133. Turquie du Sud-Ouest

Après l’Est peu fréquenté et donc authentique, nous nous rapprochons des grands sites touristiques du centre et du Sud-Ouest, comme la Cappadoce, la Riviera turque et Pamukkale. Ces endroits plus visités seront-ils à la hauteur de nos attentes ?

Turquie du Sud-Ouest
Et pourquoi pas la carte du parcours en début d’article ? Toujours en version zoomable ici

Traversée vers la Cappadoce

Il nous faudra deux bonnes journées pour rejoindre la région de la Cappadoce, avec de beaux paysages et de tranquilles spots nature pour seules attractions touristiques. Il est toujours assez difficile de photographier des paysages en roulant, alors que cela représente somme toute une partie importante de notre voyage. A part quelques clichés glanés aux arrêts, le reste restera fixé uniquement dans nos yeux. Il faut bien garder un peu d’intimité ! Nous ferons une halte nocturne intéressante pour la suite devant le Mont Erciyes. C’est l’éruption de ce volcan aujourd’hui endormi qui a permis de former les paysages de la Cappadoce, recouvrant toute la région de diverses couches dont certaines vont donner de la couleur, et d’autres comme le tuf du relief. Cet agglomérat volcanique tendre va permettre à la nature de créer de jolis paysages (canyons, falaises, cheminées de fées, etc.) et aux humains de creuser à peu près n’importe où des abris, des églises voire des villes souterraines complètes pour se protéger des assaillants.


Kayseri

Kayseri est la grande ville la plus proche de la Cappadoce. Nous trouvons la ville plutôt agréable et étonnamment propre comparé au reste du pays. C’est un sujet dont j’ai peu parlé, mais, alors que nous trouvons en Turquie le plus grand nombre de poubelles à disposition de tout notre voyage (en ville c’est quelquefois une tous les cinquante mètres), le pays est jonché de détritus, lingettes canettes et bouteilles de verre loin devant le reste. On ne sait pas si le secret des espaces publics assez nets tient à une politique municipale ou bien à une éducation particulière dans les écoles, mais la preuve est là : quand on veut on peut ! Cette parenthèse mise à part, nous dénichons quelques curiosités dans la ville, comme un mausolée tournant (c’est sa construction en spirale qui donne cet effet mais rien à voir avec le restaurant panoramique de la Tour Montparnasse) dédié à une princesse, la reproduction au milieu d’un rond-point d’une tablette en argile écrite en cunéiforme reprenant le texte d’une lettre de commerce Assyrienne, un bazar animé sans le moindre touriste occidental, pas mal de magasins de tapis (la ville est la capitale turque du tapis) et quelques magasins intéressants de par leur contenu. Nous avons fait aussi un petit stop dans une concession Fiat (présent partout en Turquie) pour faire changer des balais d’essuie-glaces et compléter le niveau du liquide de refroidissement qui baissait, tout ça en quelques minutes sans rendez-vous, à peine le temps de boire le thé offert.


Ozkonak

Le sous-sol de la Cappadoce est un vrai gruyère. La nature y est pour une part, mais l’homme a largement profité de la tendreté du tuff volcanique pour creuser des villes souterraines afin de se protéger de ses agresseurs, et cela a commencé plusieurs siècles avant notre ère. Environ 200 villes sont présentes dans la région, nous avons choisi celle-ci, la première sur notre route. On y trouve diverses cavités correspondant à des habitations, mais aussi des écoles, des églises, des cuisines communes, reliées entre elles par de tout petits couloirs où il faut marcher courbé. Des portes à roue isolent les passages stratégiques. 4 niveaux sont visitables sur les 10 que comporte la ville, et c’est déjà pas mal. Difficile tout de même d’imaginer vivre longtemps là-dedans. A quelques kilomètres de là, le Monastère de Belha (Ve siècle) est totalement creusé dans la roche, sur le même principe. Il comporte même une chambre secrète source d’énergie positive (ce serait la raison de l’installation de moines ici) que nous avons rejointe en nous faufilant dans un couloir à l’obscurité totale. A la lueur près de nos smartphones. Un petit air d’Indiana Jones…


Avanos

A l’entrée nord de la Cappadoce, cette petite ville est renommée pour ses potiers (le fleuve qui la traverse serait riche en argile à certaines saisons) dont la production est affichée à tous les coins de rues et même aux intersections, ainsi que pour son vin (elle est jumelée avec Nuits-Saint-Georges). Nous n’avons acheté ni grande jarre émaillée ni caisse de rouge pour raison de place dans Roberto, nous contentant de flâner dans la ville.


La Vallée de l’Amour

Les cheminées des fées sont légion en Cappadoce. Parmi les plus visitées on trouve celles de la Vallée de l’Amour, dont vous trouverez aisément la signification en regardant les photos. Les fées étaient bien gâtées… En arrière-plan de cette belle randonnée, on aperçoit de grandes falaises aux couleurs roses, blanches ou rouges, qui donnent leur nom à autant de belles balades, nécessitant parfois la journée.


Göreme

C’est le cœur de la zone touristique. Tout ce dont ont besoin (ou pas) les visiteurs y est concentré : distributeurs de billets, marchands de glaces, cireurs de chaussures, pour commencer par les plus indispensables, et bien sûr bars, restaurants et magasins de souvenirs. La particularité, c’est que tout a été intégré dans une zone hérissée de formations plus ou moins coniques. Il a suffi d’y creuser directement les hôtels et les boutiques. Les touristes en redemandent, mais nous avons préféré la nature autour. Il est vrai que nous avons notre maison avec nous et que nous pouvons la déplacer presque partout.


Boycott raté

Difficile d’imaginer la Cappadoce sans montgolfières. L’aspect trop prégnant de l’invasion humaine de ce décor naturel et le paradoxe de photographier d’autres personnes qui photographient ce que vous êtes venus voir me gênait suffisamment pour que je décide a priori de ne pendre aucun cliché de montgolfière. Et puis le matin quand nous nous sommes réveillés avec une multitude de ces engins volant juste au-dessus de Roberto, j’ai craqué. J’ai tout de même réussi au cours de ce bref séjour à éviter toute intrusion de quad dans le champ de mon objectif. Ce qui est un exploit, car à l’approche de l’aube et du crépuscule, de longues files de ces engins bruyants et générateurs de poussière se forment partout. On n’ose à peine imaginer l’ambiance sur les lieux où ils se rejoignent tous. Et encore moins le nombre incalculable de selfies publiés au même moment sur les réseaux sociaux. Oui je sais, moi aussi je publie. Mais pas trop de selfies, hein ?


Concentré de troglodytisme

Dès les 1ers siècles de notre ère, les chrétiens arrivent nombreux dans la région et fondent monastères et églises. Pour le bâti c’est facile, il suffit de creuser dans le tuf qui est en surabondance ici. C’est ainsi que sont concentrées près de Göreme une dizaine de ces lieux de culte, protégés dans ce qui est appelé un « musée à ciel ouvert ». Les portes souvent étroites et parfois au sommet d’escaliers raides et sans rambarde ouvrent sur des salles parfois étonnamment grandes et structurées comme chez nous (nef, autel, chapelles, etc.). Les murs sont volontiers couverts de fresques dont l’état de conservation est variable mais parfois excellent. Dans plusieurs cas, les yeux de tous les personnages ont disparu. On pourrait croire à un vandalisme de la part des Ottomans qui sont arrivés plus tard, mais ce sont en fait les Grecs qui sont responsables de ces énucléations, croyant à un pouvoir miraculeux de la peinture des yeux diluée dans une boisson. Les photos étant interdites à l’intérieur des bâtiments, toutes les fresques que vous verrez ont été « empruntées » sur le net.

Dans la même journée, nous avons gravi le rocher central de la ville d’Uçhisar, tout autant gruyèrisé que les églises précédentes. La différence est dans la laïcité, ce piton ayant abrité une grande partie de la population jusqu’à il y a peu, avant d’être livré à la foule et et à la manne touristique.

Et pour terminer en beauté, nous sommes allés visiter 40 km plus loin la vallée de Soganli, un melting pot d’habitations et d’édifices religieux creusés dans des falaises et des reliefs rocheux. Là encore, nous jouons aux explorateurs dans des lieux abandonnés, aussi bien les habitations initiales évacuées suite au tremblement de terre de 1998 que les maisons construites par le gouvernement pour reloger les habitants qui n’en ont pas voulu. Les lieux sont aussi beaux que peu visités, l’équation étant plutôt rare.


