78. Du Nouveau Mexique à l’Utah

En arrivant au Nouveau Mexique, nous qui pensions être déjà dans le désert le touchons vraiment du doigt, ou plutôt des pneus de Roberto. Mais il s’agit d’un désert coloré, collines jaune-vert parsemées de petits buissons ondulant à l’infini, gigantesques falaises roses faites de couches empilées qui ne demandent qu’à s’effondrer, profonds canyons comme celui du Rio Grande qui ne sont pas dûs à l’érosion mais à l’écartement de plaques tectoniques. Avec 6,7 habitants au Km², les villes sont plutôt rares mais ont un caractère mexicain bien affirmé. Normal puisque c’est le Mexique qui a dénommé la région.


Taos Pueblo, un village figé dans le temps

Le village de Taos Pueblo a été bâti voilà un millénaire, bien avant l’arrivée des colons espagnols, par la tribu des indiens Taos (saules rouges) qui y vit encore, du moins environ 200 de ses membres. L’architecture est particulière à la région, avec des bâtiments rectangulaires aux angles arrondis construits en adobe (mélange de boue et de paille séchée au soleil), souvent sur deux ou trois étages reliés entre eux par des échelles. Afin de conserver les traditions, l’eau courante et l’électricité n’y sont pas installés. L’approvisionnement en eau est assuré par une précieuse rivière qui traverse le centre du village. Le lieu est en grande partie sacré et de nombreuses zones ne nous sont pas accessibles : rues excentrées du village, ancienne église et cimetière, ainsi que toute la montagne en arrière-plan qui serait le lieu de naissance de tous les ancêtres. Mais la partie visitable est tout à fait suffisante pour apprécier l’esthétique et la sérénité du lieu. 19 autres villages indiens de ce type sont encore présents au Nouveau Mexique, mais Taos Pueblo est le plus grand et le seul continuellement habité.

Juste à côté, la petite ville de Taos essaie de conserver les mêmes principes architecturaux, mais le ciment peint a bien souvent remplacé l’adobe et bien sûr l’eau et l’électricité équipent les maisons. Le mélange des styles amérindien, espagnol et anglais lui donne néanmoins un certain charme, attirant pas mal de touristes et un artisanat varié, souvent de qualité.


Chimayo et mes blagues un peu Lourdes

Du temps où elle était occupée par les amérindiens, c’était plutôt une station thermale. Mais lorsque les colons espagnols ont importé (imposé) le catholicisme, les miracles sont arrivés comme par miracle. La terre rouge du coin aurait guéri quelques lépreux, déparalysé des paralytiques, sauvé des tas de gens en fait, comme l’attestent les nombreuses photos de remerciements collées sur les murs et la ribambelle de béquilles suspendues dans une chapelle. Il paraîtrait que pour la Covid aussi ça marchait bien. Nous on avait Raoult, chacun son truc. En tout cas, le succès est tel que la municipalité doit ramener chaque année plusieurs camions de terre pour compenser celle que les fidèles ont emportée avec eux. Je rêve du jour où les emballages plastiques auront un pouvoir guérisseur : les rues seraient d’un propre, mais d’un propre ! Sinon c’était beau et, contrairement aux apparences, je respecte tous ces gens qui se recueillent et prient pour eux-mêmes ou pour leurs proches. Et puis la campagne avec ses falaises roses est superbe.



Santa Fe

Avec ses 2100 m d’altitude, la capitale de l’état du Nouveau Mexique est la plus élevée de toutes les capitales d’état des USA, et sans tricher en plus car elle ne comporte aucun gratte-ciel. De loin, toutes les constructions ont l’air masquées par la verdure. Nous y avons trouvé en conséquence une fraîcheur nocturne bien agréable après les températures élevées de ces dernières semaines.

Architecturalement, elle reprend le style amérindien déjà vu à Taos Pueblo deux jours auparavant : constructions cubiques à bords arrondis, sur plusieurs niveaux décalés, avec poutres apparentes. Mais si les indiens du village en question ont su préserver leurs matériaux (terre argileuse mélangée à de la paille) et leurs traditions (pas d’eau courante, pas d’électricité, transmissions uniquement orales) la grande ville s’est bien entendue convertie au béton et à toutes les commodités modernes (8 heures par jour devant un écran, activité physique sur un tapis, repas livrés par Uber Eat, etc. tout ça grâce à la Santa Fe électricité…). A ce style amérindien s’ajoutent des influences hispaniques (ce sont quand même les Espagnols qui ont créé la ville), mexicaines (Santa Fe a appartenu à ce pays pendant 38 ans mais ont dirait beaucoup plus longtemps), et françaises (juste pour la cathédrale, bâtie par des auvergnats sur le modèle de celle de Volvic, l’eau bénite en moins). Beaucoup d’artistes sont venus s’installer ici, profiter des 300 jours de soleil par an et de la manne touristique hébergée dans les hôtels de luxe.


J’ai pas kiffé Georgia

Georgia O’Keeffe est une peintre américaine de renommée internationale, connue pour ses fleurs et ses paysages peints à la manière « précisionniste », ce qui n’a rien à voir avec l’hyperréalisme, contrairement à ce qu’on pourrait croire et que j’adore. L’artiste ayant fini ses jours à Santa Fe et légué une partie de ses œuvres à la ville, celle-ci reconnaissante lui a ouvert un musée, que nous sommes allés visiter. Claudie a beaucoup aimé, moi pas trop. A vous de juger sur les quelques photos jointes. Il y a quand même quelqu’un qui a payé 44,4 millions de dollars en 2014 pour la grosse fleur blanche sur la dernière photo. Si vos enfants ne savent pas quoi faire plus tard, suggérez-leur de devenir précisionnistes.


Mais j’ai kiffé le folklore

Puisque Santa Fe possède cette réputation artistique, nous en avons cherché une expression peu commune et avons déniché ce Muséum International d’Art Folklorique. Outre des expositions temporaires comme celle sur les démons japonais et cette autre sur le masque anti-covid en tant qu’œuvre d’art, nous avons surtout apprécié l’exposition permanente sur les arts folkloriques rassemblant plus de 160 000 figurines du monde entier. Une vraie caverne d’Ali Baba, on ne savait plus où donner de la tête !



De la bombe, je vous dis !

Je n’avais jamais entendu parler de Los Alamos auparavant. Ça veut dire que finalement ils ont bien fait leur boulot. De garder secret le lieu où ils ont mis au point la bombe atomique. Enfin maintenant c’est public. Pas le laboratoire où ils font encore des trucs louches, mais la salle où ils exposent des maquettes de Little Boy et Fat Man, les tombeurs respectifs de Hiroshima et Nagasaki. En mettant tous les plans pour qu’on puisse en refabriquer une à la maison. Et en plus c’est gratuit. Comme ça on est moins regardants quand ils disent qu’aux endroits où ils ont fait les essais, il n’y a eu aucune conséquence pour les oiseaux, bien au contraire. C’est sûr qu’avec leur 3 becs ils mangent mieux ! Nan, je blague, la dissuasion nucléaire c’est quand même utile. Du moins tant qu’un fou n’en prend pas les commandes.

On apprend aussi quelques anecdotes dans ce lieu chargé d’histoire. Comme celle du navire qui a transporté l’uranium en provenance de Los Alamos qui a été coulé par une torpille 3 jours seulement après la livraison. Où encore celle du photographe qui a pris l’unique cliché disponible du tout premier essai nucléaire, alors qu’il n’était qu’un amateur, chargé par son patron de prendre quelques photos souvenirs des préparatifs. Et enfin le coup de chance de la ville de Kokura, initialement choisie comme cible, remplacée au dernier moment par Nagasaki en raison du mauvais temps. Pensez-y la prochaine fois que vous vous plaindrez de la météo !



Séquence vérité

Si le ciel est souvent bleu sur les photos, c’est qu’il y a un biais de recrutement comme on dit dans les études scientifiques. Si nous sommes plutôt vernis côté météo depuis le début de l’été, on ne peut pas cacher que la grisaille se montre parfois. Mais dès lors que c’est possible, ce sont ces moments que l’on choisit pour faire les courses, les pleins et les vides de Roberto, les lessives, ou tout simplement profiter d’une petite pause. Mais rien besoin de tout ça cette après-midi là, nous avions bien l’intention de visiter ce petit site appelé Chimney Rocks pas trop éloigneé de notre route prévue. Mais le ciel déjà menaçant depuis quelques heures a confirmé nos craintes, et des trombes d’eau se sont abattues sur nous. Attendant l’accalmie sur le parking du site, nous avons vu un ranger venir se garer à côté de nous et nous faire signe d’ouvrir la vitre. Il venait nous informer que la visite du parc était fermée pour aujourd’hui en raison du risque de foudroiement en altitude, mais que nous pouvions venir dans le centre des visiteurs visionner quelques vidéos et explorer l’exposition. Ce que nous avons fait. Dévoué, non, le ranger ? Nous avons suivi ses conseils et appris que ces constructions rocheuses au sommet de la montagne étaient destinées à des observations astronomiques et notamment lunaires. A défaut de pouvoir nous y rendre, nous ne rapporterons que des photos de l’entrée sous la pluie.


Les dessous de table des indiens Pueblos

La région de Mesa Verde, au sud-ouest du Colorado, est un immense plateau recouvert d’une forêt, d’où le nom de « table verte », sillonné de profonds canyons créant autant de falaises de grès abruptes. Les indiens Anasazi puis Pueblos y ont longtemps vécu à sa surface, cultivant leurs champs et récoltant leurs fruits. Pour des raisons diverses, sans doute liées au climat et peut-être à des périodes de guerre, une partie d’entre eux s’est réfugiée vers le 12ème siècle dans de grandes alcôves naturelles au sein même des falaises. Ils y ont élevé des murs, installé des planchers et autres lieux de vie, créant ainsi de vastes bâtisses troglodytes où pouvaient vivre jusqu’à 200 personnes. Ils étaient protégés ainsi, sans doute mieux qu’à la surface, des températures extrêmes des étés et des hivers tout comme des précipitations. Une longue période de sécheresse une centaine d’années plus tard les incita à quitter les lieux et migrer plus loin.

Le parc national ouvert depuis 1906, permet d’observer de loin et de près (en visite guidée uniquement) ces habitations étonnantes. Bien sûr, un bon nombre de randonnées sont aménagées. Nous avons opté pour un parcours de 4 km le long d’un canyon, spectaculaire par son tracé inséré dans les falaises, ses vues vertigineuses et les pétroglyphes à son point ultime.



Il est dans tous ces états

Je veux parler du point géodésique qui se trouve à la jonction de l’Utah, du Colorado, du Nouveau Mexique et de l’Arizona. Au carrefour des 2 axes qui servent de séparation (le 37ème parallèle nord et le 109ème méridien ouest). Au USA on fait simple, on n’y va pas par 4 chemins, si on peut dire. Les touristes viennent en masse s’y faire prendre en photo, mais semblent un peu décontenancé au moment de se positionner. C’est sûr qu’au niveau de l’équateur il n’y a pas de question à se poser : un pied dans l’hémisphère Nord, un autre dans l’hémisphère Sud. Mais là, comment faire avec seulement deux pieds ? A défaut d’y mettre les mains, dans une position peu avantageuse, plusieurs tactiques sont employées : un pied chevauchant deux états, photo en couple procurant l’avantage du bon nombre de points d’appui, ou encore mieux à 4 personne, une dans chaque état. Alors que les boutiques de souvenirs autour exigent encore le port du masque, on est loin ici de la distanciation sociale. Pour la petite histoire, sachez que la position exacte a été déplacée à plusieurs reprises par divers scientifiques coupeurs de cheveux en quatre et reste contestée par certains. En tout cas, c’est le seul endroit aux USA où 4 états de rencontrent en un même point.


Monument Valley

Nous avons eu le plaisir de bivouaquer juste à l’entrée de la vallée, une quinzaine de kilomètres avant le célèbre site, entre deux falaises rougeâtres dont les couleurs se sont enflammées au coucher puis au lever du soleil. Spot gratuit avec table de pique-nique fournie, c’était mieux que collés-serrés dans les campings du parc. Nous avons visité ce dernier en milieu de matinée, alors que le soleil n’était pas encore écrasant et que les touristes étaient encore en nombre raisonnable. Les mots manquent pour décrire cet endroit majestueux où l’on se faufile avec Roberto sur une route en terre entre des rocs montagneux géants aux couleurs rougeoyantes. Les photos parleront mieux que les mots.



Deux ponts trop loin

Après une route fantastique grimpant au flanc d’une falaise et procurant des vues magnifiques, nous parvenons au petit Parc des Ponts Naturels (Natural Bridges National Monument pour les intimes). Une route de 14 km en fait le tour et nous arrête devant 4 ponts, permettant de les observer du sommet et pour les plus courageux de descendre dans le canyon les observer par en dessous. Après la matinée à Monument Valley et compte-tenu de la chaleur de ce milieu d’après-midi, nous avons manqué de motivation pour les deux premiers, situés respectivement à 1 et 3 km de la route, et donc le double pour l’aller-retour. Le troisième nous a paru plus sympathique avec son unique kilomètre retour compris, alors nous sommes allés lui rendre une petite visite. Il nous a offert une arche élégante, bien élancée dans le ciel et semblant assez fragile. Nous avons appris que ces ponts naissent au début d’une boucle d’une rivière, ce qui permet une érosion ciblée au creux de la courbe et la formation progressive d’un trou jusqu’à l’autre côté.


Une journée minérale

Les paysages de l’Utah sont véritablement extraordinaires. Nous avons roulé une grande partie de la journée au milieu de paysages grandioses, montagnes en mille-feuilles minérales ou au contraire en pierres massives que l’érosion transforme en sable pour les premières et en blocs de taille imposante pour les secondes. Les couleurs sont fantastiques, variant d’une région à l’autre entre les gris, les blancs, les jaunes ocre, les mauves et les rouges, sans parler des tons bleutés de certaines parois. Entre les montagnes, des canyons asséchés et façonnés en arabesques ou en champignons par le temps, des couloirs de verdure grâce à l’eau qu’ils recueillent par temps de pluie ou aux rares rivières qui les empruntent, comme le Colorado très boueux à cet endroit. Nous n’avons cessé de nous émerveiller tels des enfants tout au long de la journée et les appareils photo ont bien chauffé. Nous avons terminé par la visite du Capitol Reef National Park, bien dans le ton de ce que nous venions de voir, avec quelques curiosités en plus comme ces pétroglyphes gravés à bonne hauteur sur des falaises. Ce qui les a sûrement préservé du vandalisme dont on a pu constater quelques exemples malheureux au niveau du sol.



Le plus beau des parcs ?

Ce n’est pas nous qui le disons, mais le National Park Service, l’organisme qui gère tous les parcs nationaux des USA. Après chacun en fait son affaire, mais ce Bryce Canyon National Park est véritablement au-dessus du lot et fait partie de nos coups de cœurs de ce voyage. Il s’agit d’un haut-plateau dont l’érosion a créé une multitude de cheminées appelées ici hoodoos. Le phénomène n’est pas unique dans le monde, mais c’est ici qu’il a sa plus forte concentration, rassemblée dans plusieurs zones appelées amphithéâtres. Les multiples tonalités de rose-orangé, la fragilité des édifices, la multiplicité de leurs formes, et leur caractère innombrable en font un spectacle exceptionnel. On commence par les apprécier du dessus, en longeant une falaise, avant de plonger vers leur base, dans des couloirs étroits et impressionnants, afin d’avoir un autre point de vue tout aussi impressionnant du dessous. Tout cela en compagnie de sympathiques chipmunks (de petits écureuils) peu farouches au point de venir tourner autour de vos chaussures. Et bien sûr en compagnie d’autres touristes, mais ce n’était pas le délire non plus. Vraiment un endroit qu’on a adoré.


C’est par ce parc que nous terminons cet article. Il nous reste encore un petit bout d’Utah à parcourir et même encore un parc national avant de rejoindre le Nevada et le célèbre Grand Canyon. Nous allons en avoir encore plein les mirettes et sûrement des choses à vous raconter.

77. Colorado

Nous avons retrouvé dans ces montagnes « de couleur rouge » (« colorado » en Espagnol) de cet état de l’Ouest américain celles de nos manuels de géographie. Elles contrastent magnifiquement avec les feuillages des arbres des vallées et les falaises blanches au voisinage. Mais ce grand état possède bien sûr d’autres richesses. Entre les parcs nationaux des montagnes rocheuses et des grandes dunes de sable, la capitale Denver et sa richesse culturelle et nos petites aventures, il n’y a pas de quoi s’ennuyer !


Allez en prison, ne passez pas par la case départ !

C’est par cette petite affiche malicieuse que débute la visite de l’ancienne prison de Laramie, tout au sud de l’état du Wyoming. Construite en 1872, elle a hébergé pendant 30 ans les plus grands bandits de la région, dont le célèbre Butch Cassidy. On commence par nous montrer la maison du gardien en chef, luxueusement logé pour l’époque, afin que le contraste soit bien net avec les cellules des prisonniers. Tout aussi austères que les règles de l’époque : dépersonnalisation (remplacement du nom par un numéro, rasage complet et tenue rayée unique), lever à 5h30 du matin, interdiction de toute conversation, marche en rangs serrés pour les sorties, travaux forcés, etc. On est loin des parties de Kohlantess de la prison de Fresnes !

