mentionné ci-dessus, entièrement constituée par la station de pompage de l’eau du barrage. En 1967, une intervention audacieuse (il a fallu dynamiter une partie des installations en activité – on parle de chirurgie à la tronçonneuse…) a permis d’installer des turbines complémentaires et de porter ainsi la capacité de production à 21 milliards de kilowattheures d’électricité par an. Le Grand Coulee Dam reste aujourd’hui le premier producteur d’hydroélectricité aux États-Unis.

Nous avons passé la nuit au bord du lac Roosevelt, le lac de retenue du barrage, qui s’étend jusqu’à la frontière canadienne, à plus de 250 km de là. Le ciel du soir n’était pas terrible mais l’aurore était magnifique.


La machine à jeter son argent.

Nous avons trouvé cette étonnante machine dans un centre commercial. Une sorte de grand yoyo noir un peu mystérieux posé perpendiculairement à son axe. Au centre une sorte d’entonnoir dont on ne voit pas le fond. Sur le bord supérieur, deux « lanceurs de pièces » qui envoient la monnaie tourbilloner avant de disparaître à tout jamais dans le trou central. Pour ceux qui ne savent pas quoi faire de leur argent et qui hésitent encore, une plaque les informe qu’ils auront l’énorme avantage de savoir, à condition de jeter plusieurs pièces en même temps, vous saisissez la perversité de la chose, si celle de 2$ disparaîtra avant celle de 1$ ou bien l’inverse. N’ayant pas d’argent à jeter, j’ai tout de même sacrifié une pièce d’1 centime pour prendre la photo, tout en n’essayant pas de la rattraper avant l’issue finale, au risque de paraitre pingre.

J’ai bien regardé, je n’ai pas trouvé de machine similaire pour jeter ses billets, avec qui sait un gros ventilateur et la question de savoir si le billet de 100 s’envole avant le billet de 50. Mais ça ne saurait tarder 😉


Du port au bison

Si ce titre de chapitre vous fait penser par erreur au dernier plat à la mode des anti-vegan, c’est totalement volontaire. Mais il est juste là pour relier le début et la fin de cet article. Après avoir franchi brièvement l’état de l’Idaho (nous y reviendrons dans quelques semaines), nous sommes parvenus à celui du Montana. Pas besoin de vous faire un dessin sur l’origine du nom. Notre première visite est consacrée à un parc de bisons, réserve faunique créée dès 1908 pour tenter de sauver l’espèce quasi-exterminée par les conquérants américains officiellement parce que ces paisibles animaux gênaient la construction de leur chemin de fer et officieusement parce qu’ils étaient la source de vie principale des indiens. Même si la réserve a été lancée sous l’égide de l’état, on sait bien qui a fait pression pour son ouverture et ce n’est que depuis le début de cette année que la gestion en a enfin été confiée aux tribus indiennes Salish et Kootenai qui la revendiquaient depuis plusieurs décennies. Nous sommes contents pour eux.

Environ 500 bisons sont éparpillés dans ce parc de 76 km2, dans lequel on ne peut circuler qu’en voiture sur une route en gravier. Les chances de les trouver paraissent bien minces, mais les gardes du parc renseignent chaque jour la position approximative des différents animaux (aussi des ours, des lynx, des cerfs, des loups, etc.) sur un plan à l’entrée. Les conseils de bison futé en quelque sorte.

Par bonheur, les bisons préfèrent la vie en communauté et quelques groupes sont censés se trouver sur notre route. Nous nous lançons donc à leur recherche dans un décor magnifique, et nous allons effectivement en trouver. Les premiers d’ailleurs sont impossibles à rater puisque, immobilisés au plein milieu de la route, ils provoquent un embouteillage (de 4 voitures, n’imaginez pas la grande foule non plus). Les visiteurs sont sages et respectent bien les consignes, comme ne pas descendre de voiture par exemple. Les américains me semblent à ce sujet plus respectueux que les canadiens qui poursuivent volontiers les ours enfant sous le bras et appareil photo à la main alors que c’est le meilleur moyen de se faire croquer. Bref, nous passons une belle journée et rentrons avec des images de bisons plein les yeux. Et plein la carte-mémoire pour vous en faire profiter.


Cette seconde entrée aux USA nous comble. Le seul bémol est la chaleur qui reste assez élevée en permanence. Nous compensons en nous garant le plus possible à l’ombre et en prévoyant bien le secteur d’apparition du soleil le lendemain matin. Avec la conséquence que nos panneaux solaires fournissent bien moins d’électricité. Si nous roulons une heure ou deux, l’alternateur suffit pour compenser, mais cela n’a pas été le cas à Seattle où nous avons dû surveiller la batterie qui commençait à perdre un peu de tension. Mais tout s’est bien passé, le roulage jusqu’au Montana passant brièvement par l’Idaho lui a redonné son plein d’énergie. Nous venons d’arriver à Missoula. La suite pour bientôt.