87. Bébé neuf

A
Eh oui, un bébé tout neuf !

C’est devant cette enseigne de puériculture bien nommée que nous apprenons la grande nouvelle de la naissance de notre petite fille. Le joli minois de cette petite Mélissandre s’affiche sur l’écran de nos smartphones et nous comble de joie. Nous finissons tout de même nos courses dans ce magasin douillet car nous devrons attendre encore 48 heures, crise sanitaire oblige, avant de pouvoir serrer (pas trop fort surtout) cette petite merveille dans nos bras et féliciter les heureux parents. Nous l’avons trouvée toute fine et toute légère avec son poids plume de 2,7 kg (mais la maman faisait encore moins à la naissance). Et plus nous la regardons, plus nous trouvons que c’est le plus beau bébé du monde. En toute objectivité, hein ?

A
Les rayons des magasins de puériculture ont un petit côté étrange…
A
et l’on y devient facilement gaga !
A
Notre petite merveille habillée en ours blanc à la sortie de la maternité
A
En vrai c’est la merveille de ses parents, mais nous sommes heureux tout autant…

Euh… à bientôt, mais pas tout de suite, hein, on veut pouvoir en profiter un peu !

57. La Floride et les Rameaux

Au fait, pourquoi la Floride s’appelle-t-elle ainsi ?

La question est fort à propos (je suis fier de me l’être posée 😉) à proximité du Dimanche des Rameaux. Ce jour-là en effet, les chrétiens doivent apporter à l’église des branches fleuries telles que celles brandies par la foule accueillant Jésus sur son âne à Jérusalem. On appelle cela les Pâques fleuries. Vous l’avez deviné, c’est un jour de Rameaux, en 1513, que les Espagnols ont débarqué en Amérique, à Saint-Augustine précisément, dans une région que le conquistador appela Floride, en raccourci de Pascua florida, Pâques fleuries. Ok, mais alors pourquoi ne pas avoir donné ce nom à la ville ? Vous le saurez un peu plus loin, mais d’ici là, j’ai quelques autres (bonnes 😉) questions.

Quel est le fruit emblème de la Floride ?

Facile, il figure sur toutes les plaques d’immatriculation des voitures de l’état. Avec d’ailleurs la fleur emblème de celui-ci, la fleur d’oranger. Et les Visitors Centers à l’entrée des principales routes de Floride vous en offriront volontiers un jus fraîchement pressé. La production de ces agrumes, autrefois majeure dans l’économie régionale, est aujourd’hui en déclin, à cause de la concurrence mondiale bien sûr, mais surtout de la « maladie du dragon jaune » importée – volontairement diront les complotistes – d’Asie. Tiens, ça ne vous rappelle pas quelque chose ?

Pourtant autrefois, le marché fut prospère. Les producteurs de plus en plus nombreux devaient se démarquer en personnalisant les boîtes en bois de leur production par un slogan marquant, autre que le « Ici on vend de belles oranges pas chères » de Fernand Raynaud. Nous avons retrouvé quelques-unes de ces étiquettes promotionnelles au musée d’histoire de la Floride, dont on peut se demander pour certaines si elles faisaient vraiment vendre. La belle-mère ou les soldats ennemis font plutôt sourire maintenant, tandis que l’indien offrant ses fruits au conquistador ferait plutôt grincer des dents. Après tout est question de goût. Je ne sais pas vous, mais moi, ma préférée c’est la dernière… Et vous, puisque nous sommes en période électorale, vous auriez voté pour laquelle ?


Quoi ? Encore un musée Dali ?

Oui mais celui-là il est privé, et c’est la plus importante collection mondiale privée d’œuvres de Salvador Dali. Elle a été assemblée par un couple de collectionneurs fous de l’artiste (et non du chocolat comme dans la pub) et suffisamment riches pour acquérir au fil des années plus de 200 œuvres. On y trouve notamment 7 des 18 toiles géantes réalisées par Dali dans sa vie, dont les célèbres « Découverte de l’Amérique par Christophe Colomb », reflétant sa propre découverte du continent sous un angle artistique, et « Gala nue devant la mer » qui se transforme en portrait d’Abraham Lincoln dès lors que l’on s’éloigne à l’autre bout de la pièce. Figurent aussi les tableaux « Les marché des esclaves avec le buste invisible de Voltaire » et « Les persistances de la mémoire » avec ses montres molles, montres que l’on retrouve aussi bien dans le jardin attenant au musée, sur un banc mou bien sûr, qu’en grandes quantités dans la boutique, business oblige. Tout ça se trouve à St Petersburg, enfin la version américaine, pas l’autre.


Mais qui donc était en vedette américaine ?

Le musée Dali accueille toujours une exposition temporaire. Cette fois-ci l’invité n’était rien d’autre que son ami Picasso. Bon, j’avoue que le cubisme m’impressionne moins que le surréalisme, je ne suis donc pas un grand fan de l’invité. Je vous mets quand même quelques œuvres qui ont accroché mon regard. J’ai été interrogé aussi par les titres d’un certain nombre de dessins pas toujours évidents à relier avec le visuel. Sauriez-vous retrouver par exemple les titres des 3 œuvres ci-dessous ? Vous trouverez les bonnes réponses en bas de ce chapitre, après mes 2 portraits. Je cherchais en effet un moyen informatique de convertir ma photo en portrait style cubiste. Je n’ai pas trouvé, mais grâce au site Google Art & Culture, j’ai pu me confectionner deux bouilles sympathiques en mode Van Gogh ou Vermeer.


Légende à retrouver :
A1 : Vent arrière ?
A2 : Homme assis ?
A3 : Prière d’été ?
Légende à retrouver :
B1 : Buste de Céretane ?
B2 : Serveuse Céretane ?
B3 : Boulangère Céretane ?
Légende à retrouver :
C1 : Maître d’école ?
C2 : Chasseur ?
C3 : Accordéoniste ?


Que feriez-vous un week-end à Orlando ?

