39. La Lituanie à tous les temps

Juste à temps !

Aussitôt la frontière franchie, les portes de la Lettonie se sont refermées derrière nous, le pays venant d’annoncer un nouveau confinement de 3 semaines en raison d’une explosion du nombre de cas de covid. L’incidence atteignait en effet ce jour-là les 1180 cas par million d’habitants (contre 80 pour la France), ce qui constituait le record mondial du jour. Nous nous en tirons fort bien mais restons inquiets pour la suite devant ce réveil de la pandémie en Europe centrale : la Lituanie et la Pologne connaissent également une forte augmentation de l’incidence de la maladie et pourraient bien refermer leurs portes du jour au lendemain. Ce qui serait un problème dans le cas de la Pologne, car c’est le seul pays qui nous permet de rejoindre l’Europe de l’ouest par voie terrestre. Nous pourrions toutefois gagner l’Allemagne en ferry dans le pire des cas.


Un temps en arrière

Salle de bains de la Duchesse de Courlande (Château de Rundale – Lettonie)

Un courrier de lecteur nous est parvenu. La parution dans l’article précédent d’une photo dans le Château de Rundale, montrant la salle de bains de la Duchesse de Courlande, a en effet attisé la curiosité de Raymond, un de nos lecteurs fidèles, camping-cariste de surcroît, qui pose la question suivante : « Les toilettes de l’archiduchesse sont-elles sèches ? ». Nous ne pouvons que répondre par l’affirmative : « Oui, archi-sèches ! ». N’hésitez-pas vous aussi à poser des questions aussi pertinentes.


A la croisée des temps

La Colline des Croix – Siauliai – Lituanie

Nous avons abordé la Lituanie par un site incontournable, la Colline des Croix, au nord de la ville de Siauliai. Cette colline fortifiée était déjà un lieu de culte au XIVème siècle et les Lituaniens venaient y déposer des croix, des crucifix, des effigies de la Vierge Marie et des rosaires. Les envahisseurs successifs du pays, à commencer par les Russes en 1795 ont interdit toute forme d’expression de la religion et détruit les lieux à plusieurs reprises. Mais les Lituaniens, prenant cela comme une forme de résistance ont continué, parfois au péril de leur vie, à en déposer. Et plus les bulldozers passaient, plus le lieu devenait important et plus les Lituaniens apportaient de croix. Aujourd’hui, leur nombre dépasserait les cent mille, autant dire l’ambiance qui règne lorsque l’on s’approche puis que l’on s’immerge dans ce lieu magique.


Des chats tant et tant

A peine une heure plus tard, nous changions complètement de registre, incapables de résister à l’affiche annonçant un musée du chat. Établi depuis une trentaine d’année, ce musée a largement eu le temps d’étoffer sa collection et de décliner le thème presque à l’infini. Comme au cours de nos dernières visites, mais là c’était un comble, il n’y avait pas un chat. C’est-à-dire pas d’humains, appelons un chat un chat. Mais par contre des chats il y en avait plein, aussi bien des représentations sur les murs, les plafonds et dans les vitrines que de vrais chats qui allaient d’une pièce à l’autre, venaient se frotter contre nos jambes, cherchaient à se faire caresser ou faisaient la sieste confortablement installés sur des coussins. Ceux-là, connaissant le proverbe, nous avons fait bien attention de ne pas les réveiller. A un moment dans une vitrine garnie de chats en céramique, nous avons repéré une souris (de la même matière). Que faisait-elle ici ? Vous donnez votre langue au chat ? Eh bien elle a été donnée par le musée de la souris… Bon je sais, pas de quoi fouetter un chat. En fin de visite, j’ai un peu les yeux qui piquent et vous devinez quoi dans la gorge, une allergie peut-être qui me donne en effet l’idée de partir. Mais la personne de l’accueil nous fait sortir par une autre porte qui mène elle à une sorte de zoo en appartement accueillant une vingtaine d’espèces diverses. D’abord quelques oiseaux exotiques, certains très sociaux comme ces touchants perroquets faits l’un pour l’autre partageant la même volière, d’autres à l’inverse installés séparément car s’entendant comme chien et chat, s’échangeant même des noms d’oiseaux. Ensuite quelques reptiles dont un iguane d’un mètre de long, quelques insectes dont des phasmes se dissimulant dans une sorte d’herbe-à-chat. Enfin une floppée de petits rongeurs dont de gentils chinchillas et de bons rats (à bon chat…). Tout cela nous a été présenté en visite guidée VIP par un jeune homme sympathique. Une belle surprise. Nous avons fini par retrouver Roberto en suivant les empreintes de chats dessinées sur le sol, heureux de ce guidage car la nuit commençait à tomber. Mieux valait en profiter avant car comme vous le savez, la nuit ils sont tous gris.






