127. Albanie

Ce 32ème pays de notre périple n’est pas un enième pays balkanique. Il a son caractère bien à lui. Déjà parce que ses origines sont différentes, les Albanais descendant des Illyriens, comme en témoigne leur langue unique indépendante des dérivés du serbo-croate parlés autour. Et puis parce que son histoire est particulière, faite d’une succession d’envahissements et de dictatures. Mais les Albanais sont résilients et bien plus attachés à leur nation qu’à leurs diverses religions.


La cathédrale transformée en salle de gym

La cathédrale de Shkoder, au Nord-Ouest de l’Albanie, a connu bien des tourments liés au passé mouvementé du pays. Née dans un château au Moyen-Âge, elle fut transformée en mosquée au XVe siècle après l’invasion des Ottomans, qui autorisèrent finalement sa reconstruction entre 1858 et 1867. Endommagée par un séisme en 1905, puis par un bombardement en 1913, elle fut reconvertie en palais des sports en 1967, sous le régime du dictateur Enver Hoxha. Il a fallu attendre la chute du Rideau de Fer en 1990 pour que la cathédrale retrouve sa fonction initiale, avec les honneurs de la visite de Mère Teresa et du pape Jean-Paul II en 1993. Le Dieu du ciel a repris sa place aux dieux du stade.


Photo-nostalgie

Toujours à Shkoder se trouve une exposition de photographies anciennes rassemblées par une famille albanaise, un témoignage exceptionnel du passé limité bien sûr à la date d’apparition de la technologie. Si la galerie de clichés commentés est intéressante, elle s’accompagne aussi d’une collection de matériels de prise de vue et de laboratoire qui ont fait ressurgir en moi l’époque où, adolescent, j’étais passionné par la photographie argentique, du découpage des bobines de films dans le noir complet au séchage des tirages sur la machine à glacer en passant par toutes les étapes de la prise de vue et des manipulations en laboratoire sous lumière rouge. Ceux qui sont passés par là apprécieront.

P.S. La dernière image est celle d’un appareil photo à 15 objectifs. A l’époque où l’on ne pouvait avoir qu’un seul exemplaire de chaque photo prise (pas de négatif), cela permettait d’en avoir 15 d’un coup !


Ponts et chaussées

La période ottomane, qui a duré environ 4 siècles, de 1478 à 1819, a laissé pas mal de souvenirs dans le pays. Parmi eux ces gracieux ponts de pierre munis d’arches en ogive et parfois décorés de motifs géométriques ou de calligraphies arabes. Nos préférés sont le pont de Mes, le plus long des Balkans avec ses 108 mètres et ses 13 arches, le pont des Tanneurs de Tirana, devenu inutile faute de rivière à traverser suite à des remaniements urbains, et le Pont de Bënjë, enjambant une rivière toute bleue et des sources thermales formant de jolis bassins, tout là-haut dans la montagne.

Dans les villes ayant réussi à conserver leur centre historique, comme Berat ou Gjirokaster, les rues sont pavées de pierres multicolores formant des motifs géométriques du plus bel effet. L’association de plusieurs types de pierres avec des rugosités différentes avait aussi pour but d’empêcher les chevaux de glisser.


Skanderberg ce héros

Peu de personnalités ayant vécu au XVe siècle ont encore une grande popularité aujourd’hui. C’est pourtant le cas de Georges Castriote dit Skanderberg, qui réussit toute sa vie durant à repousser l’invasion de l’Albanie par les Ottomans, pourtant bien plus nombreux et mieux équipés. C’est que l’homme avait du charisme et de la diplomatie à revendre, suffisamment pour fédérer les différentes tribus du pays qui pourtant ne s’entendaient guère. Ardent défenseur de la chrétienté, il bénéficiait du soutien des États pontificaux. Le pape Pie II l’avait même qualifié d' »athlète du Christ ». Les successeurs de Skanderberg n’ont pas eu le même succès : 10 ans après sa mort, les Ottomans envahissaient le centre et le sud de l’Albanie…

Nous avons vu à Lezhë, lieu de son décès, le mausolée englobant les ruines de la cathédrale St Nicolas où repose sa dépouille. Nous avons admiré son imposante statue équestre à Tirana. Nous avons visité le musée qui lui est consacré à Krujë, ancienne capitale du pays qui fut aussi son quartier général. Krujë … QG … Y aurait-il un lien ?


Les dictateurs

À la fin de chaque guerre mondiale, l’Albanie a été la proie des nations voisines qui profitaient du chaos ambiant pour s’en emparer, favorisant pour les mêmes raisons l’ascension d’hommes politiques albanais à ego élevé. C’est ainsi que le président de la république Ahmet Zogolli s’auto-proclama roi du pays en 1928,  et qu’après ses débordements, le politicien Enver Hoxha le destitua au profit d’un régime communiste pur et dur dont il était le seul maître, ce qui revenait quasiment au même. Le premier, outre un train de vie excessif, avait pratiquement vendu son pays à Mussolini, qui d’ailleurs finit par l’envahir. Le second, après s’être cherché des liens avec les pays idéologiquement proches (Yougoslavie, URSS, Chine), les a tous rompus, isolant l’Albanie du reste du Monde à la manière de la Corée du Nord aujourd’hui. Craignant le contre-pouvoir religieux, Enver Hoxha fit fermer et/ou détruire tous les lieux de cultes, tout en proclamant en 1967 l’Albanie comme le « premier état athée du monde ». Craignant des représailles aussi bien externes qu’internes, il fit installer 700 000 bunkers dans tout le pays, qu’on retrouve encore un peu partout, et mit en place un système fortement répressif basé sur l’espionnage massif de tout le pays via une police politique appelée Sigurimi. En découlèrent 40 années d’isolement total, d’appauvrissement économique et surtout une répression parmi les plus sanglantes d’Europe. La « maison des feuilles » et le « bunk’art » (un ancien bunker reconverti en musée) à Tirana relatent ouvertement cette période sombre qui a causé la mort de dizaines de milliers de personnes et conduit à l’incarcération et à la persécution d’à peu près autant d’autres.


Tailler la route

La route est une partie importante de notre vie nomade. Elle est souvent un bon reflet de ce que nous trouverons plus tard dans le pays. En dehors des grands axes, les routes sont étroites et leur revêtement nécessite une attention permanente tant il est parfois endommagé, manquant ou affaissé. Les automobilistes sont tantôt excessivement lents, tantôt trop rapides. A l’inverse du klaxon, les clignotants sont rarement utilisés. Nous n’avions pas rencontré jusqu’ici de stationnement aussi anarchique : la double file est d’usage courant, mais aussi le stationnement en épi là où les autres sont alignés le long de la chaussée et réciproquement. Un jour, alors que nous voulions nous garer sagement sur un emplacement bien délimité au sol, les habitants nous ont fait signe de nous garer de l’autre côté de la rue, en plein sur la voie de circulation. Peut-être parce que c’était à l’ombre ? Il nous est arrivé aussi de devoir faire marche arrière dans des petites rues bloquées par un stationnement inadapté. Les voitures sont pourtant de belle taille, le modèle le plus répandu étant la Mercedes, ce qui pose question dans l’un des pays les plus pauvres d’Europe. Parmi les explications possibles, le fait que les dirigeants de l’époque communiste étaient les seuls à pouvoir en posséder en fait un signe de prééminence sociale ; la réputation de solidité de la voiture allemande lui confère aussi un avantage sur les routes défoncées et stimule le marché de l’occasion, d’autant que les voitures neuves sont très taxées dans le pays. Pour terminer, mentionnons la rue Egnatia qui traverse toute l’Albanie. Venue de Constantinople (maintenant Istanbul), elle mène tout droit à Rome. Contrairement au dicton, c’est bien la seule ici.


Avantagée par la nature

La nature en Albanie est immense et sauvage, c’est un grand point positif pour le pays. Le nord-est de l’Albanie est très montagneux et difficilement accessible faute de routes. Il y a sans doute largement de quoi satisfaire les découvreurs en herbe. Pour le reste, nous avons vraiment trouvé de jolis coins, que ce soit pour la visite ou pour y dormir. A deux reprises, nous avons été entourés le soir par des chevaux sauvages. Un matin, nous nous sommes réveillés avec un troupeau de moutons et avons pris le café avec son berger. Pour nos deux seules nuits en camping, des animaux de basse-cour se promenaient autour de nous. Et puis nous avons randonné dans des endroits grandioses, dormi près de rivières toutes bleues, observé les locaux traverser des lacs en barque, remonté un canyon avec de l’eau jusqu’aux genoux. Jamais nous n’avons senti déranger les habitants, qui au contraire, voyant que nous hésitions à rejoindre un « spot » nous en indiquaient le chemin. Ici, traditionnellement, le sens de l’accueil est élevé. Jamais autrefois on ne refusait le gîte et le couvert à des voyageurs qui se présentaient. Je ne sais pas si c’est encore vrai aujourd’hui, faute d’avoir tenté l’expérience.


Cuisine locale

Nous avons été surpris de voir aussi peu de fruits et légumes dans les supermarchés, jusqu’à comprendre qu’ici on les achetait plus volontiers au bord des rues ou sur les marchés. La cuisine locale ressemble à celle des pays voisins, alliant toujours des influences italiennes et turques, mais rajoutant ici une touche de grec. La viande est volontiers grillée, en boulettes ou cuite en ragout. Le yaourt est dans presque toutes les sauces. Les deux plats les plus typiques portent le nom de leur récipient : le tavë, un plat en terre cuite qui passe directement du four à l’assiette, contenant morceaux de viande, légumes et sauce au yaourt un brin épicée. Et le saç, un plat métallique avec un couvercle pour cuire divers ingrédients sur la braise. Nos desserts se sont essentiellement composés de fruits, les pâtisseries locale, d’influence orientale, bien que très tentantes, étant trop sucrées. Le raki, une eau de vie de fruits, accompagne aussi bien les entrées que le café après le repas ou même celui du matin… Les bières locales, notamment la Korça, tiennent la route.


La religion

Peut-être parce qu’ils ont été privés du droit de culte pendant les 40 années de dictature communiste, les Albanais déclarent presque tous une religion. Mais pour avoir subi ces nombreuses invasions, ils sont bien davantage attachés à leur nation qu’à une religion particulière. Il en résulte une grande tolérance religieuse malgré le caractère largement majoritaire de l’islam. 70% de la population est musulmane, mais cela ne se voit pas. Le voile n’est presque jamais porté, les appels à la prière sont extrêmement discrets, les pratiquants réguliers sont en fait assez rares. 25% sont chrétiens, orthodoxes ou catholiques. Et 5% sont un peu musulmans un peu chrétiens en ayant adopté la religion bektache. Ils prient dans des tekkes, sans sièges ni bancs comme dans les églises, mais richement décorés et hommes et femmes réunis contrairement aux mosquées. Il est courant en Albanie d’avoir deux ou trois lieux de culte différents qui se font face.


Mais qu’est-ce qu’il a ce George ?

Si vous pensiez que j’allais parler de cette chouette chanson de Salvatore Adamo et Olivia Ruiz, j’en suis désolé. Mais là, nous allons parler de George W., dont nous avons curieusement trouvé une statue sur notre route, dans une petite ville du centre de l’Albanie dont vous n’avez probablement pas entendu parler, Fushë-Krujë. Et mieux encore, un café et une boulangerie à proximité de la statue portent aussi son nom ! Mais qu’a donc fait l’ex-président des États-Unis pour mériter cela ? Eh bien déjà il est venu en Albanie, ce qu’aucun président américain n’avait fait auparavant, pour exprimer le soutien des États-Unis non seulement aux Albanais du pays mais aussi à ceux en grande difficulté au Kosovo. Et sûrement aussi pour y investir quelques dollars une fois la région stabilisée.

L’insolite de la statue attire aussi les commentaires sarcastiques des voyageurs sur les avis Google Maps, presque plus amusants à lire que l’histoire de la visite elle-même. En voici quelques-uns.



Tenir sa langue

L’albanais est une langue indo-européenne sans parenté avec les autres, formant une branche à elle seule. Elle pourrait être dérivée de l’illyrien antique. La première conséquence pour nous est que cette langue s’écrit en caractères latins, plus compréhensibles que le cyrillique qui envahissait de plus en plus les panneaux en descendant vers le sud. Et que nous retrouverons de toutes façons lorsque nous passerons en Grèce. Alors pour l’occasion, voilà juste un petit florilège d’enseignes locales et un petit quiz pour exercer votre sagacité


Trois villes incontournables

1. Tirana, pour son dynamisme et son architecture

Tout le modernisme de ce pays qui est l’un des moins riches d’Europe semble se concentrer dans sa capitale, avec un nombre impressionnant de gratte-ciels esthétiquement réussis qui semblent faire la nique aux bâtiments austères et mastocs de la période communiste. Les commerces du centre-ville diffèrent peu de ceux des autres capitales européennes, les rues sont larges et bien aérées. La grande place Skanderberg est le cœur de la ville, toute carrelée de blanc et bordée d’édifices religieux et publics de belle facture, dont le musée d’histoire nationale et son emblématique mosaïque en façade. De nombreux personnages presque tous armés marchent vers la gloire et la victoire (libération du pouvoir ottoman) entourant une jeune femme symbolisant la mère patrie. Un peu plus loin, une cloche fondue avec des milliers de douilles retrouvées après l’insurrection de 1997 qui a conduit à la chute du gouvernement communiste rend hommage cette fois aux victimes de cette dernière lutte pour la démocratie. Évoquons aussi la pyramide Hoxha, qui a failli tomber dans le même oubli que son dictateur éponyme, avant qu’on décide de la rénover. Enfin, curiosité unique, Tirana possède 2 rues Georges W. Bush…


2. Berat, pour son magnifique ensemble de maisons ottomanes et son château

De part et d’autre d’une rivière s’alignent en terrasses une multitude de maisons ottomanes aux façades blanches percées de nombreuses ouvertures toutes pareilles, qui font surnommer Berat « la ville aux mille fenêtres ». Au-dessus, perchée sur un immense rocher, trône une citadelle hébergeant de nombreux édifices classés à l’UNESCO, mais aussi encore pas mal d’habitants et de commerces. Berat mérite aussi la visite pour ses nombreux édifices religieux dont le plus emblématique est l’église St Michel, accrochée à mi-hauteur sur le rocher de la citadelle, et qui figure en couverture de notre édition du guide Lonely Planet.


3. Gjirokaster, pour ses maisons fortes remarquablement conservées

C’est dans cette ville du sud de l’Albanie que naquit la rébellion contre l’empire ottoman sous la férule d’Ali Pacha. Il réussit là où Skanderberg avait échoué en déclarant de façon unilatérale l’indépendance de l’Albanie en 1819, mais n’eut pas le temps d’être populaire, décapité en représailles par les Turcs 2 ans après. Notre Alexandre Dumas national l’a tout de même immortalisé dans son roman éponyme. A cette époque, rien de tel pour se défendre que des maisons fortifiées, dont on peut encore retrouver et visiter quelques exemplaires dans la vieille ville. Une façon idéale de s’imprégner des coutumes ottomanes du XIXe siècle, notamment celles liées aux mariages et au sens de l’hospitalité (des pièces étaient réservées exclusivement à ces usages dans chaque maison). Nous avons visité aussi la forteresse qui surplombe la ville, comme à Berat, mais qui présente moins d’intérêt.


Une claque à l’odomètre

C’est en Albanie que l’odomètre de Roberto va afficher désormais six chiffres, soit 100 000 km, après avoir parcouru 32 pays différents en un peu plus de 3 ans. Notre monture se porte plutôt bien. Mis à part cet agaçant voyant « faire contrôler moteur » qui s’affiche puis disparait spontanément sans que l’on n’ait jamais trouvé de cause précise, et bien sûr ce souci vite réparé de démarreur et de batterie au Monténégro, nous n’avons pas connu de panne bloquante. Pourvu que ça dure !

Et 100 000 km, sur cartes, ça donne quoi ? Ces petites animations permettent de bien réaliser les distances parcourues

2O21 – Europe du Nord

2023 – Amérique Centrale
2022 – Amérique du Nord

2024 – Europe du Sud-Est

Vamos a la playa


Souvenirs souvenirs


En route pour la Grèce

Ça ne nous était pas arrivés depuis le Panama, nous allons quitter le pays par bateau. Car nous ne passons pas de suite vers la Grèce continentale mais nous allons l’aborder par une île : Corfou. C’est dans un ferry modeste que nous allons traverser, avec une porte d’entrée à peine plus grande que Roberto et pour corser la chose – c’est une première – un embarquement en marche arrière. Mais bon, il y a des marins pour vous guider (en albanais ou en grec…) et ça s’est bien passé. A suivre, donc.


Et la carte du parcours pour finir, zoomable en cliquant ici

126. Les merveilles du Monténégro

Nous arrivons au début du mois de mai au Monténégro, le 31ème pays depuis le début de notre vie nomade il y a un peu plus de 3 ans, alors que nous approchons des 99000 km parcourus. Ce petit pays a été l’un des derniers avec la Serbie à quitter la Yougoslavie, les deux contrées partageant une religion orthodoxe prédominante et une affinité pour le communisme. Nous ignorons tout du Monténégro, la découverte est totale et va s’avérer pleine de belles surprises. Alors que nous pensions le traverser en une semaine (le pays a la taille de l’Île de France), il nous en faudra au moins deux avant de nous décider à en sortir.