Une salle entière est dédiée à Butch Cassidy, hôte de la prison pendant 18 mois, presque érigé en héros malgré ses nombreux crimes. Il est volontiers comparé à un Robin des Bois alors qu’il n’a jamais rendu un penny de ses larcins à quiconque. Au contraire, traqué par la police et des détectives privés, il a fini par s’enfuir avec son compère Kid Sundance en Amérique du Sud où il aurait probablement été tué quelques années plus tard. Les tests ADN n’ont toutefois pas confirmé que c’était bien lui, laissant la part belle à tous les fantasmes de ses admirateurs.


Lovely Loveland

Nous sommes maintenant dans l’état du Colorado. Sur la route du Parc National des Montagnes Rocheuses, nous faisons une petite halte à Loveland. Cette ville a bien sûr tiré parti de son nom – qui est en fait celui du président de la compagnie de chemins de fer qui a permis à la ville de se développer – pour promouvoir ce qui tourne autour de l’amour. Lors de la St Valentin notamment, le must est d’envoyer une carte à l’être cher avec le cachet postal de la ville. Si l’on ne peut se déplacer, il suffit d’envoyer la carte préaffranchie à la poste de la ville où des bénévoles se chargeront d’appliquer le cachet avant de la réexpédier. Le restant de l’année, on peut se faire photographier devant les lettres géantes LOVE du centre des visiteurs ou bien y accrocher un cadenas.

L’autre spécialité de la ville, si l’on peut dire, ce sont les scultpures. Outre le concours annuel du mois d’août, 3 parcs exposent plusieurs centaines de ces œuvres. Le premier que nous avons visité est dédié à l’art sculptural du Zimbabwe, le second sert d’accroche à l’office de tourisme, et le troisième, le plus grand, offre au regard des passants plus de 150 sculptures en bronze dont pas mal méritent le détour. Et tout est gratuit, profitez-en !


Parc National des Montagnes Rocheuses

Nous n’avions pas prévu de passer par ce parc au début et peut-être avons-nous provoqué de mauvaises ondes qui ont terni notre visite. A moins que ce ne soit lié au fait que nous y étions en plein week-end de fête du travail. La foule était au rendez-vous hélas. Donc pas de camping disponible et la ville à l’entrée du parc, Estes Park, est particulièrement inaccueillante vis-à-vis des véhicules de loisirs, interdisant notamment tout stationnement nocturne, y compris dans les rues. Nous avons passé la nuit sur un parking d’hôtel en centre-ville et avons décollé de bonne heure pour entrer dans le parc avant 9 heures. Car après, il faut un permis qui, comme les hébergements, se réserve plus d’un mois à l’avance. Ensuite, nous avons emprunté la route fétiche du parc, un chemin en terre bordé de quelques précipices mais circulant la plupart du temps en forêt. Le problème c’est que nous étions loin d’être seuls, et circuler ainsi au milieu d’une file de voitures ça gâche fortement le plaisir. Parvenus vers 3700 m d’altitude, ça s’est amélioré. Le paysage s’est dégagé, devenant grandiose, sans être toutefois exceptionnel pour nous qui avons vécu 25 ans à la montagne. Nous avons tout de même suivi quelques sentiers de randonnée au milieu de la toundra, grimpé sur de petits sommets rocheux et glané quelques informations sur les panneaux ou au centre des visiteurs. Un peu déçus quand même, nous sommes ressortis du parc le soir d’y être entrés, sans avoir l’envie d’y retourner.


L’attaque de l’écureuil

Dès la sortie du parc, nous avons longé le Lac Mountain Shade, qui n’avait pas tant l’air que ça à l’ombre de la montagne. Juste à côté se trouve une forêt nationale, et les forêts nationales c’est pratique pour nous autres voyageurs nomades car il est possible d’y stationner gratuitement et en général paisiblement pour la nuit. Nous nous sommes trouvés un petit coin dans une clairière et avons dormi comme des loirs. Un peu saisis par le froid tout de même le matin (9°C dans Roberto et sans doute 2 ou 3°C dehors). Nous avions juste oublié que nous étions en altitude. Un petit coup de chauffage nous a remontés rapidement à 20°C et le soleil radieux a rapidement pris le relais. Nous sommes donc retournés près du lac, toujours au soleil d’ailleurs, et avons randonné sur une petite boucle de 6,5 km, l’East Shore Trail, moitié au bord de l’eau moitié dans la forêt et les prairies. A la fois joli et tranquille, comme nous aimons. Le seul être vivant qui a troublé notre passage a été un écureuil qui, du haut de son sapin, nous jetait des jeunes pommes de pin et des bouts de branches. A priori il n’avait rien contre nous, il préparait plutôt sa récolte pour se sustenter pendant son hibernation. Tout de même, être canardés par un écureuil, c’est un comble !


Petit coup de pompe

Nous sommes en pleine forme, rassurez-vous, mais ce n’était pas le cas il y a quelques jours de notre pompe à eau qui, après 18 mois de bons et loyaux services nous a brusquement lâchés. De rapides vérifications permettent de s’assurer qu’il ne s’agit pas d’un problème d’alimentation en eau ou en électricité. Il nous faut donc trouver dans l’idéal un dépanneur, pour avoir au moins un diagnostic précis, ou à défaut une nouvelle pompe, sachant que les raccords des pompes américaines pourraient ne pas être compatibles avec les nôtres. Evidemment, nous sommes en plein week-end de fête du travail, mais c’est toujours comme ça. Nous dénichons un dépanneur à une douzaine de kilomètres de l’endroit où nous sommes, apparemment ouvert d’après Google – qui est loin de la fiabilité à 100%. L’entreprise s’appelle RV Doctor, c’est tout dire. Ils sont plutôt spécialisés dans le dépannage à domicile, ce qui nous parait incongru pour des véhicules plutôt mobiles, mais à la réflexion beaucoup de véhicules de loisirs américains sont scotchés plusieurs mois voire à l’année dans des campings ou ils sont raccordés à tout. Au bureau de RV Doctor, un gars qui semble tout juste sorti de son lit (il est 9h30) nous affirme qu’aucune réparation ne se fait sur place mais qu’il peut nous envoyer dans la journée un dépanneur …à notre domicile. Nous avons beau lui montrer Roberto garé juste devant sa fenêtre, rien à faire. Nous n’allons tout de même pas aller nous installer dans un camping juste pour la réparation ! Nous remontons dans notre véhicule et ressortons nos téléphones pour rechercher un autre dépanneur ou un vendeur de pièces détachées. C’est alors qu’arrive de l’arrière de la maison une autre personne qui nous demande si tout va bien. Nous lui expliquons notre problème et il demande tout de suite à regarder. Après quelques tests il pense que la pompe est grillée et nous propose de la remplacer. Une demi-heure plus tard nous repartons avec une pompe neuve et avec la pensée d’en donner de grands coups (de pompes bien sûr) à notre premier intervenant.

Cela pose la question plus générale des pannes en voyage. Pour les problèmes mécaniques, nous pouvons faire appel à l’assistance incluse dans notre contrat d’assurance, encore faut-il avoir du réseau et dans cet immense pays, c’est loin d’être toujours le cas. Et cela ne nous permet que de nous faire transporter au garage le plus proche, car la plus grosse difficulté est de trouver des pièces pour nos véhicules européens. Les concessionnaires Fiat américains ne vendent pas de fourgons Ducato et donc n’ont pas les pièces détachées, ni les valises diagnostiques sans doute. Les autres marques ne sont pas mieux loties et ceux qui espéraient s’en sortir en partant avec un véhicule Ford se cassent tout aussi bien les dents : les Ford Transit européens n’ont pas les mêmes moteurs que leur homologues Yankee. Une panne là-bas est donc souvent synonyme d’attente de l’envoi des pièces détachées. Pour les pièces d’usure, il est toutefois possible d’anticiper. Nous avons ainsi ramené avec nous de notre dernier passage en France un jeu de filtres et de plaquettes de freins. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de passer chez un concessionnaire Fiat pour faire remplacer le filtre à air moteur qui nécessitait un outil spécifique pour le démontage. Ils m’ont remis le nouveau, que j’avais apporté, en me souhaitant bon voyage, sans rien me demander donc.


L’argent a fait son bonheur

Georgetown dans le colorado est née 2 fois : une première fois en 1859 après la découverte de quelques pépites d’or dans le torrent qui la borde, dans une micro-ruée vers l’or qui ne dura que 2 ans. Puis une seconde fois en 1864, grâce à la découverte de filons à forte teneur en argent dans les montagnes et à une loi américaine récemment promulguée qui permettait au dollar de reposer aussi bien sur l’argent que l’or. La ville connut un essor tel que pendant quelques années, elle sera la ville qui produira le plus d’argent au monde.

Pour acheminer tout ce minerai il fallait un train, et la ligne fut inaugurée en 1885, transportant aussi des passagers jusqu’à la grande ville de Denver toute proche. La 2ème guerre mondiale porta un coup d’arrêt à la production d’argent et la ville connut une nouvelle récession. C’est le tourisme et l’énergie de plusieurs sociétés conservatrices du patrimoine qui la sauvèrent et permirent la remise en service de la voie désaffectée un siècle plus tard.

Nous avons emprunté ce train à vapeur circulant en voie métrique sur de frêles ponts de bois sans parapet, comme à l’époque. Cela nous a rappelé notre voyage itinérant en Inde d’il y a 35 ans (mais que ça passe vite !) où nous voyagions de nuit dans les derniers trains à vapeur en service régulier, nous réveillant le matin le visage et les cheveux couverts de scories. Pas de scorie ici, les huiles recyclées remplacent le charbon.

Nous en avons profité aussi pour visiter la mine d’argent. Mais, si le décor en valait la peine, le discours de la guide était plus orienté sur les anecdotes et les histoires de fantômes (les américains adorent) que sur la vie des mineurs et les technologies employées pour extraire et traiter le minerai.


Les Red Rocks

Ce titre ressemble un peu au nom d’un groupe musical ou d’une équipe de baseball, mais il s’agit bien d’une formation naturelle de roches rouges, des falaises de grès formées il y a 290 millions d’années. En temps ordinaire, c’est un parc de la ville de Denver qui se visite tranquillement. Mais la capitale du Colorado y a aussi installé un amphithéâtre en taillant un peu la montagne, pour y produire des concerts. Les Beatles notamment y ont joué en 1964. Nous avons retrouvé l’affiche à l’hôtel de Denver où ils avaient passé la nuit, laissant la direction totalement débordée par les 5000 fans qui s’étaient rassemblés devant la porte. Le problème des soirs de concert, c’est que les sentiers de randonnées ne sont plus accessibles, et c’était forcément le cas lorsque nous sommes arrivés dans le coin. Il restait heureusement la possibilité de circuler sur la route panoramique, ce qui nous a permis de profiter de ce paysage étonnant et de prendre quelques photos.


Denver, du décor !

Ce qui est bien dans les grandes villes, c’est que l’offre culurelle est généralement riche et variée. Et permet de constater que, si la nature nous offre de belles choses, l’humain en est capable aussi. En voyage, nous apprécions d’alterner les deux.

Denver est riche en oeuvres de street art, avec une concentration particulière dans le RiNo Art District. RiNo pour River North et non pas pour la bête à corne ou le nez qui coule. Une ancienne friche industrielle, comme souvent, reconvertie en quartier branché avec tout ce qu’il faut pour boire et manger, notamment dans l’ancien marché central. Nous y étions au moment du festival annuel de street art, et plusieurs peintres étaient en action. Nous avons passé près de 2 heures à déambuler dans le quartier à examiner les murs, les portes de garages, et mêmes les poubelles ! Voici quelques unes de nos trouvailles.


L’architecture urbaine est par contre assez banale, peu soutenue par le classique quadrillage américain des rues et avenues qui rend la ville monotone. Comme d’habitude aux USA, pas de vrai centre-ville, tout au plus une longue rue semi-piétonne peu fréquentée. La chaleur y était peut-être pour quelque chose, mais les vitrines ne sont pas vraiment accueillantes non plus. A titre indicatif, on peut marcher plus d’une heure sans trouver une épicerie. Sont-elles cachées à l’intérieur des buildings ? Ont-elles disparu au profit des courses en ligne ? On trouve tout de même quelques curiosités en flânant dans les rues, comme ce gros ours bleu debout les yeux collés contre les vitres du Palais des Congrès. Un vrai symbole de la ville, il est baptisé « Je vois ce que vous voulez dire ». Il devait parait-il être brun, mais une erreur dans l’essai de couleur – un comble dans un état qui s’appelle Colorado – lui aurait donné cette teinte surprenante que finalement l’artiste a décidé de garder.


Le Denver Art Museum est réputé pour sa grande collection d’art amérindien, mais s’intéresse aussi à l’art de l’ouest américain et à celui du reste du monde. Les peintres impressionnistes français y avaient notamment une belle part. Nous y avons trouvé aussi une section dédiée au design et quelques expositions temporaires plus ou moins à notre goût. Mais la partie sur l’art amérindien vaut à elle seule le déplacement.


Dans un autre registre, le Forney Museum of Transportation mérite également la visite. Sa collection de voitures miniatures est exceptionnelle, tout comme celle des véhicules en tous genres rassemblés dans ses hangars. Des trains aux avions en passant par les vélos, les motos, les voitures, les autobus, les avions et même une auto-tamponneuse. Du matériel parfaitement entretenu avec des carrosseries d’un tel lustre qu’elles auraient fait rougir Roberto s’il avait pu entrer.


Nous nous sommes baladés enfin dans le jardin botanique, dans le TOP 5 des USA selon …la ville de Denver. Pas sûr que nous lui aurions donné nous-même cette place, notamment en raison de la faible mise en valeur de la grande serre tropicale, mais nous avons tout de même pris du plaisir à en explorer les différents secteurs, notamment ceux dédiés aux plantes de l’Ouest américain armées pour affronter des écarts climatiques extrêmes. Les grands bassins de nénuphars sont à notre avis le must de ce jardin avec de grandes variétés de fleurs et de feuilles ressortant particulièrement bien sur une eau volontairement assombrie. Une véritable œuvre d’art réalisée par l’équipe de jardiniers. Bravo !


Le Jardin des Dieux

Près de Colorado Springs, une ville à laquelle nous n’avons pas trouvé d’intérêt autre que le prix exceptionnellement bas du diesel (1,03 €/l, c’était peut-être une erreur, nous nous sommes dépêchés d’en profiter !), se trouve le Jardin des Dieux. C’est un parc qu’on peut parcourir entièrement à pied, aménagé autour de formations rocheuses étonnantes de grès rose ou rouge. Formées par sédimentation il y a des millions d’années, elles se sont redressées au moment de la formation des Montagnes Rocheuses et l’érosion en a fait des sortes de dalles verticales plus ou moins épaisses d’environ 150 mètres de haut. Chacune a son petit nom, des trois grâces aux chameaux qui s’embrassent. Nous avons cru reconnaître pour notre part un éléphant, non recensé dans la documentation. Mais ça risque d’être compliqué pour le faire homologuer, d’autant que nous l’aurions volontiers fait baptiser Roberto… Nous avons aussi croisé quelques cervidés pas trop farouches mais aussi un serpent à sonnette qui, lui, n’avait pas l’air commode. Un joli lieu un peu trop fréquenté mais qui a le mérite d’être gratuit. Ceci explique peut-être cela.


Rendez-vous manqué

Nous avions prévu de visiter le Parc National des Grandes Dunes de Sable, apparemment spectaculaires puisque les plus hautes d’Amérique du Nord, mais la météo en a décidé autrement. Avec la pluie continue et le brouillard bas, nous n’aurions pas vu grand-chose. Tant pis, ce sera pour une autre fois, nous décidons plutôt qu’attendre l’accalmie d’ »avaler du bitume » et de quitter un jour plus tôt que prévu le Colorado. Mais ce ne sera qu’un au revoir car cet état nous a bien plu et nous y retournerons prochainement. A bientôt pour la suite au Nouveau Mexique !

76. Autour de Yellowstone

C’est un long parcours qui nous emmènera de Missoula à Laramie en passant par l’exceptionnel parc Yellowstone, les états du Montana, du Wyoming et du Dakota du Sud jusqu’au célèbre Mont Rushmore. Une dizaine de jours intenses et inoubliables.

Missoula et son carrousel solidaire

Cette attraction est particulière par son histoire : un jour un menuisier du pays est allé voir le maire et lui a dit « I have a dream… » Il a proposé en fait de construire un carrousel pour la ville, à la seule condition qu’on lui promette que le manège ne sera jamais vendu ou déplacé. La ville a accepté, et désormais tout le monde se plaint du grincement infernal du manège, de la musique lancinante du limonaire, des enfants qui tombent ou qui se plaignent de violents maux de tête peu après avoir chevauché l’engin… Non non je blague, tout le monde est ravi, les enfants vont tous bien, le carrousel est magnifique et décoré dans les moindres détails y compris le bâtiment qui l’abrite. Ce qui est surtout marquant, c’est que la générosité de l’homme qui avait un rêve s’est étendue comme par contagion à une grande partie de la ville. Plusieurs milliers de personnes ont ainsi donné un coup de main pour que le projet se réalise, aussi bien pour sculpter et peindre les chevaux, carrosses et autres figurines que pour restaurer et remonter pièce par pièce le mécanisme que le menuisier avait récupéré, ou encore lever les fonds nécessaires aux travaux. Près de 100 000 heures de travaux bénévoles ont été comptabilisées. Le carrousel de Missoula est en service depuis 1995. 4000 volontaires se déclarèrent encore présents en 2001 lorsque le projet se présenta de construire un jardin d’enfants en forme de dragon juste à côté. Avec autant de bras, il ne fallut que 9 jours pour le montage. Un bel exemple de solidarité.