Au temps de la Guerre froide

Portes ouvertes à la base de lancement de missiles nucléaires (Plafellai)

Grâce au traité de non-prolifération des armes nucléaires signé par 191 pays en 1970, les bases de lancement de missiles ont été démantelées petit à petit, les cinq bases Russes installées en Lituanie comme les autres. C’est l’une d’entre elles que nous avons visitée. Un lieu étonnant et rarement exposé au public, laissé dans son état naturel afin que l’on s’imagine bien l’ambiance de l’époque. Tout est bien sûr en souterrain, le grand bâtiment technique de 2 étages comme les 4 silos de 30 mètres de profondeur ayant hébergés des missiles munis de têtes nucléaires. Des mannequins rappellent les équipes qui se relayaient jour et nuit pour pouvoir en 48 minutes lancer un missile à l’autre bout du monde dès que l’ordre en serait parvenu. Heureusement, cela n’est jamais arrivé, même si la guerre froide a bien eu lieu.





Heureusement, même si cette installation a joué un rôle stratégique lors de la Guerre Froide, aucun missile n’en a jamais été lancé !


Les sculptures de l’étang

De premier abord, ces quelques scupltures au bord de l’eau ne payaient pas de mine, mais …

Le Jardin Orvydas, près de la ville de Salantai, héberge une multitude de sculptures en pierre ou en bois réalisées par un maçon et son fils (Orvydas est leur nom de famille) à partir des années 1920. Initialement destinées au cimetière de la ville, elles furent cachées dans la ferme de leurs créateurs pour échapper à la furie destructrice vis-à-vis des objets religieux des occupants soviétiques dans les années 60. Aujourd’hui la famille peut bien sûr exposer librement ces œuvres dans une sorte de grand jardin agrémenté de quelques pièces d’eau. Le truc, c’est que tout est disposé un peu n’importe comment, dans une nature qui reprend peu à peu ses droits et que cela donne un charme fou. Le mélange sculptures, assemblage de pierres, troncs d’arbres moussus et lianes pendantes nous a beaucoup rappelé Angkor Wat. Un lieu surréaliste et intemporel que nous avons adoré.






Quand le taon s’est figé

C’était il y a 50 millions d’années. A cause du réchauffement climatique d’alors (et on veut nous faire croire que c’est tout nouveau !) la résine qui dégoulinait des sapins de Scandinavie a été emportée au large par la mer Baltique qui montait et s’est déposée au fond. Personne ne venant la récupérer, elle a fini par se fossiliser et venir s’échouer sur les plages de la côte ouest de la région allant de l’actuelle Lituanie à l’actuelle Pologne. Les hommes préhistoriques ont ramassé ces cailloux bizarres et ont trouvé que ça ferait de jolis cadeaux pas chers pour leurs femmes préhistoriques qui adoraient les petites bestioles piégées dedans. Le problème est qu’elles en voulaient toujours plus et qu’il a fallu pour les satisfaire aller en chercher davantage directement au fond de la mer. C’est à ce moment que l’exploitation de l’ambre a commencé. Nous avons appris tout ça ou presque au musée de l’ambre de Palanga. Grâce à eux, nous sommes moins bêtes et savons maintenant que, contrairement à ce qu’affirme L’Oréal, l’ambre ne vient pas du soleil.





