62. Washington sans état gère

Avant d’arriver dans la capitale des États-Unis, nous avons traversé 3 états : la Pennsylvanie, la Virginie occidentale et le Maryland. Mais Washington DC n’est pas dans tous ces états et ne doit pas être confondue avec l’état de Washington qui est à l’Ouest, le pauvre. Non, la capitale est bien au-dessus de tout ça, malgré son absence de gratte-ciel. Puisqu’elle a été désignée pour gérer le pays, elle est hors d’état, dame !

Petit quizz, il y avait longtemps : qui de ces personnages a donné son nom à l’état correspondant ?

William Penn ?
Virginie DePaul ?
Mary Land ?

Vous trouverez une réponse détaillée à la fin du chapitre suivant… En attendant, voici nos quelques étapes jusqu’à la capitale :

1°) Pittsburgh, Pennsylvanie, ville aux multiples facettes

Construite au confluent de 3 rivières dans une région très vallonnée, on y accède ou y circule par l’un des 400 ponts (excusez du peu) ou l’un des 2 funiculaires (nous avons pris les deux tant qu’à faire). Les sommets alentours offrent de super vues sur la skyline, les rives des rivières offrent de bons spots nocturnes, et la ville comporte quelques pépites. D’une part ce jardin botanique dont les grandes serres mettent en scène des tableaux d’artistes ou plus simplement des pays ou des environnements climatiques. Notez le jardin vertical à l’entrée en forme de cadre. La ville est aussi la patrie natale d’Andy Warhol et donc forcément y consacre un musée que nous avons trouvé magnifique et très pédagogique, nous permettant de comprendre toute la démarche artistique de cet artiste de renom. On découvre enfin dans un quartier banal de Pittsburgh cette maison étonnante appelée Randyland, du nom de son créateur Randy Gilson. On s’y balade librement. Des tables invitent éventuellement à y prendre un verre à condition d’amener sa boisson avec soi. L’ensemble est aussi hétéroclite qu’harmonieux, ce qui parait bizarre à dire. Une débauche de couleurs et d’excentricités en tous genres qui ne peut laisser indifférent. L’artiste était d’ailleurs présent sur le pas de sa porte, expliquant sa démarche dans un langage aussi émotionnellement coloré que son œuvre.

LA VILLE







LE JARDIN BOTANIQUE


LE MUSÉE ANDY WARHOL




RANDYLAND


Réponse au quizz : C’est William Penn, à qui le roi Charles II d’Angleterre octroya cette région en remboursement du prêt que lui avait accordé son père. Virginie, l’amoureuse de Paul s’appelait de la Tour (rien à voir donc avec une quelconque servante d’une quelconque couleur). Et la Mary en portrait n’est autre que Mary Tudor, la reine sanglante ou Bloody Mary. Vingt dieux la Mary !


2°) Bekerley Springs (Virginie occidentale)

Si vous ne le saviez pas encore, j’ai une affinité particulière pour les stations thermales, ayant travaillé dans ce domaine une grande partie de ma vie. A chaque fois qu’il s’en présente une, il me faut aller l’explorer. Bekerley Springs est loin d’avoir le charme des stations françaises, allemandes ou tchèques. Elle a tout de même le mérite d’avoir été la première station thermale aux États-Unis, et s’enorgueillit d’avoir eu la visite à maintes reprises de George Washington, dont la baignoire en extérieur a été conservée. Le petit parc thermal est très classique avec son kiosque, sa pelouse et ses bancs. Ce qui est inhabituel ce sont les bassins en extérieur où l’on peut se baigner ou simplement tremper les pieds. Des bulles qui remontent et quelques remous semblent indiquer que l’eau arrive par en dessous. Pas de quoi s’y réchauffer en tout cas, la température de l’eau à l’émergence est de 23°C, produisant peut-être une petite brume en hiver. Une buvette à l’américaine (vous savez, le petit jet qui sort quand on appuie sur le bouton) permet de goûter l’eau, qui n’a pas de saveur particulière. La composition est affichée, mais pour une fois j’ai du mal à l’interpréter, les sels minéraux étant dosés en grains par gallon, système impérial oblige. Sachant qu’il y a 14 millions de grains dans une tonne US, que la tonne US est un peu plus légère que la tonne UE (907,18474 kg), qu’un gallon US vaut 231 pouces-cubes qui valent chacun 0,16387 litres, quelle est la teneur en calcium de cette eau ?


3°) Washington DC

Blague à part

Quand j’étais petit, une blague traînait à l’école : on demandait à son voisin « Comment tu écris ‘nouille' » ? Et tout de suite après « Quelle est la capitale des États-Unis » ? Invariablement, le voisin répondait sans réfléchir ‘Nouillork’ et l’on pouvait se taper sur les cuisses. Car bien entendu, la capitale c’est Washington.

Enfin seulement depuis 1790 parce qu’au début le gouvernement a été dirigé depuis New York puis Philadelphie. Il a fallu, afin de ne pas risquer de favoritisme, trouver un endroit qui ne soit pas un état pour installer la capitale, et on a piqué pour cela un petit morceau de terrain de 175 km² au Maryland et à la Virginie, appelé District de Columbia.


Metro, centro, dodo

Les centres des grandes villes étant souvent embouteillés et peu propices au stationnement, nous préférons en général nous garer en périphérie et faire le reste du trajet en transport en commun. A Washington DC, nous avons choisi comme parking diurne et nocturne celui de la station de métro Greenbelt. Sur plusieurs centaines de places, une trentaine seulement sont réservées aux véhicules souhaitant stationner plus de 24 heures. Quelques-unes heureusement étaient encore disponibles lors de notre arrivée.

C’est assez couru car le prix est modique : 4,95 $ par 24h les jours de semaine et gratuit les week-ends, à condition de payer avec la carte Smartrip utilisée pour rejoindre la station de métro. Cette carte est très utile par ailleurs car le prix des trajets est très variable, selon que l’on prend le bus ou le métro, selon le nombre de stations, selon le jour de la semaine et selon l’heure de la journée. Avec la carte pas de souci, on y met le montant que l’on veut sur des automates – à hauteur variable également – et le montant à payer est débité en sortie de station.