Nuit en forêt près de Garnet

C’est véritablement notre emplacement nocturne préféré car nous y avons en général une paix royale. Les forêts sont loin d’être toutes accessibles, souvent privées ou alors non équipées de voies de circulation. Mais aux USA, les forêts nationales relèvent du domaine public. Il suffit de les repérer sur la carte quand les emplacements de choix n’ont pas déjà été repérés par d’autres voyageurs sur les applications comme iOverlander. On nous demande parfois si nous ne craignons pas pour notre sécurité d’être autant isolés. Mais nous avons plutôt la sensation inverse. Tant mieux, il en faut pour tout le monde !


Garnet, le village fantôme

Vers 1890, des prospecteurs ont découvert de l’or dans la région, attirant de nombreux chercheurs, et, chose inhabituelle, leurs familles. La ville de Garnet a poussé comme un champignon, hébergeant jusqu’à 1000 personnes vers 1895, et disposant alors de 4 magasins généraux, 7 hôtels, 13 saloons, 3 écuries, 2 barbiers, 1 médecin, 1 école, 1 boucher et 1 boutique de confiseries (des familles vous dis-je). Pourtant, rien de tout cela n’a fait long feu. Les filons ont commencé à s’épuiser vers 1900, les exploitants ont commencé à louer à des gogos leurs mines en déclin, et les familles sont parties peu à peu. En 1905, il ne restait plus que 150 habitants. En 1912 un grand incendie en a encore chassé un grand nombre et le peu qu’il restait a été enrôlé dans la 1ère guerre mondiale. Même si la ville a connu quelques réveils provisoires par la suite, elle a fini par s’éteindre et est aujourd’hui abandonnée. Bien entendu, les autorités ont saisi le filon et tentent de maintenir en état les différents bâtiments pour la préservation de l’histoire, ce qui nous permet de les visiter aujourd’hui. Une poignée de baraques en bois dont une partie du mobilier est restée en place, suffisamment pour que l’on s’imprègne de l’ambiance de l’époque. Un petit sentier parcourt aussi la zone minière où l’on trouve du matériel abandonné et des puits de mine condamnés par sécurité mais dont rien que l’entrée en dit long sur les conditions de travail de l’époque.


Nuit au camping, près de Townsen

Après avoir traversé les jolis paysages du Montana, moyennes montagnes recouvertes d’une herbe jaune qu’on croirait sèche et parsemées de quelques sapins, ou champs ondulés de céréales à perte de vue, nous cherchons comme chaque soir un coin tranquille pour dormir. Nous avions repéré un camping gratuit près de la ville de Townsen, mais en faisant le tour de cet emplacement pourtant sympathique, nous découvrons que le seul occupant, une caravane sans son véhicule tracteur, est équipé d’un groupe électrogène en fonctionnement. Pas du tout envieux de supporter cela toute la soirée et encore moins la nuit, nous filons un peu plus loin. Comme il est déjà tard, nous nous rabattons sur un petit camping tout proche, dénué de tout personnel comme nous en avons déjà vu (on met le paiement dans une urne à l’entrée). Pas de groupe électrogène cette fois, mais un groupe de tondeuses à gazon entourant Roberto. Relativement silencieuses, ces vaches noires ne nous laisseront que quelques bouses avant de s’éloigner et nous permettre une nuit paisible.


Allez les bleus !

Sur une colline bordant l’autoroute qui mène à Three Forks dans le Montana, on peut apercevoir un troupeau de chevaux semblant brouter tranquillement l’herbe jaune du coin. Tout de même, quelque chose cloche : ces chevaux semblent d’une taille quelque peu inhabituelle et, si leur crinière vole au vent, eux-mêmes sont immobiles. Qui plus est, en se rapprochant un peu, on distingue une couleur bleutée. S’il est possible de s’arrêter sur un petit terrain vague bordant l’autoroute, rien ne permet d’approcher davantage le troupeau. Il faut sortir les jumelles pour apprécier les 39 sculptures en métal prenant des positions aussi diverses que réalistes, et s’apercevoir que la couleur bleutée est celle de taches peintes sur chaque « animal ». Renseignement pris, il s’agit de l’œuvre d’un artiste local à qui une entreprise de céréales a offert un sommet de colline qu’elle ne pouvait sans doute cultiver. Et il parait que les vrais chevaux bleus, ça existe. Pas comme les éléphants roses.


Il nous en a fait voir de toutes les couleurs

Je parle bien sûr de cette merveille qu’est le parc de Yellowstone. On entre ici dans la cour des grands question parc naturel, le plus ancien du monde d’ailleurs car il a été créé en 1872. Pour les passionnés de thermalisme que nous sommes, c’est un grand waouh toutes les 10 minutes. Nous sommes en effet dans l’immense cratère d’un volcan dont la dernière éruption date de 620 000 ans, gardant depuis une activité géothermique intense. On voit des fumeroles partout, des lacs d’eau ou de boue en ébullition, et bien sûr des geysers. Les 2/3 des geysers du monde sont ici ! Le tout est joliment dispersé, comme si cela ne suffisait pas, dans un décor montagneux époustouflant, grandiose et diversifié. Ce qui a marqué le plus notre première journée, ce sont les couleurs magnifiques des différentes sources que nous avons rencontrées, liées aux micro-organismes qui parviennent miraculeusement à vivre dans ces eaux très chaudes (le record est à 240°C !). Paradoxalement, plus la couleur est froide, plus la température de l’eau est élevée.

A noter que nous avons fait la rencontre d’une famille française ayant tout quitté il y a 4 mois pour partir vivre au moins un an leur rêve de parcourir l’Amérique du Nord. Bien qu’ayant beaucoup voyagé avec nos enfants, nous n’avons jamais dépassé les 2 mois et demi de voyage continu, aussi nous ne pouvons qu’être admiratifs. Leur aventure est très bien racontée sur leur compte Instagram @lilybaroud, n’hésitez pas à jeter un œil.


Yellowstone J2

Ce grand parc mérite au moins 3 jours de visite, davantage si l’on souhaite parcourir d’autres sentiers que ceux qui se présentent tout le long des routes principales pour aller voir les points d’intérêts classiques. Ce qui n’est déjà pas si mal : rien qu’en empruntant ces sentiers, pour la plupart des passerelles en bois pour éviter de s’enfoncer dans les boues très chaudes, nous avons parcouru aujourd’hui 11 kilomètres. Comme hier, nous sommes allés d’émerveillements en émerveillements. Difficile de se lasser devant ces panaches de vapeur qui parsèment l’horizon, ces bassins en ébullition entourés de couronnes multicolores, ces fontaines crachotantes issues de cônes aux formes improbables et cette odeur de soufre omniprésente. Nous avons pu voir ce jour deux des attractions majeures du parc : le fabuleux Grand Prismatic Spring, un lac d’eau thermale formant une sorte de grand œil bleu entouré d’un halo de dégradés oranges du plus bel effet, et le célèbre geyser Old Faithful, dont l’intérêt réside surtout dans la fréquence relativement rapprochée et régulière des éruptions. C’est en conséquence autour de lui que l’on a construit toutes les infrastructures du sud du parc, comme les hôtels, les restaurants, les boutiques de souvenirs et bien entendu le centre des visiteurs. Les horaires probables des éruptions y sont annoncés, mais qu’on ne s’y trompe pas, les fourchettes sont assez larges. Ainsi, pour l’Old Faithful qui jaillit en moyenne toutes les 90 mn, la prochaine éruption était annoncée entre 13h40 et 14h (le spectacle a démarré à 13h40, mieux valait ne pas être en retard), tandis que pour le suivant, le Riverside geyser, c’était entre 15h05 et 16h35 (demandant donc un peu plus de patience). Pour d’autres geysers, l’intervalle entre deux éruptions est annoncé comme pouvant varier entre quelques heures et …quelques années ! Nous avons joué la simplicité en nous contentant de voir l’Old Faithful expulser 20 000 litres d’eau bouillante à une trentaine de mètres de hauteur, pendant environ 2 minutes. Confiants dans les organisateurs, nous n’avions même pas pris de parapluie !

Dans la série des rencontres, nous avons fait connaissance avec 2 autres familles de voyageurs français, chacune avec 2 enfants, parties pour un an à la conquête de l’Amérique du Nord et de l’Amérique centrale et complètement conquises par l’expérience. Ceux qui rêveraient d’en faire autant pourront se délecter de leurs aventures sur leurs comptes Instagram @prenezlapause et @nous_5_en_amerique.


Le zoo-camping du parc

Le camping sauvage étant interdit dans tout le parc, nous avons passé la nuit dans l’un de ses « campgrounds ». Les installations sanitaires sont basiques, limitées à des wc et lavabos, mais sans douches. Les emplacements sont par contre agréables avec, comme la plupart du temps en Amérique du Nord, table de pique-nique et foyer de cuisson individuels. Partout des panneaux préviennent de la présence fréquente d’animaux sauvages, ours et bisons entre autres. Nous n’aurons pas eu l’honneur de leur visite, mais en quittant le camping le matin nous sommes tombés sur ce cerf qui broutait tranquillement dans les allées, entre deux caravanes.


Gris et pastel

Troisième et dernier jour à Yellowstone. Nous commençons notre visite le matin par un secteur de géothermie boueuse. Ici, les sources dégagent volontiers de l’hydrogène sulfureux que des bactéries vont transformer en acide sulfurique, capable de dissoudre les roches autour et formant donc de la boue. Dès l’approche de la zone, bien avant de voir ces chaudrons bouillonnants, on sent bien l’odeur caractéritique d’œuf pourri et on entend les échappées de vapeurs, les bruits d’ébullition, et les bulles qui éclatent à la surface. Des geysers de boue, heureusement pour nous non actifs actuellement, ont aspergé puis grillé toute la végétation alentour, créant une grande clairière gris-blanc au milieu de la forêt. Le dernier bassin de boue que nous verrons n’est plus gris mais jaune. C’est de l’acide sulfurique presque pur, avec un pH proche de 1. Il est 10 fois plus acide que le jus de citron par exemple. A ne surtout pas consommer, même avec modération !

Nous traversons ensuite des plaines à bisons (une bonne cinquantaine étaient présents) pour rejoindre le grand canyon de la rivière Yellowstone, l’un des fleurons du parc. Long de 30 km, large de 500 à 1200 m, profond de 300m, il est le résultat de 600 000 ans d’érosion par la rivière et les conditions climatiques. Les parois abruptes où pas grand-chose ne pousse ont pris de jolies couleurs pastel, jaune pâle, vieux rose ou ocre. De frêles colonnes et murs rocheux s’avancent ça et là, procurant un bel effet de relief. Au bord des falaises, que nous avons longées à pied, des arbres au bord du vide exposent leur racines nues tout en s’accochant désespérément avec les autres. Le spectacle est vraiment spendide.


Le rodéo de Cody

Nous quittons Yellowstone en fin d’après-midi, avec l’impression d’avoir vécu quelque chose d’exceptionnel. Heureusement, la jolie route qui sort du parc nous permet une transition en douceur, tout comme celle qui mène ensuite à Cody, bordée de hautes falaises rougeâtres. Cody s’ennorgueillit d’être la capitale mondiale du rodéo, et comme nous n’avons jamais vu ce genre de manifestation, nous nous garons près de l’arène et attendons l’ouverture. Jusqu’à fin août, un show a lieu chaque soir à 20 heures. Nous arrivons en avance pour avoir les meilleures places, juste devant les stalles de départ, d’où nous pouvons assister aux préparatifs. Les cow-boys en tenue complète se bandent le bras qui tiendra le harnais (pour les chevaux) ou la corde (pour les taureaux) et l’entourent d’une attelle. Ils portent des gilets de maintien et des petits coussins protégeant la nuque. Manifestement, ça va être éprouvant pour les articulations. Pour l’épreuve sur les taureaux, ils troqueront en outre leur chapeau pour un casque intégral. Pendant ce temps le public s’installe. Les porteurs de chapeaux, de blousons et bottes en cuir sont nombreux. La musique country diffusée par les haut-parleurs donne l’ambiance. Vers 20h un animateur prend la parole, qu’il partagera avec un clown placé, lui, sur la piste. Les épreuves s’enchaînent, sous les cris et encouragement des spectateurs. D’abord rodéos à cru sur chevaux, puis attrapage de veaux au lasso, en individuel ou en équipe, rodéo sur chevaux mais avec selle, course de vitesse avec obstacles et enfin l’épreuve reine, le rodéo sur des taureaux déchaînés où, je crois, le meilleur a tenu 12 secondes. Du beau spectacle et une ambiance typique far-west.

Fatigués de cette grande journée, nous ne chercherons pas bien longtemps un endroit pour passer la nuit : un supermarché Walmart est à deux pas. Pas très glamour mais il fera l’affaire. D’autant que le frigo est vide, nous serons sur place pour les courses du lendemain.


La ville de Buffalo Bill

Si le rodéo est si légendaire à Cody, c’est bien bien grâce au créateur de la ville, William Frederick Cody. Son nom ne vous dit sans doute rien parce qu’il ne s’est appelé comme ça que jusqu’à l’âge de 23 ans où il abattit en une journée 69 bisons dans une sorte de concours stupide avec un autre éclaireur de l’armée qui lui n’en tua « que » 46. A partir de ce jour peu glorieux, mais qui pourtant suscitait l’admiration des gens d’alors, on l’appela Buffalo Bill. Quasiment autodidacte puisqu’il entra dans la vie active dès ses 10 ans, à la mort de son père, il fut particulièrement entreprenant tout au long de son existence. Cavalier et tireur émérite, acteur dans l’âme, il lança à l’âge de 36 ans, en 1882, le Wild West Show, un grand spectacle composé de numéros variés faisant tous l’apologie de la conquête de l’ouest. On y voyait des démonstrations de tir de précision, des courses de chevaux, des scènes de chasse avec de vrais bisons, des attaques de diligences, des batailles historiques et des scènes de la vie quotidienne. Buffalo Bill y participait en personne, aux côtés d’invités célèbres comme Calamity Jane ou le chef indien Sitting Bull. Le succès fut retentisssant et la troupe partit en tournée nationale puis européenne, avec une logistique remarquable pour l’époque. Buffalo Bill créa aussi la ville de Cody et fit beaucoup pour développer ses infrastructures. Nous n’avons pas résisté au plaisir de déjeuner au restaurant de SON hôtel. Ambiance typique garantie pour un prix étonamment raisonnable (15€ le buffet du midi).

Un excellent article sur le Wild West Show ici


Cinq pour le prix d’un

Le Buffalo Bill Center of the West est le centre culturel de Cody.5 expositions sont rassemblées dans même bâtiment, avec un billet d’entrée valable 2 jours, ce qui nous a été fort utile. La première est bien sûr dédiée au héros de la ville, tandis que les autres sont consacrées à l’histoire naturelle de la région, aux indiens des plaines, à l’art régional et aux armes à feu. Cette dernière, exceptionnelle, expose 5200 pièces sur les 7000 en possession du musée. Elle semble parfaitement à sa place ici au Wyoming, l’un des états ayant la plus forte proportion de détenteurs d’armes à feu (60% contre 5% pour le Delaware et 33% en moyenne aux USA)


La Tour du Démon

Après avoir de nouveau traversé des paysages superbes, nous arrivons à la Tour du Démon, une étonnante formation rocheuse qui ne ressemble à rien de ce qui l’entoure. Comme une dent qui aurait poussé au milieu de la campagne. En s’approchant un peu, on aperçoit des rayures verticales qui, avec la forme générale en tronc de cône, donnent à la chose l’apparence d’un cannelé bordelais géant. Inévitablement, on se demande comment elle est arrivée là. Au Visitor Center, les hypothèses vont bon train. On parle d’abord d’une origine extra-terrestre. Dailleurs, un alien est exposé à l’entrée, comme s’il avait été capturé puis empaillé en guise de preuve. Plus loin, on affirme, photo et gravure 3D à l’appui, qu’une ourse immense aurait tenté de grimper au sommet de la montagne où s’était réfugié un groupe d’Indiens, provoquant les profondes rainures avec ses griffes, en glissant. La bête ayant échoué, le lieu est devenu sacré pour les tribus du coin. Après, il y a les scientifiques qui ont forcément une explication : de la lave aurait trouvé son chemin il y a 60 000 ans (facile l’hypothèse, il n’y a plus personne pour témoigner) dans des couches sédimentaires, que la rivière autour aurait ensuite érodées. La lave elle-même en séchant lentement aurait produit ces jolies colonnes polyédriques. Pas facile de savoir qui a raison. Moi j’aime bien l’histoire de l’ourse, et vous ?


Nous passons la nuit à l’orée d’une forêt près du site, évitant volontairement le camping au pied de la tour. Pas seulement en raison du risque d’éboulement mais aussi parce qu’ils diffusent encore chaque soir le film Rencontres du 3ème type. Encore qu’avec en fond le décor qui a inspiré Spielberg ce pourrait être amusant.


Des têtes bien faites

Nous poussons jusqu’à l’état du Dakota du Sud pour rendre visite au monument le plus emblématique des USA après la statue de la liberté: le Mont Rushmore. Les têtes des plus méritants présidents du pays gravées dans le granit attirent chaque année plus de 3 millions de visiteurs. Initialement, ce devaient être des personnages célèbres de l’Ouest, mais le sculpteur Gutzon Borglum en a décidé autrement. Vu que l’oeuvre est très connue, je ne vais pas trop faire le savant, mais je vous propose un petit jeu : parmi les affirmations suivantes, une seule est fausse, laquelle ?