Le temps d’une pause

Palanga est aussi une station balnéaire déjà très prisée à l’époque soviétique et dont la tradition a été reprise sans état d’âme par les Lituaniens. Une grande rue perpendiculaire à la plage héberge moult restaurants, boîtes de nuit, attractions foraines (avec autos-tamponneuses et autres tirs aux ballons de baudruche) et magasins de souvenirs, bref tout ce qui propage le covid. Heureusement qu’il y a la bière pour tuer les microbes. Les locaux en boivent 160 litres par an tout de même. Nous sommes allés au tester le breuvage national et la cuisine locale au restaurant, avant de nous dégourdir les jambes jusqu’au bout de la jetée qui s’avance dans la mer, au milieu des kite-surfers. Vivifiant.



Mesurer le temps

C’est en arrivant dans la ville suivante, Klaipedia, que nous nous sommes précipités avant sa fermeture dans le musée de l’horlogerie. Nous avions déjà abordé ce thème à Cluses en Haute-Savoie, où l’accent était plutôt porté sur la technologie, ce qui semblait normal dans la vallée du décolletage idéale pour trouver toutes les machines-outils et les pièces nécessaires. Ici l’histoire de la mesure du temps et l’aspect artistique sont davantage pris en compte que la technique elle-même, et c’était tout à fait intéressant. Vous trouverez les informations nécessaires en commentaires des photos





Un port tant important

Car il fut la raison d’être de la ville dès le XVème siècle alors qu’elle appartenait à la Prusse. Idéalement située au bord de la Mer Baltique, Klaipédia a assuré les fonctions de port de commerce, de construction navale, de point de traversée pour l’isthme de Courlande la reliant à la Russie et de base stratégique pour les sous-marins nazis. Les trois premières fonctions sont encore assurées aujourd’hui. On ne sait pas si le « fantôme noir » que l’on voit sortir de l’eau sa lanterne à la main est là pour rappeler la dernière


Ces sculptures que les Lituaniens aiment tant

C’est une véritable passion. Qu’elles soient de bois ou de pierre, on en voit partout en campagne comme en ville. Klaipėda ne déroge pas à la règle et en héberge un certain nombre. Plus d’une centaine dans ce parc du centre-ville, la plupart identifiées par un nom qui ne nous a pas convaincus et que je me suis autorisé à rebaptiser ci-dessous. Et quelques autres ça et là dans les rues, comme cet homme aux airs de KGB qui guette sa proie ou cette femme devant la gare avec son petit garçon et sa valise, offerte au pays par les Allemands en souvenir de la douleur des familles germaniques qui ont dû quitter le pays lorsqu’il a été rendu à la Lituanie. Étonnant que l’œuvre soit encore debout vu ce qu’on subi les Lituaniens pendant l’occupation nazie

Qui veut la baballe ?

Un grand pas pour la femme, un petit pas pour l’humanité

La princesse Léïa de Milo
Zz*$uh&igt xù§km tout le monde !

Quand je veux courir plus vite j’enlève l’enclume

La Vénus de Milo enlève le bas
Ze veux pas Zansen, ze veux Fizer!

Le premier qui rigole je lui en donne aussi du Propecia

La Vénus de Milo juste avant l’accident


La plus belle ville, je t’en fiche !

C’est le guide qui le dit : « Compacte et pavée, la vieille ville (de Kédainiai) est une des plus jolies du pays ».  « Compacte », ok, cette vieille ville ne doit guère dépasser le kilomètre carré. « Pavée », si on veut, mais je dirais plutôt « cailloutée », car les galets de tailles variables disposés sur le sol à des profondeurs irrégulières et sur lesquels il est difficile de marcher sans se tordre les chevilles n’ont rien des pavés bien taillés qui enjolivent les rues moyenâgeuses. Quant à « jolies », à part de rares maisons originales bien que pas trop entretenues, ce centre de la vieille ville comporte surtout des édifices sans charme quand ils ne sont pas à moitié en ruines. Allez, mettons tout de même en valeur quelques éléments qui sortent du lot. A noter que cette ville, ceci explique peut-être cela, est la capitale lituanienne du concombre…