Loin d’aller grossir les files d’attente des parcs d’attraction, nous sommes allés à la rencontre de notre famille-sœur américaine. Nous étions en relation depuis des années, après qu’ils aient généreusement accepté de recevoir notre fils Achille plusieurs étés de suite, de façon totalement bénévole. Des séjours d’immersion linguistique au départ, encadrés par l’association Horizons du Monde tout à fait recommandable, qui auraient pu s’arrêter là si ne s’était créée une relation intime entre cette famille au grand cœur et notre fils. Qu’ils appellent « notre fils français » tout comme le nôtre les appelle « ma famille américaine ». Le père, Tim, professeur de musique, est  tout aussi facétieux que grand amateur de sauces pimentées qu’il fabrique lui-même et qui ont ravi le palais exigeant de notre Achille. La mère, Chris, travaille dans un diocèse où elle est aussi choriste. Elle nous a paru à la fois très sensible et forte de caractère. Leur fils, Ben, grand copain du nôtre et très complice avec lui lors de ses séjours, est malheureusement décédé brutalement dans un accident de la route où son véhicule a été percuté par un chauffard de 17 ans sans permis. Nous avons vécu cette période tragique par réseaux sociaux interposés et admiré alors la dignité de cette famille très croyante qui s’est appuyée sur la religion pour se relever. Tim et Chris ont aussi deux filles, que nous connaissons moins, mais dont notre fils nous dit beaucoup de bien. Notre traversée des USA était l’occasion idéale de concrétiser notre souhait d’aller les rencontrer en vrai. Et ce week-end a comblé nos attentes. Le samedi pluvieux nous a octroyé des heures de discussion (en anglais, oui, oui) où nous avons échangé nos expériences et ouvert nos cœurs. Un grand moment émotionnel. Le dimanche était plus détendu et, avec le retour du soleil, Tim et Chris nous ont emmené faire une belle balade nature aux environs du Lac Monroe. Comme vous pourrez le constater sur les photos, la nature était au rendez-vous, dont cette source bien à l’image de cette amitié qui venait de (re)naître. Dommage que les photos ne montrent pas réellement le côté humain, pourtant le plus important ces deux jours-là, Merci à nos hôtes que nous espérons vraiment revoir très bientôt.


Et vous, auriez-vous voté vert ou verre ?

Nous avions le choix ce matin-là entre un jardin botanique et une galerie d’œuvres d’art en verre. Nous avons finalement voté verre, ce qui s’est avéré un excellent choix puisque la galerie était dotée d’un jardin tropical exquis. Nous avons laissé Roberto avec un peu d’appréhension sous des peintures murales effrayantes avant de nous engouffrer dans cet atelier où l’on expose aussi bien que l’on travaille le verre. Les œuvres magnifiques nous ont laissé sans voix. Enfin juste de quoi discuter un peu avec le responsable de l’exposition. Nous ajoutons volontiers à notre carnet d’adresses cette Duncan McClellan Gallery de St. Petersburg en Floride pour y refaire un petit tour dans quelques années lorsque nous aurons terminé notre tour du monde et que nous aurons éventuellement une maison à aménager.

La bonne surprise donc, c’était le petit jardin attenant, associant avec un goût certain plantes tropicales, orchidées magnifiques, sculptures et œuvres en verre, le tout gardé par un chat accueillant. Le vert au service du verre en quelque sorte, nous étions comblés.


Docteur Jekyll ou Mister Hyde ?

C’est la question que l’on peut se poser devant les automobilistes américains. Très courtois lorsque nous sommes piétons, attendant même de l’autre côté du carrefour que nous ayons fini de traverser. Très patients aux carrefours munis de 4 stops, laissant chacun s’avancer tour à tour dans l’ordre d’arrivée, ce qui est parfois compliqué lorsqu’une dizaine de voitures sont présentes. Mais les mêmes (ou pas ?) peuvent être déchaînés sur les grands axes et les voies rapides, circulant bien au-delà des limites de vitesse autorisées, doublant par la droite sans prévenir, zig-zaguant entre les files de voitures, traversant soudain en venant d’une rue à droite 4 files d’un coup pour se mettre sur celle de gauche. Et je ne parle pas de la circulation sur les zébras ou encore des dépassements sur double ligne jaune. Je sens parfois que Roberto, en bon italien fougueux, aimerait en faire de même !


Les Américaines sont-elles aussi belles qu’on le dit ?

Nous sommes allés le vérifier dans ce musée qui leur est dédié. Et nous ne pouvons que le confirmer devant ces citadines aux châssis rutilants, aux pare-chocs astiqués, aux amortisseurs souples, aux bas de caisse avantageux, aux lève-vitres impulsionnels. Ou encore devant ces sportives aux airbags contenus mais aux filtres à air et à particule développés, capables, promptes à l’allumage, de démarrer au quart de tour et de jouer leur rôle de convertisseur de couple. Et encore, souhaitant limiter nos crit’air de jugement, ne pas risquer de vanne EGR ni de se prendre un soufflet de cardan dans la tête de delco, nous éviterons de parler des pompes à huiles et de tout ce qui est décapotable, les vices cachés, quoi. Ah oui, quelles Belles Américaines !


Peut-on tout mettre en boîte ?

Les épinards, d’accord, parce que ça rend plus fort et du coup on peut ouvrir la boîte en l’écrasant avec une seule main. J’ai essayé, mais comme je n’avais pas encore mangé d’épinards, je n’ai pas eu la force suffisante pour ouvrir la boîte. Euh ça ne marche pas le truc de Popeye ! Mais le vin… Oh non pas le vin ! Et pourtant ils l’ont fait. Ici on trouve des rouges, des blancs, des rosés et des champagnes …en canettes. Sacrilège !

Et les gens ? Allez, sardinons-nous dans la grosse caravane en forme de boîte de conserve que nous venons d’offrir à Roberto. Ah, vous doutez et vous vous dites que nous n’avons pas pu en arriver là ? Vous avez raison, le véhicule devant la caravane ce n’est pas Roberto, même s’il y ressemble. Et les gens dans la caravane ce n’est pas nous. Ouf !


Connaissez-vous la coquina ?