Les Bouches de Kotor

Nous abordons le Monténégro par les Bouches de Kotor, un ensemble étonnant de 4 baies profondes entourées de hautes montagnes, s’apparentant un peu aux fjords nord-européens, mais débouchant sur la Mer Adriatique. La route qui en épouse le moindre contour offre des vues spectaculaires à chaque virage et traverse de charmants petits villages. Après un arrêt dans la cité balnéaire d’Herceg Novi, qui nous intéressera davantage par son monastère orthodoxe que par son centre historique très touristique, nous nous arrêtons à Lipci observer quelques peintures rupestres datant du VIIIè siècle av. J.-C., d’accès étonnamment libre. L’étape suivante est Risan, où nous décidons de passer la nuit sur une jetée en attendant l’ouverture le lendemain d’une maison ornée de mosaïques romaines du IIè siècle ap. J.-C. C’était sans compter sur le fait que le 2 mai était encore la fête du travail au Monténégro. Ils doivent sans doute travailler beaucoup pour avoir 2 jours de congés à cette occasion. Nous gagnons ensuite Perast, peut-être le plus beau village de la baie bien qu’envahi par la foule, venue en partie visiter 2 îles minuscules hébergeant l’une une église l’autre un monastère. La route se termine par la ville fortifiée de Kotor. Après, si l’on ne veut pas faire le tour complet, il ne reste plus qu’à s’échapper par l’une des nombreuses petites routes en lacets qui partent à l’assaut des montagnes.



Une route à dessein

Au lieu de poursuivre le tour des bouches de Kotor, nous prenons la direction des montagnes au Nord. Alors que la pente n’est encore que très modeste, nous rencontrons une petite succession de lacets qui sur notre GPS et sur Google Earth dessinent une sorte de M. Eh bien ça n’est pas un hasard. Cette sinuosité inutile – la route aurait pu aller tout droit compte tenu de la faible pente – est l’acte volontaire de l’architecte austro-hongrois en charge de la construction de cette route en 1878, tombé amoureux d’une monténégrine dénommée Milena, à qui il a pu offrir cette belle preuve de son affection. Et dans M il y a aussi aime, n’est-ce-pas ?

Un peu plus haut, nous partons à l’assaut d’une impressionnante succession de lacets, 25 virages en épingles à cheveux sur quelques kilomètres, cette fois tout à fait justifiée. De plus, cette route appelée Serpentine est très étroite et assez fréquentée. Croiser les véhicules en sens inverse était presque un challenge à chaque fois. Particulièrement quand il s’agissait de bus. Nous en avons tout de même rencontré trois, nous donnant l’occasion d’apprendre la bonne technique pour que ça passe dans les virages : toujours laisser le bus à l’extérieur !


Purée de poisse

Montés bien haut avec ces routes délicates mais superbes, nous finissons dans le brouillard, et c’est bien dommage parce que notre destination du jour est un petit sommet censé procurer une vue époustouflante à 360° sur la moitié du pays et même les pays limitrophes. A l’arrivée au parking ça n’est pas gagné. Mais il nous reste l’espoir que ça se dégage après avoir gravi les 491 marches qui mènent au Mont Lovcen. Ne croyez pas pour autant que toutes les montagnes du Monténégro soient dotées d’escaliers. C’est qu’ici, au sommet, se trouve le mausolée du prince-évêque préféré du pays, qui a régné de 1830 à 1851, avant que le Monténégro ne devienne une vraie monarchie un peu plus tard. Pierre II Petrovic Njegos était un leader aussi bien politique que culturel, connu pour ses œuvres poétiques et philosophiques. Après que la petite chapelle où il était enterré ait été endommagée par les guerres, le pays reconnaissant l’a transformée en un mausolée étonnant. La démocratie est maintenant de mise au Monténégro, mais un prétendant au trône attend son tour en Bretagne où il est né après l’exil de la famille.

Le brouillard ne se lèvera pas, nous décidons de repartir. Mais Roberto non. Toujours ce démarreur qui ne se lance pas, alors que pourtant tout ce qui est électrique fonctionne. Nous branchons le logiciel de diagnostic sur la prise ODB. Il dit que tout va bien. Et bien sûr, avec une boîte automatique, pas question de tenter de démarrer en prise. Comme ça s’était résolu tout seul il y a 3 jours, nous patientons un peu. Et Roberto finira de bouder. Alors nous changeons nos plans et partons vers la capitale qui n’est qu’à une heure de route et qui possède un garage Fiat-Iveco.


Bagdad Café

Nous trouvons facilement ce tout petit garage qui ne paie pas de mine. À 17h15, un quart d’heure après la fermeture officielle, il est encore ouvert. Nous entrons et cherchons quelqu’un dans ce tout petit local ne pouvant pas recevoir plus de 3 voitures, où règne un certain désordre ambiant et où la télé semble tourner en continu. Je déniche un mécano, branché avec son ordi sur une voiture. J’explique notre problème. Il commence par me dire que c’est encore férié pendant 5 jours (nous sommes le vendredi de Pâques orthodoxe…) avant de me donner, devant mon air dépité, rendez-vous à 8h30 demain matin. Ouf ! Nous dormons sur un terrain vague loin de nos standards habituels mais proche du garage. Roberto démarre correctement et nous sommes pile à l’heure au rendez-vous. Après quelques essais, ils nous disent que le démarreur a peut-être un problème, mais que la batterie aussi. Ils nous démontent le premier, nettoient et graissent tout mais ne trouvent pas grand-chose. La batterie semble moins en forme et il est probable qu’après 3 ans et près de 100 000 km elle soit en fin de vie. Nous acceptons la proposition de la changer. En attendant que la commande arrive d’un stock voisin, on nous amène des chaises puis on nous propose du café, de l’eau, un jus de fruit. Nous déclinons gentiment tout, mais quand ils nous proposent du brandy (!) nous acceptons finalement le café… Que nous dégustons avec eux pendant leur pause. Ils sont vraiment aux petits soins pour nous, nous font visiter le garage, nous montrent où ils en sont, etc. Finalement la batterie arrive et vers 11h, nous repartons avec un Roberto tout fringant et démarrant au quart de tour.


Fuir la foule

Avant que Roberto nous fasse le coup de la panne, nous avions prévu de visiter un monastère orthodoxe très connu dans le pays. Mais pas très facile d’accès. Nous nous sommes dits qu’y aller un week-end pascal n’était pas une si bonne idée et nous décidons de partir du côté opposé, vers une région montagneuse peu visitée. C’est une route magnifique qui nous y mène, longeant d’abord un canyon spectaculaire puis traversant des zones ressemblant un peu au massif des Causses chez nous. C’est de nouveau une voie étroite, par endroits mal revêtue, mais le côté sauvage nous va bien et nous ne croisons que rarement d’autres véhicules. Nous arrivons le soir au village de Gusinje, au cœur d’une vallée bucolique avec ruisseaux, pentes herbeuses, cimes enneigées tout autour et ce qu’il faut de vaches et de moutons pour compléter l’ambiance campagnarde.


Les pieds dans le Plav

Dans le même secteur se trouve le lac de Plav. Encore un décor magnifique avec des couleurs qui n’auraient pas manqué d’inspirer Monet. Mais une fraîcheur – nous sommes à plus de 900 m d’altitude – qui n’incite pas à y tremper autre chose que les pieds. Le village lui-même, sans être exceptionnel, mérite qu’on jette un œil à sa tour en pierre construite au XVIe siècle pour mieux se défendre des invasions ottomanes et à ses mosquées en pierres ou en bois qui montrent que ça n’a pas été si efficace…


Vers le grand oeil bleu

Nous faisons maintenant cap au Nord-Est vers d’autres montagnes, celles du parc naturel du Durmitor. De hauts plateaux, de jolis petits lacs et une couronne de montagnes dont certaines enneigées. Pas moins de 50 sommets à plus de 2000 m d’altitude nous attendent. De décembre à mars, le parc est d’ailleurs une station de ski réputée. Le reste de l’année, il semble que ces grands espaces soient peu visités et c’est bien dommage.


Presque noir


Scenic Road

Nous avions rencontré ce concept lors de notre visite des parcs américains : beaucoup d’entre eux sont dotés d’une « scenic road », une route qui mène à différents points de vue ou départs de randonnées et qui permettrait même de visiter un parc sans descendre de sa voiture. Au parc du Durmitor, nous avons emprunté cette route panoramique sur à peu près les 2/3 de ses 75 km. Bien moins aménagée que ses homologues américaines, elle est particulièrement étroite, jouxte sans protection de nombreux précipices et côtoie des parois à risque élevé d’éboulement si l’on peut en juger par les roches jonchant la route à certains endroits. Elle est à double sens et il est ardu de s’y croiser. Il faut parfois reculer de quelques centaines de mètres pour trouver un petit élargissement approprié. Curieusement, le prospectus recommande une circulation en sens antihoraire SAUF pour les (petits) camping cars à qui il est conseillé l’autre sens… Raymond Devos trouverait certainement que ça n’en a pas. De sens.


Gorge profonde


Le monastère d’Ostrog

Ce monastère isolé en plein centre du Monténégro, est le plus vénéré des chrétiens orthodoxes du pays, la religion majoritaire. Il se compose d’un monastère supérieur, le plus emblématique du fait de son encastrement dans une falaise de 900 m de hauteur, recevant un million de visiteurs par an, d’un monastère inférieur, situé 2 km plus bas, beaucoup moins visité, et de deux petites églises. Le tout premier aurait été créé par Saint-Basile, un évêque d’Herzégovine, qui aurait amené tous ses moines dans 2 grottes présentes dans la falaise après qu’ils aient été chassés de leur monastère initial d’Herceg Novi par les Ottomans. Son corps est maintenant enchâssé dans le mur de la petite église attenante et continuerait de guérir toutes sortes de maladies. Ce qui est bien c’est que toutes les confessions sont acceptées. La santé n’a pas de religion n’est-ce-pas ? De magnifiques fresques ornent l’intérieur, mais les photos sont interdites. Les superbes mosaïques de l’étage supérieur sont par contre accessibles. Une belle ambiance en tout cas et pas tant de monde que ça.


Podgorica

La jeune capitale du Monténégro – elle ne l’est devenue qu’en 2006, à l’indépendance du pays – est le reflet du passé chaotique du pays. Après les divers envahissements plus ou moins destructeurs qu’elle a subis, la ville s’est reconstruite de façon assez hétéroclite en une sorte de melting pot architectural quelque peu déconcertant. Nous y avons flâné une journée et fait tout de même quelques découvertes, démentant ceux qui racontent sur les réseaux qu’il n’y a rien à voir.


Le Temple de la Résurrection du Christ est une superbe cathédrale orthodoxe presque neuve – elle n’a été consacrée qu’en 2014 – avec ses larges dômes surmontés de croix dorées, ses murs en pierres taillées et son intérieur couvert de fresques. Une cérémonie de mariage était en cours lors de notre visite, mais un groupe de touristes ayant été invité par leur guide à rentrer, nous avons suivi le pas. Nous n’avons néanmoins pas pu tout explorer, et nous n’avons pas réussi à dénicher la fresque la plus célèbre, une petite saynète montrant Tito, Marx et Engels brûlant ensemble en enfer. Une vengeance des orthodoxes sur l’interdiction de culte ordonnée par le régime yougoslave. Je vous mets quand même une photo prise sur Internet.


Stara Varos, le vieux quartier ottoman, en dehors de ses ruelles pavées qui tranchent avec les larges avenues de la ville nouvelle, ne possède pas de construction bien typique à part peut être la tour de l’horloge peu mise en valeur et le vieux pont romain. Nous avons été intrigués par contre par de multiples graffitis dans ses rues montrant des vikings et la date 1987. Après recherches, il s’agit d’une référence à la date de création d’un club de fans de l’équipe de foot locale. Ils se sont nommés les « barbares » et sont connus pour être très turbulents, responsables de nombreuses interruption de matches après avoir envahi le terrain, lancé des fusées éclairantes, des gaz lacrymogènes et des objets contondants. Y compris lors de compétitions européennes. Les hooligans monténégrins en quelque sorte.


Du vin de bonne garde

Pas très loin de Podgorica, nous nous arrêtons visiter une cave à vin qui possède une histoire particulière : elle est en effet installée 30 mètres sous terre dans des anciens hangars top secret abritant les avions de l’armée populaire yougoslave. 1 million de litres de vins vieillissent juste sous le vignoble dont ils sont issus. Deux cars de touristes arrivés juste avant nous ont dissuadé de tenter la dégustation, mais c’est une option sur place, y compris avec restauration et accord mets-vins si ça vous tente.


C’est une surprise mais chut !

Peu de gens le savent, mais les chutes du Niagara sont à 10 minutes de Podgorica, au Monténégro. On ne peut pas en douter, c’est écrit dessus. Plus modestes que leurs homologues nord-américaines, elles sont néanmoins de belle prestance et méritent véritablement la visite. A part peut-être au mois d’août où elles auraient tendance à se dessécher, la comparaison n’étant alors plus de mise.


Le Lac de Skadar

La plus grande étendue d’eau des Balkans sert aussi de frontière entre le Monténégro et l’Albanie. Elle est alimentée par une rivière sinueuse bordée de nénuphars, dont on peut observer les magnifiques méandres depuis la route panoramique qui traverse le parc. Plus loin, c’est le lac presque entier que l’on peut observer. Sa faible profondeur, 5 m en moyenne, explique la présence de nombreuses plantes aquatiques lui donnant de belles couleurs, et attirant surtout une faune exceptionnelle. 256 espèces d’oiseaux notamment, dont le rare pélican frisé que nous n’aurons pas le bonheur de rencontrer alors qu’il avait une tête sympathique sur les photos. La route panoramique est aux « normes » monténégrines, c’est-à-dire étroite, tortueuse, mal limitée, sans marquage au sol évidemment, et dont les glissières de sécurité sont remplacées par de simples rochers posés en équilibre au bord du précipice. L’attention nécessairement soutenue du conducteur limite un peu l’observation des paysages pourtant exceptionnels. Heureusement que des arrêts sont ménagés ça et là !


Cetinje

La capitale du pays de 1481 à 1918 est un peu plus chargée d’histoire que sa successeure Podgorica. Elle conserve nombre de bâtiments Art nouveau datant de l’époque où la noblesse européenne rendait visite à celle du Monténégro. D’opulentes demeures d’habitation – dont celle du président, mais aussi des administrations, des ambassades, etc. La construction effrénée noie tout ça un peu plus chaque jour dans des immeubles plus ou moins modernes, mais il persiste suffisamment de bâtiments de caractère pour rendre la visite de la ville agréable. D’autant qu’un certain nombre de ces édifices ont été transformés en musées.   


Laisse béton

« Une petite Dubrovnik, le calme en plus » disait notre guide à propos de Budva, la première ville que nous retrouvons sur la côte. Après la visite de la « perle de l’Adriatique » en Croatie, il nous fallait aller le vérifier. Eh bien nous avons été très déçus. La citadelle qui crève les yeux dans la version croate est ici difficile à apercevoir ici, presque constamment dissimulée par des constructions récentes hideuses. Et une fois passées les murailles, on retrouve la même concentration de boutiques et restaurants, mais sans l’harmonie et la richesse architecturale de la grande sœur croate, définitivement bien supérieure. Le seul point sur lequel nous sommes en accord, c’est le moindre nombre de touristes. Mais il ne faut pas chercher bien loin l’explication.


Un peu plus loin, la presqu’île de Sveti Stefan, certes hyper photogénique, confirme la vente du littoral aux promoteurs immobiliers : là c’est la totalité de cet ancien village, dont les habitants ont été expulsés par le régime communiste, qui a été privatisée, les maisons ayant été reconverties en chambres d’hôtel de luxe. L’accès via l’étroite route est réservé exclusivement aux résidents, tout comme l’une des 2 plages qui l’entourent tandis que l’autre est payante. Du coup, le site touristique le plus photographié au Monténégro est aussi le moins visité. Quel paradoxe !

Et à proximité, de nouvelles constructions sortent déjà de terre, une tendance au bétonnage intensif que nous ne pourrons malheureusement que confirmer en poursuivant la route côtière. C’est décidé, nous repartons vers les montagnes !


Une vie de châteaux

Nous allons trouver sur notre route quelques-uns de ces nombreux châteaux, perchés stratégiquement au sommet de montagnes pour assurer la défense des envahisseurs actuels contre les envahisseurs futurs. Le Monténégro a, malheureusement pour lui, fait l’objet de beaucoup de convoitises dans le passé.

La forteresse de Haj Nehaj fut construite au XVe siècle par les Vénitiens pour se protéger des Ottomans. On y accède par une belle randonnée dans la forêt. Au sommet, on s’étonne de la taille de la construction et on compatit pour les travailleurs qui ont assemblé toutes ces pierres au bord d’un précipice. On distingue encore bien la silhouette de la petite église qui disposait autrefois d’un autel catholique et d’un autre orthodoxe. Nous avons eu la surprise de voir un père et sa fille, ayant gravi comme nous le sentier, venir y prier. La nature envahit délicieusement les lieux et le panorama est bien sûr splendide.


La citadelle de Stari Bar, alors qu’elle est située en plein centre-ville, a le mérite de ne pas être habitée et envahie de commerçants, lesquels sont sagement alignés à l’extérieur des murailles. L’intérieur est dans son jus et fait l’objet de travaux de restauration permanents. On y découvre des restes des différentes civilisations qui ont occupé les lieux, des Illyriens en 800 av. J.-C. aux Monténégrins depuis 1878, en passant par les Slaves, les Vénitiens, les Ottomans. Paradoxalement, ce sont les Monténégrins qui ont le plus abîmé les bâtiments en les bombardant pour récupérer leur bien. Un gros tremblement de terre en 1979 a aussi fait beaucoup de dégâts. Ayant eu la bonne idée de démarrer de bonne heure, nous avons la chance d’avoir le site presque rien que pour nous. C’est en redescendant vers 11h que nous avons croisé quelques « groupeaux », comme nous les appelons…

L’olivier bimillénaire

La région de Bar est couverte d’oliviers, il y en aurait plus de 100 000, et la majorité aurait plus de 1000 ans. Celui-là serait le doyen de toute l’Europe avec ses 2 000 ans d’âge. S’il a résisté aux dégradations des différentes guerres qui ont secoué le pays, il a été un partiellement brûlé par un incendie accidentel : un joueur de cartes qui profitait de son ombre a jeté accidentellement une allumette et l’un des troncs a pris feu. Sans doute un flambeur de poker.