Le caravansérail du sultan

C’est exactement comme cela que se traduit le nom de la ville de Sultanhani, qui comporte pourtant bien d’autres bâtiments. Mais celui-là est d’exception. D’abord parce qu’il est le plus grand caravansérail de Turquie. Dans ce pays, tout au long de la route de la soie, on en trouve un tous les 30 à 40 km, ce qui correspond à une journée de marche. Après quoi, il fallait bien que les caravaniers se reposent et pratiquent leur commerce. Ils étaient, comme leurs animaux de transport, reçus ici gratuitement, nourris et logés, et disposaient même de la mosquée au centre. Du all inclusive en quelque sorte. Aujourd’hui, les touristes sont moins bien traités, puisqu’il leur faut s’acquitter d’un droit d’entrée et payer leurs consommations au bar. Néanmoins, l’architecture vaut le coup d’œil, tout comme les femmes qui se relaient pour tisser un immense tapis, et l’exposition de tapis anciens très bien mise en scène.


Konya, la ville sainte

Cette grande ville de 2 millions d’habitants est à la fois l’un des plus grands centres religieux du pays, respectant les valeurs traditionnelles de l’islam via ses 3000 mosquées, et le lieu de naissance du fondateur d’un ordre dérivé de l’islam, les derviches tourneurs. Nous visiterons en premier le mausolée qui leur est dédié, mais raterons de peu la démonstration hebdomadaire de la fameuse danse au centre culturel. Mais vous n’aurez aucun mal à trouver une vidéo sur le net. Naturellement, nous visiterons quelques mosquées, découvrant au passage les magnifiques céramiques bleu turquoise* seldjoukides (une dynastie turco-persane qui domina l’empire musulman d’Orient du Xie au XIIIe siècle) et finirons par le musée ethnographique, centré sur l’artisanat ottoman. La pause restaurant n’aura pas été exceptionnelle quant aux entrées et plats de résistance dont nous commençons à nous lasser, mais nous aura encore appris 2 ou 3 choses sur les desserts.

* Turquoise signifie « pierre de Turquie ». J’avoue que je n’avais pas fait le rapprochement jusqu’ici !



Au musée ethnographique, en autres, cette arme hydride associant pistolet et hache (deux précautions valent mieux qu’une !) et ce joli set en bois pour la préparation du café turc.


Alanya : les affres du tourisme de masse

Nous rejoignons la Méditerranée à Alanya, en pleine « Riviera turque ». Nous n’avions pas vu la mer depuis que nous avons quitté les rivages de la Mer Noire. Eh bien ça n’est pas folichon. D’Antalya à Antioche, ce sont près de 800 km de littoral qui ont été bétonisés et livrés au tourisme de masse, principalement des Russes et des Allemands en plus des nationaux. Hotels, piscines, plages couvertes de parasols et clubs de loisirs se succèdent sans fin autour d’une 2 fois 2 voies où l’on roule à 110 km/h en pilant tous les 500m à cause des feux rouges. Nous grimpons au sommet d’une péninsule qui domine la ville et gaspillons 12 euros chacun à visiter une citadelle qui ne comporte que des murs. Nous étions sans étonnement les seuls, même les Turcs qui ne paient pourtant que dix fois moins semblaient avoir eu vent de l’arnaque. S’il fallait trouver un point positif, gardons le panorama. Revenus sur les quais en bas, nous longeons une armada de bateaux de pirates amarrés côte à côte, que tentent de remplir les vendeurs en hélant le chaland. Pourquoi des pirates ? Peut-être parce que les sirènes et leurs seins nus sont plutôt mal vues ici ?  


Aspendos : un bel amphithéâtre mais pas que

Nous nous éloignons de la côte de quelques kilomètres, c’est fou comme on retrouve du beau rapidement : nous sommes sur le site archéologique d’Aspendos. La majorité des visiteurs se limitent au théâtre, l’un des mieux conservés d’Asie mineure, au point d’être couramment utilisé aujourd’hui pour des représentations, dont un festival d’opéra et de ballet. 20 000 places seraient disponibles. Nous étions très peu le jour de notre passage à grimper le petit chemin qui mène à la ville haute, avec de beaux vestiges d’une agora, d’un marché couvert, d’une basilique, d’une fontaine monumentale, d’un aqueduc. Dommage.


Antalya : les affres bis

On se demande ce que trouvent à cette ville les 10 millions de visiteurs annuels. Certes le petit port est mignon, la vieille ville pourrait être charmante si toutes ses maisons anciennes n’étaient pas reconverties en boutiques qui vendent toutes les mêmes souvenirs. Mais le reste n’est qu’un alignement de voitures devant un alignement d’hôtels all-inclusive devant un alignement de parasols sur une longue plage de 18 km au sable douteux. Le pire c’est que beaucoup de ces touristes n’iront pas plus loin que ce séjour balnéaire artificiel et n’auront que cette image de la Turquie.

Nous quittons rapidement cette ville étouffante à bien des égards pour gravir de jolies montagnes, traverser des prairies aux belles couleurs, laisser passer des troupeaux de chèvres. Ça change des moutons de la ville !


Pamukkale : une merveille de la nature

On pourrait se croire en haute montagne, proche d’un domaine skiable, en voyant surgir devant notre pare-brise ces collines d’un blanc éclatant qui tranchent sur celles plus vertes alentour. Mais la vallée dans laquelle nous roulons n’est qu’à 250 m d’altitude et les fameuses collines ne dépassent pas 600, il ne peut donc s’agir de neige à cette saison, d’autant plus qu’en ce milieu d’après-midi, la température ambiante avoisine les 32°C. Nous sommes en fait face à un extraordinaire phénomène naturel : des sources saturées en bicarbonate de calcium déposent depuis plusieurs milliers d’année du calcaire sur le sol. Petit à petit se forment de petits barrages, les travertins, qui retiennent l’eau dans de jolies piscines aux teintes bleu vert. L’afflux non contrôlé des touristes a failli dégrader totalement le site, mais les autorités ont mis un peu d’ordre dans tout ça : interdiction de se baigner (des bassins artificiels ont été créés pour les irréductibles et les selfimaniaques), interdiction de marcher en chaussures, interdiction de gravir les travertins. Une gestion complexe de l’eau est aussi nécessaire pour entretenir la belle couleur blanche et éviter les algues à certaines saisons.

Comme pour la Cappadoce, des montgolfières survolent le site (et Roberto) le matin de bonne heure. Ce n’était pas spécialement anticipé, et cette fois nous étions les seuls à cet endroit.


La visite est couplée avec celle de la station thermale antique de Hiérapolis, perchée juste au-dessus, qui exploitait les fameuses sources entre le IIe siècle av. J-C. et le IVe siècle ap. J.-C., pendant la période gréco-romaine. Encore un joli théâtre, un musée archéologique dans les anciens thermes, la mystérieuse porte de Pluton d’où sort un gaz mortel qui tue les oiseaux et les taureaux mais curieusement pas les prêtres eunuques, et une nécropole qui rassemble les tombes de tous ceux qui espéraient repartir guéris après avoir « pris les eaux ». Au final c’est plutôt la station qui leur a pris les os.

La visite s’est terminée par les Bains de Cléopâtre, une piscine thermale à 36°C d’où s’échappent quelques bulles. La photo aux jolis reflets verts masque une réalité moins reluisante. D’abord rien ne prouve que Cléopâtre soit venue se baigner là. Ensuite une horrible zone commerciale a été construite autour de la piscine, où déambule une foule de touristes occidentaux dont certains en maillots de bain échancrés ou strings assez mal venus dans un pays musulman même tolérant. Les prix y sont exorbitants, le simple thé turc y coûte par exemple 6 fois plus cher que dans la ville à côté, tout en étant servi dans un gobelet en carton au lieu du joli verre tulipe habituel. Bien que plutôt fans des piscines d’eau thermale, nous avons rapidement fui cet endroit pour nous dérangeant.


Boycott réussi !