Sinon les stations elles-mêmes sont très austères : toutes en béton brut de décoffrage y compris les bancs pour s’asseoir, sans aucune décoration ni publicité. Les rames sont larges. La couleur bleu délavé des banquettes va bien avec la sobriété ambiante. Difficile de croire que l’on est dans la capitale des États-Unis d’Amérique ! Heureusement, les 6 lignes sont aériennes dès que l’on sort du centre-ville et ça permet de voir un peu de verdure.


L’Enfant terrible qui dessina la capitale des États-Unis d’Amérique

L’aménagement du District de Columbia fut l’objet d’un concours en 1791, et c’est un architecte français, Pierre-Charles L’enfant, qui le gagna. Il était déjà connu des Américains pour avoir accompagné les généraux La Fayette puis Washington lors de la guerre d’indépendance. Le problème c’est que L’Enfant était capricieux au point qu’on lui retirât son projet et qu’il emmena, boudeur, ses plans avec lui. Une partie seulement des travaux se fit, de mémoire. Il fallut attendre 1901, soit 27 ans après la mort de l’architecte, pour que l’on remette la main dessus et que l’on lance enfin la réalisation du projet, ce grand parc central autour duquel sont disposés tous les monuments importants du gouvernement fédéral, mémoriaux compris. En raison de sa réaction, L’Enfant ne fut jamais payé, ou si peu, pour son travail et mourut dans la pauvreté. Le gouvernement fédéral se rattrapa, bien qu’un peu tard, en l’enterrant au cimetière d’Arlington, aux côtés des sommités du pays. Un rare privilège pour un étranger.


Le National Mall

Nous avons parcouru le premier jour sous un temps grisâtre (désolé pour les photos) et le second jour heureusement avec le soleil, une grande partie de ce parc. Nous avons rendu une petite visite aux édifices qui l’entourent, présentés ci-dessous en commentaires.













Il est temps pour nous de reprendre notre route vers le Nord Ouest cette fois, en direction de Buffalo et des Chutes du Niagara. A très bientôt !

59. Un an de vie nomade !

Le 24 avril 2021, en période de déconfinement progressif, nous démarrions notre vie nomade avec Roberto, tout frais sorti de chez son aménageur 5 jours auparavant. Après quelques jours passés à Rodez pour le rendre habitable, nous sommes partis heureux sur des routes quasi-désertes, munis d’une attestation un peu olé olé justifiant notre déplacement par l’achat de notre véhicule principal et le séjour au domicile de l’un de nos enfants pour rechercher un logement. Nous sommes ainsi entrés pleinement dans notre vie nomade, profitant du bonheur cumulé d’être libérés de la vie professionnelle, de la sédentarité et accessoirement de cette pandémie censée être sur le déclin. Profitant du bonheur de pouvoir aller où bon nous semble, de pouvoir nous arrêter au gré de nos envies, de se réveiller chaque jour dans un lieu différent. Et surtout de vivre à deux intensément notre soif de découvrir le monde.

Un an plus tard notre désir de poursuivre cette vie aventureuse est intact. Nous continuons à y trouver ce que nous cherchions. Nous avons parcouru près de 36 000 km et traversé 16 pays. Nous avons découvert des paysages souvent splendides dans lesquels nous avons volontiers randonné. Nous nous sommes gorgés de culture, d’histoire locale, d’art, de cuisine locale. Nous avons aussi rencontré quelques voyageurs nomades, discuté un peu avec les locaux souvent curieux de notre épopée, mais pratiquement jamais croisé de Français pas si aventureux que ça finalement. Si nous regrettons la distance physique avec la famille et les amis, nous sommes pour la plupart d’entre eux restés en relation grâce aux moyens de communication modernes, vidéoconférences et réseaux sociaux inclus.

En guise de bilan, j’ai demandé à chacun de nous de sélectionner une douzaine de photos, une par mois, et d’y mettre une légende. L’exercice s’est avéré ardu, les choix cornéliens, mais il fallait bien mettre des limites, à défaut de refaire tout le blog.

Claudie

04/21 Ma première sortie avec Roberto
05/21 Une nuit en pleine nature près d’un lac. Le début d’une longue série
06/21 Le Tribunal de Nuremberg, parce que j’adore l’Histoire
07/21 Freudenberg en Allemagne, trouvée non pas dans le guide mais dans un éphéméride !
08/21 Skänors Strand en Suède, pour les couleurs
09/21 Falaise de Preikestolen en Norvège, pour la beauté du site et l’exploit
10/21 La Colline aux Croix en Lituanie pour le côté résistance aux Russes
11/21 Les peintures florales sur les maisons de Zalipie en Pologne
12/21 La balade en vélo électrique avec les copains à l’Ile d’Yeu
01/22 Musée Frida Kalho (Mexico)
02/22 Paseo del arte, à Orizaba
03/22 La Nouvelle-Orléans pour son quartier français si typique
04/22 Le musée Martin Luther King d’Atlanta

Jean-Michel

04/21 Forcément, la découverte de Roberto !
05/21 Réveil au pied d’un moulin près d’Agen. Chaque jour le spectacle est différent
06/21 Ma première ville au-delà des frontières de la France
07/21 Les extraordinaires maisons de Freudenberg… et ma chérie devant
08/21 Cimetière Viking en Suède. Toute une culture à découvrir
09/21 Traversée de rennes près du Cap Nord. Mais j’ai hésité avec celle de Claudie
10/21 Les chantiers navals de Gdansk, pour leur valeur historique. La ville est bien aussi
11/21 La place colorée si typique du centre-ville de Zamosc en Pologne
12/21 Superbe excursion à l’Ile d’Yeu avec nos amis, ici au Fort de la Pierre Levée où j’étais en colo…
01/22 Découverte du Mexique par la place centrale très animée de Mexico (le Zocalo)
02/22 Les murs peints de Puebla (et de tout le Mexique)
03/22 Ma toute première sortie équestre dans le village fantôme au-dessus de Real de Catorce
04/22 Le jardin botanique d’Atlanta pour son incroyable serre tropicale

Roberto

04/21 Ma première nuit en pleine nature
05/21 Les gorges de l’Ardèche, épatantes pour tester les freins et la direction
06/21 Ma nuit aux pieds du Château de Neuschwanstein
07/21 Ma première plage… sur l’île de Rømø au Danemark. J’ai failli courser les chars à voile !
08/21 La Suède, ses forêts et ses milliers de lacs
09/21 J’ai réussi, je les ai emmenés au Cap Nord moi tout seul avec mes petites roues
10/21 Le camping d’Helsinki pour ses aurores magnifiques
11/21 Les sources ferrugineuses de Karlovy Vary (Rép. Tchèque) qui m’ont dégagé le filtre à air
12/21 Ma première escapade sur la neige au Lioran. Même pas glissé !
01/22 Le joli Château de Chalencon en Haute-Loire. Après, on m’a enfermé !
02/22 Ma première douche à Veracruz après 1 mois de mer
03/22 La terrible route étroite de Real de Catorce. J’y ai quand même croisé 4 véhicules !
04/22 Cette vue devant mon pare-brise ! Voilà comme on me traite après 35 000 km !