Dernier stop nature dans les ajoncs

Nous n’aurons au cours de cette traversée du Monténégro passé qu’une nuit dans un camping, car nous étions un peu juste en électricité, et une autre en ville, près du garage Iveco dans lequel nous avions rendez-vous le lendemain. Tout le reste a été en pleine nature. Le pays en est largement doté et est plutôt tolérant sur le sujet. Jamais nous n’avons été dérangés ni n’avons craint pour notre sécurité.


La frontière

Nous en avons donc terminé avec ce beau pays qui nous aura réellement émerveillés. Nous nous dirigeons maintenant vers l’Albanie. Une autre aventure commence. Nous allons de nouveau changer de monnaie (vous ai-je dit que, bien qu’il ne fasse pas partie de l’Union Européenne, le Monténégro utilisait l’Euro ?) et devoir composer avec un nouvel opérateur téléphonique, notre forfait Free de 35 Go mensuels ne fonctionnant pas là-bas. Mais si tout était facile, il n’y aurait plus d’aventure ! A bientôt !


Carte

124. Bosnie II

Nous revoici donc en Bosnie, et plus particulièrement en Herzégovine, la province la plus au sud du pays dont la capitale régionale est Mostar, la ville la plus visités après Sarajevo. En fait, la majorité des visiteurs du pays se contentent de ces deux villes, ce qui donne une vision vraiment très partielle du pays.


Mostar

1. Les cicatrices de la guerre

Après cette dizaine de jours en Croatie, le contraste saute aux yeux : en dehors du quartier historique qui a manifestement été restauré, la ville – comme Sarajevo d’ailleurs – reste très marquée par la guerre des années 1990. Le conflit a-t-il été plus sévère ici ? Le pays a-t-il moins de moyens pour se reconstruire ? Souhaite-t-on ici ne pas effacer trop vite les traces pour ne pas oublier que tout peut repartir à tout instant ?



2. De la couleur dans la ville

Mostar se rénove peu à peu, et certains quartiers ont été doté de superbes muraux pour sortir de la grisaille ambiante. C’est très réussi.


3. Le business du vieux pont

Centré sur le célèbre pont, symbole de la ville, ce quartier semble avoir été épargné par la guerre. Il a en fait été totalement reconstruit, jusqu’au pont lui-même que les habitants ne croyaient pas pouvoir récupérer. Les petites rues pavées de motifs géométriques, la vieille mosquée, les maisons classées, les plongeurs qui sautent du pont dans l’eau glacée, ont en apparence attiré tous les capitaux pour la réhabilitation, et forcément tous les touristes. Ce quartier que privilégient les vacanciers et tour-opérateurs, avec ses bars bruyants, ses restaurants très moyens et ses boutiques de souvenirs à gogo, c’est celui que j’ai le moins apprécié, pour cause d’envahissement et de perte d’authenticité. Mais bon, le business c’est le business.


4. Descente de Lee

Afin d’éviter aux jeunes de la ville de sombrer dans les conflits de religion, une association locale s’est proposée de leur ériger la statue d’une célébrité qui leur conviendrait à tous, musulmans, catholiques, juifs ou orthodoxes. Le résultat du vote a été des plus étonnant : c’est l’acteur américain Bruce Lee, spécialiste du Kung Fu, qui a dominé tous les suffrages, et dont l’effigie en bronze grandeur nature a été placée en 2005 dans un parc de la ville. Forcément, ça n’a pas plu à tout le monde, il y a eu plusieurs tentatives de vandalisme, des déplacements de sécurité, une disparition mystérieuse finalement attribuée à une restauration volontaire par le sculpteur, avant un dernier positionnement dans un jardin public où la star des arts martiaux faisait le bonheur des promeneurs depuis 2013. Nous ne pouvions rater un tel symbole, mais sur place, impossible de trouver la silhouette familière. Nous avons juste fini par trouver le piédestal libre de tout occupant, si l’on excepte des gamins y faisant circuler des petites voitures. Renseignement pris, la statue avait de nouveau disparu 2 semaines seulement avant notre passage ! Les réseaux sociaux s’émeuvent, la police enquête, et l’on finit par retrouver notre pauvre Bruce Lee démembré, apparemment victime d’un ferrailleur désargenté. Pas sûr que la star s’en remette. 


5. Hommage en cascade

Il a été demandé à un célèbre architecte local de concevoir un mémorial aux partisans yougoslaves morts pendant la Seconde Guerre Mondiale. Le résultat est surprenant, reproduisant en béton une vaste cascade et un torrent, sur lesquelles sont parsemées des pierres tombales en forme de pièces de puzzle.


6. And the winner is…

Le plus chouette à Mostar, c’est l’environnement. Traversée par la tumultueuse rivière Neretva, la ville est entourée de sommets, dont l’un d’eux nous hébergera pour la nuit. Près d’une petite zone touristique aménagée avec tyrolienne, bar panoramique et plateforme qui s’avance au-dessus du vide pour mieux apprécier le panorama et le slogan écrit en pierres visible de toute la ville. Il affiche aujourd’hui « BiH WE LOVE YOU ». Les 3 lettres signifiant Bosnia i Herzegovina ayant remplacé le « TITO » initial.



Le monastère des Derviches de Blagaj.

Les Derviches, une branche mythique de l’Islam, avaient sans doute besoin d’un challenge pour construire leur monastère. La falaise dans laquelle ils l’ont inclus en 1520 est surplombante et largue régulièrement des rochers sur l’édifice, reconstruit à de multiples reprises. La rivière au bord de laquelle ils l’ont placé, sortant d’une grotte, crée régulièrement des dégâts en débordant. Mais ces moines sont d’une grande tolérance et accueillent volontiers les visiteurs de toutes les confessions, moyennant une petite obole bien sûr. L’endroit est éminemment photogénique et d’un calme relaxant. Enfin nous y étions avant l’heure d’ouverture des restaurants, ceci explique peut-être cela.



Le confluent de la Buna et de la Neretva.

La première prend sa source sous le monastère de Blagaj et, paisible, se jette en petites cascades dans la seconde, tumultueuse, étonnamment canalisée dans la roche à cet endroit. Quand on sait que le débit moyen de ce fleuve est de 250 m3 par seconde, on imagine que le courant doit avoir une sacrée force !


Zitomislici

Ce monastère sur notre route était prometteur : comme beaucoup de lieux de cultes orthodoxes, il était parait-il couvert de fresques de toute beauté. Malheureusement, un évènement officiel était prévu lors de notre passage, 2 voitures noires de vigiles sont venues se garer à côté de Roberto et nous ont demandé de partir. On aurait peut-être du faire le coup de la panne ou de l’anglais de collégien, mais ils n’avaient pas l’air de rigoler, alors nous avons obtempéré…


Pocitelj

C’est une ville toute en pierre et toute en pente, dont on apprécie mieux l’architecture en grimpant jusqu’à sa forteresse par des escaliers bien raides. On plaint les gens qui devaient monter les packs d’eau au XVème siècle.



Stolac

On vient y voir en général les nombreux moulins qui se succèdent sur la rivière Bregava traversant la ville, et, en saison, on se baigne volontiers sous ses jolies cascades. Vu la grisaille et les températures fraîches, nous nous sommes contentés de la balade.


Les stecci de Bjelojevici

La Bosnie compte 22 sites inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO pour ses stecci, des tombes médiévales d’un genre particulier, gravées de motifs décoratifs encore peu expliqués aujourd’hui. On y trouve aussi bien des motifs géométriques que des soleils, des croissants de lune, des armes ou encore des scènes de chasse. Et plus rarement des inscriptions en cyrillique du genre « Je n’étais déjà pas grand-chose maintenant je ne suis plus rien » ou « Pas touche à mon caillou ». Un sens de l’humour à faire regretter cette époque. Les tombes de Bjelojevici étaient en accès libre, en plein milieu de la nature. Nous avons dormi dans le coin pour profiter de la tranquillité absolue.



Le monastère de Tvrdos

Oui, nous aussi nous avons du mal avec la prononciation. Et encore je vous simplifie la vie, je ne mets pas les accents. Ce monastère serbe orthodoxe date du XVème siècle et il semble parfaitement entretenu. En tout cas l’intérieur est exquis. Les vignes et les oliviers dans les jardins tout autour laissent penser à une production locale des moines. Mais si les bouteilles de vin et d’huile d’olive présentées dans l’immense boutique portent toujours la marque du monastère, il est évident que le petit domaine ne peut pas assurer une telle production. On ne sait pas non plus si ce sont les moines qui ont aménagé le parking pour les bus des tours opérateurs ni rempli les rayons de la boutique de bondieuseries, mais apparemment les affaires marchent. Après tout tant mieux pour eux. Un truc intéressant, si j’ose dire, c’est la main momifiée d’Hélène d’Anjou dans un coin du monastère. Lorsque son père a accepté de donner sa main au roi serbe Stefan Uros Nemanjoc, il n’imaginait certainement pas une fin aussi macabre.


Trebinje la méridionale

Cette ville est la plus au sud de la Bosnie, peuplée principalement de Bosno-Serbes. Elle fait partie d’ailleurs de la République Serbe de Bosnie. C’est compliqué là-bas. Proche de l’Adriatique, elle en récupère le climat doux et ensoleillé avec 260 jours de soleil par an. Elle est toute proche d’ailleurs de Neum, la seule ville maritime du pays (la Bosnie ne compte que 21 km de côtes, enclavées entre 2 territoires croates). Nous avons trouvé Trebinje plutôt agréable avec son étonnant pont de pierre déplacé pour cause de construction de barrage à 7 km de la ville alors qu’il en était distant de 15 (mais alors pourquoi pas directement en ville ?), son opulente cathédrale orthodoxe et des célébrités peintes dans tous les coins de rues.

Ah au fait, Trebinje, qui se prononce « trébinié », tirerait son nom de Napoléon qui, lors de son passage aurait trouvé la ville « très bien ». On s’étonne tout de même d’un vocabulaire aussi pauvre de la part de l’empereur.


La Bosnie, c’est fini

Ce spot où nous passerons la nuit peu avant la frontière avec la Croatie était notre dernière étape en Bosnie-Herégovine. Nous aurons vraiment beaucoup apprécié ce pays qui nous a surpris à bien des égards et touché par son histoire fragile, le tout dans des décors grandioses et sauvages.


Dubrovnik n’est qu’à 33 kilomètres de là. Nous allons la découvrir en famille. Avons-nous gardé le meilleur de la Croatie pour la fin ? A suivre au prochain épisode !

120. Hongrois ce convoi

Roberto notre fidèle fourgon aménagé nous a promenés sur les routes de la Hongrie, un beau parcours d’environ 500 km autour du Lac Balaton. Nous nous réservons la partie Est du pays et la visite de la capitale pour dans quelques mois.


Hongrois être parfait

Suite à la dernière publication, un fidèle lecteur francilo-normand m’adresse la remarque suivante :

« Une petite remarque normande insignifiante : lorsque vous parlez de Grandville, parlez-vous de Granville en Normandie car je n’ai pas trouvé le jumelage dont vous parlez ? (Serait-ce une) coquille ? Si oui, attention la « Pléiade » risque de vous refuser la publication ».

Maniaque de l’orthographe comme je suis, je vérifie et ne peux que constater ma lamentable erreur. Je lui ai bien entendu répondu en privé, mais au cas où d’autres esprits vifs se seraient posé la même question, je publie ci-dessous ma réponse (sans les formules de politesse et amicales) :

Oui nous parlons bien de Granville la normande, initiatrice du douzelage comme on peut le lire ici.

Dans ma grande générosité, j’ai hélas rajouté ce « d » inopportun, qui fut tout de même utilisé dans le passé. Je hais la simplification de l’orthographe !

Cela dit, j’ai lu que le port de Granville était le premier en France en matière de coquilles… Il me pardonnera certainement.


Hongrois que c’est un château

Notre première étape hongroise est la ville de Keszthely, sur la rive Ouest du Lac Balaton. Hors saison, ça n’est pas une grande ville touristique, mais elle recèle quelques curiosités dont ce palais qui ressemble à un château, propriété des Festetics, une famille de notables croates depuis 1739.

Au fil des générations, ils ont accumulé comme vous et moi tout un tas de bricoles, mais eux en avaient tellement qu’ils ont fini par les exposer au public, moyennant finances bien sûr. Ce qui est amusant, c’est qu’il y a un peu de tout, réparti dans plusieurs dépendances du palais.

La collection consacrée à la chasse, au rez-de-chaussée de l’un de ces « musées » effraie tout d’abord les visiteurs contemporains en raison de la multitude de trophées exhibés, des cornes couvrant les murs aux peaux de bêtes étalées sur le sol. En réalité, la collection initiale ayant été perdue au cours de la guerre, tous ces objets seraient des dons de chasseurs de la région, notamment de l’un des créateurs du musée qui se montre en photo souriant jusqu’aux oreilles le pied posé sur un tigre du Bengale ou un éléphant d’Afrique. Beurk.

À l’étage heureusement, l’exposition devient didactique, des diaporamas très bien faits montrant des animaux de chaque continent dans leur environnement reconstitué.


En franchissant le palier, on tombe sans transition aucune sur l’un des plus grands réseaux de modélisme ferroviaire d’Europe. 75 trains orchestrés par un système informatique circulent sur 2700 m de voies ferrées dans des paysages autrichiens ou hongrois, dans des gares fidèlement reproduites à l’échelle, dans diverses saisons, traversant des viaducs, s’arrêtant (comme) pour prendre des passagers dans de petites villes aux personnages parfois hétéroclites comme cette scène de rue clin d’œil à la Guerre des Étoiles.


Dans le bâtiment suivant, nous trouverons une collection sur le thème du transport, avec des calèches de tout poil précédant les premières automobiles du XIXème siècle, principalement d’origine américaine. Avant chacun des 3 modèles exposés ci-dessous figurent en gros plan des bouchons de radiateurs, rétroviseurs ou autres accessoires. Saurez-vous retrouver la marque correspondante ? (réponses dans l’ordre après la dernière photo).

C’était quasiment le seul modèle hongrois exposé parmi les automobiles, les autres étant plutôt américains. L’occasion de vous proposer un petit jeu : saurez-vous reconnaître, pour chacun des 3 modèles ci-dessous, la marque que suggèrent les 2 gros plans qui les précèdent (bouchons de radiateurs, rétroviseurs, éléments de roues, etc.). La réponse est après la dernière photo.




Nous finirons par la visite du palais lui-même, au cours d’une visite guidée obligatoire en Hongrois. Si nous n’avons pas compris grand-chose aux commentaires, nous avons tout de même pu apprécier sur de nombreuses salles le mode de vie des aristocrates aux XVIIIè et XIXè siècle, juste avant qu’ils ne se fassent piquer le palais au moment de la 2nde Guerre Mondiale. On leur a tout de même laissé leur magnifique bibliothèque en chêne hébergeant 80 000 ouvrages. J’imagine par contre que tout le pinard est parti. A la guerre comme à la guerre !


Hongroise personne

Keszthely est l’une des plus anciennes villes du pays et ça se voit. L’architecture est austère, de notre point de vue du moins (mais où sont les belles couleurs du Mexique ?!) et les rues sont désertes lors de notre départ en balade alors qu’il est presque 10h, certes un dimanche. Les magasins fermés renforcent la notion de solitude. Mais quelques passants finissent par arriver, on doit se lever tard ici les jours fériés.


Quelques musées finiront par ouvrir, mais nous n’en visiterons qu’un, celui dédié à l’œuvre d’une vie, celle de l’honorable Ilona Miskei qui a assemblé pendant 14 ans plus de 4,5 millions de coquilles d’escargots fossiles recueillis dans les mines voisines pour reproduire le Parlement de Budapest à l’échelle 1:33. L’ouvrage fait tout de même 7 m de long sur 2,5 m de large et 2 m de haut. Lorsque l’auteure en a fait don au musée, Il a fallu une semaine pour transporter l’œuvre depuis chez elle. Une allure d’escargot, tout naturellement.


Spécialités hongroises



Hongrois être au Népal

Ciel bleu et air frais ce matin-là, un dimanche. Traversant une forêt, grimpant au sommet d’une colline accompagnés d’autres randonneurs, nous traversons bientôt un torana, apercevons des ribambelles de drapeaux de prières accrochés aux arbres et flottant au vent tout en entendant de petites clochettes et en humant des effluves d’encens qui nous rappellent notre séjour à Katmandou.

Et bientôt le grand stupa tout blanc apparaît. Pas besoin de nous pincer, nous savons que nous ne sommes qu’à une quinzaine de kilomètres du Lac Balaton. Eh oui, il existe bien une petite communauté bouddhiste dans ce pays à majorité catholique. Moins d’un Hongrois sur 1000. Mais ils sont très influents. La capitale ne s’appelle-t-elle pas Bouddhapest ?


Hongrois être en été

Alors que le Lac Balaton n’attire pas vraiment les nageurs en hiver, son voisin d’Heviz en voit s’ébattre toute l’année. C’est que sa température oscille entre 22 et 35°C selon les saisons, grâce aux sources chaudes qui l’alimentent. Certes on s’y baigne dans une ambiance soufrée qui pourra déplaire à quelques-uns, mais avec l’avantage de pouvoir soigner ou préserver ses articulations. Une expérience inoubliable que de se baigner en hiver avec 10°C dans l’air mais 24°C dans l’eau, dans une petite brume pas désagréable générée par la différence de température.


Hongrois que c’est du champagne


Hongrois entendre Jonasz

« Même quand les dieux vous abandonnent, lac Balaton / Le sable est doux comme une pomme, lac Balaton ». C’est avec ces paroles de Michel Jonasz (d’ascendance hongroise) que j’avais entendu parler de ce lac, le situant vaguement en Europe Centrale, avant de le découvrir au cœur de la Hongrie. C’est tout l’intérêt du voyage que de situer un monument, une histoire, un nom qui n’avaient pas jusqu’ici de localisation bien précise dans mon esprit. Avec ses 67 km de long, le plus vaste lac d’Europe centrale ne devait pourtant pas passer inaperçu sur mes cartes de géographie !