Le site d’Éphèse avait l’apparence d’un énième site archéologique sur notre route. Les commentaires du guide et les photos ne nous ont pas convaincus, notamment la foule qui traîne dans l’allée principale. Et puis s’est rajouté le ras-le-bol de la taxation des touristes-étrangers-vaches-à-lait. Certes l’inflation galopante que connaît le pays depuis 2022 (ça tourne à environ 50% par an avec des pics dépassant les 80% !) justifiait l’instauration d’un prix en euros qui assurerait la stabilité, mais on observe au contraire une encore plus forte inflation sur les prix en euros : de 11 € en 2022, le prix d’entrée est passé à 23 € en 2023 et 40 € en 2024, hors suppléments ! Alors que les Turcs paieront moins de 2 €. Alors que le gouvernement turc refuse l’inscription d’élèves turcs aux lycées français du pays, prétextant la non réciprocité (refus de la France d’ouvrir des écoles turques pour élèves français) j’aimerais bien voir cette réciprocité appliquée aux musées français exigeant des touristes turcs un droit d’entrée 20 fois supérieur. Agacés par tout ça, nous avons boycotté et pris le chemin de la plage…


La plage

Les plages ne sont pas si attirantes que ne le laissent supposer les guides, principalement en raison de la présence d’innombrables déchets, du moins pour les plages publiques ou sauvages. Il est à espérer que celles quadrillées de parasols à n’en plus finir sont un minimum entretenues, mais ce n’est pas le genre d’endroit que nous avons envie de fréquenter. Nous nous trouvons tout de même une grande plage pas trop abimée, dont le sable à l’arrière est suffisamment tassé pour que Roberto puisse rouler dessus. Une bonne brise compense l’absence d’ombre, et l’eau à peu près claire encourage à la baignade. Nous allons finalement rester deux jours ici, une sorte de week-end de vacances dans notre voyage. Nous en avons besoin régulièrement. Nous observons au passage un joyeux pêle-mêle d’occupants, des pêcheurs assis toute la journée devant leur ligne aux familles entières se baignant en burqa en passant par les couples venant faire faire leurs photos de mariage devant le coucher du soleil. Les chiens sont nombreux sur les plages, comme dans tout le pays d’ailleurs, mais absolument pas agressifs.


Après une nouvelle pause baignade dans un autre port, nous arrivons à Izmir, la ville de tous les Danger. Le plus difficile, c’est qu’il va vous falloir attendre le prochain article pour savoir pourquoi je l’ai appelée comme ça. À bientôt !

131. Turquie

Premières impressions

Des formalités d’entrée relativement simples et rapides, de belles routes, de l’essence pas chère et même de l’AdBlue à la première pompe venue, des magasins modernes : tout porte à penser que, paradoxalement, la Turquie est économiquement plus développée que la Grèce. Cela va-t-il se confirmer dans la durée ?


Le Mémorial des Dardanelles

La bataille des Dardanelles a été un moment fort du début de la 1ère guerre mondiale. La France et la Grande Bretagne, alors alliés de la Russie, souhaitaient protéger son approvisionnement qui transitaient par le détroit des Dardanelles, entre la Mer Égée et la Mer Marmorata, contrôlé par l’Empire ottoman aidé des Allemands. Tout étant barré côté terrestre, ils organisèrent un débarquement, aidés aussi des Australiens et des Néozélandais. Mais, mal organisés, ils échouèrent et le conflit se termina au profit des Ottomans, chaque camp perdant au passage 56 000 soldats. Le succès permit tout de même à la Turquie de proclamer son indépendance, et en reconnaissance d’élever un grand mémorial en hommage aux victimes. Curieusement, le fait d’avoir participé rendit très fiers les Australiens et Néozélandais fraîchement libérés de l’emprise britannique. Le 25 avril, anniversaire du débarquement, est chez eux un jour férié et bien davantage célébré que le 11 novembre. Nous avons visité aussi l’un des cimetières français, mentionnant notamment la perte des 4 sous-marins et de leurs équipages qui avaient été engagés dans le conflit. Indispensable devoir de mémoire.



Un de Troie

Il nous aura fallu venir en Turquie, aussi bien Claudie que moi, pour apprendre que la ville de Troie était ici, sur la côte Ouest du pays. Et pas en Grèce comme nous le pensions. Et pas dans l’Aube non plus, je vous vois venir. Le site est presque aussi vieux que les pyramides d’Égypte, mais n’a été mis au jour qu’à partir de 1871. Il est bien sûr célèbre pour avoir été le théâtre de l’affrontement entre les rois grecs, dont Achille, venus récupérer la belle Hélène volée au roi de Sparte par le prince troyen Pâris. Après 10 ans de siège et une ruse chevaline que l’on connait tous, les Grecs ont fini par remporter et la guerre et l’épouse du roi.

Il ne s’agirait pas simplement de la légende rapportée par Homère dans l’Iliade, les fouilles archéologiques réalisées à Troie confirmeraient une partie du conflit. Nous avons trouvé sur les lieux un musée moderne mais cher (2 fois le prix du déjeuner que nous avons pris après la visite) et un site archéologique agréable à parcourir sur de petites passerelles en bois. Notre vraie déception a été que la réplique grandeur nature du Cheval de Troie était … en travaux. De quoi ruer dans les brancards.



Nulle autre qu’Assos…

Qu’Assos me fasse sourire n’étonne pas Claudie, habituée à mes jeux de mots vaseux. J’espère tout de même transmettre ce sourire par contagion à quelques lecteurs.

Pour le reste, le site que pourtant notre guide préférait largement à Troie nous a déçus. Accès mal indiqué, longue file de boutiques de souvenirs et de bars-restaurants avant de parvenir à l’entrée, édifices ressortant peu du paysage en raison d’une couleur similaire au sol, stigmates encore très présents du dernier incendie. Quant au « magnifique » temple d’Athéna perché sur sa colline au-dessus de la Mer Égée, il n’avait pas toute la superbe promise.

Dommage pour un site fondé au 1er millénaire av. J.-C. par des Lesbiens et des Lesbiennes. Les habitants de Lesbos, l’île grecque juste en face, vous pensiez quoi ?

Deux heures de route plus tard, nous trouvons un chouette endroit pour dormir. Une aire de pique-nique dans une petite forêt dont les arbres ont les pieds peints en blanc. L’ambiance tranquille à l’arrivée ne durera pas. Vers 19h les voitures ont commencé à défiler, haut-parleurs vrombissants et glacières pleines de bouteilles. Misère…

Nous avons vite laissé ce petit monde à leur soirée animée pour rejoindre un spot plus paisible jouxtant un cimetière. Las, à 21h, deux voitures sont arrivées et ont commencé à sortir les bouteilles et les chaises. Re-misère !

Mais la sono était discrète cette fois, au point que nous nous sommes endormis avant leur départ. À se demander le matin si nous n’avions pas rêvé. Mais les bouteilles et papiers gras étaient bien là sur le sol à l’emplacement des voitures…


Immersion

Parmi les choses que nous aimons le plus en voyage, il y a le fait de se retrouver au milieu d’une population qui ne nous ressemble pas et qui vit sa vie normalement, sans être pervertie par un quelconque attrait touristique, ni éventuellement par nous-mêmes. Cela ne nous était pas encore vraiment arrivés depuis notre arrivée en Turquie, jusqu’à ce que nous visitions Bursa, la 4ème ville du pays. Une journée de marche citadine qui nous aura conquis, nous menant des bazars très animés aux superbes mosquées et mausolées appelés ici turbë. Dans les deux cas nous avons eu l’impression d’être les seuls touristes du jour, du moins non turcs. Avec tous nous sens en éveil car très sollicités. La vision de cette architecture ottomane, d’un grand nombre de femmes voilées, des couleurs vives des boutiques de soie installées dans un ancien caravansérail. L’ambiance sonore des camelots, des klaxons et des appels à la prière mélangés. L’alternance des parfums d’encens, de savons ou encore de café. Alors que les lieux de cultes musulmans nous sont souvent refusés en Europe tout en étant par ailleurs assez austères dans leur décoration jusqu’ici, nous sommes entrés sans problème – du moment que le dress code était respecté – dans de grandes et magnifiques mosquées merveilleusement bien décorées. Une véritable immersion que nous attendions depuis un moment.

Nous prenons la route de la station de ski située au sud de Bursa, sans monter jusqu’au sommet (2545 m d’altitude) pour dormir au frais dans une petite forêt déserte trouvée par hasard à environ 1100 m. Nous décidons d’y rester 2 nuits. La Turquie s’avère aussi hospitalière que la Grèce pour les véhicules aménagés, et c’est une bonne nouvelle.


Cumalikizik

Ce petit village au nom rigolo est l’exemple typique des conséquences désastreuses de la surpopulation touristique. Bien conservé depuis le moyen-âge, il attire forcément les citadins lassés du béton de leurs façades et du bitume de leurs rues. Mais les citadins ça a besoin de manger, de boire et de faire pipi. Alors on leur construit des bars et restaurants. Et puis un ou deux parkings. Et puis pourquoi ne pas les appâter avec des babioles multicolores ou des sirops de fruits locaux ? Alors les boutiques poussent et cachent les façades moyenâgeuses, empiètent sur les rues pavées.