Rien d’irrévérencieux là-dedans, c’est le nom de la matière première du Castillo de San Marcos, le fort qui a permis à la ville de Ste. Augustine de rester la plus ancienne ville des États-Unis après sa fondation en 1565. La coquina, c’est une roche sédimentaire calcaire formée essentiellement de fragments de coquilles et de limon, présente sur les côtes du Golfe du Mexique. Une fois extraite de la mer, on la fait sécher pendant trois ans avant de la découper en parpaings. Les constructions réalisées ainsi étaient à la fois solides et résistantes aux boulets de canons dont elles amortissaient les impacts, une qualité indéniable pour les forts. Celui de Ste. Augustine n’a d’ailleurs jamais cédé sous le coup des assaillants. Son artillerie a sûrement joué un rôle aussi. En tout cas, une chose est sûre, on n’a rien sans faire des forts.


Une haie d’honneur pour Roberto ?

Pourquoi pas, mais plutôt la majestueuse allée de chênes couverts de mousse espagnole menant à une ancienne plantation près de la ville de Savannah en Géorgie. La ville elle-même est charmante, dotée en son centre de rues toutes aussi arborées et bordées de somptueuses demeures victoriennes. De quoi donner envie de se poser quelque part. Mais non.


Do you have a dream ?

Martin Luther King l’avait, lui, et l’a en grande partie réalisé. Nous avons dormi dans son quartier natal d’Atlanta, près de sa maison, près de l’église où il prêchait la déségrégation auprès de son père, près du mémorial qui rapporte toute sa lutte basée sur la ténacité et la non-violence. Une magnifique histoire. Une vie de lutte difficilement racontable en dix lignes de texte, mais si vous en avez l’occasion, ça fait du bien de se replonger dans cette histoire. A l’opposé total du célèbre pasteur qui était aussi anticapitaliste, un pharmacien d’Atlanta avait lui aussi un rêve qu’il a concrétisé, celui de devenir riche en concevant une boisson pétillante et sucrée dont plus personne ne peut ignorer le nom. C’était probablement une erreur que de visiter le même jour le Mémorial Martin Luther King et le World of Coca-Cola. Le plus significatif est que le premier était gratuit alors que nous avons dû payer 20$ pour regarder les films publicitaires du second (n’y allez pas) dans un bâtiment « noir de monde ». Un qualificatif par contre qui aurait plu à Martin Luther King.

Bon, allez, pour les fans de Coca-Cola je vous promets un paragraphe dans le prochain article. La firme est tout de même un symbole incontournable des États-Unis.


Mais la route nous attire, c’est plus fort que nous, alors nous quitterons juste après la publication de cet article Atlanta et la Géorgie pour le Tennessee, vers le Nord-Ouest. Ci-dessous comme d’habitude la carte du parcours actualisée et les boutons pour communiquer. A bientôt chers lecteurs !

51. La inspección

Je profite du blog pour vous distiller quelques mots d’espagnol, langue dans laquelle nous sommes totalement baignés actuellement, d’autant que peu de mexicains parlent anglais. L’espagnol n’est pas si compliqué pour les francophones grâce au fait qu’une grosse partie du vocabulaire est commune, ou presque. Ainsi pour tous les mots dont la terminaison est -tion et -sion (ou -ssion) en français, il suffit de remplacer le suffixe par -ción ou -sión et vous aurez le mot espagnol. Fastoche, non ? Il y a bien sûr des exceptions comme « protestation » qui devient « protesta », mais rassurez-vous, « exception » se traduit bien « excepción », sinon ç’aurait été un comble ! Mais revenons à notre « inspección ».

la inspeccion

L’inspection douanière est un moment important dans le processus du shipping. Non pas tant par l’acte bureaucratique, qui peut néanmoins parfois tourner au vinaigre comme ce couple décrivant sur les réseaux sociaux que leur véhicule a été bloqué à Veracruz pendant 2 ans ! Mais surtout par le fait que vous revoyez ce jour-là pour la première fois depuis 4 ou 5 semaines votre compagnon à roues favori. Outre l’émotion des retrouvailles, vous découvrez aussi à quel point il a pu être ou non malmené. Car au cours de ces voyages en RO-RO, les véhicules sont de plus en plus souvent, pour ne pas dire systématiquement, visités et « allégés » d’une partie de leur contenu, voire dégradés. C’est un gros problème qui ne trouve pas pour l’instant de solution car les victimes se plaignent rarement au-delà des réseaux sociaux, n’attendant rien de leur assurance maritime qui n’assure que les biens d’une valeur individuelle supérieure à 200$. Et quand bien même ces victimes iraient en justice, elles se heurteraient au renvoi de responsabilité des différents intervenants entre eux (transitaires, autorités portuaires, compagnies maritimes, etc. Nous n’avions donc pas d’autre choix que de faire avec, en protégeant Roberto du mieux que l’on pouvait tout en connaissant les limites de ce genre de protections face à des gens déterminés pouvant prendre tout leur temps dans la quiétude d’une cale de navire ou l’obscurité d’un port.

« Quoi ? Les 2 gringos ont leur inspection aujourd’hui ? » – Non, ce n’était quand même pas dans le journal !

Quatre jours après le déchargement de Roberto, nous avons enfin le rendez-vous pour l’inspection douanière. L’agent qui nous guide dans les formalités à Veracruz, Luis, nous avait quelque peu préparé : un seul d’entre nous pourra entrer dans le port, à condition d’être correctement habillé, ce qui signifie chemise, pantalon et chaussures fermées, y compris pour les femmes. L’occasion est trop belle de mettre mon pantalon tout neuf, acheté 2 jours auparavant. Luis me récupère, accompagné d’une employée, devant la porte de l’hôtel. Il me demande si j’ai bien mon passeport, regarde mon pantalon et me dit, une expression bizarre sur son visage : « Vous n’avez pas de jean ? ». Voyant mon incompréhension il insiste, montrant que son employée et lui en portaient. Je confirme cette faute de goût, désolé de ne pas être aussi « correctement » habillé qu’il l’espérait. Il répond que ça ira et me fait enfiler un gilet de chantier orange fluo, the mexican touch sans doute. Nous arrivons à l’entrée du port. Pendant que Luis passe les barrages pour l’accès de sa voiture, l’employée m’emmène au contrôle des humains, un peu similaire à celui des aéroports, le gel hydroalcoolique à double dose en plus (j’ai dû recevoir celle de l’employée qui, elle, est passée direct…). Nous retrouvons Luis, une liasse de papiers fraîchement tamponnés à la main. Après un long parcours dans l’immense port, sillonnant entre les trains de marchandises en marche et les nombreux poids lourds, il nous amène au parking de la douane. Et là je vois enfin Roberto, attendant sagement au soleil parmi une demi-douzaine de congénères. J’envoie de suite une photo à Claudie afin de partager ce moment d’émotion, puis je scrute la carrosserie au travers du grillage qui nous sépare encore. Je ne décèle rien d’anormal, c’est déjà ça.