Nous nous sommes approchés au plus près du lac Balaton via la péninsule de Tihany. La route qui longe d’abord la côte, sa végétation lacustre et ses pêcheurs, s’élève ensuite 80 m au-dessus du niveau de l’eau. Là, une abbatiale bénédictine de 1754 héberge quelques jolis autels, tandis que l’hôtel juste à côté héberge une jolie terrasse surplombant le lac. Devant un tel spectacle, les petites tables décorées de bouquets de lavande séchée – une production locale – étaient irrésistibles. Avec un petit café et une pâtisserie locale, ce fut un moment magique.


Hongrois pas si bien dire (de la poésie)

Le poète et homme de lettres Rabindranath Tagore, premier lauréat non européen du prix Nobel de littérature en 1913, n’aurait peut-être pas pu terminer l’œuvre qui l’a rendu célèbre s’il n’avait pas bénéficié de cures thermales à Balatonfüred. La station balnéaire huppée du lac Balaton lui a édifié un buste et nommé un grand parc en son honneur.

D’autres visiteurs célèbres sont honorés sur les murs du Panthéon de Balaton, juste en face de l’hôpital cardiologique de la ville, mais à vrai dire nous n’en connaissions pas un seul… D’autres statues nous ont davantage parlé – si l’on peut dire – comme ce pêcheur et ce capitaine de ferry qui gardent l’entrée du port, ce réalisateur hongrois immortalisé sur son dériveur, ou encore cette main qui sort tragiquement d’une colonne de béton en hommage aux victimes d’un naufrage de ferry en 1954 (voir ci-dessous).

Les 3 vies du Pajtas

Navire à vapeur construit en 1918 à Budapest pour transporter des passagers sur le Danube, le Pajtas y heurta malheureusement une mine au cours de la Seconde Guerre Mondiale et coula.

Renfloué après la guerre, il fut reconverti en ferry sur le lac Balaton, avec une capacité en passagers augmentée de 150 à 200 personnes sans aucun test préalable. Ce devait être excessif car le 30 mai 1954, après plusieurs mouvements de balancier, il coula de nouveau, faisant plusieurs dizaines de victimes, en souvenir desquelles ce monument a été érigé.

De nouveau renfloué, il reprit du service sur le Danube muni cette fois d’un moteur diesel et termina sa carrière en 1987 sur une rive du Danube. Pour couler des jours paisibles.


Hongrois que c’est fermé et puis non

Nous n’hésitons pas à nous éloigner du lac d’une quarantaine de kilomètres pour nous rendre à Herend, capitale de la porcelaine hongroise. Le temps est splendide, la manufacture est là devant nous, toute bâtie de briques comme une usine et toute décorée de porcelaines comme une manufacture de porcelaine. Nous entrons dans le hall d’accueil, très classe, ça s’annonce bien. Mais nous retombons de haut – sans rien casser – en apprenant que les visites sont interrompues et ne reprendront qu’au mois d’août prochain c’est-à-dire, euh, dans 5 mois ! Nous sortons dépités, dégoûtés de Google qui annonçait l’établissement ouvert, ce qui était malgré tout le cas puisque seules les visites étaient fermées.

Nous traînons le pas sur la petite place juste en face, dont le seul occupant est un superbe lion en céramique.

Nous nous approchons d’une vitrine où quelques belles pièces de vaisselle sont exposée, cherchant tant bien que mal à prendre des photos pour nous consoler, en collant les appareils à la vitre pour éviter les reflets. Claudie, déjà deux vitrines plus loin, me lançe : « Viens, c’est ouvert ! ».

Nous entrons alors dans une véritable caverne d’Ali Baba, avec des pièces plus merveilleuses, plus fines, plus délicates les unes que les autres. Nous passerons presque une heure dans cette grande boutique et repartirons avec deux petits animaux (oui parce que le service 12 couverts en porcelaine à stocker dans Roberto ç’aurait été plutôt osé) totalement consolés.


Hongrois être revenu à l’époque soviétique.

Amateurs d’urbex ou d’airsoft, voici un endroit incontournable à explorer : une ville fantôme complète avec barres d’immeubles, boutiques, bars, etc. Tout ça envahi à souhait par la végétation, s’effondrant peu à peu, encore accessible par des rues parsemées de nids-de-poules et partiellement couvertes d’herbes folles.

Il s’agit d’une ancienne base militaire soviétique construite dans les années 60 pour héberger les militaires et leurs familles. Tout ce petit monde est gentiment rentré chez lui après l’effondrement de l’URSS en 1980. Maintenant ce sont les bâtiments qui s’effondrent, c’est ce qu’on appelle la double peine.

L’endroit est facile à trouver, il suffit de taper sans vous tromper Szentkirályszabadja sur votre application GPS favorite. Si vous utilisez la dictée vocale ça va être un peu plus compliqué 😉


Hongroise personne ici non plus

A 15 km de là, une aventure similaire est arrivée à un bâtiment unique qui pourrait ressembler à un palais ou un château, mais qui est en fait une ancienne caserne destinée à un régiment d’artillerie. C’est un peu comme maintenant, il fallait mettre le paquet pour attirer les jeunes…

Pendant la 2ème Guerre Mondiale, les jeunes nazis sont venus goûter à la vie de château, remplacés par les jeunes soviétiques après la guerre. Et quand l’URSS s’est disloquée, ce sont les jeunes du quartier qui sont venus prendre le relais. Mais la caserne-château n’a plus sa superbe d’autrefois, loin de là.


Hongrois ce qu’on voit …et on a tort

Pecs serait la seconde ville de Hongrie à visiter après Budapest, mais nous a laissés d’abord dubitatifs sur son intérêt. Ce n’était peut-être pas une très bonne idée de nous garer pour la nuit près de la gare car nous avons dû traverser quelques quartiers affreux pour nous rendre au centre-ville, heureusement de meilleure facture, notamment les bâtiments autour de sa grande place principale.


Nous avons cru avoir la berlue en apercevant au sommet du toit de l’Église de la paroisse du centre-ville à la fois une croix chrétienne et un croissant de lune musulman. Et la confusion s’amplifie en pénétrant dans l’édifice, avec des fresques, des écritures, des éléments architecturaux et des symboles appartenant aux deux religions. On comprend bien que ce lieu de culte est passé de main en main au fil des siècles, passant d’église gothique à mosquée puis de nouveau église catholique. Lors de la dernière restauration, on a décidé de conserver une grande partie de son histoire et de ne pas faire table rase sur le passé comme à l’habitude. Intelligent et tolérant.


Nous avons cru voir non pas double mais quadruple en arrivant devant la façade de la cathédrale du 11ème siècle, qui laisse dépasser 4 tours. La nef, la crypte, les sols, tout a été merveilleusement décoré au fil des années. On peut monter dans la seule tour qui fait office de clocher pour apprécier le panorama sur la ville. Mieux vaut éviter de rester en haut lors de la sonnerie biquotidienne de la plus grosse cloche, véritablement assourdissante. L’accès est d’ailleurs fermé à ce moment-là, attention de ne pas se faire piéger !


Nous avons dû écarquiller les yeux devant les tableaux du maître de l’art abstrait géométrique Victor Vasarely, enfant du pays, joliment présentés dans un musée qui lui est dédié, ainsi qu’aux autres artistes de sa famille.


Nous avons du ravaler notre impression d’en avoir trop vu en visitant une nouvelle exposition sur la porcelaine. Mais à Pecs, on ne jure que par la manufacture Zsolnay, crée en 1853, la plus importante de l’empire austro-hongrois en 1914. Elle fut aussi à la pointe de l’art et du design européen, fournissant des carreaux de faïence pour orner les monuments dans tout le pays, influençant le mouvement art nouveau (notamment avec ses pièces de verrerie décorées à l’éosine). Elle connut malgré tout un déclin rapide, en seulement quelques années, en raison de l’occupation serbe et de l’introduction du socialisme. Une petite production persiste, se visite même, mais là encore, ce n’était pas le bon moment. Nous nous sommes néanmoins régalés dans le musée.


Hongrois que c’est fini, mais non !

Nous quittons provisoirement la Hongrie, mais nous y reviendrons dans quelques mois, sur le retour de notre circuit européen. Il nous reste encore beaucoup de choses à apprendre sur le pays et bien sûr visiter sa mythique capitale. J’espère que mes petits jeux de mots répétitifs ne vous auront pas trop agacés. Mais avouez que les possibilités étaient limitées. A bientôt !

Ci-dessous notre parcours en Hongrie, zoomable en cliquant ici.

115. Cap Sud-Est

C’est reparti ! Après cette longue pause métropolitaine, nous entamons la 3ème boucle de notre périple vers le Sud-Est de l’Europe. Partant d’une petite excursion au pays de Cervantes, il nous faudra d’abord traverser toute la France pour rejoindre l’Italie, avec forcément au passage quelques visites intéressantes malgré le temps plutôt froid et maussade. Au fait, c’est quand le réchauffement climatique ?

Escapade ibérique

cap sud-est à partir de maintenant
La baie et la plage de San Sebastian

Stationnés au Pays Basque pour le réveillon, nous avons profité de l’unique journée de beau temps – bien qu’un peu frisquet – pour faire un rail-trip en Espagne jusqu’à San Sebastian. Le soleil qui nous a attirés a eu malheureusement même effet sur les (autres) touristes. N’ayant pas prévu initialement de nous baigner pour cause de mer gelée, nous avons tout de même été contraints de nager dans la foule. Avec pour effet de pénaliser la beauté du lieu.


Réveillon gastronomique

Entre amis, à St Jean de Luz, au restaurant L’instinct où travaille notre grande fille – c’était l’occasion de tout de même la voir ce soir-là, nous avons dégusté un délicieux repas gastronomique. Il ne fallait pas se laisser impressionner par le menu, bien plus axé sur la qualité que la quantité. Un délice. Et une très bonne adresse si vous passez par là 😋

port de st jean de luz
Le port de pêche de Saint-Jean-de-Luz

Bonne année !

voeux roberto 2024
Bonne Année 2024 à tous les nomades, à tous ceux qui rêvent de le devenir,
et à tous ceux qui voyagent avec nous via les réseaux !

Roberto en redemande

Iveco Fiat Cayla S.A. Rodez
J’adore le style de la salle d’attente d’Iveco-Fiat à Rodez. En plus ils sont super gentils

Nous avons rendez-vous à 8h ce matin-là au garage Iveco-Fiat de Rodez pour une dernière réparation avant notre boucle sud-est-européenne. Lors d’une précédente révision à Agen, le garage Fiat de là-bas avait décelé une « importante fuite d’huile » et proposé comme seule solution de déposer le moteur pour voir d’où ça venait, rien que ça. N’ayant rien remarqué jusqu’ici, un peu suspicieux sur la réparation proposée (un peu comme si un médecin disait à son patient : vous avez un peu de tension, il faudrait sortir votre cœur pour voir si ça ne vient pas de là) et surtout ayant d’autres projets à court terme, nous avions décliné et repris la route. Tout en surveillant un peu le sol après nos stationnements et en surveillant le niveau d’huile. Sans remarquer de d’anomalie après plusieurs mois. Toutefois, lors de la précédente visite à Rodez, nous en avions parlé et ils ont confirmé un certain degré de fuite. Habitués à entretenir les camping-cars basés sur Ducato, ils avaient déjà rencontré le problème, qui venait selon eux d’un bouchon du carter d’huile qui s’était partiellement dévissé. L’accès en était difficile, il fallait démonter un phare et puis un autre truc dont je ne me souviens plus, mais en tout cas pas le moteur ! La réparation a été faite en 2h30, pendant lesquelles on nous a gentiment proposé d’attendre dans une petite salle au chaud (températures négatives dehors ce jour-là), café à disposition si besoin. Roberto est maintenant fin prêt pour la 3ème boucle de son tour du monde.


Intermède vanlife


Poète poète stéphanois

Il ne faut pas s’mentir,
Avec ce temps neigeux
Pas trop envie d’sortir.
Nous avons préféré
Aller voir c’était mieux
l’expo des passementiers

Il ne faut pas s’mentir
Les passementiers d’Saint-É
Plutôt que de mourir
Dans les mines de charbon
Ont su bien exploiter
Un tout autre filon

La passementerie c’est l’art
De tresser quelques fils
Pour en faire des Damart,
Des ceintures, des rubans,
Des franges torses graciles.
Et même des sous-vêtements

exposition rubans
Le tissage des rubans aujourd'hui

Romans-photos

! rûr neib seloivar sel


De boulanger à cordonnier…

…ou l’histoire étonnante du facteur Cheval, architecte de l’étrange. Il consacra 35 années de sa vie à bâtir son extravagant « Palais idéal » à l’aide de matériaux qu’il trouvait pendant ses tournées quotidiennes de 43 km et qu’il ramenait après son travail avec une brouette. Le palais fut achevé en 1914, mais il fallut attendre 1969 pour que l’oeuvre soit classée aux Monuments historiques. Ferdinand Cheval n’a pas toujours été facteur. Il commença sa vie active comme boulanger, et c’est peut-être le pétrissage de la pâte qui l’incita à malaxer les différents mélanges composant son palais. Contrairement à ce que pourrait suggérer mon titre, il ne fut jamais cordonnier. C’est juste que, malgré avoir fait plusieurs fois le tour du Palais, je n’y ai pas trouvé de boîte aux lettres. Et comme on dit, les cordonniers sont les plus mal chaussés…


On termine par la boutique, avec une récupération un rien tendancieuse de l’un des textes du palais. Jugez-en…


Plutôt dessous que dessus.

Le pont d'Avignon
Le Pont Benezet à Avignon

Visiter Avignon sans voir le pont si célèbre était impensable. Maintenant je mourrai moins bête en sachant que ce pont n’atteint plus l’autre côté du Rhône depuis longtemps, avec seulement 3 arches subsistantes sur les 22 d’origine, et surtout qu’on n’y a jamais dansé tous en rond, l’étroitesse du passage ne le permettant pas. Par contre il est probable qu’on y ait dansé au-dessous, au niveau de l’île centrale qui abritait une guinguette. La comptine mériterait d’être corrigée, mais tant qu’elle permet d’attirer 400 000 visiteurs par an, la ville d’Avignon ne se presse pas. Les beaux messieurs et les belles dames du conseil municipal font cooomme ça.

Le pont d'Avignon

Retenue à la source

Voilà une expression qui conviendrait bien à ce lieu étonnant que nous a fait découvrir Françoise, notre amie l’isloise. Nous sommes à Fontaine de Vaucluse, à l’endroit précis où nait la Sorgue, pas si connue mais pourtant la 1ère source de France métropolitaine et même la 5ème mondiale avec un débit moyen équivalent à 17 800 litres de rhum par seconde. Ou d’eau si vous voulez, mais ça fait tout de suite plus impressionnant avec le rhum 😉

Au pied d’une falaise, un gouffre qui n’a pas encore fini d’être exploré laisse apparaître une jolie nappe vert émeraude qui semble tranquille. L’eau passe ensuite sous des rochers avant de laisser place à un fort courant aussi vert que limpide.

Françoise nous montre des photos prises 3 semaines auparavant, où l’on voit que l’eau du gouffre était plus haute d’une dizaine de mètres et que les rochers aujourd’hui à sec étaient noyés sous un vif courant. Dès qu’il a plu un peu ou beaucoup, toute l’eau du coin se retrouve retenue ici.

J’espère qu’à vous aussi mon petit topo aura plu un peu ou beaucoup.


Argent public


France-Italie


San Remo sans Milan


Hemingway sur le carreau


Peinture à l’eau

D’abord, la petite ville de Portofino, surnommée la perle de la Riviera italienne, se mérite. Une première tentative d’y accéder avec Roberto a échoué : bien que respectant le gabarit autorisé (max. 6m de long et 2m30 de large) nous avons été sans ménagement invités à faire demi-tour, les places de parking étant peut-être déjà complètes à 10h du matin. Nous avons alors rejoint, par la petite route aussi étroite que sinueuse, le parking le plus proche, à 5 km de la ville, rejoignant cette dernière en bus.

Mais le désagrément est vite oublié devant cette merveille : autour d’un petit port aux eaux bleu-vert se dresse une ceinture de façades alternant les couleurs chaudes et munies de volets verts comme c’est classique en Italie. Mais là, c’est la tranquillité du lieu qui fait la différence (précisons que nous sommes en basse saison) et les petits sentiers sillonnant la forêt alentour, menant qui au Château Brun qui au phare, avec des vues magnifiques sur le port et la baie.

Au retour de balade, nous fêtons dignement mon anniversaire dans l’un des rares restaurants du port, appréciant de notre table, outre des mets délicieux, la vue sur les façades colorées et leurs reflets ondoyant sur la rade. Vraiment un bel endroit, qui nous fait réaliser la chance que nous avons de pouvoir voyager.


Ne pas tomber dans le panneau

Où ne pas se laisser impressionner par le paysage !


Un bisou s’il vous plaît !

Assis à la terrasse de ce café à Gênes, ça m’a fait bizarre de demander au serveur un bisù (prononcer bisou) et il a eu d’ailleurs un petit sourire en coin…

C’était notre premier contact avec la pâtisserie italienne, plutôt raffinée et appétissante. Nous en avons aperçu bien d’autres par la suite, dans les vitrines des pasticcerie, mais difficile de goûter à tout !


La terre du milieu


À Élisa et Achille

Cette dédicace n’est pas pour la seule Élisa que je connaisse (désolé @elisaroland mais je te promets de t’en rédiger une lorsque je serai au Brésil) mais elle est bien pour Achille mon fils, passionné de Napoléon. Car l’Élisa en question, c’est bien la sœur de Napoléon, à qui il a offert la ville de Lucques en 1809 après avoir annexé la Toscane en 1805. À l’époque, les habitants les plus riches de la ville, comme ailleurs en Toscane, faisaient construire une tour sur leur palais, la plus haute possible évidemment. Le problème est qu’elles étaient particulièrement ciblées lors des différentes attaques, et aujourd’hui il n’en reste plus que 9 sur les 250 initiales. La Tour Guinigi, avec ses 45 m de haut, a été choyée par la grande-duchesse de Toscane, Élisa, sans doute en raison de son jardin au sommet qu’elle a bien entretenu. Les chênes qui y poussent font la fierté de la ville et représentent une attraction étonnante, pour peu qu’on veuille bien gravir les 230 marches qui mènent au sommet. Avec une vue époustouflante à la clef bien sûr.