Par chance, le village est assez grand et en pente. Vers l’extérieur et les hauteurs, les chalands se font plus rares et les maisons redeviennent accessibles. Et les boutiques sont plus intimes, comme celle où nous avons pris notre premier thé turc. Une seule table au milieu d’une grande pièce en désordre, à laquelle sont déjà attablés la patronne et quelqu’un de la maison. Mais ils s’écartent un peu et nous rajoutent 2 chaises, nous invitant à leurs côtés. Nous avons échangé un peu et bu notre thé, servi noir et dans de tout petits verres. 35 centimes le çay, comme on l’appelle là-bas. L’expérience valait le jus, si on peut dire.


Ça rime

Oui, Iznik ça rime avec céramique. L’activité a été prédominante entre le XVIe et le XVIIe siècle, au point que l’on retrouve de jolies faïences créées dans la ville sur les plus grandes mosquées du pays. La demande est moindre maintenant, mais de nombreuses boutiques restent dédiées à l’activité, dont un pôle de créateurs dans une ancienne école coranique. Du très beau travail qu’on aimerait rapporter avec nous. Mais il faudrait atteler une remorque à Roberto.


Limite : 82 km/h

Impressionnés par la qualité du réseau routier au départ, nous révisons peu à peu notre opinion. Il est vrai que le large temps dont nous disposons et notre quête des bivouacs en altitude et en nature nous conduisent fréquemment à emprunter les axes secondaires. Et là force est de constater que le niveau d’entretien n’est pas extraordinaire et rejoint en bien des points, on pourrait même dire en bien des trous, celui des derniers pays traversés. L’absence de revêtement est par ailleurs fréquente sur ces routes, et Roberto est presque en permanence recouvert de poussière. Le côté amusant de ces petites routes, c’est le nombre d’animaux qui y circulent en liberté, vaches principalement, mais aussi moutons, chèvres, chiens et chats. Il faut être vigilant.

Sur les grands axes, nous empruntons habituellement la route à 2×2 voies qui longe l’autoroute – que par principe nous ne prenons pas, même si en Turquie le coût est modeste. La limite de vitesse y est extrêmement variable, passant de 110 km/h par défaut à 50 km/h au moindre croisement, les deux panneaux correspondants pouvant se suivre à quelques mètres seulement. Autant dire que personne ne respecte, d’autant plus que la fin du 50 n’est jamais annoncée. Le plus compliqué, c’est que la limite est variable selon les véhicules. Apparemment, c’est 100 pour les fourgons comme le nôtre ou 90 pour les camions. Quand la 2×2 voies traverse des villes, la limite descend à 82 km/h pour les voitures (il parait que c’est pour pouvoir flasher à 90…) et 50 à 60 km/h selon la ville et la taille du véhicule pour les autres.

Mais le pire, c’est la mise en place depuis quelques années du contrôle de la vitesse moyenne, qui peut se faire sur plusieurs dizaines de kilomètres avec aussi des sections plus restrictives. On trouve des portiques avec caméras un peu partout, difficile de savoir si elles sont juste pour le contrôle de sécurité ou pour celui de la vitesse. Nous n’avons pas perçu de flash pour le moment, il n’y en a peut-être pas d’ailleurs. Mais il parait que pour les étrangers, la note tombe à la frontière, au moment de quitter le pays…


La ville du safran

Difficile de cacher son passé quand on s’appelle Safranbolu. Cette ville a été un poste caravanier important entre l’Orient et l’Occident du XIIIe au XVIIIe siècle, où l’arrivée du chemin de fer a mis fin à ce type d’activité. Entre autres commerces, on y vendait du safran, la ville en étant le principal producteur en Turquie. De ce passé, Safranbolu garde une architecture ottomane remarquablement conservée, qui l’a faite inscrire au patrimoine mondial de l’Unesco.

Nous n’aurons pas le plaisir de voir les champs de crocus en fleur ni d’assister à la récolte, le tout se produisant à l’automne, mais nous pourrons déguster un « thé » au safran chez Mehmet, un commerçant réputé de la vieille ville. J’ai mis thé entre guillemets car de thé il n’y en a point : l’eau chaude est directement versée sur une pincée de pistils rouges de safran au fond d’un petit verre, le liquide prenant immédiatement une magnifique couleur jaune d’or.  En parlant d’or, le safran est l’épice la plus chère du marché, se vendant entre 30 et 45 000 € le kilo, soit à peine moins que le métal précieux (54 000 € le lingot)


Thé ou café ?


Le repos du gosier

Bien sûr, nous avons craqué pour un petit assortiment….


Noir c’est bleu

Nous voici arrivés sur le littoral de la Mer Noire, et vous savez quoi ? Eh bien elle est toute bleue, parfois même d’un joli turquoise dans les zones de hauts fonds ! Encore un mythe qui tombe… Certes, tard le soir ou même la nuit, une couleur sombre apparait, mais la nuit, toutes les mers sont grises, c’est bien connu. Le pire, c’est que l’origine du nom n’a pas été élucidée. Il se pourrait que « noire » désigne le « nord », cette mer se situant au nord de la Turquie, mais ça n’est qu’une hypothèse parmi d’autres. Ce qui est admis, c’est que cette mer était autrefois un lac d’eau douce, 150 m au-dessous du niveau actuel. L’élévation suite à une fonte glaciaire aurait fait monter le niveau de la Méditerranée, qui se serait déversée par le détroit des Dardanelles dans la Mer de Marmara, qui se serait déversée par le détroit du Bosphore dans la Mer Noire. En profondeur, c’est toujours ce qui se passe d’ailleurs : l’eau y est très salée alors que très peu en surface.

Nous avons longé la Mer Noire d’Ouest en Est sur plusieurs centaines de kilomètres. C’est parfois très sauvage avec une petite route tranquille qui se faufile entre une végétation abondante – favorisée par le microclimat – et de jolies petites criques, ou plus urbanisé avec des cités portuaires ou des stations balnéaires aux constructions quelconques, reliées par une route côtière à 2 x 2 voies souvent envahie de camions.


Sinop, en bref


Les mythes tombent comme des mouches

Après la Mer Noire toute bleue, nous découvrons la ville de Samsun, qu’on imaginait plutôt sud-coréenne que turque. D’accord, c’est juste pour rire, il manque quand même le g final. Mais dans un parc de la ville, en bord de mer, nous tombons sur la statue d’une jeune guerrière, arc à la main, jupe et mocassins en daim, et la mention « Amazone » en dessous. Mais les Amazones ne sont-elles pas originaires d’Amazonie ? Eh bien non, je me suis encore fait piéger. Un panneau explicatif nous apprend qu’un peuple de femmes guerrières aurait vécu ici entre 2000 et 1000 av. J.-C. ce que les historiens jugent peu probable selon d’autres sources, aucun vestige archéologique correspondant n’ayant été retrouvé. Par contre, des traces tangibles de femmes guerrières ont été retrouvées en Ukraine et en Russie. Autant dire que le conflit actuel remonte à loin. Ç’est quand même drôle de voir réunis ici Samsun et Amazon.

Et un petit chez soi reconstitué. Admirez au passage l’intégration du déshumidificateur d’air ! Tout ça était un peu kitsch et sujet à controverse historiquement parlant, mais bon à 0,40 € l’entrée, on n’a pas demandé à être remboursés !


Ainsi s’achève cette première partie de la Turquie. Le pays est grand, prévoyez au moins 2 ou 3 autres articles sur le sujet. Alors à bientôt !

Le parcours correspondant à cet article, en version zoomable ici pour les passionnés et ci-dessous les boutons pour commenter, pour vous abonner ou pour nous retrouver sur les réseaux sociaux

128. La Grèce de Corfou aux Météores

Une fois n’est pas coutume, nous arrivons dans un nouveau pays via une île. En même temps, les îles, ce n’est pas ça qui manque en Grèce. Mais Corfou avait un côté mythique et romantique qui nous attirait. Sans parler du lien avec Achille…

Premier contact corfiote.

À peine débarqués à Corfou, nous sommes saisis par une avalanche de couleurs. Celles de l’eau bien sûr, qui nous rappellent celles de nos Caraïbes, mais aussi celles du décor à terre qui n’est pas en reste. Les maisons et les villages sont très fleuris par leurs habitants, mais la nature se débrouille pas mal toute seule et les bouillées multicolores des lauriers et des bougainvilliers parsèment la campagne sur un fond de cyprès, d’oliviers et de montagnes suffisamment élevées pour accrocher les nuages. La route côtière longe tantôt des rochers abrupts, tantôt d’adorables criques plus ou moins sablonneuses. Nous finissons par succomber au charme d’une plage de graviers blancs, peu fréquentée, et décidons d’y passer notre première nuit. Avec un superbe coucher de soleil à la clef.