Pas une injure pour autant

Street-art près du centre de Kaunas

Mon père est de la génération où l’on apprenait par cœur non seulement les départements français avec leurs préfectures et sous-préfectures, mais aussi les pays du monde avec leurs capitales. Lorsque je lui ai dit que nous étions en Lituanie, il m’a demandé si j’avais visité sa capitale Kaunas. Je lui ai répondu qu’il devait se tromper, que la capitale c’était Vilnius. Pendant que nous discutions d’autres choses, Claudie a brièvement recherché sur Internet et confirmé que Kaunas avait bien été la capitale temporaire de la Lituanie de 1920 à 1940, entre le début de son indépendance et son annexion par l’URSS. Quelque part mon père avait donc raison et je le lui ai confirmé. Il aurait pu me répondre « Je te l’avais bien dit, Kaunas ! » sans pour autant faillir à sa politesse habituelle. Cela dit, la capitale déchue nous a fortement déçus. A de rares exceptions près, elle n’est qu’un immense chantier avec ses rues retournées (dont la rue la plus typique de la vieille ville, totalement inaccessible) et ses façades bardées d’échafaudages ou enveloppées de plastique. Des panneaux nous apprenant que la ville sera la « capitale européenne de la culture » en 2022, nous avons peut-être là la raison de ce grand chamboulement.



Un jour épatant

Société philharmonique nationale (Vilnius) : enfin un beau bâtiment, de style classique

Les capitales (les vraies) déçoivent rarement. Vilnius n’a pas dérogé à la règle. Nous avons surtout visité la vieille ville, inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1994, miraculeusement préservée malgré les guerres et les occupations successives du pays. Le beau temps était de la partie, les distances raisonnables : nous avons tout fait à pied. Nous trouvons là enfin les beaux bâtiments du pays, dans une vieille ville assez aérée avec de grandes places et pas mal d’espaces verts, relativement préservée de la circulation automobile mais aussi de la prolifération des multinationales de la mode ou de la technologie. Nous grimpons apprécier la vue au sommet de la colline du château (en ruines pour sa part), visitons la belle cathédrale et allons nous restaurer dans un établissement qui sert une cuisine authentique et fraîche, un peu comme celle de nos maîtres-restaurateurs. Nous voulions rendre visite ensuite au musée d’art moderne (MO muziejus) malheureusement en fermeture hebdomadaire ce mardi. Nous nous sommes reportés sur le Iliuzijų muziejus, que vous aurez traduit pas le musée des illusions. Toujours amusant de voir comment notre cerveau et notre vue son bernés par quelques procédés simples. Nous y étions peu nombreux et avons été chouchoutés par le personnel qui donnait volontiers le mode d’emploi et les explications pour certaines illusions, nous aidant même à réaliser quelques photos surprenantes.








Une curiosité enfin que ce quartier de Vilnius auto-proclamé pas ses habitants République d’Uzupis en 1998. Elle est dotée d’un drapeau, d’un hymne national, d’une monnaie (l’eurouz), d’une armée de 12 hommes, d’une constitution (écrite par des poètes et affichée en de nombreuses langues dans une rue), d’un président élu à vie et d’une reine élue chaque année. Le 1er Avril, jour de la fête nationale, les ponts autour du quartier sont fermés et les « passeports » des locaux sont contrôlés pour éviter tout débordement. Car en effet ce jour-là, il y a distribution gratuite de bière pour tout le monde. La population est constituée en grande partie d’artistes et de squatteurs. Les ateliers et galeries y sont légion.


Le charme d’antan

Nous terminons notre parcours lituanien par la ville de Druskininkai, toute proche de la frontière avec la Biélorussie. Elle a la particularité d’être une station thermale réputée. Son eau chloro-sulfatée sodique et calcique, ses vieux bâtiments des années 1900 et même sa télécabine nous ont fait replonger un instant dans notre ville thermale d’attache, Saint-Gervais, où nous avons résidé 25 ans.


La Pologne nous attend…

Eh oui, vous l’avez deviné, c’est notre étape suivante. Alors à bientôt et merci de nous lire. Les liens pour commenter ou s’abonner sont dans le menu.

Parcours en Lituanie

Notre trajet depuis le 19 Avril dernier, soit 20 300 km parcourus.