Transition

L’évocation de la sœur de Napoléon me permet une transition facile avec notre étape suivante : Piombino, port d’embarquement pour une destination spéciale, que vous découvrirez dans la prochaine publication… A bientôt !

Et la carte du trajet, ne perdons pas nos bonnes habitudes ! Vous pouvez avoir une version zoomable en cliquant ici

110. On the road again

Entre la sortie d’hibernation de Roberto et les petites routes du Portugal, entre une partie de la famille et des amis, notre mois d’Août a été bien occupé. Le rythme des publications s’en est ressenti, mais le blog aussi avait besoin de vacances, que voulez-vous !

Le grand retour

Nous sommes au 4ème jour de l’arrivée du Titus dans le port de Zeebrugge, un vendredi, et, sans nouvelles de notre intermédiaire, nous envisageons de passer un week-end supplémentaire sur place puisqu’aucune livraison ne se fait les samedis et dimanches. Mais le mail tant attendu arrive enfin : Roberto est prêt à être réceptionné à l’adresse qui nous est indiquée. Cela dit, notre intermédiaire nous demande la date à laquelle nous souhaitons y aller, afin qu’il puisse prévenir la compagnie maritime de notre arrivée, et cela 24h à l’avance. Ce qui signifie pour nous une réception pas avant lundi. Inenvisageable ! Nous contactons directement la compagnie qui, elle, nous donne le feu vert. En toute allégresse, nous remballons nos affaires et quittons notre logement pour nous rendre à Zeebrugge à 15 km de là. Aux bureaux de Wallenius Wilhelmsen (la compagnie), nous signons quelques papiers et attendons qu’on aille nous chercher Roberto.

Et puis, le grand moment arrive enfin, nous voyons Roberto franchir la porte de la zone sécurisée du port et venir se garer juste devant nous. L’employé nous remet les clefs avec un grand sourire, nous souhaitant bon voyage. Voici maintenant venu le temps de l’inspection. Notre véhicule a-t-il été visité, dévalisé, voire vandalisé pendant ce voyage ? Nous entrons avec un brin d’inquiétude. Mais nous sommes vite rassurés : tout a l’air intact, tel que nous l’avions laissé. Les placards sont rangés, les petites cachettes où j’avais dissimulé quelques outils sont toujours occupées. Nous poussons un soupir de soulagement et nous installons à bord. Nous sortons avec joie des installations portuaires et reprenons la route. Un vrai moment de bonheur !

Après 15 mn d’attente, Roberto fait son entrée
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Une rapide inspection nous rassure : pas de vandalisme

Cap Sud-Ouest

Il n’est pas question de reprendre notre tour du monde de suite, nous allons pendant quelques mois retrouver nos familles et amis quelque peu délaissés avant de reprendre le large. Mais ce que nous reprenons à 100%, c’est notre vie nomade qui nous a beaucoup manqué pendant ces deux derniers mois. Plaisir de rouler, de s’arrêter au moment choisi, de bivouaquer chaque jour dans un site différent et tout simplement de vivre dans notre petite maison sur roues. Nos premières étapes sont plus familiales que touristiques et les publications sur le blog se sont raréfiés d’autant. Lui aussi a droit à quelques congés !

Roberto on the road again
Roberto enfin libre à Bruges (ci-dessus) puis sur une aire d’autoroute et tout près d’Agen (ci-dessous)

Mais nous voilà repartis vers le Sud-Ouest avec deux étapes consacrées prioritairement à deux de nos enfants, à Agen puis St Jean de Luz.

Plage de Saint Jean de Luz
La plage de St Jean de Luz (non ne cherchez pas, Roberto n’y est pas !)

Bidart, vous avez dit Bidart ?

C’est dans cette commune située entre St-Jean-de-Luz et Biarritz que l’on découvre en suivant le sentier du littoral l’étrange Château d’Ilbarritz au sommet d’une petite colline. Il fut construit entre 1895 et 1897 dans le but principal d’abriter le plus grand orgue privé jamais conçu. Un coup de folie ou de génie du Baron Albert de l’Espée qui venait d’acheter le terrain.

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Le château d’Ilbarritz à Bidart (64)

L’aventure ne dura que 4 ans, et en 1903 le château fut revendu et l’orgue déménagea à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre où l’on peut encore le voir aujourd’hui. Le château connut une histoire mouvementée, transformé tour à tour en sanatorium, hôpital de guerre, casino, garnison allemande, hôtel Relais et Châteaux avant d’être classé en 1990 pour ne pas finir en centre de thalassothérapie. Sauf que l’argent manque et la lente dégradation se poursuit. Une âme charitable pour le sauver ?

A propos d’orgue, saviez-vous que lorsqu’on parle de « grandes orgues » il ne s’agit que d’un seul instrument alors que les « grands orgues » en concernent plusieurs ? Bidart, non ?


Une faille de Google Traduction

Si vous demandez au célèbre traducteur en ligne la traduction en Espagnol du mot français « Auchan », en bon élève sur le caractère invariable des noms propres, il vous répondra « Auchan ». Mais c’est méconnaître l’origine du nom commercial de cette enseigne de supermarchés.

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Le magasin Alcampo à Irun (Espagne)

La marque Auchan provient du quartier des Hauts Champs de Roubaix, où a été ouvert le premier magasin de l’entreprise en 1961. Une fois franchie la frontière franco-ibérique comme nous venons de le faire, la marque se transforme en Alcampo, ce qui est tout simplement la traduction de « au champ » en Espagnol.

A l’intérieur, pas de grande particularité par rapport à l’enseigne française, si ce n’est l’imposant rayon de jambons entiers et l’agréable odeur qui va avec.

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Rayon des jambons entiers dans l’hypermarché

L’Espagne sans la foule

En plein cœur du mois d’Août, que le ciel soit gris ou bleu, la grande majorité des touristes se concentre sur les plages ou dans l’étroite zone maritime adjacente, celle où l’on a pied. Étrange communion estivale qui se retrouvera quelques jours ou semaines plus tard sur les routes du retour.

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La foule sur la côte, même un jour de mauvais temps. Mais comment font-ils ?

Autant vous dire que ce n’est pas la tasse de diesel de Roberto que de rouler pare-chocs contre pare-chocs, surtout après avoir traversé les grands espaces américains. Et quant à nous, les seules plages qui nous font rêver sont désertes ou presque, avec une eau au-delà de 26°C dans laquelle nagent quelques tortues et autres poissons multicolores.

Nous avons donc rapidement fui la zone côtière pour rejoindre des zones plus paisibles. Nous avons ainsi traversé de jolis petits villages aux maisons de pierres, des champs parsemés de moutons, des ponts étroits que frôlent les rétroviseurs de Roberto, des routes de montagne quasi désertes.

A quelques exceptions près, la masse touristique s’est évaporée comme par magie. Nous avions même les spots Park4night* pour nous seuls la nuit. Ça c’est un signe !

* Application sur smartphone où les adeptes de véhicules de loisirs partagent leurs bivouacs


Vitoria-Gasteiz et Bourges-Avaricum

Contrairement à Saint-Étienne ou Bruère-Allichamps, Vitoria-Gasteiz est un pléonasme, Gasteiz n’étant que le nom basque de Vitoria. C’est comme si on appelait notre capitale Paris-Lutèce ou ma ville natale Bourges-Avaricum, encore qu’il s’agisse pour ces deux-là du nom Romain.

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Donc Vitoria-Gasteiz est la capitale du pays basque espagnol. Imaginez un centre médiéval entouré d’une zone un peu plus moderne puis d’une ceinture d’espaces verts. Une ville tranquille où il fait bon vivre, et où il fait bon se promener. Les dix mille pas enregistrés par le smartphone de Claudie nous ont permis d’apprécier une architecture assez typique d’Espagne comme ces fenêtres saillantes, ces grilles omniprésentes aux ouvertures comme aux clôtures, ces figures sculptées dans la pierre en façade, ces frontons d’églises munis de cloches, etc.

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En tout cas une balade paisible en plein mois d’août sans la foule. Un peu comme à Paris-Lutèce j’imagine.


« Veille toujours au grain, sans attendre demain »

Dans l’un des premiers villages que nous rencontrons, après avoir franchi la frontière hispano-portugaise, nous découvrons un regroupement d’une cinquantaine d’édifices sur pilotis, tout en pierre et pour la plupart surmontés d’une croix.

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Espigueiros do Lindoso, Portugal

Renseignement pris, il s’agit de greniers de stockage du maïs, remontant parfois au XVIIème siècle. Les pilotis en pierres protègent contre les rongeurs. Des fentes verticales sur les parois, en favorisant l’aération, protègent contre l’humidité. Les croix sur le toit protègent contre toute malédiction. Et le regroupement, en favorisant la surveillance, protège contre les voleurs.

Chaque famille du village possédait son grenier. Certains sont parait-il encore utilisés de nos jours.

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Une belle découverte en tout cas, idéale pour notre premier contact avec le Portugal.


Le sanctuaire du Bon Jésus du Mont

Sanctuaire du Bon Jésus du Mont à Braga
Sanctuaire du Bon Jésus du Mont à Braga, Portugal

Au sommet d’une colline près de la ville de Braga, toujours au Portugal, trône une église de style néoclassique datant du XVIIIème siècle. Jusque-là rien d’exceptionnel, mais le site est classé au patrimoine mondial par l’UNESCO. On l’atteint soit par un funiculaire, fonctionnant depuis 1882 et utilisant un système particulier de contre-poids d’eau, soit par les 577 marches d’un escalier avec 17 paliers, débutant par un chemin de croix avant de se poursuivre par le majestueux escalier des cinq sens. L’ensemble est très photogénique l’après-midi lorsqu’il est éclairé par le soleil, mais un peu moins le matin à contre-jour. Nous avons courageusement choisi les marches, sans pour autant les gravir à genoux comme le font certains pénitents. Cela nous a permis d’apprécier les sculptures et fontaines disposées tout au long et de découvrir petit à petit le panorama sur la vallée et la ville.

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Batismo

Nous avons eu le grand honneur d’être invités au baptême de la petite Julia, fille de nos amis Christelle et Nuno. Une tradition familiale bien marquée au Portugal, ayant bien plus d’ampleur que chez nous. En gros, c’est quasiment la même organisation qu’un mariage en France : cérémonie à l’église, vin d’honneur puis dîner dansant. Sans parler Portugais, nous n’avons pas pu échanger avec tous les invités, mais heureusement une partie d’entre eux était francophones. La musique et les danses étaient presque toutes portugaises, ce qui nous réjouit : tant de pays perdent une partie de leur culture en se laissant envahir par la langue anglo-saxonne. Mais heureusement pas le Portugal.

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Nous voilà au bout de notre route Sud-Ouest. Il n’y a plus qu’à reprendre le chemin en sens inverse car de nouveau la famille nous attend, nous réclame. De nouveau quelques centaines de kilomètres à parcourir. Mais ce n’est pas comme si on détestait ça… A bientôt alors !

104. Costa Rica quatrième décade

Voici la dernière série de notre périple au Costa Rica. Des zones peu visitées du centre-est aux plages touristiques de la côte Caraïbe. Comme pour les épisodes précédents, c’est la nature qui revient en leitmotiv. Pas de problème, nous sommes loin de la saturation !

Orosi ou le tourisme discret

Il faut à la fois sortir de la route panaméricaine et s’engager dans une route secondaire en cul-de-sac pour parvenir à Orosi et sa vallée entourée de montagnes embrumées. Du coup les touristes s’y font rares. On trouve pourtant dans cette petite ville paisible de 10 000 habitants la plus ancienne église du pays, dénommée San José d’Orosi, construite en 1743 et ayant résisté à de nombreux tremblements de terre grâce à sa structure en bois et en adobe. Il en ressort un certain cachet, autant pour l’extérieur que pour l’intérieur, comme en témoignent les photos. La ville serait réputée pour ses plantations de café mais nous n’en avons curieusement vu aucune. Elle possède aussi plusieurs sources thermales, toutes privées. Nous sommes allés jeter un œil au Balneario de Aguas Termales, mais l’aménagement en piscines ordinaires ne nous a pas donné envie de nous y baigner. Les possibilités de stationnement sont réduites dans la vallée. Nous tentons le diable en nous garant pour la nuit en plein centre-ville, juste entre le stade de foot et l’église. Un samedi soir… Pas gagné d’avance !

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Mural en centre-ville sur les productions locales principales : café et bananes
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La vallée d’Orosi, vue du mirador, un parc gratuit aménagé pour le pique-nique et la détente
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L’attraction d’Orosi : son église, la plus ancienne du pays
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Intérieur en bois, sol en terre cuite, la classe ! Le lieu est très prisé pour les mariages
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Orosi est aussi connue pour ses sources thermales. Mais en piscine classique avec musique, non merci !

Un jardin botanique universitaire

Le Jardin Botanique Lankester, près de Paraiso, est en effet un centre de recherches de l’Université du Costa Rica, ayant pour mission l’étude des orchidées et des plantes épiphytes dans un but de conservation de la biodiversité de la planète. Il publie d’ailleurs une revue de référence dans le domaine, appelée Lankesteriana (site en lien) et anime le réseau mondial d’informations sur les orchidées Epidendra (site en lien). Si les plantes épiphytes ont la part belle dans le jardin, elles n’occupent qu’une petite partie de ses 21 hectares. Nous allons nous émerveiller tour à tour devant les broméliacées, les zingibérales (héliconias, oiseaux de paradis, bananiers, arbres du voyageur et gingembre), les fougères arborescentes, les palmiers, les cactus, tous bien mis en valeurs et parfaitement entretenus. Le jardin japonais est loin d’être le plus beau qu’on ait vu, mais le jardinier du crû qui l’a créé est peut-être reparti au pays du soleil levant, distant d’à peine 13 300 km. On lui pardonnera.

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L’entrée du jardin botanique, déjà gage de qualité
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C’est aussi le paradis des broméliacées, plantes caractérisées par leur structure en rosettes
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Des forêts de bambous encadrent le jardin japonais, un peu moins bien réussi que le reste
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Bien entendu, on trouve des fleurs partout

La cité abandonnée

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De l’autre côté de la vallée, la ville d’Ujarras autrefois florissante n’est plus qu’un hameau. Elle a en effet été abandonnée pour cause d’inondations dévastatrices à répétition, déplacée dans un secteur plus sûr et renommée Paraiso. La vieille église est maintenue debout tant bien que mal et un petit parc a été aménagé autour pour qu’on lui rende encore visite. Si la nature est belle au Costa Rica, il y a parfois un prix à payer.

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La maison du rêveur

Au détour d’un virage près de la petite ville de Cachi apparait soudain une petite maison de bois paraissant délabrée. Mais en s’approchant de près, on remarque vite que ce n’est pas une maison ordinaire. Ses murs et ses fenêtres sont en bambou ou en bois de caféier partiellement ébranché. La façade et le côté exposé à la route sont ornés de multiples sculptures, représentant la vie rurale et des éléments religieux typiques à la culture du café. On y trouve même une représentation de la Cène de Léonard de VInci. Tout cela est l’œuvre du célèbre sculpteur costaricien Macedonio Quesada (1932-1994), relayé un temps par ses fils. Bien que Google annonce une ouverture quotidienne de 9h à 17h, les locaux sont manifestement fermés de longue date, l’atelier et l’exposition ne se visitent plus. Dommage, nous aurions bien rêvé un peu…

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La Maison du Rêveur, à peine visible dans un virage
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Une route spectaculaire

Nous poursuivons notre exploration des régions montagneuses du pays, profitant de paysages verdoyants, entre forêts imposantes, plantations de caféiers et cultures en espalier qui épousent les reliefs irréguliers et permettent d’exploiter les sols très caillouteux. Nous traversons de petits villages aux maisons quelconques mais plutôt bien entretenues et généreusement fleuries. Question entretien, la route par contre laisse à désirer, comme souvent sur les routes secondaires. On peut passer d’un instant à l’autre d’une belle route toute neuve à un chemin de terre très orniéré, de deux larges voies à une étroite voie unique, notamment au passage des ponts. On trouve parfois de véritables marches, créées par l’effondrement du sous-sol instable ou encore des zones ondulées pour les mêmes raisons, prévenues ou pas par des panneaux explicites. Conduire ici demande beaucoup de vigilance, et nécessite d’accepter qu’à tout moment « ça ne passera pas » et qu’il faudra faire demi-tour. En contrepartie, le paysage est à la hauteur et la circulation (heureusement !) réduite.

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Des routes plutôt jolies, entre plantations de café et maisons fleuries
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Cultures en espalier : saurez-vous reconnaître ce qui pousse ici ? (réponse au bas du chapitre)

Allez, on vous emmène faire un peu de route avec nous. Imaginez-vous au volant de Roberto…

Un passage de pont un peu étroit… Il restait encore 3 ou 4 cm de chaque côté des rétroviseurs !

Là, c’est une route « normale » qui finit, comme on dit, en eau de boudin…

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Bon, nous sommes passés ! Roberto prend un repos mérité au milieu des champs, entre un hangar à vaches et un cimetière. Ça a été calme des deux côtés. Notez le carrelage sur les tombes, c’est courant ici.
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P.S. Réponse à la question plus haut : des christophines


Exit les Mayas, vive les Huetares !

Voilà plusieurs semaines que nous n’entendons plus parler des Mayas, et c’est normal car ils ne sont jamais parvenus jusqu’au Costa Rica. Ici, les civilisations précolombiennes s’appellent les Chorotegas ou les Huetares, et le moins que l’on puisse dire est qu’ils n’étaient pas de grands bâtisseurs. Les seuls restes visibles sont à Guayabo, et nous sommes allés les voir. Point de pyramides ici, mais de grandes structures circulaires qui servaient de base aux maisons, un beau réseau d’aqueducs et des chaussées pavées. On apprend peu de choses sur place à propos des tribus qui vivaient là de -1000 à 1400 et l’on reste un peu sur sa faim. Heureusement, la forêt tropicale qui englobe le site, luxuriante, sonore à souhait et parcourue de toucans et de morphos bleus rattrape le coup.