Prolongations

Au petit matin, nous sommes seuls avec les voiliers ancrés dans la baie. L’eau est cristalline. Pourquoi bouger ? Rien ne presse ! Nous restons là toute la journée dans le secteur, profitant à la fois de cette plage agréable avec une eau pas trop fraîche et des sentiers de randonnée qui conduisent, à l’exclusion de toute route, à d’autres plages dans le coin. Croisant très peu de randonneurs, nous les pensions désertes, mais c’était sans compter sur l’accessibilité par la mer. De fait, elles étaient toutes occupées. Dont l’une par un de ces bateaux de croisière à la journée avec musique rythmée à fond, boissons à volonté et tous les cris qui vont avec. Beurk. Nous retrouvons avec bonheur notre petite plage pour une seconde nuit et ouvrons pour l’occasion notre bouteille d’ouzo.


L’effet Ouzo

Non ce n’est pas ce que vous croyez, nous n’avons abusé de cette boisson nationale grecque, un double distillat d’alcool neutre mélangé à divers aromates dont principalement l’anis. Incolore, le liquide prend un bel aspect blanc laiteux lorsqu’on y ajoute des glaçons et de l’eau. Cette transformation, liée à la précipitation des microgouttelettes d’huile essentielle d’anis dans l’eau, est appelée effet ouzo, même lorsqu’on l’obtient à partir du pastis, n’en déplaise aux Marseillais. Qui ne vont pas aimer non plus l’origine du nom : il serait lié aux inscriptions faites sur les caisses d’ouzo que l’on expédiait à Marseille « Uso Massalia » (à l’usage de Marseille). Et qui vont encore moins aimer, en adorateurs de leur savant fou, que ceux qui ont su résister à la tentation de l’hydroxychloroquine en se faisant vacciner ont pour la plupart profité de l’effet ouzo utilisé pour fabriquer les nano-vecteurs d’ARN messager anti Covid-19.


Étapes sur la côte

1. Le Cap Drastis

Une avancée spectaculaire de falaises toutes blanches sur une mer bleu azur. L’accès par des routes étroites n’est pas si facile, surtout lorsque les gens s’y garent n’importe comment, mais le lieu est très photogénique.

Toujours adeptes du synchronisme films ou séries / lieux visités, nous avons regardé La Folle Aventure des Durrell, l’histoire autobiographique d’une famille anglaise venue s’installer à Corfou, précisément dans le coin du Cap Drastis. Le ton est léger et humoristique, les personnages sont attachants. Surtout, l’ambiance de l’île est bien rendue. De quoi se détendre si l’été est pluvieux…


2. La plage Saint-Stéphane

Bien plus fréquentée que celle que nous avons quittée le matin. Nous y avons stationné sur le sable le temps d’une petite baignade. Bien qu’il soit étonnamment possible d’y rester la nuit, nous avons préféré la tranquillité d’un petit surplomb rocheux un peu plus loin.


3. La baie Saint-Georges

Une grande plage de galets et de sable aux eaux cristallines attirant beaucoup de familles, le bruit et les commerces qui vont avec. Mais vue de loin, c’est magnifique.


4. Le petit village traditionnel de Krini

C’est l’un des plus vieux villages de Corfou, avec sa typique place circulaire centrale où les habitants aiment se retrouver, voire s’asseoir des heures à regarder ce qui se passe. Souhaitant respecter leur intimité, nous n’avons pas fait de photo. Mais nous avons retrouvé la petite place est ses habitants sur Google Street View, dont le véhicule muni de caméras multiples a eu moins de scrupules. Imaginez tout de même que nous sommes passés là avec Roberto, en essayant de n’écraser personne !


5. Le château byzantin d’Angelokastro

On ne peut aller le voir qu’en traversant le village précédent. Il a fière allure, perché au sommet de son rocher. L’intérieur est plutôt en ruines mais offre un magnifique panorama sur la grande bleue 300 m au-dessous et sur le nord de l’île.


6. La zone touristique de Paleokastritsa

Elle est probablement l’un des endroits les plus spectaculaires de Corfou, avec ses criques turquoise entourées de collines vertes et fleuries. Avec la contrepartie d’une fréquentation maximum genre serviette contre serviette sur les plages et bouée contre bouée dans l’eau, sans parler de la circulation difficile. Nous nous sommes contentés d’admirer le paysage et de prendre quelques photos avant de fuir.


7. Le raté des plages de Limni

Ce sont deux plages jumelles qui se tournent le dos de part et d’autre d’un isthme. Aucune route n’y mène. On y accède soit par bateau, soit par un sentier très pentu. Le ciel devenant menaçant, nous nous garons au plus proche du sentier, dans le virage d’une route très peu fréquentée et remettons la balade au lendemain. Mais le temps n’était pas bien meilleur, alors nous nous sommes épargnés le sentier raide et devenu du coup potentiellement glissant. Nous avons repris la route.


8. Un petit restau à Pelekas

Nous étions venus dans ce petit village pour voir un panorama à 360° depuis l’observatoire du Kaiser. Mais le temps toujours grisâtre ne m’a pas donné envie d’immortaliser le paysage depuis cet endroit. Il nous  est resté le village, pas extraordinaire, mais doté de quelques restaurants dont l’un nous a donné envie de goûter à la cuisine grecque. Rien d’exceptionnel pour commencer, juste deux petites spécialités courantes mais surtout locales. C’est comme pour le ti ‘punch : il n’est jamais meilleur que consommé aux Antilles !


9. L’Achilleion

Elisabeth d’Autriche, la fameuse Sissi, était passionnée par la culture hellénique et notamment la mythologie. Son personnage préféré était Achille, auquel elle s’identifiait en raison de sa propre nature rebelle et indépendante. Lorsqu’après plusieurs drames familiaux et une sorte de road trip en Europe elle décida d’établir résidence à Corfou, c’est tout naturellement qu’elle dédia son palais au héros d’Homère, le baptisant Achilleion. Elle décora l’intérieur et le jardin de multiples œuvres d’art. Le premier étant en travaux, seul le second nous était accessible le jour de notre visite. Nous avons entre autres été impressionnés par la grande statue d' »Achille triomphant » de 6 mètres de haut (11 m avec le piedestal). A ceux qui souhaiteraient savoir si Sissi a fini ses jours à Corfou, je dis non non non, elle est morte assassinée à Genève 7 ans après la fin de la construction de l’Achilleion.


Visite de la ville de Corfou

Corfou, comme Oléron, est la capitale de l’île éponyme. Reste à savoir qui a commencé le premier. La vieille ville, bien conservée ou restaurée, est un melting pot des influences des différents occupants des Vénitiens aux Grecs en passant par les Français et les Anglais. Récit en images.




Passage en Grèce continentale

Nous reprenons le ferry pour la ville d’Igoumenista. Cette fois le navire est de grande taille et Roberto n’a aucun mal à y rentrer, même si la marche arrière est encore de mise. Si la soute est quasi pleine de véhicules, les passagers sont en petit nombre. Comme si personne n’avait envie de quitter Corfou… Mais c’est que nous avons beaucoup de choses à voir, nous !


Les montagnes du Nord-Ouest

Dans la logique de l’itinéraire et parce que nous avons envie de prendre un peu le frais, nous nous dirigeons vers la région des Zagoria, toute proche de l’Albanie, alternant montagnes toutes vertes, vallées profondes et quantité de roches calcaires, le tout traversé par des petites routes étroites et particulièrement sinueuses.

Notre première route, en cul-de-sac, nous amène aux villages de Micro Papigo et Mégalo Papigo, dont les maisons aux murs de roches calcaires et aux toits de lauzes sont typiques de la région, formant de beaux ensembles homogènes, entourés de falaises montagneuses impressionnantes. Entre les deux, nous passons la nuit près d’un petit canyon bordé de piscines naturelles, encore un peu fraîches pour la baignade au moment de notre visite.


Nous gagnons ensuite les Gorges de Vikos, formant le canyon le plus profond du monde si l’on en croit l’inscription sur le Livre Guinness des Records. Dans ce cas précis, c’est en tenant compte de la profondeur (900m) proportionnée à sa largeur. Parce que le Grand Canyon dépasse tout de même les 1300m de profondeur si je ne m’abuse. A ce tarif là, Roberto est le plus vaillant fourgon du monde si l’on se limite aux Fiat Ducato bleu impérial ayant parcouru 32 pays en 3 ans avec 2 trous bleus au côté gauche (si vous avez envie de relire « Le baptême du van », cliquez ici). Mais revenons à notre canyon qui est tout de même assez impressionnant, surtout lorsque l’on s’avance jusqu’au bout de l’étroit chemin à flanc de falaise qui se termine dans le vide sans aucune protection.