Nous poursuivons donc notre parcours sans hésiter, sans même nous être posés la questions tellement cela semble une évidence. Nous venons d’ailleurs de souscrire notre assurance santé pour une année complète. Car en effet, hors Europe, la sécu ne couvre plus que les situations d’urgence et encore faut-il avancer les frais. Nous ne l’avions pas encore fait jusqu’ici car nous étions couverts 3 mois après notre dernier départ de France par l’assistance de notre carte bancaire. La suite du récit de notre voyage, c’est pour dans quelques jours, surveillez vos boîtes-mail ! A très bientôt.

52. On the road again

Roberto est enfin libéré des griffes des douaniers mexicains et cela n’a pas été une sinécure. L’inventaire après la récupération nous a permis de constater par ailleurs qu’un certain nombre d’objets avaient disparu pendant le transport transatlantique, bien plus que nous ne le pensions initialement. Mais notre fourgon lui-même n’a pas été détérioré et c’est avec un grand bonheur que nous avons pu reprendre notre vie itinérante sur les routes du Mexique. On the road again !

Le VIN français n’est pas bon !

Oui je sais, vous n’y comprenez rien, je vais vous expliquer. Après avoir patienté tout un week-end le temps que les douaniers se reposent avant de pondre le rapport sur l’inspection qui autorisera Roberto à sortir, nous attendons le message de notre agent maritime pour nous rendre au port. A 9h30, notre ami Kilian nous indique que lui est déjà là-bas et qu’il n’attend plus qu’un coup de tampon pour partir. Nous en faisons part à notre agent sous forme d’un petit mot qui signifie en gros « pourquoi lui et pourquoi pas nous ? ». La réponse ne se fait guère attendre : « Vous ne pouvez pas sortir, votre VIN n’est pas bon »…

Notre ami Kilian a pris de l’avance sur nous. Il attend son van, celui derrière Roberto

Ne vous méprenez pas, ce n’est pas une insulte à notre boisson nationale, le VIN c’est le Vehicle Identification Number, ou encore numéro de châssis propre à chaque véhicule. Eh bien dans le cas de Roberto, la compagnie maritime a tout bêtement tronqué les 3 premières lettres, coupé le VIN en quelque sorte, ce qui évidemment est insupportable aux yeux de l’administration mexicaine. L’agence nous dit être en contact avec la douane et assure s' »apprêter à envoyer » un mail à la compagnie maritime afin qu’elle corrige le document. Inutile de vous dire notre déception. Nous nous voyons passer encore quelques jours à Veracruz le temps que les échanges de mails et de coups de tampons se fassent.

Nous exprimons tout de même notre mécontentement à la fois à notre agent qui avait en main tous ces papiers depuis plus d’un mois et aurait pu les vérifier, ainsi qu’à notre intermédiaire allemand qui aurait pu lui aussi s’assurer que la compagnie maritime avait la bonne information. Et puis, tandis que Kilian nous annonce qu’il est au volant de son van, dans la file d’attente pour sortir du port – nous sommes tout de même heureux pour lui, nous prolongeons notre chambre d’hôtel d’une journée. En espérant qu’il n’en faudra pas deux ou trois autres. Heureusement, peut-être piqués au vif, les différents intervenants ont apparemment pu corriger rapidement les documents puisque notre agent nous propose vers midi un rendez-vous à 15h pour la sortie du port. Ouf !

Kilian sort du port. Et pourquoi pas nous ?

Le moment venu, l’agent me prend devant l’hôtel et m’emmène de nouveau auprès de Roberto. Nous attendons 45 minutes interminables avant de recevoir la liasse de papiers dûment validés qu’il faudra présenter aux différents postes de contrôle. L’agent m’explique toute la procédure et le chemin pour sortir car il ne pourra m’accompagner jusqu’au bout. Et là je reprends enfin le volant. Un vrai bonheur que de reconduire notre fourgon après tout ce temps. Je suis le parcours indiqué et me retrouve comme prévu dans la longue file d’attente au milieu d’un flot continu de poids lourds. L’avancée se fait au compte-gouttes, c’était prévu, et ce n’est qu’une heure et demi plus tard que je passe enfin les dernières barrières, non sans avoir dû montrer une dernière fois que j’avais un bon VIN derrière le fagot, euh derrière le pare-brise. Un long parcours d’une quinzaine de kilomètres me ramène enfin auprès de Claudie, dont je n’ai pas besoin de vous décrire la joie lors des retrouvailles.

On the road again
C’est enfin notre tour. Pour une fois que je me sens heureux coincé dans une file interminable de poids-lourds !

Protections en vain

Le temps m’avait manqué pour réaliser l’inventaire de nos biens lors de l’inspection des douanes. Bien que j’aie retrouvé la porte latérale de Roberto non verrouillée, l’absence de tout désordre à l’intérieur me laissait supposer qu’à l’inverse du véhicule de Kilian retrouvé sens dessus dessous (voir article précédent) personne n’avait pénétré à l’intérieur du nôtre. Malheureusement, Claudie et moi devons nous rendre à l’évidence, il y a bien eu intrusion et fouille en règle de notre fourgon et, curieusement, pour ne pas dire avec perversité, tout a été remis en place comme s’il ne s’était rien passé. Les serrures des tiroirs et de la porte de la salle de bains ont bien été forcées, les pênes en acier tordus en témoignent. Quelques vêtements ont disparu, un petit couteau, un aspirateur portable, un thermomètre et sûrement quelques autres bricoles dont l’absence se révèlera au moment où nous en aurons besoin.