8. Le grand départ !

Départ de St Barth - 17/4/2021 - 8h45
Départ de St Barth – 17/4/2021 – 8h45

Nous quittons Saint-Barth, son soleil, sa chaleur, sa sécurité, ses boutiques et ses restaurants ouverts pour une vie meilleure dans une métropole confinée, grisailleuse, froide, insécure, confinée à 10 km le jour et sous couvre-feu la nuit. N’est-ce pas marcher un peu les pieds sur la tête ? Oui, le moment choisi ne parait pas le plus propice, mais une date c’est une date et notre départ était depuis longtemps organisé pour ce jour-là. Et puis nous sommes dûment tamponnés et vaccinés, aucun papier, aucune attestation ne manque dans le classeur infailliblement organisé par Claudie. Nous avons des motifs impérieux en veux-tu en voilà pour les différentes destinations, surfant sur notre absence totale de domicile : jusqu’à Toulouse, nous sommes censés rejoindre à Agen notre fils, lui-même censé nous héberger dans son studio jusqu’à ce que nous dénichions un logement. De Toulouse à Rodez, dans la direction opposée à Agen donc, nous rejoignons Charlène, notre hôte Airbnb, censée nous héberger dans sa maison jusqu’à ce que nous trouvions à nous loger. C’est Roberto que nous trouverons à Rodez, mais comme les autorités n’admettent pas qu’un fourgon aménagé soit une résidence, ce qui complique la vie de nombreux nomades qui vivent dans leur véhicule à l’année, il nous faut un autre motif. Une fois l’aménagement finalisé nous rejoindrons Agen avec une nouvelle attestation de notre fils, en attendant l’assouplissement de la règle des 10 Km annoncée le 3 mai. En réalité, à part les tests PCR exigés avant chaque embarquement, rien d’autre ne nous sera demandé tout au long de notre voyage. Nous sommes presque déçus !

Arrivée à Toulouse - 18/4/2021 - 11h
Arrivée à Toulouse – 18/4/2021 – 11h

Nous abandonnons ensuite la ville rose dans une voiture de location dont le caractère hydride m’aura permis de me ridiculiser auprès du loueur. Celui-ci m’avait auparavant proposé de me surclasser, me demandant si je conduisais « tout type de véhicule », notamment à boîte automatique. Et moi de confirmer que oui, à Saint-Barth il n’y avait que ça. Et puis au volant du véhicule, une Lexus toute neuve, j’ai cherché en vain où insérer ma clef de contact. Je me suis cru sauvé en apercevant le bouton du démarreur (j’ai déjà eu ça sur un Renault Espace précédemment) mais j’ai eu beau presser dix fois, la voiture n’a pas plus réagi qu’un comateux sous anesthésie générale. Je suis retourné vers le loueur qui m’a répondu goguenard que, ben oui, une voiture hybride, ça démarre sur le moteur électrique, donc qu’il faut juste appuyer sur la pédale pour que ça avance ou recule !

J’ai eu un peu l’impression qu’après 10 ans à St Barth, isolé de la vraie vie, je débarquais de ma campagne profonde…