Sur la route du retour, nous nous arrêtons au bord d’une autre curiosité de la région : la forêt de pierre. En fait des colonnes de couches de calcaires empilées parsemant une vraie forêt. Curieusement l’endroit est moins visité que le belvédère du canyon, et nous le trouverons suffisamment calme pour y passer la nuit. Le terrain était en légère pente, mais autant dire que nous n’avons pas eu de mal à trouver de belles pierres plates pour horizontaliser Roberto. Beaucoup de voyageurs nomades transportent avec eux des cales à cet effet, mais c’est assez encombrant et nous nous accommodons volontiers d’inclinaisons jusqu’à environ 3%, d’autant que nous n’avons pas de frigo à gaz qui supporte mal les pentes.


Perte de latin

Une des grosses difficultés du voyage en Grèce est la langue. Pas tant l’oral, beaucoup de Grecs parlant Anglais, voire Français dans les lieux touristiques, que l’écrit qui apparaît pour nous comme des hiéroglyphes. La lecture des panneaux routiers est délicate. A la vue d’un panneau d’avertissement, nous nous demandons toujours sur quoi nous allons tomber, pourquoi pas sur une bombe nucléaire qui vient d’exploser, qui sait. Tout est possible ! Et nous ne pouvons même pas compter sur les cartes de Google Maps, envahies elles-aussi par les caractères grecs. Quant au traducteur de Google qui marche plutôt bien dans pas mal de langues, il apparaît ici assez limité. Bon, pour l’instant on se débrouille, mais nous avons totalement intégré l’expression « y perdre son latin » !


Le tour de Jannine

Ok, la ville s’appelle Ioannina, ce qui veut tout de même dire Jannine en Grec. Elle est située au bord du plus grand lac de la région, au niveau d’une péninsule de forme carrée que recouvre une citadelle. Une jolie route arborée longe le lac sur toute la limite de la ville, permettant aussi bien aux promeneurs et autres joggers de s’y promener qu’aux voitures de se garer à l’ombre. Et gratuitement qui plus est, comme cela semble être la règle dans la majorité du pays pour l’instant. Un très bon point pour la Grèce. La circulation, bien que raisonnable n’est pas compatible avec un bivouac, aussi nous prenons un peu de hauteur pour aller contempler la ville de haut et dormir au frais. Avec une vue splendide aussi bien à la nuit tombée qu’au petit matin. Le récit de nos visites – dont un superbe Musée de l’Orfèvrerie – en photos.



Transition saisonnière

Le printemps vient de se terminer, c’est l’occasion d’une petite pause florale avec nos dernières découvertes


Incitation à fumer

Encore une petite ville de montagne appelée Metsovo. Notre guide disait « Avant d’y arriver, vous sentirez peut-être un entêtant mélange de pin, de viande grillée et de feu de bois. Vous distinguerez ensuite des gracieux panaches de fumée s’élever au-dessus des toits de tuile (…) ». Eh bien c’était exactement ça ! La fumée au-dessus de chacun des restaurants alignés sur la rue principale semblait être la meilleure publicité du lieu. Plus ça fumait, plus grand était le nombre de gens attablés.

Ce n’était pas l’heure du repas pour nous, alors nous nous sommes contentés de fouiner dans quelques boutiques, de découvrir quelques spécialités fromagères et liquoreuses locales, et d’aller jeter un œil à une galerie artistique qui nous en faisait, de l’œil. Bon, ça ne se raconte pas trop, ça, alors je vous ai préparé un petit jeu des légendes.

a) Un bateau avec des Grecs ?
b) La conquête du Péloponnèse ?
c) Vacances en famille ?


a) L’heure de l’insuline ?
b) Bain oriental ?
c) Le Hammam des Caryatides ?

a) L’universalité de la sieste ?
b) Homard m’a tuer ?
c) Nature morte avec une femme ?


a) Portrait de la Reine Deinej ?
b) Portrait de la Reine Denim ?
c) Portrait de la Reine Sofia ?


a) Les ravages de la peste
b) Les ravages de l’alcool
c) Auto portrait

Réponses (avec les auteurs)


Compagnons d’abreuvoir

Encore un petit bivouac sympathique, juste à côté d’abreuvoirs en pierre. Ça n’a pas manqué, un troupeau de chèvres est venu nous y retrouver. Et puis le fermier qui habite juste au-dessus. Nous pensions nous faire virer, mais c’était juste pour discuter. Avec l’aide pas terrible de Google Traduction car il ne parlait pas plus Anglais que nous Grec. Nous avons tenté de lui offrir un petit verre de liqueur locale, mais il nous a dit qu’il fallait qu’il aille travailler et que ça n’était pas raisonnable…


Les Météores

Un incontournable de la Grèce que nous ne pouvions manquer : sur la région d’un ancien delta se sont formées de multiples colonnes de grès pouvant aller jusqu’à 400m de hauteur. Au Xe siècle, des moines se sont dit qu’il n’y avait pas meilleur endroit pour s’isoler du monde et prier en paix. Ils avaient d’abord occupé des grottes, mais finirent par trouver le moyen d’ascensionner certains de ces pitons rocheux à l’aide de cordes et d’échelles. Et d’y bâtir des monastères pour tenir dans la durée et mieux se défendre. Certes l’approvisionnement et les déplacements étaient ardus, principalement basés sur des filets que l’on montait avec un treuil, hissant aussi bien de la nourriture que des humains. Sur plusieurs dizaines de constructions, seuls 6 monastères fonctionnent encore et sont accessibles à la visite. Compte-tenu de la réputation et de l’originalité du lieu, nous ne sommes évidemment pas seuls. Mais les cars de touristes se contentent des monastères les plus accessibles, c’est-à-dire avec le moins de marches. Ça reste un lieu magique, tant par le décor que par l’histoire.


Le Monastère Varlaam, ci-dessous, porte le nom de l’ermite qui s’y installa pour la 1ère fois au XVe siècle. Malgré la petite chapelle et les quelques cellules qu’il avait aménagées, il y resta seul pendant 10 ans avant de mourir. Après plusieurs années d’inoccupation, deux frères vinrent s’y installer et transformer les lieux en profondeur grâce à des dons. Aujourd’hui on y trouve, outre le monastère, deux églises, un musée qui expose quelques œuvres d’art religieux et surtout explique les difficultés de la vie monacale dans les premiers temps.

L’approvisionnement et l’accès se faisaient uniquement via un treuil et des filets, pour les marchandises comme pour les humains !

C’est avec cette vue sur les Météores que s’achève ce premier chapitre sur la Grèce. Le pays est grand, nous avons encore beaucoup à découvrir. Et donc à partager. A bientôt !

Le parcours correspondant à cet article, en version zoomable ici

124. Bosnie II

Nous revoici donc en Bosnie, et plus particulièrement en Herzégovine, la province la plus au sud du pays dont la capitale régionale est Mostar, la ville la plus visités après Sarajevo. En fait, la majorité des visiteurs du pays se contentent de ces deux villes, ce qui donne une vision vraiment très partielle du pays.


Mostar

1. Les cicatrices de la guerre

Après cette dizaine de jours en Croatie, le contraste saute aux yeux : en dehors du quartier historique qui a manifestement été restauré, la ville – comme Sarajevo d’ailleurs – reste très marquée par la guerre des années 1990. Le conflit a-t-il été plus sévère ici ? Le pays a-t-il moins de moyens pour se reconstruire ? Souhaite-t-on ici ne pas effacer trop vite les traces pour ne pas oublier que tout peut repartir à tout instant ?



2. De la couleur dans la ville

Mostar se rénove peu à peu, et certains quartiers ont été doté de superbes muraux pour sortir de la grisaille ambiante. C’est très réussi.


3. Le business du vieux pont

Centré sur le célèbre pont, symbole de la ville, ce quartier semble avoir été épargné par la guerre. Il a en fait été totalement reconstruit, jusqu’au pont lui-même que les habitants ne croyaient pas pouvoir récupérer. Les petites rues pavées de motifs géométriques, la vieille mosquée, les maisons classées, les plongeurs qui sautent du pont dans l’eau glacée, ont en apparence attiré tous les capitaux pour la réhabilitation, et forcément tous les touristes. Ce quartier que privilégient les vacanciers et tour-opérateurs, avec ses bars bruyants, ses restaurants très moyens et ses boutiques de souvenirs à gogo, c’est celui que j’ai le moins apprécié, pour cause d’envahissement et de perte d’authenticité. Mais bon, le business c’est le business.