Malgré la bonne tenue du cadenas qui verrouillait les portes arrière, celles-ci ont pu être entrebâillées en force, suffisamment pour passer la main et récolter ce qui était le plus accessible dans la soute. Une mini-perceuse a ainsi disparu de ma boîte à outils. Ce qui nous amène à nous inquiéter pour notre petit coffre-fort, d’apparence intact et fermé. Nous affichons la combinaison et l’ouvrons… pour découvrir qu’une partie du contenu a également disparu. Pas les lingots, que nous avions gardés avec nous bien sûr 😉, mais quelques objets de valeur indéterminable comme nos anciens téléphones par exemple. Le plus surprenant est qu’ils aient réussi à ouvrir et encore plus à refermer ce coffre sans effraction !

Certes il s’agissait d’un modeste coffre d’hôtel, avec une clef 4 pans pour l’ouvrir en cas de perte du code ou d’épuisement des piles, et aussi une prise USB destinée aux gérants des hôtels. Ont-ils utilisé l’un de ces 2 moyens ??? Cela témoigne en tout cas que nous avons eu affaire à des voleurs expérimentés, pas de simples marins au long cours. Nous allons pousser la société Seabridge qui nous a vendu la traversée à investiguer davantage pour que ces vols à répétition cessent de devenir la règle et ne demeurent pas impunis. Et en parler sur les réseaux sociaux pour inciter les futurs voyageurs à en laisser le moins possible plutôt qu’à tout barricader. Mais nous n’allons pas nous prendre la tête non plus. Le principal est que Roberto n’ait pas subi de dommages et puisse continuer à nous emmener vaillamment là où nous le souhaitons. Notre vie nomade avant tout, le reste n’est que dommages collatéraux. Les risques étaient connus et nous les avons acceptés.


20 pesos le litre d’essence (0,90€), qui dit mieux ?

Nous passons la fin de journée sur le parking d’un supermarché à remettre Roberto en état d’y dormir et bien que nous ayons encore la chambre d’hôtel, nous nous offrons le plaisir d’aller passer la nuit dans notre véhicule favori garé sur la jetée, à 10 mètres de la mer. Quel bonheur ! Le lendemain, nous repassons à l’hôtel prendre nos affaires et quittons pour de bon Veracruz. Non sans avoir fait quelques petits stops dans la banlieue pour refaire le plein de gasoil (un peu plus cher que l’essence, mais à peine : 1 €/l), d’eau (gratuite à la station-service en contrepartie de la visite de notre fourgon) et de denrées alimentaires. Et même faire shampouiner Roberto qui, après ces 6 semaines de voyage, était franchement cra-cra. Lavage « al mano » comme ils disent, à grands coups de seaux d’eaux et de serpillère dans une ambiance de musique latino à tue-tête. Nous n’aurons pas droit à la finition à la brosse à dents, comme la voiture d’à côté, faute peut-être ne de pas avoir payé le supplément adéquat, mais 4 euros pour 50 mn de lavage, c’était vraiment donné ! Après plus d’une heure de route (tout un poème, je vous en reparlerai c’est promis), nous nous garons dans une petite rue du village de Zempoala, tout près de l’entrée d’un site préhispanique que nous visiterons demain.


Zempoala, le « site des vingt cours d’eau »

Au matin, nous sommes réveillés par le soleil qui commence à bien chauffer l’habitacle. Il n’est pourtant que 8 heures. Je descends prendre le frais. Une dame sort de la propriété devant laquelle nous sommes garés et s’approche de moi. J’ai soudain un doute et me dis que nous la gênons, que nous allons devoir déplacer le fourgon. Mais non, c’est tout le contraire, elle me propose de me garer à l’ombre dans sa propriété pour ne pas rester en plein soleil, joignant le geste à la parole en ouvrant largement son portail. Quelle hospitalité ! Je me confonds en remerciements et conduis donc Roberto sous les grands arbres d’un jardin. Il s’agit en fait de la cour d’un petit restaurant, mais rien ne nous est demandé. Nous achèterons tout de même quelques empanadas avant de quitter les lieux en guise de remerciement. Ainsi protégés du soleil, nous partons à la découverte du site qui vient d’ouvrir.

Roberto à l’ombre dans la garderie

En fait, un seul des vingt cours d’eau évoqués dans l’appellation du site est naturel : la rivière qui le traverse. Les autres, ce sont les différents canaux du dense réseau d’irrigation de ce complexe politico-religieux préhispanique édifié vers l’an 1200 par les Totonaques. Ce peuple plutôt pacifique du centre du Mexique vivait d’agriculture, de chasse et de pêche. Ce qui ne l’empêchait pas d’avoir des rites religieux plutôt barbares, du genre sacrifier des esclaves pour les écorcher et se revêtir de leur peau. Brrr ! La table d’exécution est encore là d’ailleurs, et l’herbe y pousse bien… Autour, nous explorons un ensemble de pyramides construites entièrement en galets provenant de la rivière, joints avec un mortier fait à base de coquillages cuits. Nous avons le site pour nous seuls, l’ambiance n’en est que meilleure. Les Totonaques connaîtront leur déclin, comme tous les peuples de cette époque, avec l’arrivée des Espagnols en 1521. Ils crurent un instant s’en sortir en s’alliant avec Hernan Cortes, le grand chef des conquistadores, pour lutter contre leurs ennemis Aztèques, mais l’Espagnol en guise de remerciement détruisit les statues de leurs divinités, obstacles à la christianisation, et leur refila en prime la variole. Les rares survivants se réfugièrent dans la ville voisine et le site tomba dans l’oubli, envahi peu à peu par la végétation. La restauration est en cours depuis une cinquantaine d’années.