  1. Le sculpteur a été formé en France
  2. Les nez des portraits sont de la même taille que Roberto
  3. L’une des têtes a dû être déplacée
  4. Un portrait féminin devait être ajouté mais cela n’a pas pu se faire faute d’argent
  5. Trump a demandé à ce que son portrait soit ajouté
  6. Une sculpture concurrente, plus grande, est en cours de réalisation sur une montagne proche
  7. Aucun décès n’a été à déplorer pendant le chantier
  8. Le sculpteur était membre du Ku Klux Klan

La solution en commentaire dès 5 réponses obtenues


A point ou bien cuits ?

De passage dans la ville de Hot Springs, nous n’avons pas résisté au plaisir de nous plonger dans les eaux bien chaudes d’un établissement local comportant plusieurs piscines ouvertes entourées de jardins. Rompant ainsi avec la frustration de n’avoir pu nous baigner dans les sources (trop) chaudes du parc Yellowstone. Un délice.


Nous sommes repassés maintenant dans le Wyoming et venons d’arriver à Laramie. Le voyage se poursuit sereinement. Pas d’incident mécanique à signaler, Roberto est bien vaillant, savourant sans doute comme nous le plaisir de découvrir la suite. Comme vous aussi j’espère.

75. Retour aux USA

Comme l’éclair

Les passages de frontières doivent être préparés un minimum, ne serait-ce que pour avoir nos différents documents à portée de main alors que la plupart du temps ils sont enfermés dans notre petit coffre et que nous portons sur nous des photocopies. Nous avons fait aussi un peu de vide dans le frigo, les USA étant assez sensibles aux aliments frais. Nous devons enfin prévoir les questions qui vont nous être posées, du genre « Quelle est votre prochaine destination ? » (Difficile de répondre que l’on ne sait pas – ce qui est la réalité quotidienne de notre voyage) ou « Transportez-vous des armes ? » (Surtout se retenir de plaisanter avec le sujet). Notre seule question à nous sera de savoir combien de jours nous seront octroyés sur le visa. Car la règle n’est pas simple et peut être interprétée différemment d’un douanier à une autre. Et comme nous sommes sortis du pays avant la fin des 90 jours, seule la période restante pourrait nous être accordée, ce qui serait une catastrophe (10 jours pour traverser les USA, imaginez !).

Nous voilà fin prêts, nous arrivons à la douane vers 13 heures. Trois files sont disponibles, deux pour les voitures, une pour les camions et « R.V. » (recreational vehicles). Nous empruntons cette dernière. Je tends spontanément nos passeports au douanier, qui nous dit que nous ne sommes pas dans la bonne file, que les R.V. c’est plus gros que ça et que pour lui nous sommes un « van ». J’ai envie de lui répondre que les policiers qui règlent le stationnement en ville pensent autrement mais je me tais. Nous stationnons à l’endroit qu’il nous indique et entrons dans le bâtiment. Une douanière très sympa nous interroge brièvement sur notre parcours, semblant admirative, scanne nos pupilles et nos pulpes de doigts puis nous remet nos passeports. Je vérifie rapidement le tampon : nous sommes autorisés à circuler jusqu’au 12 novembre, soit 90 jours. Yes !

L’opération aura pris 10 minutes tout au plus. Aucun papier n’aura été demandé pour Roberto qui n’aura pas non plus été fouillé. Quand on pense à tous les migrants qu’on aurait pu faire passer ! Je blague bien sûr. Hein, la NSA, je plai-san-te !


Les écluses de Ballard

Nous avons pris la route de Seattle. Dans la banlieue nord, nous nous arrêtons visiter les écluses de Ballard qui permettent de relier les lacs intérieurs de Seattle (Lac Union et Lac Washington) au détroit qui mène ensuite vers le Canada puis l’Océan Pacifique. Les touristes fluviaux sont nombreux et l’écluse est pleine à chaque remplissage, qu’il est toujours amusant d’observer. Quelques otaries se baladent dans les bassins. L’endroit s’appelle aussi la Baie des Saumons, et ce n’est pas pour rien. Nombre d’entre eux repartent vers la mer à cette époque et, comme ils ne sont pas très friands des écluses, où les attendraient d’ailleurs les otaries et les lions de mer, on leur a installé des échelles pour leur permettre le passage. Avec accessoirement une paroi vitrée pour que les touristes viennent les observer sauter de bassin en bassin. Il n’y a étonamment rien de mercantile là-dedans, l’entrée des écluses est gratuite, y compris les documents d’aide, les visites guidées et le tour d’un petit jardin botanique attenant. En fait c’est géré par la Nation américaine. Il faut bien que les taxes que l’on paye sur le gasoil et l’alimentation servent à quelque chose… Nan, en vrai, merci les USA !


Visite de Seattle

En vrai, la capitale de l’état de Washington n’est ni Washington (ça on le savait) ni Seattle (ça on le savait moins) mais plutôt Olympia (qui tire son nom du Mont Olympe que je pensais en Grèce mais qui existe aussi aux USA tout en n’ayant pas eu la faveur des JO d’hiver de 1960 qui ont eu lieu à Squaw Valley pas très loint de là mais en Californie). Nous avons préféré visiter Seattle pour ne pas créer de confusion et parce que le Lonely Planet lui consacre 14 pages contre une seule à Olympia. Bizarre mais ils doivent avoir leurs raisons.

  1. L’aiguille de l’espace

C’est ainsi que s’appelle la tour emblème de Seattle, comme il en existe dans beaucoup d’autres villes. Celle-ci, installée pour l’exposition universelle de 1962, culmine à 184 m. Ce qui est peu par rapport à notre Tour Eiffel, mais dans cette région à haut risque sismique il vaut mieux être prudent. Alors nous n’avons pas hésité à emprunter l’ascenseur qui mène au sommet en 41 secondes. D’abord une plate-forme fixe en extérieur, avec des parois de verre obliques sur lesquelles il faut oser s’adosser pour la photo-souvenir. Ensuite une plate-forme mobile sur laquelle il faut cette fois oser marcher car là c’est le plancher qui est transparent et permet d’observer directement sous ses pieds les microscopiques voitures et piétons se déplaçant bien au-dessous. Le seul plancher transparent mobile au monde parait-il. Et nous étions dessus !


  1. Le jardin de verre de Chihuly

Dave Chihuly est un artiste-verrier local, formé à Murano. Il présente l’œuvre de toute une vie dans une suite de pièces tantôt claires tantôt sombres mais qui attirent chacune un émerveillement renouvelé. Une débauche de couleurs et de formes improbables, de fleurs géantes, de véritables forêts de verres. Alors que l’on croit avec regret la visite terminée, la collection se poursuit, toujours aussi impressionnante, dans une grande serre puis à l’extérieur dans un jardin où le verre sublime les massifs végétaux pour le plus grand plaisir de nos yeux. Une exceptionnelle pépite de Seattle qu’il ne fallait pas manquer.

Tout ça est magnifique… faut-il vraiment des commentaires ?


  1. Troll et bus

Ce titre jouant sur les mots ne sert qu’à accrocher deux curiosités :

La première est un véritable troll, tapi sous un pont de voie rapide, pourrait effrayer les passants qui le découvrent au dernier moment. D’autant qu’en y regardant de près, il broie une coccinelle VW dans sa main. Les explications manquent sur place pour comprendre le pourquoi du comment, mais les trolls c’est comme ça.

L’autre curiosité, c’est un petit groupe de personnages attendant sous un abribus un train interurbain qui ne passera jamais, la ligne étant abandonnée depuis 1930. Ils sont là bien évidemment pour revendiquer la réouverture, mais sans grand succès apparemment. Ce qui est amusant, c’est que le chien qui les accompagne possède, lorsqu’on y regarde de près, des traits humains. Une revanche du sculpteur qui a immortalisé ainsi la tête du maire de l’époque qui s’opposait à l’installation de l’œuvre en ville. Bien fait !


  1. La ruée vers l’or de Klondike

La ville de Seattle, alors peu développée, fut touchée par un incendie géant en 1889 qui détruisit 90% des habitations alors en bois, sans faire de victime. Tout était à refaire. La ville commençait à se reconstruire, en dur cette fois, lorsqu’une seconde catastrophe, financière cette fois, la toucha : le krach de 1893 lié à un mouvement de panique des investisseurs qui voulurent soudain récupérer l’or sur lesquels leurs billets verts étaient basés. C’est dire si l’arrivée au port de Seattle d’un navire ramenant des hommes soudainement enrichis après la découverte d’un site aurifère au Yukon était un espoir pour une grande partie de la population tombée dans la misère. Plus de 100 000 personnes de la région se lancèrent soudain dans l’aventure, la plupart sans avoir aucune idée des difficultés qu’ils rencontreraient : coût élevé d’un voyage où il fallait emmener avec soi 1 an de vivres et matériaux, difficultés inimaginables sur le trajet comportant des mers gelées, des pistes enneigées et pentues et la quasi absence de toute infrastructure, durée très longue puisqu’avec les moyens de l’époque il fallait entre 6 et 18 mois pour parvenir sur les rives de la rivière Klondike, lieu de découverte de la première pépite. Pour les 40% des candidats qui parvenaient malgré tout à Dawson, la ville soudainement créée la plus proche du site aurifère, leur état d’épuisement était tel que beaucoup repartaient dégoutés ou se contentaient d’un emploi subalterne sur place. Seulement la moitié des arrivants partaient réellement chercher de l’or et au final 300 personnes seulement se sont réellement enrichies sur les cent mille partants. Les vrais gagnants, ce sont les commerçants qui ont su exploiter ce filon – c’est le cas de le dire – comme les hôteliers, les vendeurs de nourriture ou d’accessoires, les intermédiaires dans le marché de l’or et, de façon plus générale, la ville de Seattle qui était le vrai centre logistique de l’opération.


Re-verre dans le port de Tacoma

C’est tout près du célèbre port chanté par Hugues Aufray et par moi-même en colonie de vacances – c’est dire si c’est vintage – que Claudie nous a déniché un YAGM (yet another glass museum). Si vous ne savez pas que nous sommes fans de l’art du verre, reprenez la lecture du blog depuis le début 😉. Nous avons trouvé de belles pièces, mais il ne sera pas dans notre top 10. Je vous mets quelques photos pour marquer le coup.

Quelques oeuvres parmi d’autres…


A fond la gomme

Roberto nous a bien roulés, il nous avait caché que ses pneus avant étaient presque lisses. Pour s’en apercevoir, il a fallu un stationnement roues tournées d’un côté, car l’usure se fait au centre. Je ne sais pas à quoi c’est dû. Je pensais à un surgonflage mais la pression est celle recommandée. Le premier jeu avait fini comme ça, après 25 000 km, et là nous en sommes à 50 000. Une certaine règle semble s’installer. Nous trouvons facilement un spécialiste du pneu dans cette grande zone commerciale qu’est la banlieue de Seattle, possédant en stock le modèle que nous souhaitions, ce qui n’était pas donné d’avance avec notre véhicule français. Ce qui est amusant et motive l’écriture de ce chapitre, c’est que l’ouvrier qui a changé les pneus de Roberto s’appelait lui-même …Roberto ! Vous n’aurez pas sa photo car il a refusé mais je vous assure que c’est vrai.


Les chutes sèches

En plein cœur de l’état de Washington, entre les villes de George (on imagine le patronyme à l’origine) et de Coulee City (une coulée est ici un ravin glaciaire), nous sommes presques seuls à suivre cette belle route panoramique n°17 circulant au fond d’un canyon bordé de falaises ocres et abruptes. L’Ouest américain tel que nous l’imaginions. Nous cédons à l’invite d’un panneau à nous arrêter pour observer un point de vue. Et quel point de vue ! Un encorbellement de plus de 5 km de falaises surplombe de 120 m quelques plans d’eau. Aurions-nous l’occasion de nous téléporter au moment ou les cascades se déversaient du haut de ces falaises, il y a vingt mille ans, que nous nous trouverions devant les plus grandes chutes d’eau ayant jamais existé, dix fois la taille de celles du Niagara et dix fois le débit actuel de toutes les rivières du monde réunies. Ça laisse rêveur, mais aussi rageur de ne pas avoir la machine (à téléporter)


Au grand dam

Quelques dizaines de kilomètres plus loin, après avoir longé le lac Bank, une grande retenue d’eau dédiée à l’irrigation de cette région aride, nous parvenons à la 7ème merveille du génie civil américain, le barrage de Grande Coulée. C’est l’une des plus grandes structures jamais construites par l’humanité. Un kilomètre et demi de large sur 170 mètres de hauteur, 12 millions de mètres cube de béton, soit la quantité nécessaire pour fabriquer une route qui relierait Seattle à Miami. Après 8 années de travaux, le barrage (dam en anglais) a commencé à produire de l’électricité en 1942. En raison de la guerre, ce fut sa seule fonction pendant plusieurs années, mais par la suite les aménagements furent complétés pour que l’installation assure aussi le contrôle des inondations provoquées par la rivière Columbia et l’irrigation de la région grâce à la retenue du lac Bank mentionné ci-dessus, entièrement constituée par la station de pompage de l’eau du barrage. En 1967, une intervention audacieuse (il a fallu dynamiter une partie des installations en activité – on parle de chirurgie à la tronçonneuse…) a permis d’installer des turbines complémentaires et de porter ainsi la capacité de production à 21 milliards de kilowattheures d’électricité par an. Le Grand Coulee Dam reste aujourd’hui le premier producteur d’hydroélectricité aux États-Unis.

Nous avons passé la nuit au bord du lac Roosevelt, le lac de retenue du barrage, qui s’étend jusqu’à la frontière canadienne, à plus de 250 km de là. Le ciel du soir n’était pas terrible mais l’aurore était magnifique.


La machine à jeter son argent.

Nous avons trouvé cette étonnante machine dans un centre commercial. Une sorte de grand yoyo noir un peu mystérieux posé perpendiculairement à son axe. Au centre une sorte d’entonnoir dont on ne voit pas le fond. Sur le bord supérieur, deux « lanceurs de pièces » qui envoient la monnaie tourbilloner avant de disparaître à tout jamais dans le trou central. Pour ceux qui ne savent pas quoi faire de leur argent et qui hésitent encore, une plaque les informe qu’ils auront l’énorme avantage de savoir, à condition de jeter plusieurs pièces en même temps, vous saisissez la perversité de la chose, si celle de 2$ disparaîtra avant celle de 1$ ou bien l’inverse. N’ayant pas d’argent à jeter, j’ai tout de même sacrifié une pièce d’1 centime pour prendre la photo, tout en n’essayant pas de la rattraper avant l’issue finale, au risque de paraitre pingre.

J’ai bien regardé, je n’ai pas trouvé de machine similaire pour jeter ses billets, avec qui sait un gros ventilateur et la question de savoir si le billet de 100 s’envole avant le billet de 50. Mais ça ne saurait tarder 😉


Du port au bison

Si ce titre de chapitre vous fait penser par erreur au dernier plat à la mode des anti-vegan, c’est totalement volontaire. Mais il est juste là pour relier le début et la fin de cet article. Après avoir franchi brièvement l’état de l’Idaho (nous y reviendrons dans quelques semaines), nous sommes parvenus à celui du Montana. Pas besoin de vous faire un dessin sur l’origine du nom. Notre première visite est consacrée à un parc de bisons, réserve faunique créée dès 1908 pour tenter de sauver l’espèce quasi-exterminée par les conquérants américains officiellement parce que ces paisibles animaux gênaient la construction de leur chemin de fer et officieusement parce qu’ils étaient la source de vie principale des indiens. Même si la réserve a été lancée sous l’égide de l’état, on sait bien qui a fait pression pour son ouverture et ce n’est que depuis le début de cette année que la gestion en a enfin été confiée aux tribus indiennes Salish et Kootenai qui la revendiquaient depuis plusieurs décennies. Nous sommes contents pour eux.

Environ 500 bisons sont éparpillés dans ce parc de 76 km2, dans lequel on ne peut circuler qu’en voiture sur une route en gravier. Les chances de les trouver paraissent bien minces, mais les gardes du parc renseignent chaque jour la position approximative des différents animaux (aussi des ours, des lynx, des cerfs, des loups, etc.) sur un plan à l’entrée. Les conseils de bison futé en quelque sorte.

Par bonheur, les bisons préfèrent la vie en communauté et quelques groupes sont censés se trouver sur notre route. Nous nous lançons donc à leur recherche dans un décor magnifique, et nous allons effectivement en trouver. Les premiers d’ailleurs sont impossibles à rater puisque, immobilisés au plein milieu de la route, ils provoquent un embouteillage (de 4 voitures, n’imaginez pas la grande foule non plus). Les visiteurs sont sages et respectent bien les consignes, comme ne pas descendre de voiture par exemple. Les américains me semblent à ce sujet plus respectueux que les canadiens qui poursuivent volontiers les ours enfant sous le bras et appareil photo à la main alors que c’est le meilleur moyen de se faire croquer. Bref, nous passons une belle journée et rentrons avec des images de bisons plein les yeux. Et plein la carte-mémoire pour vous en faire profiter.