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Roberto garé juste devant le site archéologique
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De véritables chaussées pavées entrent et sortent du village. Elles reliaient sans doute les villages voisins.
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Lacrymal circus

C’est exactement à cette chanson de Renan Luce que m’a fait penser cette visite du Sanctuaire des paresseux près de Cahuita, sur la côte caraïbe. Nous en avions un souvenir émouvant lors de notre première visite en 2009, découvrant ces paisibles mammifères pour la première fois avec nos enfants dans un lieu créé 37 ans auparavant par un couple de passionnés, avec pour but louable de soigner tous les animaux qu’on leur rapportait et d’en remettre un maximum dans la nature, au pire de les garder dans l’espace naturel protégé autour de leur établissement. La visite comportait alors un tour en canoë dans ce sanctuaire avec un guide naturaliste aussi prompt à donner des explications que doué à dénicher les paresseux perchés dans les arbres. S’en suivait un inoubliable passage à la pouponnière, où nous avions pu observer des bébés prendre leur repas, les plus jeunes au biberon et les autres en croquant des bâtonnets de légumes cuits. La visite se terminait par la rencontre avec Buttercup, la mascotte du lieu, l’un des premiers bébés sauvés par le couple fondateur, trônant dans son siège suspendu en osier quand elle n’était pas dans les bras de la patronne.

Mais ça, c’était le passé.

Ce matin de mai 2023, nous étions les seuls à visiter, ce qui pour un établissement supposé exceptionnel était déjà révélateur. Un guide à la voix monocorde nous a emmené voir une dizaine de paresseux enfermés dans des cages jusqu’à la fin de leurs jours, nous expliquant qu’étant donné leurs infirmités, ils ne survivraient pas longtemps dans la nature, même dans l’espace protégé. La visite s’est poursuivie par une autre salle avec d’autres paresseux atteints d’autres infirmités … et puis c’est tout ! Pas de bébé à voir, les rares présents étant apparemment tous en incubateur. Pas de tour en canoë (à l’antifouling peut-être ?). Pas de rencontre avec Buttercup, la mascotte ayant rendu l’âme (cette fois nous acceptons l’excuse, compatible avec la trentaine d’années que vivent en moyenne les paresseux)

Nous avons juste été vivement encouragés à laisser un don à l’association qui n’aurait pas d’autre moyen de financement. Mais franchement, nous avons manqué de motivation, tellement déçus de ne pas revivre notre première expérience. En résumé, le sanctuaire des paresseux est « has been », n’y allez pas !

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Nous avons maintenant rejoint la côte Caraïbe. A nous les plages …et les 38°C à l’ombre ! Mais quand même de jolis levers de soleil
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Après ce premier spot nocturne balnéaire, notre premier arrêt est pour le Sanctuaire des Paresseux

Épilogue : Heureuse consolation de cette visite décevante : le soir même l’un de ces animaux passait sur la ligne électrique juste au-dessus de nos têtes pendant que nous étions à l’apéro avec des amis.


Fauna Rica

En écho à l’article intitulé Flora Rica de la publication précédente, voici, en vidéo s’il vous plaît, quelques exemples de la faune riche rencontrée au fil des jours.

ci-dessus : coati et agouti ; ci-dessous : bourdon et colibri

ci-dessus : autoroute de fourmis coupe-feuilles ; ci-dessous : bernard-l’ermite et grenouille dendrobate

sauterelle pourpre géante à ailes rouges (ne se voient que quand elle vole, comme sur la vidéo de droite : c’est un moyen d’effrayer les prédateurs)


Cahuita, la nature version Caraïbes

Comme beaucoup des villages côtiers le long de la Mer des Caraïbes, à l’Est du Costa Rica donc, Cahuita est peuplée en grande partie d’afro-caribéens venus de Jamaïque leur culture sous le bras. Mais de plus en plus d’étrangers s’installent ici, souvent après avoir découvert la région en tant que touristes, en raison de l’ambiance aussi tranquille en journée qu’animée le soir et bien sûr en raison des plages. Les plus belles sont dans le parc national, ce qui permet heureusement de les préserver et d’en limiter la fréquentation. Pour les découvrir, il suffit de suivre l’un des sentiers longeant le littoral. En tendant bien l’oreille et en restant attentif, on découvre encore ici, outre ces paysages de cartes postales avec la triade sable blanc/mer turquoise/cocotier qui penche, une faune et une flore abondante. Une mention spéciale pour les singes capucins peu farouches, qui viennent volontiers extraire les pique-niques des touristes de leur sac à dos à la moindre inattention, et aux bernard-l’ermite qui jouent à 1-2-3-soleil sur le sentier, s’immobilisant à l’approche de nos pas.

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La Playa Blanca du Parc National de Cahuita
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C’est par ces beaux paysages de cartes postales que se termine notre périple au Costa Rica. Nous retiendrons de ce pays la richesse exceptionnelle de la nature mais – est-ce à cause d’elle ? – une indifférence générale des habitants, ce qui nous change profondément des pays précédents, Guatemala en tête. Aussi curieux que cela puisse paraître, nous sommes pressés de passer au Panama pour aller rejoindre la fraîcheur des montagnes centrales. Les côtes et les plaines, en cette fin de saison sèche, sont vraiment torrides et la chaleur nocturne (toujours pas de clim dans Roberto… ça n’est pas impossible, mais il faudrait être branché tout le temps) ne permet pas au sommeil d’être réparateur. Donc on se revoit très bientôt au Panama ?

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Parcours relatif à cet article, en version zoomable ici

103. Costa Rica troisième décade

De taille modeste puisqu’il ne représente qu’un dixième de la surface de la France, le Costa Rica est assez vite traversé. Nous parcourons cette fois la région au Sud-Est de la capitale, avec sa zone montagneuse à plus de 3000 m d’altitude, avant de revenir vers la capitale pour y prendre l’avion. Car oui, nous allons faire une courte escapade vers la France pour aller voir grandir notre petite fille.

La colline de la mort

Nous poursuivons notre route vers le sud-est du pays, toujours dans la chaîne montagneuse de la cordillère de Talamanca. Roberto décroche même son record d’altitude au point de stationnement du Cerro de la Muerte à 3440m, tout près du point le plus élevé de la route panaméricaine à 3335 m

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Posés tranquilles au milieu de nulle part, à 3400 m d’altitude…

Nous allons passer là une nuit très tranquille au milieu de nulle part, profitant d’un paysage sublime à 360° et de couleurs extraordinaires au coucher du soleil. En l’absence de brume à l’horizon, on peut apercevoir ici à la fois l’Océan Pacifique et la Mer des Caraïbes. Mais nous n’aurons pas cette chance, bien que le ciel au-dessus de notre tête ait été parfaitement dégagé.

Le Cerro de la Muerte, ou colline de la mort, tient son nom des pionniers venus de la vallée centrale, autour de San José, planter du café et élever du bétail dans la vallée d’El General de l’autre côté du col. Mais le froid lié à l’altitude en a tué quelques-uns.

De notre côté, nous avons survécu, mais nous avons préféré mettre le chauffage pendant la nuit, ce qui n’était pas arrivé depuis le nord des États-Unis !


Justin Schmidt, l’homme un peu beaucoup piqué

C’est en visitant l’insectarium du Jardin des Papillons de Santa Elena que l’on peut remarquer cette affiche posée pas loin d’un bocal à scorpion, intitulée « Index de la douleur par piqûre d’hyménoptères de Schmidt ». Cette échelle insolite a été créée par un entomologiste américain qui, pour la science et par curiosité personnelle (il aurait débuté dès l’âge de 5 ans…) s’est laissé piquer par plus d’un millier d’insectes aux fins de classifier et d’en décrire la douleur ressentie.

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L’échelle de Schmidt (désolé pour les non anglophones)

On part du niveau 1 avec par exemple la fourmi de feu, que Claudie et moi avons expérimentée aux Antilles, et dont la piqûre est décrite comme « pointue, soudaine et légèrement alarmante ». Au niveau 2, celle des abeilles est vécue comme « riche, copieuse et légèrement croustillante ». Un cran au dessus, la fourmi rouge moissonneuse provoque une douleur « audacieuse et implacable, comme un ongle incarné attaqué à la perceuse ». Enfin au niveau 4, le maximum, on trouve la guêpe Pepsis, avec sa piqûre « aveuglante, féroce, électriquement choquante ». Plus de 80 espèces différentes d’hyménoptères ont été comparées ainsi pour établir cette échelle.

L’auteur s’est évidemment piqué au jeu et a cherché tout au long de sa vie professionnelle le rôle et les mécanismes des piqûres et de la douleur provoquée chez les insectes piqueurs. Ce grand homme est décédé au début de cette année à l’âge de 75 ans, d’une maladie indolore. Dans le cas contraire, il n’aurait certainement pas hésité à demander à se faire piquer,


Flora Rica

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Décor floral en bordure d’un champ de caféiers

Le Costa Rica ne brille pas tant par sa population, qui nous semble perdre ses traditions pour adopter celles des occidentaux, que par la richesse de sa nature, vraiment exceptionnelle. Pour rappel, 6% de la biodiversité de la Terre est concentrée ce petit pays qui n’en occupe que 0,0003% de sa surface émergée. Et qui fait maintenant beaucoup d’efforts pour préserver ce patrimoine après avoir laissé s’étendre la déforestation pendant des décennies. Tant mieux pour nous qui profitons de cette nature exubérante et belle, qui découvrons chaque jour des espèces que nous ne connaissions pas, et pas seulement animales. Les arbres ici sont géants, les feuilles sont immenses au point de servir d’abri en cas de pluie, les fleurs sont plus belles les unes que les autres. Et nous découvrons encore, malgré nos multiples voyages antérieurs, des fruits que nous ne connaissions pas. Mais pourquoi partout ailleurs fait-on pousser du béton ?


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Série feuilles géantes : ici, pas de risque de perte en eau, mais par contre forte compétition pour recevoir de la lumière, donc tout est grand. Celles du milieu s’appellent le « parapluie du pauvre »




Le grand bleu

En cette période festivalière à Cannes, le sujet aurait pu concerner le célèbre film de Luc Besson qui y a été présenté en 1988 (toute ma jeunesse…), pour y être plutôt mal accueilli d’ailleurs par les professionnels alors que le public en fera un film culte et que 33 ans plus tard nous en tirerons le nom de notre fourgon (si vous avez oublié pourquoi, revenez sur le menu A propos/Qui sommes-nous ? ou cliquez directement ici)

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Le film Le Grand Bleu présenté à Cannes en 1988 (photo du site premiere.fr)

Non, le grand bleu c’est le Morpho, ce grand papillon si typique de l’Amérique centrale avec ses ailes brunes et parées d’yeux de rapaces lorsqu’on les regarde de dessous, et d’un bleu étincelant et métallique en vue du dessus. C’est le plus souvent en vol solitaire qu’on le voit en randonnant en forêt ou près d’un cours d’eau, apparition magique et furtive qui ne laisse que rarement la possibilité de sortir son appareil photo. Heureusement pour nous, mais un peu moins pour lui, les fermes à papillons permettent de l’observer de plus près, et elles sont nombreuses dans le pays.

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Le fameux Morpho bleu

Le plus étonnant est que ce papillon ne possède pas l’once d’un pigment bleu sur lui. La si jolie couleur est due à la réflexion spécifique des rayons bleus du spectre solaire par des couches d’écailles microscopiques espacées précisément de la longueur d’ondes correspondant à cette couleur. Si vous voulez en savoir plus, cliquez ici.

Un vol de Morpho capturé en pleine nature
La face ventrale des ailes : ce n’est pas le même bleu !

Escapade

Notre seul souci dans ce périple est d’être éloigné de la famille et des amis. Les économies réalisées (involontairement) lors de notre vie nomade nous permettent de rentrer de temps en temps en France et de compenser ce manque. Nous nous sommes donnés une grosse semaine pour voir notre seconde fille, notre gendre et notre petite-fille de 5 mois à Saint-Etienne. Que du bonheur de voir grandir cette petite merveille, si tonique et si sage à la fois, et de la voir maintenant nous rendre nos sourires. Nous rentrons reboostés sur San José, prêts pour reprendre la route.

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Nous dormirons ici les nuits qui précèdent et suivent notre vol. Peu glamour par rapport aux spots nature de ces derniers jours, cet endroit s’est avéré étonnamment tranquille (il n’y passe aucun train la nuit, et assez peu dans la journée).
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A l’arrivée à St Etienne, l’ambiance est loin du Costa Rica ! Bon, c’est juste la vue de notre logement. En vrai la ville a quand même de beaux atouts…
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Mais nous ne sommes pas venus pour l’ambiance, nous sommes venus voir notre petite merveille. Mélissandre a maintenant 5 mois. Elle est aussi sage que tonique, nous parle et nous sourit volontiers
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Bref nous sommes des grands-parents comblés !
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Escapade terminée, c’est déjà l’heure du retour et de la reprise du voyage
Parcours Costa Rica 3
Le parcours modeste de Roberto pour cette 3ème décade, en version zoomable ici

102. Costa Rica deuxième décade

Nous explorons maintenant la vallée centrale du pays et ses alentours, en poussant une petite pointe vers le nord de la côte Caraïbe. Cette « vallée » est en fait un haut plateau avoisinant les 1000 mètres d’altitude, ce qui nous apporte une fraîcheur bienvenue. En dehors de la capitale San José, notre quotidien sera encore dominé largement par la nature, avec des rencontres animalières exceptionnelles.

Las termales del bosque

Vous vous doutez que le nom nous a attirés comme des aimants. Cet ensemble méconnu de bassins d’eau thermale vaut pourtant assurément le déplacement, tant il est l’antithèse des installations commerciales de La Fortuna. Après avoir laissé Roberto tout seul au parking (à 10h nous sommes les premiers visiteurs), nous nous acquittons d’un droit d’entrée modique d’environ 5 € par personne – c’était entre 8 et 75 à La Fortuna ! – puis traversons à pied la forêt tropicale luxuriante qui mène au site. 10 minutes plus tard, nous découvrons cette série de bassins, une dizaine environ, groupés par 2 ou 3, emplis d’une eau parfois claire ou parfois trouble, allant du jaune paille au bleu foncé, et dont la température, indiquée sur de petits panneaux s’étage entre 30 et 48°C. Nous n’avons que l’embarras du choix et allons les tester tous un par un. Ma préférence va pour le 44 jaune paille, tandis que Claudie préfèrera le 39 bleu opalescent. Très relaxés, nous allons prendre une excellente piña colada au petit bar et nous restaurer d’un repas rapide. Sans doute préparé par l’hôtel voisin, que nous avons traversé pour arriver au parking. Une petite dizaine de visiteurs en tout ce matin-là. A la fin nous nous connaissions tous et le dernier nous a dit « au revoir ». En Français bien sûr !

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Il s’agit bien d’eau thermale, de 30 à 48°C comme celui du dessus. Claudie a préféré 36 et moi 44…
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Un endroit calme et relaxant. Le pied, quoi !
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Un moment inoubliable

Sur les conseils d’amis voyageurs, nous faisons étape chez José, un guide naturaliste ayant décidé au moment du confinement, alors qu’il avait perdu toute activité chez son employeur, de se mettre au vert en accueillant des voyageurs nomades ou non dans un petit jardin tropical qu’il aménagerait lui-même, idéalement situé près d’une forêt avec tous ses attraits. Le résultat est déjà très probant. Roberto a droit à un emplacement ombragé sur une belle pelouse, bordé de fleurs tropicales parfaitement entretenues. Tous les services de base sont à disposition, dont une petite cuisine et de grandes tables pour les visiteurs. Rien que cela vaudrait le déplacement. Mais l’énorme plus, c’est José, qui propose spontanément une visite des lieux, du jardin dont il connait chaque recoin et dont il est tellement admiratif qu’il prend presque autant de photos que nous, à la forêt voisine où il va nous faire découvrir faune et flore pendant plus de 3 heures, que nous n’avons pas vu passer. Nous avons vu des arbres et fleurs magnifiques, nous avons senti les feuilles du cannellier, nous avons goûté à divers fruits ainsi qu’au café et au thé qu’il produit, nous avons cherché et trouvé les célèbres petites grenouilles « blue jeans », nous avons observé pas mal d’oiseaux, nous avons tordu le cou pour repérer des singes hurleurs très hauts dans les arbres et j’ai pu photographier mon premier toucan. Et bien entendu, l’endroit s’appelant Caribbean Rainforest Sloth, nous avons vu une demi-douzaine de paresseux, dont deux tout près de notre emplacement.