En haut : la table des sacrifices – En bas : Je me prends pour un chef Totonaque et grâcie le prisonnier

Un MAX qui assure : 20/20

Cet acronyme est le raccourci du Musée Anthropologique de Xalapa, le second du Mexique, que nous ne voulions pas manquer car le premier, celui de Mexico était fermé au moment où nous y étions. Dans un décor grandiose est exposée une superbe collection d’objets issus des principales civilisations préhispaniques du Golfe du Mexique : Olmèques, Totonaques et Huastèques. Le musée possède notamment la plus grande collection mondiale de têtes géantes Olmèques, pouvant atteindre 3 mètres de haut. Mais aussi une multitude d’autres pièces fabuleuses dont vous n’aurez que quelques exemplaires en photo, une bonne partie du reste étant accessible en visite virtuelle sur le site du musée. La visite se termine agréablement par les jardins, bien entretenus. Nous avons adoré.


C’est le moment de nous quitter, mais pas d’inquiétude, nous en avons encore beaucoup à raconter ! A très bientôt !

49. Orizaba ville magique

La ville d’Orizaba est notre dernière étape avant Veracruz, là où nous devons retrouver Roberto. Elle est située dans une vallée entourée de volcans, dont le point culminant du Mexique : le Pico de Orizaba, 5 747 m d’altitude. Nous arrivons dans la brume, avec une température plutôt frisquette, mais il est déjà prévu que cela se lève dès demain. Tant mieux, nous allons pouvoir profiter de ce « Pueblo Mágico », une appellation qui n’a rien à voir avec Houdini ou Copperfield mais qui est décernée par l’office de tourisme mexicain aux villes « offrant aux visiteurs une expérience « magique » en raison de leur beauté naturelle, de leur richesse culturelle, de leurs traditions, de leur folklore, de leur pertinence historique, de leur cuisine, de leur art et de leur hospitalité ». Plus trivialement autre chose que des plages où s’entasser en buvant de la bière.


« Le dimanche c’est un jour autre. Même le soleil est différent » (Yves Montand)

Puisque c’est dimanche et que nous imaginons que tout sera fermé, et qu’en plus il fait grand beau alors que la météo n’est pas très optimiste pour les jours qui viennent, nous décidons de prendre un peu de hauteur et d’aller observer la ville du sommet de son teléferico, Il nous semble en arrivant aux caisses que la moitié de la ville a eu la même idée que nous. Plusieurs files se font puis se défont, ça resquille un peu, l’organisation parait un peu dépassée, mais nous finissons par monter dans l’une des cabines de 6 places qui, par groupe de 3 s’élèvent vers le Cerro del Borrego (la colliine des moutons), une petite montagne qui surplombe Orizaba de 320 m. Le teléferico a été construit par les étasuniens (ici on ne dit pas américains, ça n’a pas de sens) en 2013, mais les cabines sont françaises, cocorico (pourvu que ça tienne).

orizaba  ville magique

De la plate-forme à l’arrivée, nous avons évidemment un joli point de vue sur les environs et pouvons observer le quadrillage parfait de la ville sur lequel se distinguent ça et là quelques édifices religieux. Un petit sentier relie quelques attractions, dont les restes d’un fort et un petit musée historique qui nous apprend qu’à cet endroit, le 14 juin 1862, lors de l’intervention française au Mexique, une troupe de 150 de nos compatriotes « massacra » 2000 mexicains. Pas cocorico, ça, nous nous faisons tout petits et décidons d’être temporairement suisses si l’on nous demandait d’où nous venions. Au retour tout de même, nous vérifions les informations sur Internet. En fait « seulement » 250 militaires mexicains auraient perdu la vie, dont un certain nombre sous les balles amies ou en sautant dans le vide dans la confusion de cette bataille nocturne. La différence est un peu du même ordre que celle du décompte des manifestants en France, selon que l’on se place du côté des organisateurs ou de celui de la police. Pour les passionnés d’histoire et/ou de stratégie militaire, le récit de la bataille est ici.


Nous redescendons en ville pour flâner en son centre, vers la place principale, un grand jardin bordé par la cathédrale. L’autre moitié de la ville est ici, manifestement. Une personne harangue la foule au micro. Des enfants courent partout. Une vingtaine de stands de cireurs de chaussures est en pleine activité. Des vendeurs de fleurs, d’en-cas ou de confiseries tentent leur chance d’un banc à l’autre. Et les magasins autour de la place sont pour beaucoup ouverts en ce jour du Seigneur. Mais il y a du monde aussi dans la cathédrale, qui n’est pas exceptionnelle. Et aussi dans ce Palacio de Hierro (le palais de fer), un édifice conçu par Gustave Eiffel et acheté par le maire de la ville après l’exposition universelle de 1889 pour en faire (c’est le cas de le dire) une mairie. C’est en fait devenu un musée assez éclectique, exposant d’une salle à l’autre tout aussi bien la géographie locale, l’art préhispanique, les présidents mexicains, les grands scientifiques du monde, un planétarium, que la bière mexicaine et le foot.


« Lundi. Dans les pays chrétiens, lendemain du jour du tiercé » (Ambroise Bierce – Le dictionnaire du Diable)

J’aurais pu choisir en citation « Triste comme un lundi » car ce matin le ciel est tout gris. Toutefois il ne pleut pas et nous partons nous dégourdir les jambes, habillés chaudement car avec l’altitide il ne fait guère plus de 8 ou 10°C dehors. Nous rejoignons le « Paseo del arte », une voie aménagée le long de la rivière qui traverse la ville sur environ 3 km. Sur une bonne portion, les murs sont décorés de fresques. La qualité est variable mais l’ensemble rend bien et l’effort est louable. Vous en retrouverez un certain nombre ci-dessous, commentés ou non.


Nos pas nous amènent ensuite au Jardin botanique, un havre de paix joliment entretenu qui ne figurait pourtant pas dans notre guide papier. Nous nous immergeons dans une volière où circulent librement perruches et perroquets multicolores. Nous visitons la serre à orchidées, décevante par le fait que 3 ou 4 espèces seulement soient en fleurs sur les 1 200 présentes au Mexique, mais bon, quand ce n’est pas la saison… Nous tentons sans succès de nous perdre dans un labyrinthe végétal. Nous traversons un jardin japonais riche d’une cinquantaine de bonsaïs. Nous froissons sous notre nez les feuilles de plusieurs plantes de l’espace médicinal pour en retrouver l’origine (celle surnommée « Vaporub » ne nous laisse aucun doute). Nous rejoignons enfin la sortie sur une passerelle qui serpente entre haies de bambous et sculptures préhispaniques. Un bel endroit.