A suivre…

7. Organiser le départ

Réduire nos biens comme une peau de chagrin…

Notre déménagement

Déjà, déménager à St Barth n’avait pas été une mince affaire. Quitter une grande maison de 180 m² équipée pour 6 personnes pour partir à 4 vivre dans un appartement de 80 m² avait posé pas mal de dilemmes : Tout ce que nous souhaitions emporter devait tenir dans un container de 40 pieds maximum. Si le choix d’emporter ou non les skis et les pneus contact ne prenait qu’un instant, c’était plus compliqué pour des objets plus personnels comme le piano, la bibliothèque complète de livres, ou encore les bibelots attachés à des évènements particuliers de notre vie. A force de vente en ligne ou aux amis, de dons aussi, de restitution de leurs effets personnels à nos enfants les plus grands, de quelques sacrifices et enfin grâce à l’aide de déménageurs spécialistes du remplissage des conteneurs à la manière d’un jeu de Tetris, nous sommes parvenus à faire tenir 25 ans de notre vie dans un container de 20 pieds seulement. Mais 3 ans plus tard, le problème s’est posé de nouveau lorsque nous avons quitté notre location pour un appartement bien à nous, de 66 m² cette fois. Ce qui a imposé un nouveau tri dans nos affaires, curieusement plus simple que le premier car nous nous sommes principalement débarrassés de ce que nous avions cru indispensable mais qui ne nous avait pas servi pendant ces 3 années. Nous pensions l’affaire terminée, mais ça, c’était il y a 7 ans. Et il y a 7 ans nous étions loin d’imaginer le projet actuel. La problématique était cette fois un peu plus corsée puisqu’il fallait tenir le contenu d’un appartement de 66 m² et dix ans de notre vie à St Barth dans un fourgon de 10 m². La décision de louer notre appartement en meublé nous a déjà tiré une grosse épine du pied. Mais il a fallu de nouveau donner, vendre ou jeter tout un tas de choses qui nous paraissaient importantes à garder. Cela a été une vraie prise de conscience de notre mode de vie consuméristes dans lequel nous accumulons ou achetons à tout va des biens non essentiels. Pourquoi dix paires de chaussures ? Pourquoi 4 téléphones en 10 ans ? Pourquoi garder tous ces outils rouillés ? Pourquoi garder toutes ces factures anciennes alors que la garantie des achats concernés est dépassée depuis bien longtemps ? Après de nouveaux choix drastiques et quelques heures passées devant le scanner, nous avons pu réduire notre vie au contenu d’une dizaine de petits placards laissé sur place, à deux palettes expédiées en métropole principalement destinées à nos enfants, et 2 valises de 23 Kg + 2 bagages cabine de 12 Kg.

Gérer la fin de l’activité professionnelle…

Copie d'écran site info retraite

J’imagine que quitter une activité salariée peut se résumer à informer sa caisse de retraite et son patron puis organiser son pot de départ, mais c’est entrer dans un domaine que je ne connais pas. Ce n’est donc qu’une supposition de ma part que clore une activité libérale est beaucoup plus compliqué que ça. Il vaut mieux ne pas trop s’y prendre au dernier moment car certaines formalités prennent du temps. Surtout à St Barth où le courrier prend souvent le chemin des écoliers et où les appels téléphoniques vers la métropole exigent parfois de sacrifier quelques heures de sommeil. J’ai commencé 6 mois avant mon départ, par la dénonciation de mon bail professionnel, puis, après une dernière vérification de mon relevé de carrière, par déclarer ma cessation d’activité sur le site info-retraite.fr. J’ai cru naïvement qu’il suffisait de préciser la date correspondante et de cliquer sur le bouton « Oui je suis d’accord pour me sacrifier et ne pas attendre la réforme des retraites », mais je suis tombé de haut devant la quantité de renseignements à fournir. Mais que peuvent-ils bien faire de l’organisme qui m’a délivré mon livret militaire où de l’âge auquel chacun de mes 4 enfants est devenu autonome financièrement ? Et aussi pas mal de pièces à joindre en ligne et les agacements qui vont avec : alors que ma carte d’identité est déjà scannée recto-verso sur un seul fichier, on me demande d’envoyer le recto et le verso séparément, m’obligeant à scanner de nouveau le document. Info-retraite est censé retransmettre directement à tous les organismes concernés, mais en fait ils renvoient à un autre site qui se charge lui de faire la manip, avec de nouvelles vérifications au préalable. Et puis chaque organisme ensuite vous recontacte et vous redemande d’autres justificatifs ! Mais cela ne concerne que les organismes de retraite, car il faut aussi prévenir l’ordre des médecins, les caisses de sécurité sociale, le centre de formalité des entreprises, la mutuelle et j’en passe.

Le plus problématique et non encore résolu a été de trouver un successeur pour mon activité. Malgré les petites annonces à répétition, la conjoncture n’est probablement pas favorable à l’installation d’un nouveau spécialiste ici. Il restait enfin la même problématique que pour l’appartement, réduire à pratiquement zéro les biens professionnels qui m’ont accompagné pendant trois décennies et demi. J’ai quasiment tout donné en espérant que ça resservira un peu.

déménager son bureau professionnel

Mais je ne suis pas plus attaché que ça à mon passé professionnel. J’ai pourtant adoré mon métier, mais il y a un temps pour tout. Une page se tourne, il est temps désormais de rejoindre Roberto et de profiter de notre nouvelle vie.