4. Descente de Lee

Afin d’éviter aux jeunes de la ville de sombrer dans les conflits de religion, une association locale s’est proposée de leur ériger la statue d’une célébrité qui leur conviendrait à tous, musulmans, catholiques, juifs ou orthodoxes. Le résultat du vote a été des plus étonnant : c’est l’acteur américain Bruce Lee, spécialiste du Kung Fu, qui a dominé tous les suffrages, et dont l’effigie en bronze grandeur nature a été placée en 2005 dans un parc de la ville. Forcément, ça n’a pas plu à tout le monde, il y a eu plusieurs tentatives de vandalisme, des déplacements de sécurité, une disparition mystérieuse finalement attribuée à une restauration volontaire par le sculpteur, avant un dernier positionnement dans un jardin public où la star des arts martiaux faisait le bonheur des promeneurs depuis 2013. Nous ne pouvions rater un tel symbole, mais sur place, impossible de trouver la silhouette familière. Nous avons juste fini par trouver le piédestal libre de tout occupant, si l’on excepte des gamins y faisant circuler des petites voitures. Renseignement pris, la statue avait de nouveau disparu 2 semaines seulement avant notre passage ! Les réseaux sociaux s’émeuvent, la police enquête, et l’on finit par retrouver notre pauvre Bruce Lee démembré, apparemment victime d’un ferrailleur désargenté. Pas sûr que la star s’en remette. 


5. Hommage en cascade

Il a été demandé à un célèbre architecte local de concevoir un mémorial aux partisans yougoslaves morts pendant la Seconde Guerre Mondiale. Le résultat est surprenant, reproduisant en béton une vaste cascade et un torrent, sur lesquelles sont parsemées des pierres tombales en forme de pièces de puzzle.


6. And the winner is…

Le plus chouette à Mostar, c’est l’environnement. Traversée par la tumultueuse rivière Neretva, la ville est entourée de sommets, dont l’un d’eux nous hébergera pour la nuit. Près d’une petite zone touristique aménagée avec tyrolienne, bar panoramique et plateforme qui s’avance au-dessus du vide pour mieux apprécier le panorama et le slogan écrit en pierres visible de toute la ville. Il affiche aujourd’hui « BiH WE LOVE YOU ». Les 3 lettres signifiant Bosnia i Herzegovina ayant remplacé le « TITO » initial.



Le monastère des Derviches de Blagaj.

Les Derviches, une branche mythique de l’Islam, avaient sans doute besoin d’un challenge pour construire leur monastère. La falaise dans laquelle ils l’ont inclus en 1520 est surplombante et largue régulièrement des rochers sur l’édifice, reconstruit à de multiples reprises. La rivière au bord de laquelle ils l’ont placé, sortant d’une grotte, crée régulièrement des dégâts en débordant. Mais ces moines sont d’une grande tolérance et accueillent volontiers les visiteurs de toutes les confessions, moyennant une petite obole bien sûr. L’endroit est éminemment photogénique et d’un calme relaxant. Enfin nous y étions avant l’heure d’ouverture des restaurants, ceci explique peut-être cela.



Le confluent de la Buna et de la Neretva.

La première prend sa source sous le monastère de Blagaj et, paisible, se jette en petites cascades dans la seconde, tumultueuse, étonnamment canalisée dans la roche à cet endroit. Quand on sait que le débit moyen de ce fleuve est de 250 m3 par seconde, on imagine que le courant doit avoir une sacrée force !


Zitomislici

Ce monastère sur notre route était prometteur : comme beaucoup de lieux de cultes orthodoxes, il était parait-il couvert de fresques de toute beauté. Malheureusement, un évènement officiel était prévu lors de notre passage, 2 voitures noires de vigiles sont venues se garer à côté de Roberto et nous ont demandé de partir. On aurait peut-être du faire le coup de la panne ou de l’anglais de collégien, mais ils n’avaient pas l’air de rigoler, alors nous avons obtempéré…


Pocitelj

C’est une ville toute en pierre et toute en pente, dont on apprécie mieux l’architecture en grimpant jusqu’à sa forteresse par des escaliers bien raides. On plaint les gens qui devaient monter les packs d’eau au XVème siècle.



Stolac

On vient y voir en général les nombreux moulins qui se succèdent sur la rivière Bregava traversant la ville, et, en saison, on se baigne volontiers sous ses jolies cascades. Vu la grisaille et les températures fraîches, nous nous sommes contentés de la balade.


Les stecci de Bjelojevici

La Bosnie compte 22 sites inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO pour ses stecci, des tombes médiévales d’un genre particulier, gravées de motifs décoratifs encore peu expliqués aujourd’hui. On y trouve aussi bien des motifs géométriques que des soleils, des croissants de lune, des armes ou encore des scènes de chasse. Et plus rarement des inscriptions en cyrillique du genre « Je n’étais déjà pas grand-chose maintenant je ne suis plus rien » ou « Pas touche à mon caillou ». Un sens de l’humour à faire regretter cette époque. Les tombes de Bjelojevici étaient en accès libre, en plein milieu de la nature. Nous avons dormi dans le coin pour profiter de la tranquillité absolue.



Le monastère de Tvrdos

Oui, nous aussi nous avons du mal avec la prononciation. Et encore je vous simplifie la vie, je ne mets pas les accents. Ce monastère serbe orthodoxe date du XVème siècle et il semble parfaitement entretenu. En tout cas l’intérieur est exquis. Les vignes et les oliviers dans les jardins tout autour laissent penser à une production locale des moines. Mais si les bouteilles de vin et d’huile d’olive présentées dans l’immense boutique portent toujours la marque du monastère, il est évident que le petit domaine ne peut pas assurer une telle production. On ne sait pas non plus si ce sont les moines qui ont aménagé le parking pour les bus des tours opérateurs ni rempli les rayons de la boutique de bondieuseries, mais apparemment les affaires marchent. Après tout tant mieux pour eux. Un truc intéressant, si j’ose dire, c’est la main momifiée d’Hélène d’Anjou dans un coin du monastère. Lorsque son père a accepté de donner sa main au roi serbe Stefan Uros Nemanjoc, il n’imaginait certainement pas une fin aussi macabre.


Trebinje la méridionale

Cette ville est la plus au sud de la Bosnie, peuplée principalement de Bosno-Serbes. Elle fait partie d’ailleurs de la République Serbe de Bosnie. C’est compliqué là-bas. Proche de l’Adriatique, elle en récupère le climat doux et ensoleillé avec 260 jours de soleil par an. Elle est toute proche d’ailleurs de Neum, la seule ville maritime du pays (la Bosnie ne compte que 21 km de côtes, enclavées entre 2 territoires croates). Nous avons trouvé Trebinje plutôt agréable avec son étonnant pont de pierre déplacé pour cause de construction de barrage à 7 km de la ville alors qu’il en était distant de 15 (mais alors pourquoi pas directement en ville ?), son opulente cathédrale orthodoxe et des célébrités peintes dans tous les coins de rues.

Ah au fait, Trebinje, qui se prononce « trébinié », tirerait son nom de Napoléon qui, lors de son passage aurait trouvé la ville « très bien ». On s’étonne tout de même d’un vocabulaire aussi pauvre de la part de l’empereur.


La Bosnie, c’est fini

Ce spot où nous passerons la nuit peu avant la frontière avec la Croatie était notre dernière étape en Bosnie-Herégovine. Nous aurons vraiment beaucoup apprécié ce pays qui nous a surpris à bien des égards et touché par son histoire fragile, le tout dans des décors grandioses et sauvages.


Dubrovnik n’est qu’à 33 kilomètres de là. Nous allons la découvrir en famille. Avons-nous gardé le meilleur de la Croatie pour la fin ? A suivre au prochain épisode !

123. Croatie III

Nous entrons pour la troisième reprise en Croatie et retrouvons l’Union Européenne, l’euro et nos forfaits Free. Mais aussi un coût de la vie un peu plus élevé qu’en Bosnie, qui reste toutefois raisonnable par rapport à la France.

Vers le monastère de la rivière Krka

Nous longeons d’abord les gorges de la Cetina, dans des paysages méditerranéens typiques : vignes , oliveraies, paysages calcaires parsemés de buissons à l’état naturel et de vignes et oliveraies lorsqu’ils sont cultivés, petits villages aux murs blancs et tuiles ocres. Nous nous arrêtons au monastère de Krka, important centre religieux orthodoxe, sans pouvoir y pénétrer en raison de réunion religieuses en cours. Nous ferons tout de même une jolie balade dans l’environnement immédiat.