« Cette semaine, le gouvernement a fait un sans-faute. Il est vrai que nous ne sommes que mardi. » (François Goulard)

La grisaille a évolué en bruine, plus question de sortir sans parapluie, mais une bonne occasion de nous réfugier dans les musées. Ceux-ci sont souvent gratuits au Mexique. Malheureusement cela n’attire pas les foules pour autant, à l’exception peut-être du dimanche. A plusieurs reprises depuis notre arrivée dans le pays nous nous sommes retrouvés seuls à visiter, enfin pas vraiment seuls parce qu’une personne nous surveille dans chaque salle ou encore allume puis éteint les pièces au fur et à mesure de notre passage. Nous commençons par le Musée de l’Art de l’État de Veracruz, dont les façades sont étonnamment décorées de la même façon que l’église qu’il jouxte. Il est principalement consacré aux peintres célèbres de la région, tout en consacrant une salle entière à Diego María de la Concepción Juan Nepomuceno Estanislao de la Rivera y Barrientos Acosta y Rodríguez, qui préféra s’appeler Diego Rivera pour gagner du temps en signant ses toiles. 33 de ses œuvres originales sont exposées ici, permettant d’apprécier l’évolution de l’artiste au fil du temps. Une pièce est aussi consacrée à la construction de la première ligne de chemin de fer reliant Mexico à Veracruz, qui inspira beaucoup les peintres locaux.



Après une pause déjeuner, nous nous intéressons maintenant au musée de l’hôtellerie, installé sur le site où la première auberge du Mexique fut créée le 15 janvier 1525. On y admire les aménagements et les costumes de l’époque puis leur évolution dans le temps, comme ces tenues de « bell-boy », cet ascenseur ramené de New York datant des tout débuts de l’invention, ce vieux standard téléphonique dont on imagine l’ambiance sonore de son utilisation.


« Le conseil des sinistres, c’est le mercredi, le jour des gosses. Ils vont au sable, ils font des pâtés, c’est sympa. Le garde des sceaux est là. » (Coluche)

Mercredi est le jour des enfants peut-être en France, mais pas au Mexique puisque l’école est ouverte ici du lundi au vendredi, et plutôt assez tôt comme dans tous les pays chauds (7-8h à 13-14h, le repas se prenant au retour à la maison). Pour nous c’est jour de transfert puisque nous allons maintenant rejoindre Veracruz. Comme d’habitude, nous nous rendons simplement à la gare routière et prenons un ticket pour le prochain bus disponible. Départ 40 mn plus tard, à peine le temps de grignoter un sandwich. Le trajet de 136 km nous coûte 11 euros et nous prend environ 3 heures. Pas très rapide, mais il y a eu 3 arrêts en route. Une douce chaleur (enfin !) nous attend à l’arrivée et nous rejoignons notre hôtel en taxi pour 2,50€ et laissons généreusement 50 centimes de pourboire. Pas par radinerie mais pour ne pas casser le marché. Nous sommes logés près du port. Nous serons aux premières loges pour voir arriver Roberto. Nous ne sommes pas loin non plus du centre-ville, marqué par une petite place bordée par une cathédrale. Tiens, ça ne vous rappelle pas quelque chose ?



« Si la bourse continue à baisser, vendredi ça va être un jeudi noir » (Jean-Marie Gourio)

Eh bien justement, ça commence presque comme un jeudi noir. C’est aujourd’hui que nous avons rendez-vous avec notre agent portuaire, qui nous a convoqué à l’agence ce jour-là mais sans nous donner d’horaire précis. Vers 8h30, nous sommes prêts à partir tranquillement vers l’agence située à 3 km de notre hôtel. Une petite balade à pied nous fera le plus grand bien. Mais nous recevons un mail de Claudia, la responsable de l’agence, qui nous informe qu’après nous avoir attendus à 8h elle est déjà à la banque (probablement celle où nous devons régler le montant de notre permis de transit), que demain elle ne pourra pas s’occuper de nous, mais que peut-être nous avons encore une chance si nous allons tout de suite à l’agence sinon ce ne sera pas avant mardi (dans 5 jours !). Nous sautons dans un taxi et rejoignons l’agence en 10 mn. Là une autre employée nous prend en charge, photocopie en plusieurs exemplaires nos passeports, visas, carte grise et permis de conduire, puis nous emmène à toute berzingue à la fameuse banque. Une bonne cinquantaine de personnes attendent dehors. Les premiers sont arrivés à 7 heures alors que l’établissement n’ouvrait qu’à 8h30. Nous allons devoir faire preuve de patience.

Le dernier message inquiétant de notre agent portuaire…

Heureusement nous n’aurons pas à faire 3 heures de queue, l’assistante appelle Claudia qui est à l’intérieur avec un autre client et lui passe nos papiers. 20 à 30 mn plus tard, nous sommes invités à entrer, doublant la foule, pour aller à petit guichet apparemment dédié aux fameux permis. L’enregistrement prend du temps, il faut donner notre prochaine destination (on l’improvise car difficile de dire juste « vers le nord »), corriger les erreurs du premier projet qui nous est imprimé (il y en avait une sur mon prénom, une lettre en trop qui pouvait nous bloquer à une douane, on ne rigole pas là-bas) et revérifier la liste de tout ce que contient Roberto, que nous avions établie en anglais mais qui a été traduite en espagnol. Notamment nous avons beaucoup hésité à savoir si nous avions un « gato » ou pas. La seule traduction que nous connaissons pour ce mot est « chat » mais la description de la chose que nous fait l’assistante ne correspond pas. Elle nous fait le geste de soulever. Nous pensons à un toit ouvrant, un lanterneau mais ce n’est pas ça. L’assistante s’aperçoit que nous avons pourtant déclaré ce « gato » dans la liste initiale. Après une double traduction en passant par l’anglais, nous trouvons enfin que ce terme signifie aussi « cric ». Bien sûr que nous avons un cric ! Claro que sí (j’adore cette expression…). Après avoir réglé la somme de 55,68 € à la caisse, là aussi en shuntant la foule, nous voilà munis du précieux sésame : Roberto est autorisé à circuler librement au Mexique pendant une durée de 10 ans. Cela devrait suffire.