La réponse de Claudie
Un peu poussiéreux mais enfin là !

Vingt bonnes minutes après, la douanière arrive enfin. C’est sûr que si j’étais atteint d’onychotillomanie, je n’aurais plus que des moignons d’ongles à ce moment-là. Nous faisons le tour de Roberto, que l’inspectrice prend en photos sous toutes les coutures. C’est vrai qu’il est beau… mais ce doit être pour d’autres raisons. Je vérife que la porte latérale que j’avais condamnée électriquement est bien fermée. Malheureusement, elle s’ouvre… Ça commence plutôt mal ! Un rapide coup d’œil à l’intérieur, ne constatant rien d’anormal dans l’entrée, me rassure partiellement. Mais je n’entre pas et poursuis mon inspection. J’arrive aux portes arrière. Celle de droite est entrouverte. Manifestement elle a été forcée, sans dégât apparent sur la carrosserie, et le cadenas à l’intérieur a tenu le coup. Ouf, car nous avions rangé pas mal de choses dans la soute. Pas d’autre anomalie à l’extérieur. Je pars maintenant à la découverte de l’habitacle, m’attendant au pire avec cette porte latérale déverrouillée. Mais non, tout semble en place. Aucun placard ou tiroir ouvert. Seule la cloison temporaire de séparation cabine/cellule est partiellement sortie de ses rails et présente une petite déchirure dans le bois, démontrant bien qu’on a essayé de la forcer. De nouveau sans résultat apparemment. Au niveau des portes arrière forcées, les plaques en acier anti-ouverture que j’avais installées sont cintrées, ils ont dû tirer fort, mais le cadenas qui les solidarise est toujours en place. Il a néanmoins souffert car je n’arrive pas à l’ouvrir. Je craignais enfin avoir oublié, dans la panique de la dépose à Anvers, de désactiver ma batterie, risquant ainsi une décharge profonde lors du long transport et donc une détérioration. Mais non, le disjoncteur est bien sur « OFF » et l’afficheur lumineux indique 13,9 V, ce qui signifie que les panneaux solaires la rechargent. Un premier bilan plutôt positif donc, si l’on excepte la porte forcée et peut-être abîmée.

… et la batterie aussi !

Je n’ai pas trop le temps de réfléchir à tout ça car l’inspectrice des douanes me fait sortir sur le quai la quasi-totalité du contenu des placards et des soutes, à l’heureuse exception de la batterie de cuisine. Le sport consiste à détecter tout ce qui est prohibé à l’importation et notamment tout ce qui est nourriture. Ayant eu l’information au préalable, nous n’avions plus grand-chose, mais les quelques sachets de thé et d’infusions qui nous restaient ont été confisqués, tout comme un flacon d’épices et une boîte de sucre. On nous a aussi pris un des paquets de sciure de bois, celle qui nous sert pour nos toilettes sèches, un grand danger pour le pays manifestement. Deux autres paquets stockés tout près sont passés inaperçus pour leur part, mais ne crions pas victoire trop tôt car il y aura une autre inspection à la sortie du port. L’inspectrice a forcément voulu voir les soutes. Elle a appelé à la rescousse un ouvrier qui, muni d’un coupe-boulon plus grand que lui, a sectionné le cadenas rebelle en moins de temps qu’il n’en a fallu pour écrire le dernier mot de cette phrase. Le contenu des soutes, plutôt technique (tuyau de remplissage, câble électrique, boîte à outils, etc.) n’a pas paru intéresser la fonctionnaire qui ne m’a rien demandé de sortir. Zut, j’aurais dû cacher les tisanes dans la boîte à outils ! Pour finir, ils ont lâché le chien. Enfin c’est une façon de dire qu’un gros molosse est venu mettre le nez dans toutes nos petites affaires, histoire de vérifier que nous ne tentions pas d’importer de croquettes 😉. D’ailleurs j’ai trouvé ça bizarre, parce que les « croquettes » elles vont plutôt de l’Amérique vers l’Europe et pas l’inverse, non ?

Il ne me restait plus qu’à tout ranger. Et à laisser de nouveau Roberto clefs sur le contact aux mains des employés du port pour plusieurs jours, le temps que les douaniers puissent partir en week-end et se reposer avant de rendre leur rapport. Avant de partir, je passe demander à mon ami Kilian, en train de subir le même contrôle, comment ça se passe pour lui. Je le trouve la mine défaite, errant parmi ses effets étalés sur le sol. Il me dit avoir retrouvé l’intérieur de son van sens dessus dessous et que plusieurs éléments mobiliers ont été endommagés. En outre, plusieurs de ses biens ont été volés. Je le quitte avec la promesse de le revoir l’après-midi. Il va lui falloir plusieurs jours pour s’en remettre moralement. Mais il s’en remettra, car heureusement les bons côtés du voyage vont vite reprendre le dessus.

Nous avons donc encore un grand week-end à occuper avant d’être convoqués pour l’ultime étape, celle de la sortie du port, qui n’a rien d’une simple formalité. Le musée naval vient de réouvrir, nous allons y jeter un oeil mais nous ne le trouverons pas aussi « incroyable » que l’affirme le site. Je mets aussi quelques photos d’une balade plus intéressante dans l’ancienne forteresse qui, sur une île proche de la côte protégée des courants, a pu servir d’abri aux bateaux de commerce et permettre à la ville de se développer. Le port s’est d’ailleurs développé autour d’elle et ce n’est plus une île du tout.