Le bruit de Skradin

Nous sommes là dans un parc national dont l’attrait principal est un ensemble de chutes étagées le long d’une rivière, un peu comme à Plivice. L’accès au circuit se fait en bateau, le reste se découvre à pied en suivant des sentiers, passerelles, escaliers de pierre …et touristes. Le nombre de personnes, sans doute plus élevé que d’habitude puisque nous sommes un week-end, reste toutefois raisonnable et ne nous gâchera pas la visite. Les chutes, l’environnement, les brumes, la couleur de l’eau sont magnifiques. On en voit sortir de partout, disparaître miraculeusement à un endroit pour ressurgir quelques dizaines ou centaines de mètres un peu plus loin, et toujours en quantité impressionnante. Le débit moyen de la rivière Krka est de 55 m3 par seconde, et ça peut dépasser les 300 en haute saison. Difficile de croire ici que la planète manque d’eau, mais nous sommes en saison de fonte des neiges sur les sommets, ce n’est peut-être pas comme ça toute l’année. Le grondement de l’eau est aussi omniprésent, au point qu’ici on ne parle pas de « cascade de » mais de « bruit de ». Ainsi, la chute principale appelée « Skradinski Buk » se traduit par « Bruit de Skradin »


Vieilles bagnoles

Encore un collectionneur de voitures anciennes qui a réuni une cinquantaine de modèles dans un hangar et vous en fait volontiers la visite. Beaucoup de modèles de l’Est et quasiment pas d’Américaines, ça change un peu. Nous avons le plaisir de retrouver quelques modèles français dans lesquels nous avons circulé, enfants ou adultes. Le clou du spectacle est tout de même cette coccinelle VW dont la tôle a été totalement remplacée par du fer forgé, plaqués or 24 carats en plusieurs endroits et sertie à d’autres de plus de 8000 cristaux de Swarovski. 2500 heures de travail pour le fer forgé, 500 pour le plaquage en or et 100 supplémentaires pour les cristaux. Et l’auteur, M. Vrbanus, est là pour nous le raconter. Il nous montre aussi fièrement les nombreuses récompenses qu’il a obtenues dans diverses expositions et son inscription à la prestigieuse collection Ripley’s « Believe it or not ». La voiture est totalement fonctionnelle et sert exceptionnellement pour des mariages.

Mais le clou du spectacle, c’est ça, présentée par son auteur qui plus est :


Les villes dalmates

Nous retrouvons ici, en Dalmatie, la côte adriatique et une succession de jolies petites villes aux traits similaires. Ayant dû se défendre par le passé tour à tour contre les Vénitiens et les Ottomans, elles sont en général fortifiées et ont pu conserver un cœur médiéval aux ruelles étroites pavées d’un marbre glissant. Croatie oblige, les cathédrales et autres édifices catholiques y sont nombreux et plutôt bien entretenus.
Le seul bémol est que nous avons trouvé rassemblés dans ces villes tous les touristes que nous n’avions pas encore vus ailleurs. La saison commence tôt ! Malgré les ressemblances, chacune de ces cités possède quelques particularités

* Zadar, son orgue marin, son « Salut au soleil » et son musée du verre antique

C’est un humain qui a construit l’instrument, mais c’est la nature qui en joue, plus précisément le vent et la mer. L’orgue marin de Zadar ne se voit pas, caché sous les marches d’une jetée, mais il s’entend : au gré des vagues, des sons de rythme aléatoire et de tonalité variable sont émis, évoquant tantôt une flûte de pan tantôt des chants de baleines. Une étrange musique qui semble hypnotiser quelques auditeurs, manifestement assis là immobiles depuis un bon moment. Juste derrière, c’est un grand disque bleu sur le sol qui attire plus ou moins la foule. Une sorte de panneau solaire géant qui réfléchit différemment la lumière du soleil selon les moments de la journée.  Cette fois, le concepteur – le même que pour l’orgue – a voulu faire davantage visuel qu’auditif, mais nous n’avons pas vraiment perçu de jeu de lumière, tandis que le bruit des gamins qui se coursaient sur le panneau dominait la visite. Nos nous sommes réfugiés dans le musée voisin, dédié au verre antique et notamment à ses astucieux procédés de reconstruction.


* Turanj et son île en forme de cœur

Il suffit de jeter un œil sur Google Earth, dans la zone maritime proche de la ville de Turanj, et vous allez la trouver. Elle n’a peut-être plus aujourd’hui l’aspect sauvage de la photo satellite, il parait qu’un promoteur immobilier est entrain de tout raser pour en faire un projet ciblé sur l’amour. Vraiment ?


Spot dodo

Juste avant notre destination suivante, Sibenik, nous faisons halte pour la nuit – les vanlifeurs ont coutume d’appeler ça un « spot dodo » – sur les hauteurs de la ville. Le petit chemin étroit terreux et caillouteux a donné un peu de fil à retordre à Roberto, mais le panorama à l’arrivée sur cet ancien fort était exceptionnel. Une fois de plus nous étions seuls pour la nuit.


* Sibenik, le coup de coeur ?

La ville se découvre d’abord en longeant les quais, où les locaux prennent l’habitude de boire leur café le matin. Après, il suffit de s’enfiler dans n’importe quelle petite ruelle, tout est à flanc de colline. Les pierres des maisons, les dalles de marbre du sol, les petites curiosités à découvrir à chaque coin de rue ou de placette, tout est un régal pour les yeux et, malgré le temps radieux, la foule n’est pas encore au rendez-vous. Nous visitons, entre autres, la belle cathédrale St Jacques, à la fois gothique et renaissance, curieusement bordée d’une frise extérieure de 71 portraits d’anonymes, vraisemblablement des donateurs, plus ou moins gentiment caricaturés selon l’importance de leur don. Une porte encadrée de lions, supportant des statues d’Adam et Eve, ainsi qu’un baptistère finement sculpté complètent l’ensemble. Nous finirons bien sûr par goûter à la cuisine locale, bonne sans être exceptionnelle. Mais le joli cadre pardonne tout.


* Spot dodo bis


* Rogoznica et son oeil du dragon

Cette cité balnéaire serait banale sans son petit lac d’eau de mer entouré de falaises, formé selon la légende par l’œil qu’un dragon fâché se serait extirpé avant de le jeter sur la falaise, fondant la roche à cet endroit, et selon la science par l’envahissement d’un trou naturel du sol par la mer Adriatique à la fin de l’âge de glace. C’est comme pour les décomptes de manifestants, on ne sait jamais qui a raison.


* Trogir, heureuse et cachée

Trogir est une petite ville sur une petite île prise entre le continent et une île plus grande, ce qui l’a peut-être miraculeusement protégée des différentes agressions (vivons heureux vivons cachés) et lui a permis de conserver des beaux monuments intacts de styles Roman et Renaissance derrière ses murailles. Les forces napoléoniennes ont aussi laissé une petite gloriette en souvenir de leur passage.


* Kastilac alias Braavos : have you GoT it ?

Kastilac n’est rien d’autre qu’un petit château sur un îlot carré, mais il attire du monde parce qu’il a servi de lieu de tournage pour être la ville de Braavos dans la série Game of Thrones (GoT pour les intimes). Beaucoup d’autres sites de Croatie ont été utilisés pour cette série, ainsi que pour le cinéma plus largement. Une partie non négligeable du tourisme croate se développe d’ailleurs autour de ce thème.


* Split, 2ème ville de Croatie

La ville se démarque par ses nombreux vestiges romains (son cœur fortifié, le Palais de Dioclétien, en est un à lui tout seul), son supermarché Spar classé au patrimoine mondial de l’Unesco (pour ses murs, pas pour ses boîtes de petit pois), sa statue géante de Grégoire de Nin (un évêque du Xe siècle qui lutta pour imposer le Croate à la place du Latin, devenant pour cela porte-bonheur à condition qu’on lui caresse le gros orteil), sa belle cathédrale Saint-Dominius ayant débuté sa vie par un mausolée en l’an 311, quand l’empereur romain Dioclétien y fut inhumé, avant de connaître une forte ascension sociale pour devenir église au Ve siècle puis cathédrale au VIIe.


A partir de Split nous quittons pour une quinzaine de jours la côte dalmate en nous dirigeant vers les montagnes. Nous ferons une première étape au site archéologique de Salona, l’ancienne capitale romaine de la province de Dalmatie, ayant hébergé jusqu’à 60 000 personnes. Puis une seconde à Klis pour visiter sa forteresse bâtie sur un éperon rocheux qui domine toute la campagne environnante. Même pour les non spectateurs de GoT (oui c’est Meereen dans la série), la grimpette valait le déplacement, rien que pour le panorama magnifique.



Et bien vous savez quoi, nous allons repasser en Bosnie, ou plutôt en Herzégovine, la province qui est associée au pays depuis sa création. Mostar la seconde ville du pays et quelques sites spectaculaires nous y attendent. A bientôt là-bas !