Cette seconde entrée aux USA nous comble. Le seul bémol est la chaleur qui reste assez élevée en permanence. Nous compensons en nous garant le plus possible à l’ombre et en prévoyant bien le secteur d’apparition du soleil le lendemain matin. Avec la conséquence que nos panneaux solaires fournissent bien moins d’électricité. Si nous roulons une heure ou deux, l’alternateur suffit pour compenser, mais cela n’a pas été le cas à Seattle où nous avons dû surveiller la batterie qui commençait à perdre un peu de tension. Mais tout s’est bien passé, le roulage jusqu’au Montana passant brièvement par l’Idaho lui a redonné son plein d’énergie. Nous venons d’arriver à Missoula. La suite pour bientôt.

74. Colombie Britannique

Nous terminons notre parcours transcanadien en pénétrant en Colombie Britannique, la province la plus occidentale du pays. Du versant Ouest des Montagnes Rocheuses aux fjords de l’Océan Pacifique, les chaînes montagneuses se succèdent, tantôt vertes tantôt arides, mais toujours splendides.

Étymologie

Contrairement aux apparences, la province n’est ni colombienne ni britannique. Sa dénomination n’a rien à voir avec le pays sud-américain et son appartenance à la confédération canadienne est effective depuis 1871.

En fait la région, une fois volée aux premières nations qui l’habitaient (il faut bien appeler les choses par leur nom) fut d’abord appelée par ses premiers envahisseurs Colombie pour sa partie sud, en référence au fleuve Colombia qui la traverse à cet endroit, et Nouvelle-Calédonie pour sa partie centrale, en référence à on ne sait trop quoi. En 1858, quand l’Angleterre se l’appropria, la province fut unifiée et renommée comme aujourd’hui par la reine Victoria afin d’éviter toute confusion. Enfin à l’époque.

Quant au fleuve Colombia, il fut nommé ainsi par le navigateur qui pénétra pour la première fois dans son embouchure et lui donna le nom de … son bateau. Une chance que ce dernier ne s’appelât pas le Hollandais Volant ou le France !


Rocky II

La chaîne montagneuse qui barre notre route après avoir quitté celle des Rocky Mountains (Montagnes Rocheuses) est appelée Columbia Mountains. Elle est plus ancienne, donc un peu moins élevée et un peu plus verte. Le paysage en est moins spectaculaire, d’autant que la route suit des vallées encaissées et interminables. Entre Jasper, notre point de départ en Alberta et Kamloops, notre première destination en Colombie Britannique, le GPS nous annonce 441 km. Sur cette distance, nous ne traverserons que trois petites zones urbanisées, Tête Jaune Cache (400 hab.), Blue River (157 hab.) et Clearwater (2324 hab.), dont vous pouvez imaginer l’animation. La dense forêt uniforme de sapins s’éclaircit peu à peu à l’approche de Kamloops, qui se présente comme le grand centre commercial de toute la région. On y trouve de tout, y compris le réseau téléphonique qui nous manquait un peu depuis Jasper. Mais pas grand-chose pour les touristes. Nous avions jeté notre dévolu sur une galerie d’art, malheureusement fermée le seul jour de notre passage. Une petite balade dans la ville nous a permis de découvrir ce pont de bois datant de 1912. C’est l’unique photo que nous aurons prise lors de cette traversée !


La route 99

Cette route qui relie Kamloops et Vancouver par le chemin des écoliers mérite vraiment le détour. Montagneuse de bout en bout, elle offre autant de points de vue spectaculaires que de paysages variés. Traversant d’abord des montagnes arides évoquant le Texas ou le Mexique, elle longe aussi de grands lacs aux couleurs diverses, une voie de chemin de fer sinueuse et très pentue qui interroge sur la puissance nécessaire des locomotives pour tirer les cinquante à cent wagons qu’on leur accroche volontiers ici. En conformité totale avec l’économie de la province, nous passons devant des exploitations forestières, des zones d’extraction de minerai, des lacs propices à la pêche ou au camping et un décor de western reconstitué qui a dû servir à l’industrie du cinéma.


Les lacs Joffre

C’est là l’une des randonnées les plus spectaculaires sur cette route 99. Nous nous arrêtons en début d’après-midi sur l’un des 2 parkings au bord de la route, presque combles. Le panneau « réservation par internet obligatoire » nous rappelle soudain l’avertissement de nos amies suisses rencontrées à Calgary, oublié au fil de la conversation riche de ce soir-là. Nous jurons un peu contre nous-même, et surtout contre notre guide Lonely Planet qui ne mentionne rien. Parce que voyez-vous, réserver par internet quand il n’y a pas de réseau, c’est un peu délicat. Nous allons tout de même tenter notre chance auprès du bureau d’accueil. Une ranger nous confirme la nécessité de la réservation en ligne, nous dit qu’habituellement elle renvoie les gens une quinzaine de kilomètres plus bas pour trouver un peu de réseau et obtenir le fameux pass avant de refaire le chemin en sens inverse, un non-sens écologique. Mais, très gentille*, elle nous dit qu’elle possède quelques sésames en réserve et nous en remet un. Ouf ! Nous voilà partis sur ce sentier qui nous mène en 4 km et 300 mètres de dénivelé juste sous un magnifique glacier, en passant par trois lacs d’un bleu-vert éclatant tout en essayant d’oublier que nous sommes loin d’être tout seuls ce jour-là.

*nul doute que je l’aurais qualifiée de très méchante si elle nous avait fait faire le détour…


Circulez, il n’y a rien à voir à Pemberton !

Après cette belle randonnée, nous avons repris notre route montagneuse, dans une longue descente éprouvante pour les freins, celui du moteur compris, pour atterrir – c’est finalement le mot qui convient – juste à côté d’une piste pour parapentistes, dans la petite ville de Pemberton. Nous aurions dû nous méfier de notre guide papier suite à l’importante omission évoquée dans le chapitre précédent, mais nous avons manifestement la mémoire courte. La ville y est présentée dans un encart d’une demi-page comme un « détour au pays des cow-boys » tandis qu’y sont vantés les mérites d’un musée « pour tout savoir sur l’histoire de cette bourgade hors du commun », d’une boulangerie « toute en bois dans l’ancienne gare ferroviaire », d’une distillerie « pionnière de la distillerie artisanale en Colombie Britannique » et de la « meilleure table de la ville » réputée pour …ses pizzas avec des plats entre « 22 et 38$ ». La réalité s’est avérée tout autre : aucun cow-boy n’a pointé le bout de son lasso, le musée avait plutôt l’air d’une brocante et manquait cruellement d’explications, la boulangerie se limitait à un comptoir donnant sur la rue avec impossibilité de voir de près les rares cuissons du jour, la distillerie n’ouvrait qu’à midi alors que nous étions prêts dès 11 heures et nous avons renoncé à attendre, même en nous attablant devant une pizza à 22 €. Au final, les seules choses que je retiendrai de cette étape sont le joli ciel crépusculaire et les premiers prix répétés de la bourgade au concours de la meilleure patate. C’est dire !


On prend de la hauteur

Nous sommes maintenant à Squamish, un lieu de villégiature pour les habitants de Vancouver qui veulent s’aérer les poumons et l’esprit. Afin de les satisfaire, le tourisme « outdoor » est en pleine expansion, compensant ainsi pour la ville la fin de l’exploitation forestière qui l’a fait naître et vivre pendant deux siècles. On ne compte plus les sentiers de randonnées ou de VTT, les parcours d’escalade ou les via ferrata, les pistes de ski en hiver. On y pratique même le kite-surf sur le fjord qui relie Squamish à Vancouver et de là au reste du monde par voie maritime. Nous avons profité d’une belle journée ensoleillée pour emprunter la télécabine dénommée « de la mer au ciel » et nous laisser hisser sans effort jusqu’à 885 m d’altitude et de là parcourir plusieurs chemins de randonnée parmi les nombreux disponibles. Nous n’avons appris heureusement qu’au retour que des détraqués se sont attaqués à deux reprises au câble en 2019 et 2020, provoquant la chute des 30 cabines… A ce jour ils n’ont toujours pas été identifiés. Méfiants, les exploitants décrochent les télécabines du câble toutes les nuits et les raccrochent le lendemain matin. Quel boulot !


Le port de Vancouver

Il ne nous a pas laissé les mêmes souvenirs amers que ceux que chantait Véronique Sanson. Ni impérissables non plus. Le retour dans les villes après une phase nature est toujours un peu pénible. Les embouteillages, les feux rouges, la difficulté à stationner, les sirènes de police, les alignements de tentes de SDF dans les rues nous font regretter un instant d’avoir quitté les montagnes. Mais ce sont d’autres montagnes que nous trouvons ici, un hérisson de gratte-ciels se reflétant les uns dans les autres. Nous avons flâné dans le centre-ville et surtout sur le port où se croisent en toute insouciance apparente navires de croisière, cargos, ferries, petits hors-bords, voiliers et hydravions. Beaucoup de monde déambule sur les quais, mais l’ambiance est très décontractée. Une sorte de croisette ou de malecon version canadienne. Et au final, nos kilomètres de randonnée sur ces sentiers de béton, entre ces montagnes de verre, nous auront autant fatigués que dans les décors naturels !


La sirène en maillot de bain

En août de l’année dernière, nous nous arrêtions devant la célèbre Petite Sirène de Copenhague. Nous étions loin d’imaginer qu’un an plus tard nous en trouverions une copie presque conforme dans le port de Vancouver.

De loin, l’illusion est parfaite : même taille, même position assise genoux repliés, même situation sur un rocher un peu à l’écart du quai. De près, quelques différences apparaissent : vêtue d’un maillot de bain, notre sirène canadienne est également équipée d’un masque et de palmes. La raison en est que le Danemark défend fermement le copyright de son héroïne et poursuit systématiquement en justice toute tentative de copie. La ville de Vancouver, ne voulant pas risquer de perdre des plumes ou des écailles dans un procès, a contourné la difficulté en demandant à son sculpteur d’apporter discrètement mais sûrement sa touche personnelle. Et voilà le résultat !

P.S.Pour ceux qui ne se rappellent plus le rapport entre la petite sirène et le père noël, je vous renvoie vers cet article écrit en Finlande l’automne dernier.


Le canon de neuf heures

Rien à voir avec l’apéro. C’est juste l’histoire étonnante d’un canon installé sur le port de Vancouver en 1894 d’abord pour annoncer la fin de la pêche par un coup tiré à 18h chaque dimanche, puis pour synchroniser les horloges de la ville et des navires du port en détonnant cette fois ci quotidiennement à 21 heures précises. Et cela sans discontinuer jusqu’à encore aujourd’hui, soit plus d’un siècle d’activité.

Cette longue période n’a pas manqué de péripéties. Un jour, le propriétaire de la station-service flottante amarrée juste en face a retrouvé son enseigne perforée après qu’un petit malin eut jeté des pierres depuis la plage dans la gueule du canon pourtant protégé par un grillage. Une autre fois, il a été volé par les étudiants de l’université voisine pour être restitué ensuite après une demande de rançon au profit de l’hôpital pour enfants. Le canon a aussi été découvert un matin totalement peint en rouge. Il a connu aussi quelques décalages dans son déclenchement, soit en avance de 2 heures pour être synchronisé avec l’hommage aux soignants pendant la covid, soit au contraire en retard d’une heure suite à une mauvaise interprétation du passage à l’heure d’hiver. De quoi décontenancer la population ! Enfin, ce Canon de Neuf Heures a depuis 2012 un compte Twitter, où le message « BOOM ! » est envoyé chaque soir à 21h…

C’est sur ce coup de semonce inentendu (faute de déambuler tard sur les quais) que se termine notre séjour au Canada. Nous avons adoré le pays, la beauté et la variété de ses immenses espaces naturels, la gentillesse des gens, la sécurité, la francophonie du Québec. Nous sommes conscients de n’en avoir eu qu’une image partielle, notamment pour l’avoir traversé en période estivale. L’hiver doit être un tout autre monde, et nous prévoyons d’emblée de revenir un jour à cette saison. Ou alors un autre été pour découvrir des régions plus éloignées de la route transcanadienne, comme les Territoires du Nord-Ouest avec leur si jolie plaque minéralogique.

Vous retrouverez ci-dessous les liens pour déposer un commentaire, pour nous suivre sur Instagram ou encore pour vous inscrire sur la mailing. Vous trouverez juste après les cartes de notre parcours en Colombie Britannique, de la totalité de notre périple canadien (près de 11 000 km !) et même de tout le trajet depuis Mexico. A bientôt et merci de nous être fidèle(s)

73. Le pays de la rose sauvage

Transition entre la région des Plaines et celle des Montagnes Rocheuses, la province de l’Alberta a de quoi attirer les voyageurs avec ses multiples parcs naturels et les paysages à couper le souffle. Son économie principale repose toutefois sur l’agriculture, l’élevage et surtout la production de pétrole. Elle n’est rien moins que la seconde réserve mondiale de pétrole brut, derrière l’Arabie Saoudite. Corollaire pour nous, le diesel à la pompe est l’un des moins chers du pays, en moyenne 1,40 €. De quoi compenser les longues distances à parcourir. Soucieuse de son image, la province a choisi comme emblème sur ses plaques d’immatriculation non pas un puits de pétrole mais une rose sauvage.


L’indien (Walsh)

Le premier village que nous traversons en Alberta s’appelle Walsh. Apparemment, il n’y a rien à voir. Du moins lorsque l’on reste sur le plancher des vaches (ou le bitume des autoroutes dans une version plus moderne). Mais des gens dont c’est la passion de scruter les photos aériennes diffusées par Google Earth ont repéré la tête d’un indien, fort appropriée dans ce pays où les premières nations se battent pour préserver ce qui leur reste de leurs territoires. Tentez l’expérience vous-même en tapant les coordonnées géographiques 50.010611,-110.113422 sur le site ou l’application. Ou regardez simplement la copie d’écran ci-dessous.


Camping 4 (Medicine Hat)

Nous trouvons un coin sympa et plantons la nouvelle tente que nous venons d’acheter chez un marchand indien. Claudie m’aide à planter les piquets – remarquez leur alignement parfait ! – puis, pendant que je décore de quelques assiettes, ma chérie coud nos torchons et serviettes – oui, je sais, il ne faut pas mélanger mais nous n’avions pas trop le choix – pour réaliser la toile.

Bon, vous l’aurez compris, il s’agit d’une blague. Ayons un peu de respect pour le peuple Saami, en l’honneur duquel ce tepee géant a été construit pour les jeux olympiques d’hiver de Calgary en 1988, avant d’être déplacé ici. Peut-être qu’avec ses 65,5 de hauteur il faisait de l’ombre à la tour emblème de la ville ? (voir plus loin)


Défaut de piquant (Lethbridge)

Nous avons fait un détour pour nous rendre dans cette ancienne cité minière charbonnière, non pas pour les vestiges de cette activité, mais pour tenter d’apercevoir des porcs-épics accrochés aux arbres bordant le rivage de la rivière qui traverse la ville. Ce ne devait pas être la saison car aucun n’a montré le bout de ses épines. Nous nous sommes contentés d’admirer le grand viaduc ferroviaire en acier, unique en son genre dans le monde parait-il, et de nous rafraîchir dans la rivière peu profonde. Nous n’étions d’ailleurs pas les seuls en ce jour de canicule, l’activité la plus populaire étant de descendre le cours d’eau sur des bouées de toutes tailles et de toutes formes, du pneu de poids lourd à la licorne géante.


Bisons pas futés (Fort Macleod)

Entre voir ça dans des vieux westerns et être physiquement sur les lieux, cela fait toujours une belle différence. Nous sommes sur le site où il y a 4 800 ans les indiens Black Foot s’organisaient des festins de bisons en les précipitant en masse du haut d’une falaise. En fait c’était leur seul moyen de subsistance. Et la quantité de bisons tués ainsi d’un seul coup, plusieurs centaines parfois, servaient en totalité à nourrir un hiver entier ces populations autochtones.

L’exposition très bien faite nous montre comment les différentes tribus devaient mettre tous leurs moyens en commun pour réussir cette chasse spectaculaire qui nécessitait une coordination et des préparatifs minutieux. A l’aide de cairns, que les bisons évitaient les prenants pour des rochers peu franchissables, des couloirs étaient créés sur les hauts plateaux, menant à un point de chute précis. Certains chasseurs déguisés en bisonneaux attiraient les mères qui pensaient à un animal perdu. D’autres grimés en loups, créaient un état de tension permanent dans le troupeau, afin de déclencher le moment venu la panique finale.

Finalement, ces bisons ont couru à leur perte en se comportant comme des moutons.


Frank Slide Story (Frank)

Le nom de cette histoire rappelle un peu une comédie musicale connue. Mais la musique ici, dans la nuit du 29 avril 1903, ce fut plutôt un énorme roulement de tambour lorsqu’un pan entier de la Turtle Mountain s’effondra en 90 secondes sur la petite ville de Frank qui venait de s’installer imprudemment juste au-dessous. Bravant ainsi l’avertissement des sages indiens qui se gardaient bien, eux, de planter leurs tepees sous la « montagne qui bouge ». Mais l’attrait du travail dans la mine de charbon qui venait d’ouvrir était le plus fort. Et le propriétaire récent de la mine, M. Frank, assurait l’absence de tout danger. On connait la chanson. Elle s’appelle Frank Slide Story. 96 morts et un village rayé de la carte.