De l’extérieur, une jolie vue sur le port
Des douves à l’intérieur sont là pour séparer la zone de vie de la zone de défense



Beaucoup de vent ce week-end. Le drapeau rouge interdit la baignade et les rafales de sable bousculent les marcheurs

J’espère que vous attendez le prochain article comme nous attendons Roberto. Alors à très bientôt !

48. Puebla

Les habitants de cette ville située à 110 km au sud-est de Mexico auraient pu garder ses dénominations d’origine, « La ville des anges » ou « Le peuple héroïque de Saragosse », mais ils préfèrent se contenter en toute modestie de l’appeler « Le peuple » (Puebla en espagnol), réalisant au passage une économie non négligeable sur les panneaux d’entrée de ville et les documents officiels. Cette ville de 2 millions d’âmes est classée au patrimoine mondial de l’humanité, et méritait donc la visite.

◊ L’Hôtel Colonial

Sans être colonialistes pour autant, nous adorons ce type d’architecture et, dès que nous en avons l’occasion comme en ce moment puisqu’il nous faut bien loger à l’hôtel, nous privilégions ces d’établissement de charme. D’une manière générale, le confort est un peu au-dessous des hôtels modernes de catégorie équivalente, avec par exemple des robinets qui fuient un peu dans les salles de bains ou de vieux volets qui occultent imparfaitement la lumière dans la chambre, mais le cadre y est souvent somptueux et empreint d’histoire. L’établissement que nous avons choisi à Puebla se nomme tout simplement « Hôtel Colonial ». Il fut autrefois un couvent. Vous pourrez constater sur les photos que la décoration est tout à fait dans le style et que la terrasse sur le toit offre une vue splendide sur les alentours. Et ne pensez-pas que cela coûte une fortune, nous sommes à 45 euros la chambre !



◊ Le centro historico

Le centre historique de Puebla est lui aussi de style colonial avec sa grande place centrale entourée sur 3 côtés par de grandes bâtisses avec arcades et bordée sur le dernier par une immense cathédrale richement décorée et joliment illuminée la nuit. Les façades sont soit peintes de couleurs vives, avec parfois des associations osées, soit couvertes de céramiques dont la ville est un lieu de production. Tout se visite à pied, c’est un régal constant pour les yeux et un gros coup de chauffe pour les appareils photos de nos smartphones.





Un quartier dédié au street art

Cet art de rue est très répandu au Mexique et nous en avions déjà déniché plusieurs exemples dans le centre de Puebla, jusqu’à ce que nos pas nous amènent dans ce quartier de Xanenetla. Un peu excentré, celui-ci n’avait pas très bonne réputation jusqu’à ce qu’un comité artistique décide de s’en occuper et de couvrir ses murs de fresques, interrogeant chaque habitant sur ce qui le représenterait le mieux. Ce ne sont pas moins de 75 œuvres que l’on peut observer aujourd’hui en se perdant dans le dédale de rues du quartier, redevenu sûr et attractif pour les touristes. Encore que nous étions les seuls ce jour-là.


Des églises couvertes d’or

La Chapelle du Rosaire, attachée à l’Eglise Santo Domingo de Puebla

Nous avons plaisir à entrer dans chaque église qui se présente sur notre chemin. A raison d’une par jour, il nous faudrait à Puebla un an pour les visiter toutes ! S’il en existe autant, c’est que la demande est forte et que les fidèles s’y pressent en nombre. Jamais nous n’en avons trouvé une vide. Chacune est dans un style différent, mais la décoration est souvent très riche. La merveille des merveilles est la Chapelle du Rosaire, attachée à l’Eglise Santo Domingo, entièrement recouvertes de feuilles d’or à 24 carats, brillant de mille feux grâce à la verrière située juste au-dessus.

Viendrait en second celle de Cholula, dans la banlieue de Puebla, que l’on admirerait sans arrière-pensée si elle n’avait été bâtie au sommet d’une pyramide amérindienne, construite en sept étages et sur plus de mille ans à partir de -500 av. JC par les Toltèques et leurs successeurs. Elle était, en tant que lieu cérémoniel sûrement richement décorée. Outre l’affront à ces peuples, on peut aussi se poser la question sur l’origine de l’or des églises catholiques. Quoi qu’il en soit, cette pyramide de Cholula n’est rien moins que la plus grande du monde (mais pas la plus haute) avec des 400 m de côté, à comparer avec les 150 m de celle de Chéops et les 21 m de celle du Louvre… Ses parois sont aujourd’hui recouvertes de végétation et ce sont plutôt les soubassements et les souterrains que les missions archéologiques dégagent peu à peu.


Des spécialités culinaires …spéciales

Le chile en nogada, plat mexicain par excellence, aux couleurs du drapeau du pays

En prolongement de l’article précédent, citons trois spécialités propres à la ville. D’abord le mole poblano, cette sauce à base de chocolat, de piments doux et de différentes épices, accompagnant généralement du poulet, que nous avions découverte dans un marché et qui est donc originaire d’ici, servie à toutes les sauces pourrait-on dire aux terrasses des restaurants. Ensuite le chile en nogada, gros piment doux farci à la viande, aux fruits et aux arachides, nappé d’une sauce aux noix et parsemée de persil et de grains de grenade, ce qui lui donne opportunément les couleurs du drapeau mexicain. Enfin les dulce poblano, confiseries locales, à qui une rue entière est dédiée, créées pour beaucoup par les religieuses du couvent de Santa Clara pour satisfaire la gourmandise de leurs évêques. Nous avons pu goûter aussi à deux autres spécialités réputées du Mexique, la soupe pozole à base de gros grains de maïs, de tomate et de viande, accompagnée de laitue, de radis, d’oignons et de quarts de tortillas frits, ainsi qu’aux cemitas, sortes de gros hamburgers contenant fromage frais, piments doux et viande panée. Bien nourrissant tout ça !