A suivre…

6. Rêver le voyage avant de partir…

Chez nous Jean-Michel est cartésien donc il conçoit Roberto au millimètre près, l’économie de place, d’énergie, notre confort, bref il a les pieds sur terre … Moi je rêve, le nez dans les guides et les cartes, je veux tout voir, traverser tous les pays de la terre, connaitre toutes les populations, leurs coutumes, leur cuisine.

Depuis déjà longtemps je suis des blogs de voyageurs, des pages Facebook d’aventuriers-nomades et tous m’ont bien inspirée pour tracer notre propre chemin. J’ai décidé, puisque nous sommes toujours dans le rêve, de ne pas tenir compte de la pandémie, de nous faire un tour du monde idéal. Il sera toujours temps de s’adapter, de commencer par les continents les plus faciles d’accès.

Tout est dit !
Guides illustrés à la recherche d’idées
La carte Michelin avec toute l’Europe en version papier
Les pages Ouzbékistan du Lonely Planet Monde
Le Petit Futé Europe et sa page Pays de Galles

A l’arrivée en métropole nous récupérerons Roberto chez Stéphan (Loisirs 12) et nous pensons en faire notre nid douillet tout en nous garant devant chez nos enfants (on est vraiment en manque de les bisouter), donc tranquillement on s’adapte au plus près de notre Roberto pour ensuite faire une vraie équipe de trois (mon chéri-doudou, Roberto et moi).

Puis à l’arrivée de notre container venu des Antilles, on dépotera – ça veut dire vider un container 😊 -, on prendra un peu de temps pour voir la famille élargie puis, comme le printemps sera là et qu’on sera prêts, et bien on partira … Ne vous emballez pas, on reste en Europe car en Octobre nous avons un trek au Népal avec les copains-cousins, prévu déjà en 2020, reporté en 2021 et on veut y croire. Et puis ensuite il y a les fêtes de Noël et cette année on en profiterait bien pour les faire avec nos enfants.

Mais début Janvier nous espérons que Roberto fera sa première traversée en cargo, direction l’Australie où nous le rejoindrons en avion pour le dédouaner et partir à la rencontre des kangourous ! Pendant les 90 jours de traversée, nous rejoindrons et visiterons la Nouvelle Zélande, la Nouvelle Calédonie, avec un petit vol aller-retour vers la Polynésie pour voir Amanta, Rupee et le baby.

Ensuite tout dépendra des bateaux-cargos qui pourront transporter Roberto. Asie ? Amériques ?

Peu importe l’ordre, chaque continent est prévu. Voici quelques exemples d’itinéraires trouvés sur le net :

Un grand itinéraire en Europe
Europe et Asie
Les îles Lofoten
La Transaméricaine
Un trajet en Amérique du Nord puis du Centre
Etats-Unis

J’ai beaucoup lu, annoté tous les guides et les cartes, préparé des itinéraires idéaux pour ne rien rate. Bref si tout va bien, nous sommes partis pour 7 à 8 ans. Nous savons malgré tout que tous les ans nous laisserons Roberto en garde dans le pays où nous serons et nous rentrerons voir les enfants 1 mois ou 2.

Nous espérons faire de nombreuses rencontres mais nous comptons aussi sur la famille et les amis, pour venir nous retrouver, et faire un bout de chemin avec nous, visiter un site, une capitale…

L’aventure, le minimalisme, c’est pour très bientôt 😊   

5. La gestation de Roberto

La gestation de Roberto

Maintenant que nous connaissons l’enveloppe de notre future maison roulante, il va falloir procéder à son aménagement intérieur. La démarche va nécessiter astuces et précision car nous devons faire tenir le maximum de mobilier et tous les accessoires techniques prévus dans un minimum de place, tout en soignant l’ergonomie. Pas question de s’apercevoir au dernier moment qu’il faille rentrer le ventre pour passer de profil entre la cuisine et la salle de bains ou encore que nos deux réservoirs de 100 litres d’eau ne permettent plus de fermer les portes arrière !