119 ans plus tard, nous découvrons la tragédie et les lieux. L’énorme plaie dans la montagne et l’immense coulée de pierres qui couvre les deux versants de la vallée semblent dater d’hier. Plusieurs dizaines de corps restent d’ailleurs ensevelis dans l’éboulis. On surveille désormais la Turtle Mountain comme un volcan, car ses roches très friables menacent de se libérer à nouveau, mais pour l’instant les scientifiques assurent que tout est calme. Comme M. Frank.

Un petit reportage est disponible ici :

Pour finir, nous avons passé la nuit près du site, en choisissant par prudence un emplacement sur le versant opposé et très haut situé. Un joli coin de forêt au milieu d’un troupeau de vaches. Vive la vanlife !


Dîner en ville (Calgary)

La plus grande ville de la province, qui semble avoir totalement oublié son passé olympique, est réputée cosmopolite, et c’est tout à fait en accord avec cet adjectif que nous avons abordé la ville avec une belle rencontre de voyageurs suisses, italiens et franco-canadiens, tous en fourgon aménagé. 3 Fiat Ducato et 1 Mercedes Sprinter que nous avons alignés sur le parking. Une riche et chaleureuse soirée d’échanges en a suivi. Pour certains, c’était une sorte de concrétisation de nos suivis respectifs sur les réseaux sociaux. Merci encore à Blanche et Marielle (@bm.aroundtheworld), Pierre et Pauline (@ras.supernova) et Alex et Serena (@chingonvanlife). J’ai mis les comptes Instagram pour ceux qui s’intéresseraient à leurs parcours de baroudeurs.

Nous avons parcouru en une journée cette ville moderne, dotée de gratte-ciels impressionnants et joliment dessinés, de passages piétons couverts au-dessus des rues, sans doute bien pratiques en hiver, d’intéressantes œuvres d’art urbaines, d’une tour caractéristique et d’un quartier chinois bien établi.


La petite boucle (Canmore)

La ville ça va un temps, nous nous en éloignons rapidement car les montagnes rocheuses toutes proches nous attirent. Nous avons commencé notre mise au vert par un parcours à vélo de 50 km aller-retour en fond de vallée. Très bien pour la mise en jambes, mais pas terrible pour le décor car, malgré les jolis sommets environnants, il longe en permanence l’autoroute. Les cinquante kilomètres aller-retour feraient bien sourire celles et ceux qui ont parcouru la grande boucle au début de l’été, mais ils étaient bien suffisants pour nous. Enfin surtout pour moi car, malgré l’absence d’entraînement depuis des années, j’avais choisi un peu hâtivement un vélo classique. Claudie, plus prudente ou moins téméraire avait renoué avec l’assistance électrique que nous avions testée avec bonheur l’hiver dernier à l’Île d’Yeu.


Les Rocheuses, enfin (Lake Louise)

Après avoir traversé des plaines interminables, nous sommes heureux de voir apparaître les reliefs des Montagnes Rocheuses. Et quels reliefs ! Des sommets aux contours acérés, dépassant couramment les 3000 mètres d’altitude, entrecoupés de glaciers et bien sûr des vallées et des lacs qui vont avec. La route que nous allons traverser, l’une des plus panoramiques de la planète d’après les canadiens – ça vaut ce que ça vaut – s’appelle d’ailleurs la Promenade des Glaciers. Le corollaire de cette nature d’une grande beauté, c’est que nous y avons retrouvé tous les touristes que nous pensions absents. La totalité du Canada semble avoir décidé de passer ses vacances ici ! Et le corollaire des hauts sommets, c’est que ça attire les nuages, et de fait le ciel s’est bien couvert depuis que nous sommes dans le coin.

Notre première étape sur l’Icefields Parkway (c’est la même route que ci-dessus mais les anglophones préfèrent l’appeler comme ça) est le Lac Louise. Randonner autour nécessite de se lever tôt, car le parking d’accès est souvent complet dès 7h30, et c’est encore pire pour le Lac Moraine son voisin dont le parking est clos vers 4h du matin ! Pour les non matinaux, une navette existe, mais il faut la réserver et elle était aussi complète dans notre cas. Pour les non matinaux riches, un service de limousine peut aussi vous emmener au parking. Comme Roberto voulait voir le Lac, nous avons fait un effort et sommes arrivés là-haut vers 6h30. Précaution qui s’est avérée inutile, le mauvais temps annoncé ayant dissuadé pas mal de randonneurs.

Nous avons fini notre nuit sur le parking et pris tranquillement un bon petit-déjeuner avant de nous lancer sur les sentiers à la découverte de ce magnifique lac couleur menthe glaciale. Les photos vous le décriront mieux que moi. Le paysage et le temps pas si désagréable que ça nous ont poussé à parcourir 14 km. Mais on n’est pas obligé d’en faire autant.


Sur la promenade des glaciers (de Lake Louise à Jasper)

Nous nous lançons enfin sur cette route panoramique prometteuse et, malgré un temps toujours un peu mitigé, on peut dire que nous ne serons pas déçus. Du grand spectacle pendant 232 km dans cette longue vallée glaciaire bordée de hauts sommets souvent garnis de glaciers. Des arrêts sont proposés régulièrement, soit pour simplement profiter d’un point de vue, soit pour parcourir une randonnée plus ou moins longue aboutissant sur un point d’intérêt. Parmi les meilleurs, citons :

  • le Lac Herbert, de couleur émeraude, bordé de sapins et reflétant parfaitement les montagnes ;
  • le Lac Bow, qui mérite bien son nom ;
  • le Lac Peyto, avec sa forme en tête de loup, sa couleur bleu turquoise et ses points de vue idéaux pour les selfies
  • le canyon de la rivière Mistayaque où la rivière qui sort du lac Peyto s’engouffre avec furie avant de cheminer calmement, blanche et sinueuse, le long de la vallée
  • le ruisseau Coleman, censé être un repaire à chèvres blanches des montagnes mais que nous avons raté car il n’était pas indiqué
  • la Muraille en Pleurs, une forteresse de roche ou suintent (pas trop fort le jour de notre passage) de multiples ruisseaux
  • le Glacier Athabasca, autrefois accessible dès le bord de la route mais qui se trouve maintenant très haut, reculant de 5 mètres par an, malgré tout encore accessible jusqu’à permettre de marcher dessus
  • et pour terminer cette première journée bien remplie, le petit camping de Jonas, où l’on s’installe et s’inscrit tout seul.

Choc thermique (Jasper et Miette)

La nuit dans le petit camping a été plutôt fraîche, et nous avons anticipé en mettant le chauffage dès le soir sachant que les températures nocturnes descendraient jusqu’à 1°C. Nous avons eu un peu pitié des quelques personnes qui dormaient ce soir-là sous la tente, les espérant néanmoins bien équipées. Grand ciel bleu le matin pour terminer la promenade des glaciers, ça embellissait encore les sommets. Quelques arrêts encore pour admirer d’impressionnants canyons et de tumultueuses cascades, et nous voilà arrivés à Jasper, le point ultime de cette belle route. Nous ne nous arrêtons pas pour autant, notre point de chute du jour étant prévu encore une soixantaine de kilomètres au nord-est de la ville. Il s’agit d’une sorte de village thermal où, entourés de quelques groupes de bungalows, quelques bassins emplis d’eau à 40°C accueillent les touristes du jour venus faire trempette. La source jaillit en fait à 55°C un kilomètre en amont, et nous sommes bien sûr, en thermalistes avertis, allés lui rendre visite, humer sa bonne odeur soufrée et même la goûter. Le chemin passe devant les anciens thermes bâtis en 1938, fermés pour cause de vétusté en 1984. Ici, contrairement à l’Europe, on s’intéresse peu aux vertus médicales de l’eau. La composition n’est en rien affichée et nous avons dû demander pour avoir une composition partielle. Et puis, après un rien d’hésitation, nous sommes allés nous immerger à la fois dans la foule et dans la piscine à 40°C. Nous étions vraiment bien après. Sûrement des vertus cachées à exploiter !


Last but not least (Jasper)

C’est notre dernier jour dans le Parc National de Jasper. Nous quittons de bonne heure le « camping de débordement » – un camping basique avec un minimum de services qui sert de dépannage lorsque les campings classiques sont pleins – de la Rivière Piégeuse (on se demande si c’est pour les poissons ou pour les campeurs) pour arriver avant 9h au parking de notre première randonnée du jour, comme nous l’a recommandé le centre des visiteurs du parc. Nous suivons une jolie route entre montagne et lacs, sur laquelle nous rencontrerons un troupeau de mouflons des Amériques, puis, après avoir garé Roberto, un sentier qui suit d’abord le Lac Maligne avant de s’enfoncer dans la forêt. Ce lac très encaissé est bien plus long que large, 22 km pour 1,5 km au maximum. Il est très touristique et l’ambiance entre queues-leu-leu de camping-cars monstrueux et cars de touristes nous gâche le plaisir. Nous leur laissons les petits bateaux de croisière et les canoës pour tenter de trouver notre bonheur un peu plus loin. Nous reprenons donc la route dans l’autre sens et là, c’est un ours qui traverse tranquillement la chaussée au milieu des voitures. Le plan B pour la randonnée sera le Canyon de la rivière Maligne, au bord duquel on chemine en observant les étroitures et les cascades. Jamais deux sans trois, c’est un cerf de Virginie qui se trouvera sur le bas-côté. 3 animaux sauvages effacent bien 300 touristes, dont très peu ont pu profiter du spectacle d’ailleurs.


C’est avec ce parc national exceptionnel que nous quittons la province de l’Alberta. Nous n’en avons pas fini pour l’instant avec les Montagnes Rocheuses. Nous allons voir à quoi elles ressemblent du côté de la Colombie Britannique. A très bientôt !

71. Traversée du Manitoba

Après les forêts et les lacs de l’Ontario, après la route de Thunder Bay à Kenora, nous abordons les plaines fertiles du Manitoba. D’immenses champs de blé alternent avec ceux de colza formant de superbes damiers jaunes et verts, entrecoupés de lacs. Il y en aurait plus de 150 000 dans cette province grande comme la France mais peuplée comme la moitié de Paris. Autant dire que nous ne la parcourrons pas en long et en large, mais seulement en travers, de sa capitale animée Winnipeg aux « sentinelles des prairies » d’Inglis.


La baie du tonnerre

C’est comme ça que se traduit en français le nom de la ville de Thunder Bay, située à l’extrémité nord-ouest de la partie canadienne du Lac Supérieur. Elle est née en 1970 du regroupement de deux villes plus petites, Fort Williams et Port Arthur et a peut-être été baptisée ainsi en hommage à la montagne sacrée des indiens Ojibwés, la « montagne du tonnerre » ou « thunder mountain ». Les anglais avaient alors préféré donner à la montagne sacrée le nom d’un commerçant en fourrures écossais, histoire d’effacer un peu plus la mémoire des autochtones.

Le Mont McKay est une sorte de cheminée des fées géante, que la coiffe rocheuse protectrice au sommet a protégée de l’érosion. Du coup le massif est maintenant 300m au-dessus de la vallée pour une altitude par rapport à la mer de 483m. Malgré les falaises, on peut gagner le sommet par un petit sentier bien escarpé. Mais la vue du plateau en haut récompense les efforts. C’est aussi devant cette montagne entourée de falaises, au bord d’une rivière assez fréquentée par les locaux, que nous avons garé Roberto pour y passer deux nuits.


Il y a deux siècles, l’activité dominante était la « traite », les indiens venant troquer les fourrures résultant de leur chasse dans le grand Nord contre des biens occidentaux (tissus, armes, ferblanterie, tabac, etc.). Les fourrures étaient ensuite acheminées par canoë jusqu’à Montréal. De là elles étaient expédiées sur de plus gros bateaux vers le monde entier. Toute cette activité se situait au Fort Williams où elle est aujourd’hui très bien mise en scène dans des bâtiments parfaitement reconstitués avec des acteurs costumés qui jouent leur rôle comme s’ils sortaient d’une machine à remonter le temps.



Faites-moi un signe

La poursuite de la route transcanadienne vers l’ouest va comporter de longs trajets où les forêts, les roches sédimentaires et les lacs se succèdent, tandis que les villes se font plutôt rares. Afin que le paysage, même splendide, ne risque pas de tourner à la monotonie, nous nous occupons. Notre activité principale est l’écoute de podcasts, souvent sur les sujets locaux mais pas toujours. J’aime bien aussi lire les panneaux sur le bord de la route. Ils peuvent annoncer des points d’intérêts non mentionnés dans nos guides, mais aussi informer sur les coutumes du pays, ou encore tout simplement donner le nom des voies de circulation. Un panneau indiquant sur ma droite « Yellow Brick Road » m’a tout de suite fait penser à cette chanson d’Elton John. Je n’ai pas eu le temps de le photographier, mais vous trouverez bien cette route sur Google Map du côté de Thunder Bay.

Mais toute occasion étant bonne à saisir, j’ai imaginé un petit jeu consistant à trouver des noms de rues jouant bien sûr sur les mots. Je vous en propose quelques-uns, saurez-vous en trouver d’autres ? Une image avec des panneaux vierges est à votre disposition, vous pouvez aussi metttre vos propositions en commentaires. Allez, soyez créatifs !


Orage ô désespoir

A l’approche de notre dernière ville ontarienne, Kenora, le temps devient orageux avec un ciel vraiment très sombre. Aurons-nous le temps de visiter cette cité touristique basée au bord du Lac des Bois ? Nous nous y aventurons, le parapluie à la main pour Claudie, mes jambes prêtes à courir en ce qui me concerne. En une heure de marche rapide, nous aurons un bon aperçu du centre-ville assez animé malgré le temps menaçant. Au final, le ciel sombre ne rend pas si mal sur certaines photos, mettant en valeur la couleur blanche du navire de croisière qui emporte son lot de touristes sur le lac ou de celle de la flotte d’hydravions plus prudemment restée ancrée au quai. En revanche, les autres clichés, comme celui du brochet géant de 12m de haut censé attesté de la qualité des eaux du lac, ou encore ceux des fresques murales, gagneraient à être plus contrastés.

Et puis la pluie nous a rattrapés. Aucune chance de voir un hydravion décoller devant Roberto. Nous avons repris la route, ça occupe… Avant de quitter l’Ontario, nous nous arrêtons pour la nuit sur une halte routière un peu en retrait de la transcanadienne. Comme d’habitude, il n’y avait que nous …et les moustiques !


Paysages urbains

Après plusieurs centaines de kilomètres dans une nature superbe parsemée de rares villages, nous arrivons dans la province du Manitoba, où se situe le centre longitudinal du Canada. En serions-nous pour autant à la moitié de notre périple canadien ? La suite nous le dira.


Nous arrivons assez rapidement à Winnipeg, la capitale de la province et 7ème ville du pays. Winnipeg, Manitoba, ça fleure bon les racines autochtones, non ? Après avoir traversé la banlieue, dans une circulation dense mais sans embouteillage, nous stationnons pour la nuit et probablement davantage sur le parking de la gare. Si celle-ci est étonnamment déserte, les trains ne manquent pas, transportant principalement des marchandises.


Nous retrouvons donc sans enthousiasme ces côtés négatifs de la ville : bruits en tous genres, des vrombissements des motos aux sirènes des ambulances en passant par les klaxons prolongés des trains, circulation rapide de gens pressés, mendiants ou personnes dans des états seconds, parkings payants, immeubles de béton rarement esthétiques, petit brin d’insécurité, etc.

Mais le positif domine avec les beaux bâtiments au charme suranné du quartier historique, le design des ponts et bâtiments publics, les sculptures au coin des rues, les fresques murales un peu partout, les accueillantes terrasses des cafés devant le « cube », une petite scène en plein centre-ville, un quartier français qui mérite de s’y arrêter, des beaux musées et bien sûr des boutiques qu’on ne trouve pas dans les villages de campagne. Et puis, cerise sur le gâteau, les moustiques semblent avoir déserté. Apparemment, une politique active de la ville en ce sens y serait pour quelque chose.

1. Le centre-ville et le quartier historique


2. La Winnipeg Art Gallery

On y trouve des oeuvres classiques bien sûr, mais ce musée présent depuis 1912 s’est spécialisé dans l’art Inuit et met en valeur parallèlement l’art Métis et ses magnifiques broderies de perles.


3. La cathédrale Saint-Boniface

Saint-Boniface, autrefois ville indépendante, est maintenant un quartier francophone de Winnipeg. Sa cathédrale de 1906 a été ravagée par un incendie en 1968, il n’en reste guère que la façade percée d’un trou béant à la place de la rosace, que l’on a choisi malgré tout de garder. Tout en reconstruisant une nouvelle cathédrale beaucoup plus moderne dans sa sobriété intérieure et le design de ses vitraux.


4. Parc de la Fourche

Il y a 6000 ans, les Premières Nations du Canada se sont installées là, au confluent de la Rivière Rouge et de la Rivière Assiniboine, pour profiter de terres fertiles, d’eaux poissonneuses et de bons moyens de communication avec les régions environnantes. L’état en a fait un lieu historique, l’a aménagé avec de nombreuses oeuvres d’art et y a édifié son Musée des droits de la personne (voir plus loin).


5. The Rolling Stones Unzipped

Cette exposition internationale sur l’inusable groupe de rock nous a consolés de ne pas être en France pour leur tournée mondiale actuelle. Histoire complète, costumes de scène, musicologie, graphisme des pochettes de disques, scénographie, vidéos grand format de concerts. Difficile d’entrer davantage dans les détails, mais vu que c’est international, peut être avez-vous ça à côté de chez vous si vous êtes fan.