◊ Le coup de la tisane froide

Attablés à une terrasse, nous commandons nos boissons. Un grand choix de tisanes de fleurs et/ou de fruits séduit Claudie. Les deux premiers choix posent problème puisqu’à chaque fois le serveur revient en disant qu’il n’en a pas. Il finit par donner la liste de ce qu’il a, c’était plus simple. Claudie opte pour une tisane à la rose en précisant « frio » (froide) puisque les deux choix étaient possibles. Le serveur revient avec un pot fumant dans lequel trempe un sachet… Claudie rappelle qu’elle avait demandé une tisane fraîche. Sans se démonter, le serveur revient quelques minutes plus tard avec une choppe en verre emplie de gros glaçons. Ben tiens !


◊ Le coup des plaques

Nous lisons sur un forum de voyageurs du Mexique la mésaventure d’un couple de touristes qui, après avoir malencontreusement stationné là où il ne fallait pas, se retrouvent non seulement affublés d’un procès-verbal sur leur pare-brise mais aussi dépossédés de leur plaque d’immatriculation. Ils racontent être allés interroger la police locale qui leur a annoncé sans vergogne que la procédure était normale, que c’était le seul moyen qu’ils avaient trouvé pour percevoir à coup sûr le montant de l’amende. Le couple, bien qu’ayant réglé la contravention, devra tout de même attendre trois jours avant de pouvoir récupérer sa plaque minéralogique, le temps que l’enregistrement se fasse sur le système informatique. Sur le forum, d’autres expériences similaires sont décrites et certains conseillent de faire comme les habitants : placer derrière une vitre de leur véhicule une copie plastifiée de leur plaque d’immatriculation. Prêtant attention aux véhicules garés le long du trottoir, nous découvrons qu’effectivement, nombreux ont pris cette précaution. Nos voyageurs s’interrogent alors judicieusement : « Oui mais si nous enlevons notre plaque, ils vont nous prendre quoi la prochaine fois ? Un rétroviseur ? Un panneau solaire ? ». Cela mérite effectivement réflexion.

Intéressant de noter que cette voiture-là possède deux plaques de réserve, dont l’une avec un numéro différent. On n’est jamais trop prudent ?

Allez, comme on dit, une dernière photo pour la route, celle qui va nous mener à Orizaba au milieu des montagnes mexicaines. Un peu de fraîcheur en perspective mais nous nous rattraperons ensuite lorsque nous serons sur la côte à Veracruz pour récupérer Roberto. Ce dernier se promène actuellement entre la Martinique et la Jamaïque où il devrait faire escale le 8 février. C’est long, nous avons tellement hâte de le retrouver ! Hasta pronto !

25. Roberto à la plage

Roberto à la plage

Nous voici maintenant au Danemark. Bien qu’encore dans la zone frontalière avec l’Allemagne, nous ressentons rapidement que nous sommes dans un autre pays, une autre culture. Les routes sont larges et peu fréquentées, parfaitement entretenues, délimitées latéralement par des pointillés. Le pays est tout plat et la vue porte loin. Le climat est océanique, nous en avions perdu l’habitude, et les alternances d’averses et d’éclaircies rythment nos journées sous un vent soutenu qui fait osciller Roberto. Ce dernier doit d’ailleurs circuler les yeux grands ouverts, c’est-à-dire avec les feux de croisement allumés en permanence, sans doute pour être bien visible quand le ciel s’assombrit fortement au passage des perturbations. Nous lui avons aussi apposé sur le pare-brise le disque horodateur adhésif dont sont équipés tous ses congénères autochtones. Les paysages sont beaux, alternant champs agricoles, prairies à vaches ou moutons et fjords encadrés de digues. Les maisons en campagne, typiquement des chaumières ou des maisons de briques, rouges aux volets blancs ou au contraire toutes noires, dépassent à peine de la lande, pour mieux se protéger du vent sans doute. En ville on se permet un peu plus de hauteur. Les Danois adorent placer des figurines de toutes sortes derrière les vitres des fenêtres. Nos premiers villages traversés étaient très pittoresques, mais c’est loin d’être le cas partout. En tout cas la propreté est exemplaire et les maisons sont bien entretenues. Une chose géniale ici est l’absence de masque, même à l’intérieur des boutiques ou des musées. Il est seulement recommandé et du coup très peu le portent. Le passe sanitaire est néanmoins obligatoire dans les salles intérieures des restaurants et dans les musées. Nous avons déjà eu besoin de le produire. Sans que notre QR code européen soit lu par une machine pour autant. Mais ce qui est écrit au-dessous a l’air de satisfaire ceux qui nous l’ont demandé. Côté nourriture ça se présente plutôt bien. Le poisson fumé remplace les saucisses allemandes et le coulis aux airelles qui l’accompagne est délicieux. Le pain est aussi varié qu’excellent. Et que dire des « danoiseries »… Tiens un truc étonnant, lors de notre dernier achat, la boulangerie-pâtisserie vendait aussi des paquets de cigarettes, bien cachés dans une vitrine aux vitres fumées derrière le comptoir. Va savoir pourquoi.

Campagne danoise
Route en forêt (Mogeltonder)

Façades danoises

Eglise de Mogeltonder

Sculpture dans un parc

Statues à Esbjerg

Mets danois (jus de rhubarbe et de fleur de sureau, poisson frais fumé)

La côte Sud-Ouest du Danemark au moins (nous ne connaissons encore que cette partie-là) n’est qu’une longue plage de plusieurs centaines de kilomètres de longueur, avec un dénivelé presque nul qui permet aux véhicules de circuler. Nous l’avons découvert un peu par hasard et n’avons pas résisté à l’envie d’y promener Roberto. C’est de saison après tout. Pas sûr que nous aurions pu y dormir, le camping sauvage est interdit dans tout le Danemark, mais nous y avons tout de même pris le thé fenêtres grandes ouvertes sur la mer du Nord. Une de nos petites pauses comme on les aime.


Un petit point sur notre parcours avant de vous quitter : nous avons parcouru presque 8000 Km depuis le 19 avril. Nous n’avons traversé que trois pays, mais il faut un début à tout et nous avons tout notre temps. A bientôt !