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Arrivée chez notre hôte qui a le sens de la réception
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Nous sommes hébergés dans un jardin tropical luxuriant que José a aménagé lui-même et dont il propose d’emblée la visite
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Nous rêvons d’un jardin comme ça Claudie et moi
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Après le jardin, la balade commentée se poursuit dans la forêt adjacente. Les découvertes seront encore nombreuses, comme ces plantes rampantes qui épousent les rochers ou les arbres, ce tronc moussu qu’on dirait enneigé ou encore ces graines velues dont on se sert pour garnir les oreillers

Les paresseux, c’est difficile à photographier, surtout avec un smartphone. Non pas à cause de leur vitesse de déplacement -loin de là, nous avons largement le temps de les cadrer – mais parce qu’ils vont tout de même se percher assez haut afin de ne pas trop être dérangés, et le téléobjectif des smartphones, lorsqu’il est présent, est très limité. Après le déjeuner, Claudie décide de retourner en forêt compléter sa collection de graines « œil de bœuf » en vue de se faire un collier. Mais à peine partie, elle m’appelle : « Viens voir vite ! ». Je la rejoins en courant et la trouve devant l’un des paresseux de l’entrée, cramponné à la hauteur de nos yeux sur un petit arbre qu’il a sans doute entrepris de descendre, arrêté en route par l’apparition de Claudie. Nous nous rapprochons lentement pour mieux observer l’animal qui nous regarde fixement, et arrivons à prendre des photos de cette scène extraordinaire, tant-il est rare de voir un paresseux descendre d’un arbre. Dans le milieu naturel en tout cas. L’animal, peut-être apeuré, finit par remonter, pas bien haut parce que l’arbuste est frêle, puis semble se rendormir. Claudie repart chercher ses graines, je repars discuter avec Jose et d’autres visiteurs qui viennent d’arriver. Moins d’une heure plus tard, Claudie va jeter un œil du côté du paresseux et j’entends de nouveau : « Viens voir vite ! ». Je me précipite et cette fois, ce sont deux paresseux qui sont entrain de descendre de leur arbre. Ça arrive normalement une fois par jour (ils descendent pour faire leurs besoins ou changer de perchoir) et plutôt la nuit par souci de discrétion. Il est en tout cas exceptionnel d’assister à cela, notre hôte nous affirme que c’est la première fois que ça arrive ici et que nous sommes vraiment chanceux. Figés comme des statues, nous assistons à la lente descente des paresseux puis à leur progression lente sur le sol tout près de nous. Assise, Claudie en verra un passer à un mètre d’elle ! Un moment extraordinaire. Nous les suivons ensuite à distance raisonnable jusqu’à leur nouvelle résidence pour la nuit à venir. Ils y seront d’ailleurs encore le lendemain.

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Claudie m’appelle : un premier paresseux est entrain de descendre de son arbre. Effrayé par notre présence, il va remonter…

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Mais il va finir par redescendre, accompagné par un autre, et ce sont 2 paresseux qui vont traverser le chemin devant nous !

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Des endroits comme ça, on en redemande !


Tortuguero, l’Amazonie costaricienne

Cet enchevêtrement de canaux, de marais et de rivières dans une forêt tropicale au nord du pays, sur la côte caraïbe, est probablement mieux préservé par sa difficulté d’accès (uniquement par voie fluviale ou par la mer) que par sa classification en parc national en 1970. Lors de notre visite en 2009, il nous avait fallu plus de 4 heures de bateau pour le rejoindre depuis Limon. Certes un embarcadère plus proche, La Pavona, existait déjà, mais il n’était relié au réseau routier principal que par une mauvaise piste souvent boueuse que n’empruntaient pas les transports en commun. Cette piste est aujourd’hui goudronnée et nous avons passé la nuit à La Pavona, la dernière de la saison sèche qui s’étend de décembre à avril. De fait, le lendemain, le premier mai à 6h du matin, il s’est mis à pleuvoir pour la première fois depuis longtemps. Incroyable cette météo si ponctuelle !

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Embarcadère de La Pavona. Ci-dessus le 30 avril, dernier jour de la saison sèche… Ci-dessous le lendemain 1er mai, premier jour de la saison humide. Incroyable comme la météo est ponctuelle ici !
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Enfin bon, ça ne va pas durer si longtemps et nous pourrons profiter pleinement du paysage

6 heures du matin et pourtant nous étions prêts à embarquer pour une excursion d’une journée dans le parc. Car pour voir la nature, il vaut mieux se lever tôt. Une visite encore une fois de qualité, avec un guide naturaliste qui n’avait pas son pareil pour repérer tout ce qui bouge, du colibri sirotant son nectar au caïman dont seuls les yeux émergent de l’eau trouble du canal, en passant par les singes araignées qui se balancent sous les branches, loin au-dessus de nous. Il savait identifier les chants des oiseaux, qu’il reproduisait ensuite avec son smartphone pour communiquer avec eux. Enfant de la région, il en connaissait bien sûr toute l’histoire, depuis l’arrivée des nicaraguayens chasseurs de tortues (le littoral est propice à la ponte, c’est d’ailleurs la signification du nom du lieu) venus finalement s’installer ici à l’invasion touristique croissante depuis les années 70. La flore est aussi particulièrement riche et belle, bien entretenue par la pluviosité particulièrement élevée du lieu (plus de 6 m par an !). Mon secteur préféré a été l' »allée des palmiers », un canal étroit dont l’eau calme reflète en miroir les palmiers et autres palétuviers qui la bordent.

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La lagune de Tortuguero n’est plus séparée de la Mer des Caraïbes ici que par cette mince bande de terre
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Nous avons ascensionné un petit volcan pour aller profiter du panorama. C’est vert, non ?
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Le village de Tortuguero lui-même n’est pas extraordinaire, totalement centré sur les activités touristiques. On y déguste toutefois une excellente cuisine créole dans un décor sympathique
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Visite du volcan Poas

Nous l’avions ratée lors de notre voyage de 2009, l’accès au volcan étant fermé en raison de glissements de terrains. Les fermetures sont d’ailleurs relativement fréquentes, en raison de l’activité volcanique continue depuis plus de deux siècles. La dernière éruption date de 2019, mais le Poas produit continuellement des tremblements et des fumerolles.  L’ascension est facile puisque la route parvient à quelques centaines de mètres du cratère, l’un des plus grands du monde avec un diamètre de 1320 m, hébergeant un beau lac gris-bleu parcouru de brumes mobiles. L’accès est bien sûr interdit, en raison des caractéristiques de l’eau, très chaude et acide, et du potentiel éruptif du volcan. Des abris sont d’ailleurs disponibles un peu partout, y compris sur le chemin d’accès, et un système visuel et sonore alerte en cas d’augmentation de la teneur en soufre de l’atmosphère.

C’est un joli spectacle, qui s’apprécie plutôt le matin de bonne heure (entre 8h et 9h), afin d’éviter les hordes de touristes qui débarquent des bus après cela et surtout les nuages qui se forment rapidement en cours de matinée et peuvent masquer complètement la vue. Nous avons pour notre part dormi sur le parking d’un hôtel juste à côté, profitant au passage d’une fraîcheur bienvenue grâce à l’altitude (2200 m pour le parking, 2700m pour le volcan).

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Au point de bivouac, à 2200m d’altitude, le panorama sur la vallée de San José est splendide, de jour comme de nuit. Et la fraîcheur est au rendez-vous.
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Nous nous imaginons coinçés là, à lire tout ce qui va bien pouvoir nous tomber dessus…

Arrivés au sommet (2760m) le cratère s’offre à nous, ainsi que son joli lac dont la couleur menthe glaciale reflète mal une température élevée (40 à 60°C) et un pH très acide. Pas vraiment envie de se baigner ou de tomber dedans !

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Mais pour la photo de famille c’était sans problème. Nous avons trouvé des touristes français pour nous faire le cliché !
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En tout cas, les abondantes fumerolles et les frémissements de l’eau montre bien l’activité permanente du volcan Poas. Impressionnant. Au fait vous aviez remarqué que le lac avait la bouche en coeur ?

SOS Animaux en détresse

Le Rescate Wildlife Rescue Center, près d’Alajuela, est une association à but non lucratif qui depuis plus de 30 ans se consacre à la récupération des animaux en difficulté, à leur remise en état et à leur libération dans la nature lorsque c’est possible, dans 89% des cas. Les 11% restants, inaptes pour diverses raisons au retour à la vie sauvage, sont gardés ici. Il peut s’agir d’une infirmité, genre perte d’un aile pour un oiseau, ou bien d’un contact initial trop fréquent avec les humains. Dans cet endroit, ils sont aux petits soins. Beaucoup restent en liberté et se baladent dans les allées, voir se posent sur le grillage à l’extérieur des quelques cages comme pour narguer leurs occupants. A noter la présence de plusieurs cages à oiseaux dans le parc utilisées pour protéger …de jeunes plants que les animaux dévoreraient. Assez souvent sur les pancartes, les motifs fréquents des accidents ayant amené les animaux ici sont expliqués, et l’humain a une place prépondérante. L’environnement est de qualité et bien entretenu. Nous nous sommes régalés.

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Malgré les grilles, nous ne sommes pas dans un zoo : les animaux sont posés AU-DESSUS !
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Ils se passionnent aussi pour la vie nomade et s’exhibent volontiers au volant. Attention tout de même dans les allées, y a du monde qui circule !
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Il est possible aussi que ces animaux ne s’échappent pas parce qu’ils sont handicapés. Les plus chanceux sont finalement ceux qui sont dans des cages parce qu’ils vont pouvoir être relâchés. Comme ce toucan par exemple ? Je suis assez content de ma photo en tout can euh en tout cas.

Si vous voulez en savoir plus, ou pourquoi pas faire un don pour sauver un toucan ou un jaguar, c’est ici.


Nous avons visité un « arteroport »

Si la morphologie de ce Museo de Arte Costarricence vous rappelle vaguement quelque chose, vous avez raison. Il ne s’agit ni plus ni moins que du premier aéroport international de San José, ayant fonctionné de 1940 à 1955 jusqu’à l’inauguration de son successeur actuel avant d’être reconverti en musée en 1958. Et la haute structure centrale est bien son ancienne tour de contrôle. Si un petit contrôle de sécurité est encore appliqué à l’entrée, point n’est besoin de montrer son billet pour accéder aux salles d’embar euh d’exposition puisque ce musée est entièrement gratuit.

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L’actuel Museo de Arte Costarricense et l’ancien aéroport du pays (image récupérée sur le site du MAC)
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Les artistes exposés sont principalement des costariciens ayant vécu de la seconde moitié du XIXème siècle jusqu’à maintenant. Sur les 1700 œuvres que possède le musée, seulement une partie est exposée dans 4 salles dites d’art visuel pour rester ouvertes à différentes techniques.



A l’étage, nous visitons l’ancien salon diplomatique, appelé salon doré, dont les murs sont entièrement décorés de bas-reliefs retraçant l’histoire du pays depuis la vie paisible des première tribus indiennes jusqu’à l’inauguration de l’aéroport. Et le sculpteur était français, un certain Louis Féron, qui a peut-être été oublié par ses compatriotes pour s’être ensuite fait naturaliser américain.

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Le salon doré : l’histoire du Costa Rica en bas reliefs racontée par un Français
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A l’entrée du salon est exposé un collier reproduisant toute la frise. Réalisé par notre même artiste français Louis Féron, qui était aussi (et surtout) orfèvre.

Nous terminons par le jardin des sculptures, occupant une partie de l’ancien tarmac, et présentant également des artistes locaux. Une visite virtuelle est disponible sur le site du musée.

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Attenant au musée, sur l’ancien tarmac, un agréable jardin de sculptures

San José, en or, en jade …et en béton

La capitale du Costa Rica ne reflète en rien l’image de ce beau pays. La nature si belle ailleurs y a presque disparu, les routes, plutôt bonnes en campagne, sont ici mauvaises et pleines de trous, la circulation est dense et bruyante et la pollution est à l’avenant. Nous nous y sommes tout de même arrêtés 48 heures, pour explorer à pied sont centre-ville colonial agrémenté de beaux bâtiments et de quelques musées intéressants, comme celui de l’or précolombien ou encore celui du jade.

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Le centre-ville, en majorité sans charme, possède tout de même quelques beaux restes, comme cette poste en service depuis 1917,
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ce Théâtre National, construit en 1890 après qu’une diva espagnole en tournée en Amérique latine ait boudé le Costa Rica faute de salle convenant à sa petite personne,
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cet « Edificio Metalico », de fabrication française, tout en pièces de métal préfabriquées en Belgique, abritant des écoles,
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et cette scultpture urbaine dans le Parc National appelée « Nouveau Paradigme » (si vous savez pourquoi dites-le moi !)
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Objets de la vie quotidienne, amulettes des chamans, offrandes funéraires, nombreux furent les usages de l’or par les Amérindiens, qui exploitaient le métal précieux depuis au moins 2000 ans av. J.-C.
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En cours de journée, nous sommes tombés sur le musée du jade. La visite n’était pas prévue, mais comme notre guide disait que les pièces étaient bien mises en valeur par un éclairage en transparence, nous sommes entrés jeter un œil. Sauf qu’aucune pièce n’était mise en valeur de cette façon. Déçu, j’ai décroché et même un peu dérapé…

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Musée du Jade : de belles pièces, oui, mais où est le rétro-éclairage promis ?
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Un peu énervé, j’ai cliqué sur l’audioguide en Brunka (un langage amérindien). Forcément, les légendes des photos suivantes en seront quelque peu perturbées…
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Là, j’imagine que les Brunka avaient inventé la pétanque… C’était bien avant les Marseillais qui n’ont découvert le jeu qu’en 1908.
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Séance de fouilles en cours. Moi, je dirais que le personnage était peintre. Et vous ?
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Administration de suppositoire par un chamane qui hésite entre la petite et la grande sarbacane
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Père Brunka récompensant ses enfants d’une crêpe au Nutella.
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Assiette amérindienne. Quant on vous dit que ces civilisations étaient en avance !

Au musée du jade, il n’y avait pas que du jade (non rétro-éclairé) mais aussi quelques expos temporaires, dont celle de Isidro Con Wang, un costaricien d’origine chinoise. Libéré de la pression de son père qui l’a fait travailler dur, dans les fermes notamment, jusqu’à l’âge de 40 ans, il a pu enfin assouvir son désir de devenir artiste, puisant son inspiration à la fois dans ses racines et dans son expérience agricole. D’où la présence quasi constante de taureaux dans ses œuvres, très colorées par ailleurs, voire psychédéliques. Ça nous a reposé du jade.

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La plus belle cathédrale du Costa Rica

La Basilique Notre Dame des Anges à Cartago mérite en effet à elle seule un petit chapitre. Une statuette de vierge noire découverte ici en 1625 sur un rocher puis y retournant obstinément dès qu’on la déplaçait poussa la communauté catholique à édifier une cathédrale à cet endroit. L’ouvrage fut détruit par un tremblement de terre en 1926. Mais comme à l’inverse de la vierge elle ne réapparut pas spontanément, elle fut reconstruite en 1929. En acier recouvert de béton, on n’est jamais trop prudent. L’édifice de style byzantin présente plutôt bien avec une façade ouvragée, une superbe coupole octogonale. A l’intérieur, le plafond lambrissé et compartimenté est de toute beauté, tout comme les multiples colonnes en albâtre décorées comme les murs de motifs floraux et les vitraux très lumineux. La foule ne s’y trompe pas et vient en nombre depuis la capitale, traversant la cathédrale à genoux jusqu’à l’autel.

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Façade de la Basilique, de style néo-byzantin
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Vue panoramique de l’intérieur
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l’une des chapelles

A la rencontre des quetzals

Cet oiseau sacré des Mayas ne se rencontre qu’en Amérique centrale, mais il est particulièrement difficile à observer. On ne le trouve pas en captivité car il meurt rapidement s’il est enfermé, ce qui en fait un symbole de liberté. Il faut aller dans les forêts d’altitude, se lever très tôt et bien ouvrir les yeux pour avoir des chances de l’apercevoir, car un oiseau vert sur fond vert, ça n’est pas évident à distinguer. Nous avions déjà aperçu le vol furtif de 2 de ces oiseaux lors de notre séjour au Panama en 2020, le plumage vert étincelant devenant bien visible lors du déplacement d’un arbre à un autre. Mais c’était vraiment fugace. Pour nous donner toutes les chances, nous sommes allés nous garer pour la nuit tout près du Parc National des Quetzals, à San Gerardo précisément.

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Roberto sur une épaisse moquette. A l’heure de la publication, nous n’étions pas sûrs de pouvoir en sortir…

Réveillés à 5h du matin, nous étions à l’endroit le plus propice, à 1 km de là, au lever du soleil. Quelques petits groupes accompagnés d’un guide étaient déjà là. Ça aide pour voir dans quelle direction pointer son regard puis ses jumelles. Et puis bingo, nous les avons vus. D’abord fendant l’air, bien reconnaissables grâce à leur longue queue, puis posés sur les branches, alors immobiles quelques minutes avant de redécoller, nous permettant de bien les observer, à distance raisonnable. Pour la photographie, c’est plus difficile, car nous ne sommes équipés que de smartphones et si ces appareils font des photos honnêtes en focale standard, ils sont très limités en téléobjectif. Mais cette observation rare est bien dans la boîte, je veux parler de notre boîte crânienne bien sûr. Une croix de plus cochée sur notre « wish list ».

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Si les gens regardent tous par là, c’est qu’il doit y avoir une bonne raison

Quoi de mieux que ces magnifiques et rares oiseaux, l’espèce locale s’appelant d’ailleurs le quetzal resplendissant, pour terminer cette seconde partie de notre parcours costaricien. La richesse de ce que nous avons pu voir ces dix derniers jours a mis la barre assez haut. L’Est du pays va-t-il être à la hauteur ? Vous le saurez dans le prochain épisode !

Parcours Costa Rica
Parcours Costa Rica 2ème décade, en version zoomable ici

101. Costa Rica première décade

En contraste avec les pays précédents, le Costa Rica s’affirme d’emblée comme orienté vers la nature. Le tourisme vert est d’ailleurs sa première source de revenus. De fait, après une dizaine de jours, 90% de nos activités auront eu pour thème la nature, une heureuse exception dans notre parcours.

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Quel autre pays peut mettre des paresseux sur ses billets de banque ?!
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Plaque minéralogique du Costa Rica

Frontière chaotique

L’entrée au Nicaragua avait déjà été un peu chaotique, mais la sortie encore plus, confirmant la bureaucratie intense dans ce pays. Sans vouloir entrer dans les détails, la procédure pour quitter le pays aura nécessité 2h40 tandis que l’entrée au Costa Rica ne prendra que 20 mn. Bon, chaque pays fait comme il veut, et la procédure parait plus simple pour les véhicules particuliers, mais nous plaignons les chauffeurs de poids-lourds qui, d’après les longues files de plus d’un kilomètre que nous avons pu observer de part et d’autre de la frontière ont dû perdre au moins une demi-journée à la traverser.

Sur la photo à droite, on peut voir une file de chauffeurs de poids-lourds qui attendaient le passage de leur véhicule au scanner. Assez résignés, ils m’ont gentiment laissé passer devant eux (c’est le cas aussi pour le passage en douane, nous sommes autorisés à doubler les camions). Ils trouvaient d’ailleurs bizarre qu’avec mon véhicule particulier j’aie dû y passer aussi. Apparemment, un petit billet au policier aurait permis d’éviter cette tracasserie, mais nous ne nous sommes pas pliés à ça !