Musée canadien des droits de la personne

C’est à Winnipeg une visite incontournable. Ce musée géré par l’état, très réussi architecturalement, a été bâti sur le site où les premières nations autochtones se sont installées avant de devoir gérer l’envahissement par le monde occidental. Même si leurs droits s’améliorent timidement d’année en année, nous sommes loin de l’égalité promue par la déclaration des droits de l’homme dont l’un des premiers rédacteurs était Canadien. Le musée aborde tous les aspects des droits de la personne, d’une manière universelle mais aussi sur ce qui touche particulièrement le Canada. Notamment la lutte pour les droits des autochtones, des femmes, des francophones, des travailleurs. On porte aussi un regard sans concession sur les abominations commises par le pays : déportation des acadiens, internement des canadiens d’origine japonaise, surtaxation des immigrés chinois, refus d’accueillir les juifs pendant la 2ème guerre mondiale, déplacement forcé des Inuits, génocide culturel des autochtones dont les enfants ont été enlevés pour être placés dans des orphelinats pour « effacer l’Indien qui était en eux ». Un étage entier est consacré aux génocides mondiaux, juif, arménien, rwandais, cambodgien, ukrainien, bosniaque et au racisme en général. Heureusement on développe aussi tous les moyens mis pour lutter contre tout ça. Nous y avons passé 4 ou 5 heures sans voir le temps défiler.

A propos du génocide physique et culturel des autochtones dans les pensionnats indiens, lire le bel article de France Info qui vient de paraître, à l’occasion de l’actuelle visite du pape au Canada, venu entre autres y réitérer les excuses de l’église catholique. Cliquez sur ce lien.


Déclarés revenus

Les pélicans blancs d’Amérique étaient en voie d’extinction il y a une vingtaine d’années, essentiellement parce que les humains détruisaient leurs lieux de nidification. Une fois ces zones protégées sur les rives du Lac Winnipeg, ils sont revenus, et en masse qui plus est, pour le plus grand plaisir de nos yeux. Nous les avons trouvés un peu par hasard, en étant garés pour la nuit juste au-dessus de leur plage favorite !


Chasse, pêche, traditions …et camping

Les Canadiens sont férus d’activités à l’extérieur, comme le camping, la chasse, la pêche, la randonnée à pied à vélo ou en kayak, etc. Et pas seulement l’été ! Alors ce magasin Cabela’s doit être leur paradis. Décoré d’animaux empaillés dans tous ses recoins, il semble répondre de A à Z aux besoins de chaque activité. Pour les chasseurs par exemple, outre l’équipement vestimentaire de base, on y trouve des affûts en tous genres, des animaux-cibles équipés de capteurs pour s’entraîner au tir, des appeaux pour toutes les proies possibles, des pièges à ours ou à renard, des sprays pour enlever sa propre odeur, pour en rajouter des trompeuses genre urine de coyote ou d’orignal, de la poudre pour voir d’où vient le vent (si si) et bien sûr toutes les armes possibles et les munitions qui vont avec. J’oublie les arcs, arbalètes et pistolets vendus sous blister. Pour ceux qui dépècent et cuisinent le résultat de leur chasse, des rayons entiers de couteaux, des outils à éviscérer, des machines à fabriquer les saucisses et des barbecues pour les faire griller combleront leur bonheur.


Gimli, capitale de la Nouvelle Islande

Le nom de cette petite ville n’a rien à voir avec le personnage de Tolkien. Il signifie tout simplement « paradis » en langue Viking, car c’est là que se sont installés en 1875 plusieurs centaines d’immigrants islandais, fuyant leur pays en pleine crise économique suite à une éruption volcanique. Le gouvernement a mis à leur disposition des terres sur les rives du Lac Winnipeg. Un petit musée raconte les difficultés des premiers arrivants, la façon dont ils ont bâti toute une vie à partir de zéro, la malchance d’avoir perdu un tiers de leurs effectifs en raison d’une épidémie de variole la 2ème année, puis le développement progressif de la ville, l’intégration choisie au gouvernement Canadien qui leur avait pourtant laissé beaucoup d’autonomie, l’ouverture à d’autre communautés par la suite, ukrainiennes et polonaises en premier. De quoi nous faire réfléchir les jours où l’on trouve sa propre vie difficile.


Le planeur de Gimli

La ville est aussi célèbre pour l’atterrissage d’urgence en 1983 d’un Boeing 767 d’Air Canada sur une piste militaire désaffectée, à la grande surprise des festivaliers qui s’y étaient rassemblés pour suivre une course de dragsters. La surprise était d’autant plus grande que l’avion est arrivé dans un silence total, tous moteurs coupés, en panne sèche en fait. Une bête erreur de conversion de litres en livres. Tout le monde s’en est sorti heureusement. Je vous invite à lire l’histoire en détail ici.

L’expression « to pull a Gimli glider » est depuis utilisée au Canada pour dire « faire une erreur spectaculaire et embarrassante ». Ça fait une belle jambe aux passagers !


Pas que sous les ponts

L’eau est partout ici, ou presque. Elle couvrirait 10% de la surface de la province du Manitoba (contre 0,5% de la France) et plutôt à un niveau assez élevé, ce qui embellit les paysages mais nous cause quelques petits problèmes de fermetures de sentiers de randonnées. C’était le cas pour le parc provincial d’Hecla, dans lequel nous avons simplement dormi et circulé, mais les deux chemins que nous avions envisagés de suivre étaient bloqués par l’eau.


Le lendemain, après un petit tour en voiture jusqu’au bout de la presqu’île, nous avons roulé jusqu’au parc national des Riding Mountains. Pour les mêmes raisons de hautes eaux, la moitié des randonnées étaient inaccessibles, y compris celle qui traversait un parc de bisons, quel dommage. Heureusement, nous avons pu trouver notre bonheur dans les parcours qui restaient. Une jolie balade dans une forêt de bouleaux puis de pin qui s’est terminée sur le ponton d’un petit lac.


Camping 2

Rassurez-vous, je ne vais pas vous raconter le film, encore que ce pourrait être drôle étant donné que je ne l’ai pas vu. Je voulais juste vous parler de notre seconde nuit en camping depuis le début de notre circuit au Canada fin mai, ce qui nous fait une moyenne d’une nuit par mois. Et c’est généralement parce que nous ne pouvons pas faire autrement. La première fois, c’était à Percé en Gaspésie. Toutes les villes de cette côte très touristique interdisaient le stationnement nocturne, même sur des parkings ordinaires. L’exceptionnel camping sur la falaise devant le rocher percé et les baleines nous a rapidement convaincu de ne pas chercher très loin un emplacement ce jour-là. Et aujourd’hui, le motif principal est le remplissage de nos réservoirs d’eau. La plupart du temps, c’est assez facile de trouver de l’eau, mais là, avec les villes très éloignées les unes des autres, nous arrivions au bout de nos 200 litres. Les campings au Canada sont pourtant en général plutôt cool, avec des emplacements spacieux, relativement privatisés, et quasi toujours munis d’une table de pique-nique et d’un barbecue. Pour un prix raisonnable, entre 25 et 50 € dirons-nous. Le problème avec les campings, ce sont les voisins. Ils sont pour la plupart du temps discrets ou agréablement causants, mais il y a toujours le risque d’avoir un entourage bruyant (conversation, musique, enfants, etc.) ou d’être sous le vent des odeurs des barbecues, qui servent là-bas dès le petit-déjeuner. Nos premiers critères pour le choix d’un stationnement nocturne sont 1°) le calme, 2°) la situation par rapport à nos activités du lendemain et 3°) la vue. Nous réussissons la plupart du temps à conjuguer les trois.


Les sentinelles des prairies

C’est par cet alignement étrange de hautes bâtisses de bois que nous terminons notre traversée du Manitoba.  On dirait de grands moulins sans ailes, mais on n’y meulait pas les céréales qu’on leur confiait, on les y stockait. Car ce sont des élévateurs à grain, installés là à partir de 1880 pour simplifier le transport des récoltes qui se faisait jusqu’ici uniquement par sacs transportés à dos d’homme. Le grain apporté par les agriculteurs était déversé au sol dans une trémie puis hissé à plus de 20m de hauteur grâce à une courroie munie de godets. De là, il était réparti à l’aide de tuyaux mobiles dans l’une des 16 cellules de stockage. Lorsque le moment du transport était venu, la cellule était vidée dans un camion sur la route devant ou dans un wagon sur la voie ferrée à l’arrière. En 1953, 260 élévateurs de ce type étaient en fonctionnement au Manitoba. L’arrivée des silos en béton puis en inox a conduit peu à peu à leur déclin. Ceux d’Inglis ont heureusement été restaurés pour préserver la mémoire de ces « sentinelles des prairies ».


Et, voilà, à l’heure où vous lirez ces lignes, si vous n’êtes pas trop en retard par rapport aux publications, nous serons dans la province peu prononçable de la Saskatchewan, dont la plus grande ville s’appelle Saskatoon. Peut-être la patrie de Roger Rabbit ? Merci de nous lire et à bientôt !

70. Un lac vraiment supérieur

Depuis North Bay, nous longeons le Lac Nissiping dont je n’avais jamais entendu parler auparavant alors qu’il est pourtant 1 fois et demie plus grand que le Lac Léman, le plus grand d’Europe. Mais ce joli lac devient ridicule dès que l’on parvient un peu plus loin au Lac Supérieur, 94 fois plus grand que le Lac Nissiping… De Sault-Ste-Marie à Thunder Bay, il va nous falloir plus d’une semaine pour parcourir sa rive canadienne d’est en ouest. Mais commençons par là où nous nous étions arrêtés.


Diogénial ?

Tout à fait par hasard, nous sommes passés à North Bay devant cette maison étonnante, accumulant à l’excès (et le mot est faible) une foule d’objets hétéroclites, à mi-chemin entre le pop’art et la déchetterie. Le propriétaire, Daniel Séguin, explique sur YouTube, comment il a constitué cette collection depuis 25 ans, en hommage à son père qui poussait loin la décoration de Noël devant sa propre maison et lui demandait d’observer avec lui la réaction des passants : « Regarde, je leur ai donné de la joie ! ». Daniel a lui-même commencé son œuvre au moment de Noël, avant de l’enrichir au fil des fêtes suivantes. Il revendique vouloir embellir la ville et attirer des touristes, mais naturellement cela ne plait pas toujours à ses voisins ni à la ville qui lui a intenté plusieurs procès. Mais la collection poursuit sa croissance, à tel point que notre artiste, manquant de place, a dû acheter la maison voisine. Avec un voisin comme lui, le prix avait peut-être chuté. Gageons qu’il finira par acquérir tout le quartier. Il s’est d’ailleurs présenté aux dernières élections municipales, c’est un signe !


La côte publique

Nous suivons pendant une journée la rive nord du Lac Huron. Une jolie route côtière peu urbanisée qui nous fait réaliser à quel point nos routes françaises sont éloignées des plans d’eau dont les abords sont largement privatisés. Il semble ici que la nature soit privilégiée, règlementairement du moins. Pour le plaisir de nos yeux.


Loon et thune

La petite ville d’Echo Bay est fière de son résident célèbre, Robert-Ralph Carmichael et le fait savoir en arborant une réplique géante du premier dollar canadien, dont il a dessiné la gravure en 1986. L’esquisse du peintre n’avait pourtant été retenue qu’en seconde position au concours organisé par la Monnaie Royale Canadienne. Mais le moule de l’œuvre initialement choisie ayant été perdue lors du transport, pour ne pas courir de risque de contrefaçon, c’est le canard de M. Carmichael qui a été finalement reproduit à des milliards d’exemplaires. La pièce a été surnommée « huard » par les francophones (l’espèce de ce canard plongeur présent partout au Canada) et « looney » ou « loonie » par les anglophones, loon étant la traduction de huard. La statue d’Echo Bay, reposant sur un piédestal en pierres locales, a également été réalisée par le peintre. On n’est jamais si bien servi que par soi-même !


P.S. Le huard aurait le cri d’un fantôme. A vous d’en juger en l’écoutant ci-dessous :


Le lac de tous les superlatifs

Depuis la petite ville de Sault-Ste-Marie, nous avons commencé à longer le Lac Supérieur. La rive d’en face s’écarte rapidement pour disparaître bientôt à l’horizon et le lac se présente alors dans toute son immensité, cumulant les records :

  • C’est le plus grand lac d’eau douce du monde, avec ses 82 000 km², soit le double de la surface de la Suisse par exemple. S’il vous prend l’envie d’en faire le tour, le sentier qui le borde dépasse les 4 000 km, bon courage !
  • C’est le plus profond des Grands Lacs, atteignant un maximum de 406 m. Car il est né d’un rift, c’est-à-dire de l’éloignement de plaques tectoniques. Son fond initialement abyssal et en fusion a été peu à peu recouvert de sédiments.
  • Contenant 12 billiards de litres, il représente à lui seul 10% des réserves d’eau douce en surface de la planète. Le Canada est par ailleurs le pays du monde qui a la plus grande réserve d’eau douce par habitant, soit plus de 78 000 m3/habitant/an, contre 3 247 pour la France. Cela explique peut-être qu’ils boivent un peu moins d’alcool que nous ?
  • C’est le plus froid des Grands Lacs, avec une température moyenne à sa surface de 4,4°C. Les moins frileux pourront toujours s’y essayer à la baignade au mois d’août lorsqu’il culmine à 14,5°C.

L’oie de Wawa

Pour les jeunes ou moins jeunes qui ne connaîtraient pas le sketch culte « Ouï dire » de Raymond Devos, retrouvez-le en cliquant sur ce lien. Ce pourrait être ici à Wawa que, comme dans l’œuvre de notre humoriste national, « l’oie de Louis a ouï ce que toute oie oit ». Le nom de la ville a été attribué par les Obijwés, une des premières nations du Canada et signifie « pays de la grande oie ». Quoi de mieux pour le promouvoir que d’ériger cette grande statue de 8,5m de hauteur, bien visible de l’autoroute et invitant les touristes à en sortir pour visiter la ville. A noter que le volatile initial, installé en 1963, a dû être remplacé en 2017 en raison de la rouille qui le rongeait et du risque conséquent d’effondrement sur un ou plusieurs des 60 000 visiteurs venus partager un selfie avec lui. 300 000 dollars canadiens ont été dépensés pour l’opération, soit 150 dollars du kilo pour cette statue de 2 tonnes. Contre 4 dollars le kilo pour la précédente. Quand on vous dit que la viande coûte de plus en plus cher !


Erratum

La version ci-dessus est celle de nos guides et d’un recoupement de plusieurs sites Internet dont Wikipédia. Après l’avoir écrite, en triant mes photos, je relis attentivement le texte des pancartes apposées par la ville sous la statue. Pour la petite histoire, je ne les ai pas lues immédiatement car nous subissions une attaque en règle de moustiques, j’ai juste dans un premier temps photographié les informations pour les lire à l’abri de nos moustiquaires. Ces pancartes nous apprennent que si le nom « wawa » a bien été attribué par les Objiwés, il signifiait « sources d’eaux claires ». Rien à voir avec les oies donc. Le mot aurait été mal traduit par les premiers européens arrivés sur place et confondu avec « wewe » qui signifie « oie sauvage » dans la langue indienne, et qui collait somme toute assez bien à cette ville située sur le point de passage de la migration saisonnière des oies entre la baie d’Hudson et le sud-ouest des États-Unis. Lorsque la construction d’une statue a été décidée pour l’inauguration du dernier tronçon de la route transcanadienne en 1960, c’est bien l’oie qui a été choisie par les officiels pensant que l’oiseau était la vraie origine du nom de la ville, faisant bien rire les locaux qui connaissaient la vérité. Cette première statue, faite de plâtre appliqué sur une armature en grillage, n’a tenu qu’un an face au climat rude de la région et a de l’être remplacée en 1963. L’oie actuelle est donc la 3ème œuvre et non la seconde. Comme quoi il faut toujours vérifier ses sources et n’accorder qu’une confiance limitée à Wikipédia.


Chute, on dort !

Ce n’est pas Niagara mais on peut se garer et passer la nuit au pied des chutes Magpie High Falls, près de Wawa, et nous ne nous en sommes pas privés. Nous avons pu observer en soirée l’eau qui déferlait sur 38 m de large et 23 m de hauteur, dans un vrombissement qui, pensions-nous, nous bercerait la nuit. Eh bien nous n’avons pas entendu grand-chose, attribuant cela à l’efficacité de l’isolation sonore de Roberto. Mais au petit matin, il fallut se rendre à l’évidence devant le pipi de chat qui s’écoulait alors devant les rochers : les chutes avaient été coupées pendant la nuit ! Le débit reprenant toute sa vigueur une heure plus tard, nous pouvions imaginer qu’une sorte d’extinction des feux avait été mise en place par la ville pour permettre à ses visiteurs de passer une nuit tranquille. Mais l’explication la plus probable est davantage liée aux manœuvres d’une usine hydro-électrique placée en amont pour réguler sa production d’énergie.


C’est une fille !

J’aurais pourtant parié que l’ourson le plus célèbre de Disney était de sexe masculin. Heureusement, de passage dans sa ville natale de White River, j’ai pu me rendre compte de mon erreur : Winnie était bien une oursonne. Elle a été vendue par un trappeur à un vétérinaire de cavalerie canadien provenant de Winnipeg et en partance pour Londres au tout début de la 1ère guerre mondiale. Affecté sur le front français, celui-ci a préféré laisser son oursonne au zoo de Londres. On laissait apparemment jouer quelques enfants avec, dont le jeune fils d’un écrivain qui baptisa ensuite ses peluches du nom des animaux du zoo. Le père, Alan Alexander Milne en a tiré l’histoire que vous connaissez en 1926 et que les studios Disney ont adaptée bien plus tard. Le vétérinaire est retourné vivre au Canada sans récupérer son ourse. On ne sait pas s’il a eu connaissance du roman tiré de cette histoire.