Nous pouvons certes nous aider des plans standard des fourgons du commerce, ils donnent une bonne idée de la multitude des combinaisons possibles, mais il ne faudra pas pour autant les suivre à la lettre puisque nous avons déterminé assez tôt qu’ils ne nous convenaient pas.

Néanmoins, ils donnent une bonne idée des proportions entre les différentes zones aménageables et permettent de vérifier que nos dimensions de banquettes, de tables ou encore de couloirs sont réalistes, pour ne pas dire ergonomiques

Le dessin des plans pourrait bien sûr se limiter à quelques feuilles de papier millimétré, mais ça rend compliqué toutes les modifications et les essais. Certains candidats aménageurs vont même jusqu’à confectionner leurs meubles en carton en grandeur nature. Pourquoi pas, mais nous n’avons pas assez de place chez nous !

L’informatique nous parait donc incontournable, et ça tombe bien, il existe plusieurs outils pour ça.

Logiciel Véhiplan

J’ai d’abord essayé Véhiplan, un logiciel d’aménagement 3D spécialement conçu pour les fourgons et autres utilitaires. Simple d’utilisation, fourni avec de nombreux modèles de fourgons, il est rapidement productif. Je l’ai trouvé malgré tout assez limité par rapport à mes besoins.

Avec Google Sketchup, on passe carrément à la vitesse supérieure ! Certes cela va se faire au prix d’un apprentissage de quelques heures, mais cela en vaut vraiment la peine. De plus, de nombreux tutoriels sont disponibles sur Internet, cela facilite bien la tâche. Le principe de base est tout simple : on crée d’abord une forme en 2 dimensions avant de lui donner ensuite l’épaisseur souhaitée, le tout au millimètre près. Après, une multitude d’outils permettent de plaquer des textures, d’arrondir les angles, de mélanger les objets entre eux et même de les animer. On peut reproduire ainsi n’importe quel objet ou n’importe quelle structure réelle, du dé à coudre de votre grand-mère à l’imposant Taj Mahal. J’ai adoré visionner sa construction en temps réel sur la vidéo ci-dessous.

Si l’on peut tout réaliser de zéro, cela n’est en rien obligatoire puisqu’une importante communauté d’utilisateurs met à disposition une bibliothèque bien fournie de modèles redimensionnables, dans des domaines très variés. C’est ainsi que, une fois les bases acquises, j’ai commencé à travailler sur un modèle de fourgon Fiat Ducato déjà aménagé par quelqu’un d’autre. Ce n’était pas à mon goût : j’ai supprimé tout l’aménagement intérieur et n’ai gardé que la structure, c’est-à-dire le fourgon vide tel qu’il a été livré à notre aménageur, après l’avoir repeint bien sûr.

Je me suis régalé ensuite à incorporer tous mes éléments essentiels, à tester différentes configurations de couchages, différentes tailles de fenêtres. J’ai pu optimiser l’agencement de mes panneaux solaires sur le toit et avoir ainsi la capacité maximale en fonction des tailles de panneaux disponibles. J’ai pu déterminer que ma table de cuisson gasoil, dont le boitier caché sous le plan de travail est assez imposant, ne permettait pas de loger le frigo juste au-dessous, et qu’il me fallait absolument un évier à bonde décalée et non centrale pour que les tuyauteries passent correctement. Cette mise en situation 3D m’a permis aussi de choisir parmi différents vidéoprojecteurs (mais oui, nous aurons un home cinéma comme à la maison !) celui qui donnait la taille d’image la plus appropriée à notre habitacle. Enfin, les fonctions d’animation m’ont permis de vérifier le débattement des tiroirs et des portes, la situation des sièges rotatifs avant par rapport à la dînette et la circulation du WC sur ses rails dans la salle de bains.

Bref un outil indispensable que je recommande à ceux qui ont du temps pour préparer leur aménagement. Ci-dessous quelques photos de l’aménagement obtenu avant soumission à notre aménageur.

J’avoue y avoir passé beaucoup de temps, mais tous ces préparatifs, ça n’est que du bonheur. C’est aussi ce que pense Claudie, plongée depuis des mois dans les guides et les forums pour anticiper quelques itinéraires, repérer les incontournables, etc.

Suite au prochain épisode…