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Premières impressions

Quelquefois, l’entrée dans un nouveau pays se traduit par un choc culturel, comme lorsque l’on passe des USA au Mexique par exemple, mais entre le Nicaragua et le Costa Rica, formalités administratives exclues, c’est le sentiment de continuité qui prédomine. Même végétation abondante, mêmes routes en relativement bon état, même circulation tranquille. Il a fallu attendre de parcourir à pied la première ville, Liberia, pour voir quelques différences. C’est bizarre à dire, mais ce qui frappe le plus est de voir des vitrines devant les magasins, alors que depuis plusieurs mois nous côtoyions des boutiques donnant directement sur la rue ou en en étant séparées d’une simple grille. La plus grande richesse se confirme par la présence de bus électriques, même si les vieux bus scolaires américains retapés sont encore légion, et nous sommes ravis aussi de voir notre carte bancaire refonctionner après un black out au Nicaragua. A l’inverse, les couleurs du pays précédent ont presque disparu, l’église (moderne) est hideuse et le parc central est loin d’être verdoyant. Nous espérons que ce ne seront que des exceptions, la réputation du pays est au-dessus de tout cela.


Sous l’arbre à oreilles d’éléphant

Une première pause dans un petit camping à Liberia, sous les arbres et bien aérés, nous a permis de retrouver une semi-fraîcheur qui nous manquait depuis une quinzaine de jours. Le lendemain, nous avons grimpé à 650m d’altitude vers un premier volcan, pour nous installer sur le parking d’un « lodge » (hôtel isolé en pleine nature) acceptant les voyageurs nomades. De là, nous avons suivi un petit chemin de randonnée dans la forêt tropicale sèche, menant à une source chaude soufrée. Un endroit étonnant où un petit cours d’eau transparent devient brusquement blanc laiteux à la rencontre d’une source chaude émanant du volcan voisin. La balade était bien agréable malgré les 8 km aller-retour, dans l’ombre de la forêt mais accompagnés d’une multitude d’oiseaux, toujours difficiles à photographier. En raison de leur fugacité d’une part et de la modicité de notre équipement (smartphones) d’autre part. Les clichés seront rares mais les souvenirs resteront marqués dans notre tête. Nous avons aussi ramassé quelques fruits dont celui (en étoile) du pommier baumier). Il y a de la post-production à prévoir ! En tout cas, la nuit à l’ombre de notre « guanacaste » (l’arbre national du Costa Rica, appelé aussi arbre à oreilles d’éléphant en raison de la forme de ses fruits) et avec une température descendant enfin sous les 25°C (21° même au plus frais) a été des plus réparatrices.

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Roberto à l’ombre d’un guanacaste

2 ans !

Le 19 avril 2021, nous découvrions notre Roberto pour la première fois chez notre aménageur. Les premiers kilomètres parcourus avec furent un mélange d’appréhension et d’euphorie. L’appréhension de la conduite d’un véhicule de ce format et peut-être celle de réaliser qu’il allait devenir notre nouvelle maison pour plusieurs années. L’euphorie de cette liberté nouvelle et du grand voyage qui nous attendait.

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19 avril 2021, Roberto vient de parcourir son premier kilomètre à Rodez

Ce 19 avril 2023, nous avons fêté les 2 ans de Roberto, nos 2 ans de vie nomade, et si l’on ne peut plus parler d’appréhension ni d’euphorie, nous restons dans une dynamique très positive. Ces deux années se sont écoulées à un rythme intense, parfois trop même au point que nous ressentons régulièrement le besoin de ralentir, de nous poser quelques jours sur un point de notre parcours pour souffler, pour digérer nos découvertes quotidiennes, pour nous reposer physiquement aussi des kilomètres de marche et même des kilomètres de route. Nous restons heureux de vivre notre rêve, notre seul manque étant l’éloignement de la famille et des amis, que nous essaierons de compenser avec des retours peut-être un peu plus fréquents. Le retour technique de Roberto en Europe va sans doute arranger un peu les choses, mais ne changera absolument rien à notre désir de poursuivre notre vie nomade.

Parcoursans
19 avril 2023, Roberto est parvenu au Costa Rica, après un joli parcours de 73 000 km !

Le sentier des casseroles

Nous sommes dans le parc national du volcan Rincon de la Vieja, le premier que nous explorons au Costa Rica. L’organisation est un peu à l’américaine, avec « rangers » à l’entrée, plan des randonnées, parcours parfaitement délimités et cimentés avec points d’observation clairement indiqués, boutique de souvenirs à la sortie. Nous choisissons une boucle de 3 km traversant en grande partie une superbe forêt tropicale avec des arbres magnifiques et quelques animaux, dont des iguanes, quelques oiseaux, des tapirs, des singes araignées et d’autres à tête blanche. L’attraction tourne autour du volcanisme secondaire et nous observerons beaucoup de ces « casseroles » géantes et fumantes emplies de boue ou d’eau en ébullition, dans lesquelles on cuirait bien ses spaghettis ou ses œufs, et qui justifient parfaitement en tout cas l’appellation du sentier (sendero de las pailas). Nul doute que l’activité géothermique est intense ici, et l’on comprend très bien l’installation récente d’une usine pour l’exploiter sur le site. Vraiment un bel endroit, et une fréquentation très raisonnable.

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Le volcan Rincon de la Vieja, 10h38…
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Nous n’apprendrons que le lendemain le réveil soudain de la bête quelques heures après notre passage. Mais à ce moment-là, nous étions déjà à une trentaine de kilomètres de là. Dommage ou pas ?
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Il est vrai que l’activité volcanique secondaire était bien présente
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L’attrait était aussi dans la luxuriance de l’environnement. Pas beaux ces arbres qui s’enlacent ?

Pura vida

riche en animaux sauvages…

et en phénomènes naturels

N’est-elle pas belle notre pura vida ?


Le Rio Celeste

La tentante traduction française, « rivière céleste », pourrait faire penser à une combinaison exceptionnelle du mah-jong ou encore au plat n° 116 du restaurant chinois d’à côté, mais « celeste » en Espagnol signifie bleu ciel. Et le qualificatif n’est en rien usurpé. C’est en traversant un pont que nous découvrons cette rivière d’un bleu étonnant, tranchant sur la végétation environnante. Forcément la couleur attire, et le lieu est quelque peu envahi de touristes et locaux qui viennent s’y rafraîchir, discuter ou même méditer. La concentration humaine et la localisation sous le pont ne sont pas très glamour, nous nous contenterons de deux ou trois photos. Car nous avons prévu de visiter le lendemain le parc national traversé par cette rivière, l’hébergeant sous ses meilleurs aspects. Et nous ne sommes pas déçus ! Un sentier de 6 km aller-retour mène jusqu’à l’origine de la couleur bleue, apparaissant étonnamment à la rencontre de 2 rivières transparentes, l’acidité de l’une se conjuguant aux particules en suspension de l’autre pour les faire gonfler et leur faire réfléchir ainsi la lumière bleue du spectre solaire. Mais vous préférerez peut-être la version plus poétique qui dit que la rivière aurait pris cette couleur lorsque Dieu y trempa ses pinceaux après avoir peint le ciel… Tout au long du sentier traversant une forêt exubérante, nous admirons les méandres bleutés, les petits lacs d’un bleu extraordinaire, des zones en ébullition et une magnifique cascade. Nous croisons aussi un petit lézard dont la queue est aussi bleue que la rivière. Je l’aurais volontiers baptisé « lézard céleste » mais pas sûr que les herpétologues soient d’accord !

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J’espère juste ne pas me transformer en Schtroumf !
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Pour en découvrir davantage, il faut entrer dans le Parc National du volcan Tenorio
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Mais quelles couleurs magnifiques ! Nous n’avions jamais rien vu de tel !
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Puis vient l’endroit où la magie s’opère : 2 rivières transparentes se transforment en 1 rivière bleue !
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La visite se termine par une cascade de toute beauté. On a longtemps accusé ceux qui en diffusaient la photo de truquer les couleurs, mais nous pouvons témoigner qu’il n’en est rien !
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Ah et j’allais oublier mon petit « lézard céleste » dont la queue reproduit tellement bien le Rio !

Aux pieds du volcan Arenal

Ce volcan à l’imposante silhouette cônique est né il y a 7000 ans. Il est considéré comme l’un des plus actifs du Costa Rica. Sa plus grosse manifestation remonte à 1968, comme en France d’ailleurs, alors que de gros pavés incandescents ont été projetés à plus de 5 km, d’où l’expression costaricienne bien connue « sous les pavés la lave » qui a été reprise, un peu déformée, dans l’hexagone à la même époque. Lol. Entre 1968 et 2010, les explosions et coulées pyroclastiques ont été très fréquentes. Depuis, le volcan semble souffler un peu (des fumerolles surtout) mais ne demande qu’à se réveiller, ce qui ne semble inquiéter en rien les villages installés à ses pieds, profitant tous de la manne touristique attirée par la riche faune et flore locale et par les nombreuses sources chaudes.

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Le village de La Fortuna, aux pieds du volcan Arenal

Nous avons trouvé à nous loger pour la nuit dans un camping en cours d’aménagement, mais déjà riche en faune et flore. Le patron nous a montré quelques paresseux accrochés assez haut dans les branches au-dessus de nous et une petite grenouille rouge vif qu’il a tranquillement posée sur son bras tout en nous expliquant qu’elle était vénéneuse. Il suffirait de ne pas la manger et de ne pas mettre les mains à la bouche ou se frotter les yeux pour ne pas avoir d’ennuis… Nous avons aussi rencontré un Français qui fait le chemin du Mexique à la Colombie …en vélo. De quoi donner matière à réflexion à tous ceux qui pensent que nous sommes des aventuriers !


Le lendemain matin, c’était étape sources chaudes. Mais plutôt que d’aller nous tremper comme la plupart de nos congénères dans les bassins artificiels d’un grand hôtel, nous avons choisi la version naturelle en allant tester la rivière Tabacón, plus connue des locaux que des touristes, notamment pour son caractère gratuit. Au premier abord, l’aspect est celui d’un torrent de montagne, assez vif. Mais la grosse différence c’est que l’eau avoisine les 30°C et que se baigner dans ce courant assez puissant est à la fois tonifiant (autant qu’un torrent alpin à 10°C…) et relaxant (comme tout bain chaud). Le réchauffement brusque de la rivière Tabacón avait été l’un des premiers signes de l’éruption de 1968.

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Depuis 2010, l’activité du volcan Arenal se traduit essentiellement par des fumerolles et par des sources chaudes, largement exploitées par les professionnels du tourisme

Alors nous avons trouvé cette rivière d’accès libre, juste à côté d’un grand hôtel, tonifiante de part son courant et relaxante grâce à sa chaleur. Et totalement naturelle bien sûr !


L’après-midi a été euh …canopique. C’est-à-dire consacrée à la canopée (j’avoue découvrir l’adjectif). Le Costa Rica recueille 6% de la biodiversité mondiale, soit davantage que les USA et énorme par rapport à sa superficie (0,03% de la planère). Les arbres ne sont pas en reste avec 295 espèces différentes au km² contre 35 en Colombie et 6 au Brésil. Alors se promener dans une forêt, c’est déjà écarquiller les yeux devant tant d’espèces végétales que nous n’avons pas l’habitude de voir. Et se tordre le cou pour regarder vers les cimes des arbres souvent très hauts, compétition vers la lumière oblige. Mais il est possible d’agrémenter encore tout cela en regardant la forêt du dessus, à l’aide de passerelles traversant ou surplombant la canopée. C’est très en vogue dans le pays et, même si nous avions déjà vécu ce genre d’expérience, nous avons souhaité la renouveler. Dans ce parc près du superbe volcan Arenal, un parcours de 3 km compte 12 ponts et 6 passerelles suspendues pour observer la nature sous un angle différent. Si nous avons apprécié ces différences de vues et découvert de nouvelles fleurs dont ces héliconies poilus, nous avons bizarrement été déçus par cette attraction, par le manque de faune et flore visible notamment, trouvant que les installations ne justifiaient pas le droit d’entrée assez élevé. Peut-être avons-nous été trop gâtés dans les jours qui ont précédé ?

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Un programme alléchant : pas moins de 18 ponts et passerelles pour aller voir la nature de près !
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La mousse pousse même sur les feuilles, c’est dire…

Puis nous avons repris la route sur les rives du Lac Arenal, de jolis lacets asphaltés et en bon état qui nous ont amenés à un parc accessible gratuitement au public et à tout véhicule en fait. Nous y avons passé une nuit très tranquille, sans personne autour, avec un joli spectacle au réveil.

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Le soleil joue à cache cache avec les nuages en fin d’après-midi au-dessus du lac. Quelques éclairs mais pas de précipitation. Aussi incroyable que cela paraisse, nous n’avons pas eu une goutte de pluie depuis que nous sommes retournés au Mexique début février.
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Nuit super calme au bord de ce lac. Nos seuls « voisins » ont été ces pêcheurs venus mettre leur bateau à l’eau le matin vers 7 h.

La cordillère de Tilarán

Nous poursuivons le tour du lac Arenal dans le sens antihoraire, en direction de cette chaîne de montagne. La route change brusquement de qualité, des trous apparaissent dans le bitume avant que celui-ci ne finisse par disparaître. Sur plusieurs dizaines de kilomètres. Il parait que les habitants s’en plaignent depuis longtemps sans jamais être entendus. Manifestement la « pura vida » n’est pas universelle au Costa Rica… Pas de surprise, nous sommes toujours dans la nature, à une altitude de 1300 m qui fait du bien, au village de Santa Elena plus précisément. C’est très touristique, malgré la difficulté d’accès, et nombreux sont les restaurants, hôtels, magasins de souvenirs et tours-organisateurs. Nous en apprécions d’autant notre liberté de mouvement et notre autonomie en logement et restauration : pas besoin de subir tout ça, nous savons ce que nous voulons et nous nous rendons directement dans les endroits concernés.

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Juste une photo sur la route de Santa Elena (bien trop occupé à éviter les trous…) : le jardin de ce sculpteur végétal qui accueille les automobilistes de passage

Notre premier arrêt est pour une ferme de papillons, élevés dans des serres reproduisant cinq microclimats du pays. Quelques insectes sont aussi collectionnés. Nous avons droit à une visite guidée VIP par une jeune naturaliste. Nous observons bien sûr de jolis spécimens, dont les célèbres morphos bleus, un peu plus faciles à approcher que ceux, fugaces, que nous avons croisé lors de nos balades.


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La présentation au guichet d’accueil laisse penser que plusieurs centaines d’espèces sont présentes. Mais ça sera beaucoup moins !

L’autre attraction du jour est le « ranario », qui pourrait se traduire par « grenouillerie » en Français. Un rassemblement de terrariums où sont élevées et protégées plus de 25 espèces de batraciens locaux, souvent des grenouilles minuscules ne dépassant pas les 2 cm et aux couleurs vives indiquant aux autres espèces leur dangerosité. Le plus est la possibilité avec le même billet de réaliser une double visite permettant dans l’après-midi d’apprécier les espèces diurnes et à la tombée de la nuit celles nocturnes. Nous avons adoré ces mignonnes petites grenouilles multicolores, pas si faciles à photographier toutefois en raison de leur taille.

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Le Ranario de Santa Elena, qui a bien voulu nous accueillir pour la nuit sur son parking

A trop chercher les grenouilles dans les vivariums, on en oublie parfois de regarder autour. Et là, juste devant nous, la lampe-torche tombe sur cette chose. Bon, il paraît que les scorpions costariciens ne sont pas mortels, ça rassure !

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Souvenirs souvenirs (1)

Nous sommes maintenant à Sarchi, une petite bourgade à l’ouest de la capitale San Jose. Spécialisée dans le travail du bois depuis le début du XXe siècle, elle a produit beaucoup de meubles mais aussi les charrettes à traction bovine nécessaires au transport du café à l’époque, typiquement décorées de motifs géométriques en couleurs vives semblables aux mandalas. L’arrivée du train et des camions aurait pu éteindre cette production, mais les artisans ont su se reconvertir et produisent peut-être maintenant davantage de charrettes qu’avant ainsi que beaucoup d’autres objets qui plaisent aux touristes. La ville est inscrite au patrimoine mondial de l’humanité pour avoir été le berceau de l’artisanat costaricien. En tout cas, si vous cherchez des souvenirs à rapporter de votre séjour, vous n’aurez que l’embarras du choix ici !

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Sarchi, berceau de l’artisanat costaricien
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L’entrée des toilettes est particulièrement soignée !
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Sarchi est aussi connue pour sa magnifique église, malheureusement fermée à l’heure de notre passage

Souvenirs souvenirs (2)

La ville suivante, Zarcero, avec son église et ses arches de cyprès si typiques, éveille en nous le souvenir de notre premier voyage au Costa Rica il y a maintenant 14 ans, en compagnie de deux de nos enfants et en mode sac au dos. En fouillant un peu dans nos archives, j’ai retrouvé le blog que nous avions réalisé alors, rédigé à quatre plumes. Sachant qu’il serait tôt ou tard retiré des serveurs faute d’être mis à jour, j’en avais fait une copie sur Word, avec une mise en page sommaire mais qui a le mérite de toujours exister. Elle est disponible en lecture ou au téléchargement ci-dessous pour ceux que cela intéresserait.

Nous avons eu plaisir pour notre part à nous replonger dans ce récit et à examiner le parcours d’alors que nous avions un peu oublié. Démontrant au passage l’intérêt au moins personnel à long terme de la rédaction d’un blog de voyage.

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Notre parcours en 2009, essentiellement en transports en commun
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L’église de Zarcero et son étonnant jardin sculpté

Mais voilà que la route nous appelle. Il nous reste encore beaucoup à découvrir au pays de la Pura Vida. Alors à très bientôt pour la suite !

Parcours Costa Rica
Parcours Costa Rica première décade, en version zoomable ici