22. La poule du Bois de Boulogne

Roberto au Bois de Boulogne
Roberto un peu perdu au milieu de ses congénères

Pour la première fois en trois mois, Roberto et nous sommes allés au camping. Mais pas n’importe quel camping : le Camping de Paris s’il vous plaît. Par principe nous n’affectionnons pas particulièrement ce genre d’endroit, préférant les endroits naturels et calmes à la promiscuité, mais le choix d’un camping dans notre courte étape parisienne présentait l’avantage indéniable de ne pas avoir à circuler et stationner dans la capitale. Le Camping de Paris est situé dans le Bois de Boulogne, en bordure de Seine, avec pour adresse Allée du Bord de l’Eau, c’est dire. Nous avons à l’arrivée senti nos craintes se confirmer lorsqu’il a fallu faire la queue derrière plusieurs véhicules imposants rien que pour rentrer, et aussi faire la queue à l’accueil pour gérer l’administratif. Mais un petit quart d’heure après c’était fait, et nous détenions le plan magique du lieu pour nous guider jusqu’à notre emplacement de 90 m², entre 2 haies et avec un arbre au milieu. Mais Roberto est svelte et malgré un désir irrésistible de se frotter contre l’écorce à la manière d’un Baloo, il a réussi à se faufiler entre l’arbre et la haie, pour un repos de deux nuits. Au final le camping s’est avéré étonnamment calme malgré un taux de remplissage assez élevé. Et bien desservi par plusieurs lignes de bus rejoignant le centre-ville en moins d’une heure de trajet. Nous avons pu faire tout ce que nous avions prévu et sommes repartis le surlendemain matin de notre arrivée sous un beau soleil. Mais quel rapport avec la poule me direz-vous ?

J‘y viens.

Le titre était bien sûr une accroche et, bien que stationnés dans le Bois de Boulogne à bord d’un fourgon, nous n’avons aperçu aucune de ces dames que vous imaginiez, ni même n’avons été sollicités. Enfin ça c’était parce que nous étions à l’intérieur du camping. En fait de poule nous n’en avons vu que le nid. Mais un beau, aussi profond qu’inattendu sur cette belle Allée de Longchamp. Tout de suite après le choc, rançon des véhicules modernes, une série d’évènements se sont produits simultanément et spontanément : les feux de détresse se sont allumés, le plafonnier également, les portes se sont déverrouillées et le moteur s’est arrêté. Une alarme sonore du genre de celle émise par une centrale nucléaire juste avant son autodestruction se serait déclenchée que n’en aurions pas été davantage surpris. Naturellement, quasiment tous les voyants se sont allumés sur le tableau de bord, ainsi qu’un message indiquant que le moteur avait été coupé « par sécurité » et qu’il fallait consulter la notice pour désactiver l’alarme et pouvoir redémarrer le moteur. Nous voilà donc en train d’expérimenter notre première panne en plein Paris. Difficile de faire pire ! Heureusement, l’Allée de Longchamp est peu fréquentée à cette heure de la journée. Je sors me déguiser en gilet-jaune et vais installer mon triangle de sécurité pendant que Claudie consulte le mode d’emploi de Roberto. Nous trouvons assez rapidement les explications sur la nature de la panne : en cas de choc un peu fort, un contacteur de sécurité coupe l’arrivée du carburant afin de limiter le risque d’incendie. Il suffit donc de réenclencher ce contacteur pour pouvoir redémarrer. Le problème est que les explications du manuel pour le trouver sont plutôt obscures. Laissant supposer d’abord qu’il est situé près de la batterie. Je pars donc chercher la batterie, plutôt sous le capot comme pour la totalité des véhicules que j’ai eu en ma possession jusqu’ici. Encore faut-il savoir ouvrir ce capot. D’habitude, il suffit de soulever un petit levier sous le tableau de bord, comme pour la totalité des véhicules que j’ai eu en ma possession jusqu’ici. Mais impossible de trouver ce f… levier. Claudie ressort le manuel et détermine que la chose se révèle en ouvrant la portière avant, ce qui est confirmé rapidement. Une fois le capot ouvert, rien qui ressemble de près ou de loin à une batterie. Une nouvelle exploration du manuel indique qu’elle est à l’intérieur de l’habitacle, sous les pieds du conducteur. Effectivement elle apparait après avoir dégagé les tapis de sol et déclipsé une espèce de couvercle en plastique. Mais pas le fameux contacteur. Je vous rappelle que pendant ce temps-là, une foultitude de véhicules défile autour de nous. Je suis à deux doigts d’appeler l’assistance quand me vient l’idée de chercher sur Internet. « Google est ton ami » n’arrête-je pas de seriner à mes proches quand ils cherchent une information, pourquoi ne pas avoir appliqué cela à moi-même de suite ?

J’ai dû taper les bons mots clefs car la première image proposée par mon ami est celle du contacteur en question et permet de le localiser assez rapidement, sous le tableau de bord côté passager, loin de la batterie donc. Claudie enclenche le biniou (ou le bitin, c’est comme vous voulez), je teste le démarreur et ouf, Roberto sort du coma ! Le temps de remettre en place les différents caches, de récupérer le triangle et de me remettre en civil, nous quittons les lieux rapidement. Moins d’un kilomètre plus loin, nous tombons dans un embouteillage à l’entrée sur l’autoroute A1. Nous nous consolons en nous disant que si la panne était arrivée ici, ça aurait été bien pire. Et qu’au final la mésaventure nous aura appris plein de trucs utiles sur Roberto.

Après une bonne journée de route, nous sommes aux portes du Luxembourg. Enfin, une frontière à franchir !

15. D’Allemagne

Comme le suggère ce titre de Patricia Kaas, nous sommes passés outre-Rhin. Roberto sort de France, heureux de se dérouiller les roues. Nous-mêmes avons un peu l’impression de démarrer notre périple ici, tout en sachant que cette sortie de territoire ne durera que 2 à 3 semaines puisqu’il faudra bien aller récupérer nos palettes en provenance de St Barth. Si les campagnes par lesquelles nous sommes arrivés ressemblent beaucoup aux nôtres, les villes ont plus de caractère. Les maisons sont soignées, fleuries, volontiers agrémentées de babioles. Les édifices publics et religieux sont à la fois massifs et raffinés dans leur architecture.