El Permiso de Importación Temporal de Casa Rodante, ou permis d’importation temporaire de maison roulante. Pour une voiture ou un fourgon non homologué, nous aurions dû payer une caution de 400$ et n’aurions eu le permis que pour 6 mois.

De retour à l’hôtel, une autre bonne nouvelle nous attend. Nos permis de conduire internationaux établis à Saint-Barth sont arrivés, grâce à l’aide de notre grand copain Laurent. Ils ne sont pas exigés au Mexique, mais seront nécessaires aux États-Unis.


La journée se termine avec Kilian, notre ami néerlandais dont le van fait chambre commune avec Roberto en ce moment et qui est donc venu attendre comme nous la livraison de son véhicule. Nous échangeons nos expériences avec plaisir. J’en profite pour rappeler le blog qu’il partage avec son amie Marcia et leur chat Binkie, accessible ici.

Le palais municipal, sur la place centrale, près duquel nous avons dîné.

Roberto se trouve au moment où nous écrivons, d’après le suivi réalisé sur le site MarineTraffic, quelque part entre les îles Caïman et la pointe du Yucatan. L’arrivée est prévue à Veracruz le 12 février, ou peut-être le 13. Nous devrions pouvoir vous décrire la réception dans le prochain article. D’ici là, nous allons devoir l’assurer, car bien entendu notre assurance française ne va pas au-delà des limites de l’Europe. Nous cherchons une compagnie qui couvre au moins les trois pays d’Amérique du Nord, mais ce n’est pas très simple. Nous vous raconterons. A très bientôt !

Le Yokohama et son passager Roberto en approche

47. Comida mexicana

La comida mexicana, c’est notre pain quotidien si j’ose dire. Car dans l’attente de notre fourgon, nous prenons nos repas à l’extérieur trois fois par jour. L’expression peut se traduire tout aussi bien par gastronomie mexicaine que par nourriture mexicaine selon le contenu de notre assiette. Les adeptes de la street food riche en graisses et féculents trouveront vite leur bonheur, tandis que de notre côté nous sommes encore en recherche d’un peu de subtilité. Mais il est bien sûr trop tôt pour juger, nous sommes encore en phase de découverte et les surprises sont nombreuses.  

¤ La Bufa

La Bufa, c’était le nom du restaurant de notre hôtel à Mexico. Vérifications faites sur mon dictionnaire espagnol-français de base, ça ne se traduit pas par « la bouffe », ce qui aurait pu paraître déplacé pour un restaurant, mais par …rien. A la limite, le verbe espagnol « bufar » signifiant « renifler », l’expression pourrait se traduire par « (quelqu’un) la renifle », mais ce serait encore plus déplacé ! La poursuite des recherches permet de trouver au Mexique une colline appelée el Cerro de la Bufa et dans sa description Wikipédia une traduction aragonaise du mot « bufa » en « vessie de porc », la colline ayant cette forme. Nous voilà revenus à la vraie restauration, et voilà une bonne occasion de parler de nos premières expériences avec la cuisine mexicaine.

El Cerro de la Bufa (près de Zacatecas, Mexique) © wikipedia

¤ Où l’on teste le menu du jour

comida mexicana
Restaurant populaire dans un marché

C’est notre premier jour à Mexico. Alors que nous nous frayons un chemin dans les allées étroites d’un marché, hélés par les commerçants qui veulent chacun nous faire visiter leur boutique, nous débouchons dans l’aire de restauration, plus paisible. Ça tombe bien, c’est l’heure du déjeuner. Les petites échoppes proposent des menus del dia à composition fixe. Prêts à toutes les expériences, nous tentons le coup. Nous passons commande. Pour la boisson, c’est soda ou aqua fresca. Nous choisissons la seconde solution. Claudie demande con gas mais ça fait sourire l’employée. On comprend pourquoi quelques minutes plus tard lorsque, une fois attablés, on nous apporte un broc d’environ 2 litres empli d’un liquide laiteux. Les autres tables ont la même chose d’ailleurs. Nous goûtons. C’est texturé, un peu sucré et la saveur ressemble un peu au Smecta, pour ceux qui connaissent. Bon, on se dit que c’est une façon comme une autre de prévenir la tourista… En fait, nous avons bu une horchata, faite d’eau de riz, de vanille, de lait et de cannelle.

Les plats arrivent. D’abord une sopa de la casa, bouillon de poulet avec des légumes, des cubes de fromage fondu et quelques aromates. Le plat principal arrive ensuite. Nous avons de la chance, c’est le plat national mexicain, le pollo con mole, poulet à la mole, une sauce typique d’ici à base de chocolat, de fruits secs et de piments doux. C’est accompagné sans trop de surprise de riz et d’une purée de haricots rouges. Enfin vient le dessert, une gelée parfumée chimiquement à l’orange. Rien d’extraordinaire sur le plan gustatif, mais il est difficile d’en demander davantage pour le prix : entrée + plat + dessert + Smecta euh boisson à volonté pour 3 euros. Qui dit mieux ?



¤ La Habana

Café La Habana

Après notre expérience du marché, nous souhaitons terminer ce repas par un petit café (dans sa culotte comme ajouterait notre ami Lolo, que nous embrassons). Quelques pâtés de maisons plus loin, nous nous rendons au café La Habana, un lieu empli d’histoire puisque ce serait ici que Che Guevara et Fidel Castro auraient planifié la révolution cubaine et que Gabriel Garcia Marquez aurait écrit une partie de Cent ans de solitude. Nous y dégustons un café « La Habana », servi en 2 parties : une grande tasse emplie de lait mousseux dans laquelle le serveur verse la moitié (sinon ça déborde) du contenu d’une plus petite tasse de café expresso. Il ne reste plus qu’à consommer dans l’ambiance rétro du café, inchangée depuis les années 50 et essayer à notre tour de refaire le monde ou d’écrire un nouveau paragraphe de ce blog (restons modestes !). Pour la petite histoire, le café nous a coûté presque le prix du menu du jour dans le marché. Mais pour avoir peut-être été assis à la place des célébrités ci-dessus, c’était donné !