Roberto au vert dans la Forêt Noire, un spot nocturne très tranquille

Baden-Baden, Allemagne

Nous faisons notre première halte à Baden-Baden, toujours fans de villes d’eaux, mais nous sommes restés sur notre faim car les deux établissements thermaux étaient fermés pour cause de vous savez quoi. La seule source publique que nous ayons pu trouver était munie d’un panneau interdisant de la boire en raison du risque de légionnelles. Dommage, car avec ses 69°C nous y aurions volontiers trempé un sachet de thé pour la pause. Nous avons néanmoins arpenté la ville et ses multiples ruelles permettant aux différents étages de communiquer (la ville s’étend de 180 à 668 m d’altitude). Nous avons dormi dans la forêt, noire évidemment, près de la station basse du funiculaire qui grimpe au sommet du Merkur, la montagne qui domine la ville afin de s’y rendre le lendemain. Un funiculaire entièrement automatisé, dans lequel il n’y a plus qu’à s’asseoir et à appuyer sur le bouton « stàrt » pour que la machine se mette en route. Si la fonctionnalité du bouton n’était pas trop ambiguë (c’est comme en anglais mais avec l’accent allemand), ça n’a pas été le cas pour le distributeur de tickets où nous avons dans un premier temps acheté par erreur 2 tickets de bus. Il faut dire que Claudie n’a jamais pris de cours d’Allemand, tandis que pour ma part je me suis arrêté après les 2 premières années. Et les années collège, on sait ce que ça vaut. J’étais d’ailleurs, en tant que délégué de classe, chargé de faire fonctionner le magnéto-cassettes, ça ne m’a pas aidé à me passionner pour la langue. Mais avec l’outil formidable qu’est Google Traduction, nous ne nous en sortons pas si mal. Il suffit de pointer l’appareil photo vers le panneau qui nous intéresse pour que l’incompréhensif texte en germanique se transforme non pas en langue de Molière mais en un franco-charabia à peu près compréhensible. La seule difficulté est pour les textes manuscrits. On peut causer à la machine aussi, mais nous réservons cela aux situations désespérées.

Hall des anciens thermes et détail d’une frise à Baden Baden

Le funiculaire et la vue au sommet du Merkur

Deux jours plus tard, nous parvenons par d’étroites routes de campagne (merci le GPS qui nous évite les dangereuses autoroutes allemandes) à Heidelberg, parait-il une des plus belles villes d’Allemagne et capitale du romantisme. Tant mieux, les amoureux que nous sommes 😉 se sont fondus dans la masse ! Nous avons commencé par la rue piétonne la plus longue d’Europe (2,6 km tout de même) pour nous rendre à l’Office du Tourisme chercher, comme nous le faisons le plus souvent, des recommandations et une carte détaillée de la ville avec si possible des parcours découvertes. Le soir nouvelle nuit en forêt près d’un funiculaire, mais cette fois à sa station haute pour apprécier le décor dès le petit matin et rejoindre le magnifique château en grès rouge du XVème siècle, un moment la demeure de « Monsieur » et « Madame », respectivement le frère de Louis XIV et son épouse locale Elisabeth-Charlotte. Merci aux audioguides en Français ! Par ailleurs, à tous ceux qui doutent encore de l’intérêt de la vaccination, nous avons du montrer patte blanche avant de monter dans le funiculaire, à l’aller comme au retour, en produisant nos certificats sur TousAntiCovid. A défaut, nous aurions dû faire un test dans les 48h !

Heidelberg et son château célèbre

Nous poursuivons notre parcours bavarois par Rothenburg ob der Tauber, cité médiévale magnifiquement conservée, aux décors de cartes postales, dont on peut retenir quelques chiffres intéressants :

3 litres et demi : c’est la quantité de vin qu’a du boire en une seule traite le maire de la ville en 1631 pour sauver celle-ci de la destruction, relevant le défi lancé par l’armée catholique qui l’occupait depuis 3 mois. L’histoire ne dit pas comment il a fêté ça ensuite…

87% : c’est le record national des votes en faveur d’Hitler lors des élections présidentielles de 1932. Il ne sera pas élu pour autant, ne faisant que 37% au plan national. Mais se rattrapera plus tard hélas.

1/3 : c’est la part de la vieille ville détruite par erreur le 31 mars 1945 par les américains qui ciblaient un général nazi. Heureusement, une aide internationale permettra la reconstruction. Oh la bavure !

365 : c’est le nombre de jours par an où l’on prépare Noël au Musée Allemand de Noël. Nous l’avons visité le 21 juin, premier jour de l’été. Pourquoi pas ? Féérique, mais photos interdites. Vous pouvez toujours jeter un œil sur leur site : https://christmasmuseum.com.

42 : c’est le nombre de tours qui hérissent les remparts de la ville sur lesquels on peut cheminer.

7 euros : c’est le prix modique qu’il faut débourser au Kriminal Museum pour une immersion dans le monde de la torture, du Moyen-Age jusqu’aux dernières guerres. De nombreux instruments sont exposés avec leur mode d’emploi. Au Moyen-Age, la torture était une étape comme une autre dans la procédure policière, automatique dès lors que le délit était « probable » et les témoignages insuffisants. Belle époque ! Bon, le musée décrit aussi 1000 ans d’histoire du droit en Allemagne, ça finit sur une bonne note, ouf !

FFP2 : ce sont les masques qu’il faut porter dans tous les lieux publics de la ville. Alors qu’en France ces masques sont réservés aux professionnels de santé et autres professions à risque élevé, ils sont ici imposés à tous les chalands. Il nous a fallu en acheter chez un apothicaire (pharmacien teuton).

Rothenburg ob der Tauber, la cité médiévale

Oui, c’est bien une VolksWagen !

Mais peut-être pas celle-là, qui est la vitrine du Musée Allemand de Noël

Le musée du crime médiéval, un masque de « honte » et un manuel de torture…

La route se poursuit maintenant vers Nuremberg, tout un programme… Auf Wiedersehen !