¤ Y’a pas d’heure

Nous avons eu à plusieurs reprises la surprise de nous voir proposer la carte des petits-déjeuners alors que nous nous attablions à la terrasse d’un restaurant après l’heure de midi. C’est qu’ici, tout est quelque peu décalé par rapport à nos habitudes européennes. Le petit-déjeuner se prend entre 8h et 13h – parfois même jusqu’à 16h comme sur l’ardoise ci-dessus, le déjeuner entre 14h et 16h30, tandis que le dîner ne vient guère qu’entre 21h et 22h. Mais à vrai dire, on peut manger un peu n’importe quand, il n’y a qu’à traverser la rue comme dirait l’autre


¤ Les petites envies

C’est la traduction du mot antojitos qui désigne tous les en-cas que l’on peut se faire servir à toute heure dans les nombreux étals de rue ou les restaurants, au gré des petites faims. La base de tout est la tortilla, une petite galette de maïs, plus rarement de blé, que l’on va garnir de mélanges divers. Simplement pliée en U, c’est le taco que tout le monde connaît. Fermée aux extrémités, c’est un burrito. Poêlée ou grillée, c’est une  quesadilla. Légèrement frite et recouverte d’une sauce, c’est une enchilada. Davantage frite au point de devenir croquante, c’est une tostada. En empilement alterné avec des couches de fromage, c’est une sincronizada. Lorsque le contenu est coupé en longues lamelles, une fajita, etc. Parmi les autres petites envies, on trouve aussi les tortas ou cemitas, sortes de sandwiches préparés dans un petit pain blanc, les tamales, où la farce est enveloppée et cuite dans des feuilles de maïs, les chicharrones, sortes de beignets croustillants faits de peau de porc. Les variantes sont tellement nombreuses qu’il est parfois difficile de s’y retrouver !



¤ Les faux amis

L’expérience de l’agua fresca qui n’avait rien à voir avec l’eau fraîche (voir ci-dessus) n’a pas été unique. Nous nous sommes aussi fait surprendre avec le sope qui n’est pas du tout une soupe mais un taco frit, tandis que le menudo au contraire est bien une soupe (aux tripes et au piment, miam) et non pas un menu. Nous avons aussi évité de justesse le serrano, un piment force 6 loin du jambon montagnard que nous connaissons. Et loin de l’usage que l’on pourrait imaginer, le jamaïca est une …boisson à base d’hibiscus.


¤ Les desserts

A la fin du repas, on vient volontiers vous tenter en vous présentant un plateau sous cloche garni de pâtisseries diverses. Nous avons craqué une ou deux fois, avouons-le, mais nous sommes plutôt adeptes des excellentes salades de fruits, parfois garnies de yaourt, de granola ou de glace. Les pâtisseries dans les boutiques sont particulièrement colorées, mais l’on en trouve aussi qui ressemblent furieusement aux nôtres. Il s’agit peut-être d’un souvenir de cette période d’entre deux guerres (indépendance vis-à-vis de l’Espagne en 1821 et guerre avec les Etats-Unis en 1846) où de nombreux commerçants français – dont des pâtissiers – étaient venus s’installer au Mexique, et qui s’est mal terminée d’ailleurs, justement par la Guerre des Pâtisseries. Les Français, pas très bien vus alors, voyaient leurs boutiques fréquemment pillées. Lorsque le même sort arriva à pâtisserie Remontel en 1832, son gérant réclama, via le gouvernement français, des dommages et intérêts, ce que le Mexique refusa. En réponse, la France organisa en 1838 un blocus naval du port de Veracruz et d’une partie de la côte est du Mexique. Après 11 mois, le gouvernement mexicain fini par promettre de régler la dette, ce qui mit fin au blocus, mais il ne s’en acquitta jamais. Ceci fut un argument pour le déclenchement de l’occupation française au Mexique quelques décennies plus tard, de 1861 à 1867. Tout ça pour des gâteaux !


¤ Chocolatomanie

Dès qu’un musée du chocolat se présente, nous sommes attirés irrésistiblement. Celui de Mexico n’a pas échappé à la règle, d’autant plus que c’est dans ce pays (et dans quelques autres d’Amérique centrale) que le cacao a été découvert il y a plus de 3000 ans. A l’époque, les boissons réalisées avec les fèves comme avec le mucilage servaient aux rituels religieux comme aux mariages, et les fèves elles-mêmes servaient de monnaie d’échange. Avec 100 fèves par exemple, on pouvait acquérir un canoé, pour 3000 un esclave… De nombreuses taxes étaient payées en cacao. Lors de son premier voyage, bien plus tard, Christophe Colomb a complètement sous-estimé l’intérêt des fèves de cacao puisqu’il a jeté par-dessus bord, au moment du retour, tous les sacs qu’on lui avait offerts. Il faudra attendre le second voyage pour que l’Europe puisse enfin en profiter. Le musée fourmille d’infos sur les usages précolombiens du chocolat, expose une belle collection d’objets anciens liés à son emploi et possède une pièce extraordinaire dont les murs en sont entièrement couverts et dont vous pouvez imaginer le parfum. Tout ceci se termine bien entendu par la boutique et par la dégustation d’un bon chocolat chaud assorti d’un gâteau à vous devinez quoi. Miam !




et l’inévitable dégustation !

¤ Nourriture intellectuelle

Nos découvertes gastronomiques ne doivent pas occulter celles de nos visites quotidiennes puisque nomades et explorateurs nous sommes. En voici quelques-unes pour que vous puissiez voyager un peu avec nous.









¤ Nouvelle étape

Nous quittons Mexico pour la ville de Puebla. Le trajet se fera en bus. Nous aurions adoré celui ci-dessus, mais nous devrons nous contenter d’un bus moderne. Il n’a pas été nécessaire de réserver quoi que ce soit, nous nous sommes juste fait conduire à la gare routière dédiée au secteur sud-est. De là des bus partent pour toutes les directions toutes les 20 à 30 mn. Nous avons pris le premier venu, qui nous a conduit en deux heures à Puebla pour une douzaine d’euros. Il a été amusant d’observer le manège du chauffeur qui, après s’être signé deux fois au moment de partir (pas trop rassurant ça…) a salué de la main, un peu comme on ferait les marionettes, la totalité des bus que nous avons croisé !

A bientôt pour la suite et merci de nous suivre !