Quatre pour le prix d’une

Les rives canadiennes du Lac Supérieur, déjà majoritairement en zones naturelles, comptent en outre 7 parcs naturels protégés, dont 6 sont gérées par la province de l’Ontario et 1 par l’état canadien. C’est ce dernier que nous sommes allés voir, guidés essentiellement par la clémence de la météo. Il s’agit du Parc National de Pukaskwa, une immense réserve qui ne compte que 4 km de routes pour une surface de 1 878 km². Écartant d’emblée le sentier côtier et ses 65km et sa version en canoë de longueur identique, écartant aussi les descentes en canoë sur les rapides qui sont assez techniques et se font sur plusieurs jours, nous nous penchons sur les randonnées qui entourent le centre d’accueil des visiteurs. Incapables de choisir entre les 4 parcours proposés, nous décidons de les suivre tous. Et nous ne regretterons pas notre choix car cette balade d’un peu plus de 8 km nous fera passer par des zones très variées, aussi bien des chemins forestiers ou lacustres munis de passerelles en bois aux endroits délicats que des parcours sur des rochers au sommet de petites falaises en passant par des plages aussi couvertes de bois flotté que pauvres en visiteurs. Un fait notable est l’absence de toute signalisation directionnelle à l’exception des départs ou croisements de sentiers. Aucune trace de peinture ne souille ainsi les roches ou les arbres. Nous avons parfois hésité sur la route la route à suivre, mais sans jamais nous perdre. Un grand bol d’air dans cette région magnifique. A noter le droit d’entrée modique, un peu moins de 5 € pour la journée, que l’on suive le sentier de 65 km ou bien le plus court qui n’en fait qu’un.


La route transcanadienne

Nous venons de passer le point médian de cette longue route qui traverse le Canada de part en part, 8 000 km pour aller d’Est en Ouest, du Pacifique à l’Atlantique, de Victoria en Colombie Britannique à St Jean à Terre-Neuve-et-Labrador. Il s’agit de la plus longue route nationale au monde après ses deux aînées que sont la route péri-australienne (15 800 km !) et la route transsibérienne (11 000 km). Plus de la moitié est encore la simple route à 2 voies d’origine (le dernier tronçon a été terminé en 1970) qui traverse des centres-villes ou serpente, étroite, entre des chaînes montagneuses. Petit à petit, on la transforme en autoroute, mais ce n’est le cas pour l’instant que de 15% de son trajet. Elle traverse les 10 provinces du Canada et 6 fuseaux horaires. Il faut conduire non-stop pendant une semaine pour la parcourir en entier. Heureusement, 2 nécessaires traversées en ferry permettent de souffler un peu !

Mais nous ne la suivrons pas de bout en bout parce qu’elle ne relie pas tout ce que nous voulons voir au Canada. Par ailleurs nous avons prévu 4 mois pour ce pays, cela devrait être suffisant.

En illustration, vous trouverez la carte officielle du trajet avec ses différentes branches, quelques photos de la zone montagneuse que nous venons de traverser, et puis quelques clichés que je n’arrive pas à caser ailleurs.

Si l’histoire vous intéresse, vous trouverez un reportage sur cette page


Ainsi se termine ce joli parcours le long des rives du Lac Supérieur, parmi les plus beaux paysages que nous avons traversés avec la Gaspésie. Nous n’en avons pas fini pour autant avec l’Ontario, province qui absorbe à elle seule un quart de la route transcanadienne. Comme le dit sa devise : « Il y a tant à découvrir »

69. Bonjour (au revoir) Québec

Du zoo sauvage de St Félicien aux rives du lac Témiscamingue, des mines d’or aux mines de cuivre, des longues forestières du nord aux zones agricoles colorées du sud, nous profitons jusqu’au bout de cette fin de parcours au Québec dont la francophonie si particulière et la gentillesse des gens nous auront enchanté. Nous laisserons le qualificatif « libre » à De Gaulle mais nous pouvons dire sans hésiter : vive le Québec !

Des humains pour distraire les animaux

C’est un peu la philosophie de ce « zoo sauvage de St Félicien ». Préserver un gros bout de nature avec forêts, prairies, rivières, etc. pour y placer en demi-pension (certains repas sont fournis, d’autre pas) des animaux adaptés au climat du coin. Et pour que les animaux ne s’ennuient pas, on met des grappes d’humains dans des cages et on fait circuler ces cages pas trop loin d’eux. Certes, le concept n’est pas unique, mais il correspond bien à notre façon d’aller à la rencontre des animaux. Si un gorille me tendait une banane, j’en serais ravi… Alors nous sommes montés dans la cage et avons suivi le parcours imposé en guettant la faune qui décide ou pas de se montrer. Les bisons et les ours, peu farouches, longeaient volontiers notre petit train sur roues. Les chiens de prairie, très curieux, semblaient guetter notre passage debout sur leurs terriers. Les autres animaux aperçus (loups gris, cerfs de Virginie, caribous, semblaient quant à eux indifférents, poursuivant leur sieste ou leur rumination, y compris à ma grande déception ce grand orignal se désaltérant au bord du lac, cachant ainsi ses bois typiques et magnifiques. Une partie du zoo, plus classique mais avec tout de même de grands enclos, nous a permis d’observer d’autres espèces de la région boréale. Je vous en mets quelques-unes en photos et vous propose après un petit quiz. Oui oui, déjà !

Et voici donc le quiz :

1°) Comment appelle-t-on le petit du bison ? A. un bisonneau ? B. un bisonnet ? C. un bisounours ?

2°) Comment dit-on « bison, iciparvient » en verlan ?

3°) De ces 3 affirmations sur le castor, laquelle est juste ? A. son petit s’appelle le castor junior ; B. l’huile de castor provient de sa glande anale ; C. il mange ses excréments

4°) Comment appelle-t-on le petit du chameau ? A. un chamelet ? B. un chamelon ? C. un chamaleau ?

5°) Comment appelle-t-on autrement le carcajou ? A. le glouton ? B. le gulo gulo ? C. la belette boréale ?

Réponses à la fin du paragraphe suivant


La grande traversée

A la sortie de St Félicien, le panneau est clair : prochaines stations-services à 1 puis 249 km. Nous vérifions la jauge, respirons un bon coup puis nous nous engageons dans cette traversée des régions du nord du Québec qui nous fera monter un peu au-dessus du 49ème parallèle. Un peu plus de 600 km prévus jusqu’à Val d’Or, pas forcément dans la journée car nous sommes autonomes. Une route au revêtement tout à fait honorable – je m’attendais éventuellement à de la terre, peu fréquentée, bordée de jolies fleurs multicolores, qui fend un paysage de type taïga avec forêt dense et nombreux lacs. Deux ours noirs nous feront l’honneur de leur brève apparition. Deux petites villes rompront la monotonie du paysage, ainsi que de rares maisons isolées qui interrogent sur les motivations de leurs occupants. Les zones d’habitation représentent 0,5% de la surface de la région administrative du Québec dans laquelle nous venons d’arriver, et qui porte le nom tout simple d’Abitibi-Temiscamingue. Je vous laisse le soin de dénicher sur Internet le gentilé tout aussi savoureux. Après 500 km, nous trouvons une petite aire aménagée – parking + toilettes sèches + rampe à bateaux – au bord d’un lac et décidons de nous y arrêter pour la nuit. Tout au long de cette belle route tranquille, nous avons écouté les 8 épisodes d’un balado relatant l’histoire d’un québécois ayant, à l’aide de son petit avion, saboté les lignes haute-tension et plongé dans le noir une grande partie de la région. Si comme nous vous avec envie de vous immerger dans la langue québécoise, le lien est ici. Au fait, un balado est l’appellation locale d’un podcast.

Réponses au quiz du paragraphe précédent : 1.A ; 2.Zombi, vient par ici ; 3.C ; 4.B ; 5.AB


Un ménage juteux

Nous sommes ici à Val d’Or, célèbre pour sa mine aurifère exploitée de 1935 à 1985, ce qui est plutôt long pour une mine d’or. C’est parce que le minerai était particulièrement riche, permettant d’extraire 6,3g du précieux métal par tonne. Tout le processus de fabrication, de l’extraction au coulage des lingots est expliqué de façon démonstrative. On entre d’abord dans les entrailles de la mine après avoir décroché sa tenue de la « salle des pendus » et s’être équipé de casque, lampe et ceinture. D’abord dans un chariot motorisé d’époque circulant dans des boyaux étroits où il faut régulièrement baisser la tête pour ne pas accrocher le plafond, puis à pied dans les galeries sombres et humides. Tout est bien sûr émaillé de petites anecdotes, notamment sur la façon dont les ouvriers tentaient de ramener quelques morceaux de minerai en les cachant dans le seul objet qu’ils avaient le droit d’emmener et de ramener : leur savon. Mais le meilleur est pour la fin : à la fermeture de l’usine, une entreprise spécialisée a été chargée de faire le ménage en récupérant entre autres la moindre particule de poussière piégée dans les coins ou derrière les radiateurs de la salle de broyage. Un ménage qui a rapporté gros une fois l’or extrait de cette poussière : pas loin de 900 000 dollars canadiens, soit près de 670 300 euros !


Le zoo paralympique

Rien à voir avec le zoo sauvage évoqué précédemment : ce refuge accueille bien des animaux sauvages, mais pas ceux genre le petit panda roux tout mignon qui attire les enfants et augmente les ventes de peluches dans la boutique. Il est destiné aux éclopés, aux tombés du nid, aux victimes de chauffards, aux amputés d’une patte ou d’une aile, aux bébés devenus orphelins grâce au chasseur qui a tiré sur leur mère. Tous les pensionnaires ici ont une histoire, décrite sur la pancarte devant leur cage ou leur enclos. Certains sont là temporairement, le temps de se retaper ou de se sevrer avant d’être relâchés dans la nature. D’autres sont hébergés au long cours, incapables de vivre sans assistance humaine, parfois à cause des premiers contacts humains justement (si vous rencontrez un animal en difficulté dans la nature, prévenez les autorités mais surtout n’y touchez pas). ). Ce fut en tout cas une visite touchante, dont nous vous rapportons quelques portraits.


Dyn-Amos

Nous étions venus à Amos pour le Refuge Pageau et ses animaux handicapés. Quitte à être là, nous avons poussé jusqu’au centre-ville pour en respirer l’ambiance. Nous nous sommes présentés à l’office du tourisme, aussi fleuri qu’accueillant et riche en renseignements. De nombreuses activités insoupçonnées sont proposées par la ville, si dynamique que je leur aurais bien proposé le slogan ci-dessus, mais qui n’est pas de si bon goût. Le seul vrai bon goût est celui de l’eau de la ville, qui serait la plus pure du monde grâce à son système de filtration naturel par des moraines glaciaires qui contiendrait parait-il aussi des diamants. Jetez un œil si vous voulez sur les multiples attractions de la ville. Limités par le temps pluvieux, nous nous sommes contentés de la cathédrale, de la maison Hector-Authier (un notable qui a quasiment mis en place toute la région), et le centre d’exposition tout aussi moderne que gratuit où nous avons visionné des documentaires sur l’histoire de la région en réalité virtuelle et une exposition sur le thème du voyage en réalité augmentée. Dynamique je vous dis !


Mauvaise mine

Rouyn-Noranda est la capitale de la région de l’Abitibi-Témiscamingue. Désolé pour les noms, mais je peux tout expliquer. Rouyn et Noranda sont deux villages fondés en 1926 sur le site d’une mine de cuivre fraîchement découverte. Rouyn est le nom d’un militaire lorrain s’étant illustré lors de la dernière bataille des franco-canadiens contre les anglais. Noranda résulte …d’une erreur d’imprimerie : elle devait s’appeler NordCanada. Les 2 villes ont fusionné, tout comme le cuivre qu’elles produisent, en 1986.

Abitibi et Témiscamingue, c’est à cause des Cris. Désolé pour les noms mais je peux tout expliquer. Les Cris font partie des premières nations du Canada, et à ce titre ils ont eu le loisir d’appeler les montagnes, les forêts et les lacs comme ils voulaient. Et justement, Abitibi et Témiscamingue sont les noms de deux importants lacs de la région, le « lac du milieu » et le « lac sans fond » en langue crie, vous devinez pourquoi.

Quant aux Cris, leur nom est le diminutif de l’appellation française du village Kenisteniwuik. Désolé pour le nom mais je peux tout expliquer, mais plus tard parce que ce n’est pas le sujet.

A Rouyn-Noranda se trouve donc une importante mine, qui produisait principalement du cuivre, mais aussi de l’or et de l’argent. Aujourd’hui l’extraction a cessé, seule la fonderie fonctionne, notamment en recyclage. Le problème c’est qu’elle laisse échapper de l’arsenic par ses grandes cheminées. Une étude récente, qui retrouve un taux plus élevé qu’attendu de cancers du poumon dans la ville, fait actuellement polémique dans les médias. L’usine serait menacée de fermer si elle ne réduit pas ses taux.

Je me demandais aussi pourquoi la visite était gratuite… En fait nous avons tout de même tenté d’y aller, mais, selon les agents d’accueil qui n’avaient pas si mauvaise mine, ça reste fermé aux visiteurs depuis la crise sanitaire. Oui mais laquelle ?

Rouyn-Noranda possède tout de même quelques atouts :


Pause magasinage

En guise de trou normand, entre deux chapitres, voici quelques trouvailles repérées en allant « magasiner », c’est-à-dire faire nos courses. D’abord une sélection de fromages un peu surprenants, puis quelques boissons qui ne gagnent probablement pas à être bues. Enfin à vous de voir !


Au temps de la traite des brunes

Oui des brunes, parce que les fourrures d’ours blancs ne faisaient pas partie a priori de ce commerce appelé « la traite » aux 17è et 18è siècle. C’est au Fort Témiscamingue, bâti au bord du lac éponyme par les Français en 1720 que tout cela se passait.

La position géographique était idéale. Les indiens Algonquins y venaient depuis la baie d’Hudson vendre les peaux de phoques, de loutres, de visons et de castors que les « voyageurs » d’origine européenne transportaient ensuite à Montréal. Dans les deux cas, le transport se faisait sur des canoés en écorce de bouleau, lors de navigations exténuantes de 25 jours sur des rivières tumultueuses.

Le site très pédagogique montre en détail la fabrication de ces embarcations, la vie des gens dans ce fort qui n’avait rien de militaire. De nombreuses maquettes et personnages à l’échelle permettent de mieux se rendre compte, et des animateurs, le plus souvent des jeunes en job d’été, sont là pour répondre aux questions.

J’ai eu l’occasion d’essayer un chapeau haut de forme en fourrure de castor. Nous avons apprécié aussi la balade dans la « forêt enchantée », où après l’abattage de presque tous les pins pour la construction des maisons du fort, des jeunes pousses de cèdres les ont remplacés, en prenant cet aspect tordu encore inexpliqué.

Un seul bémol : la rareté des visiteurs alors que nous sommes en haute saison touristique. Ce n’est pourtant pas le prix d’entrée qui freine les visiteurs (3,50€), alors où sont-ils ? Et cela concerne la totalité de notre parcours récent : alors que nous nous attendions depuis le début des vacances scolaires à rencontrer des difficultés pour accéder aux lieux touristiques ou pour nous garer, il n’en est rien : les attractions ne sont guère plus fréquentées qu’en juin, les parkings sont facilement accessibles le jour et nous sommes la plupart du temps seuls sur nos lieux de stationnement nocturnes. C’est tant mieux pour notre tranquillité, mais cela pose question.


Bonjour le Québec

Autant vous dire tout de suite, si vous avez bien suivi, « bonjour » en québécois s’emploie pour dire « au revoir ». Nous venons donc de terminer notre parcours québécois et quittons la province avec regret. Nous y avons été particulièrement bien accueillis, et nul doute que la francophonie a beaucoup aidé. Et puis quelle francophonie ! Nous avons adoré entendre parler les Québécois. Un langage coloré, imagé, avec des tournures dont certaines rappellent le passé tandis que d’autres au contraire apparaissent terriblement modernes dans leur lutte active contre la dominance de l’anglais. Les meilleurs exemples sont la francisation des enseignes KFC et Starbucks Coffee, devenues respectivement PFC (Poulet Frit du Kentucky) et Starbucks Café. Mais nous en avons découvert beaucoup d’autres, qui nous font réaliser que nous autres Français nous nous sommes complètement laissés envahir. C’est ainsi que nous avons écouté des balados, déjà évoqués au début de l’article, que nous ne nous étonnons plus lorsqu’on nous propose de taper notre code NIP (1), lorsque des sites Internet nous demandent d’accepter des témoins de navigation (2) ou quand un préposé d’accueil veut nous remettre un pamphlet (3). Nous savons maintenant ce qu’il y a derrière les portes des salles de bains (4) ou des vidanges (5), et ce que récoltent régulièrement les gens à la cueillette (6) des supermarchés. Nous disons désormais « pour dîner (7) » en nous présentant à un restaurant vers 13h, nous demandons la facture (8) à la fin du repas et nous ne prendrons surtout pas le risque de choquer quelqu’un lui demandant s’il (elle) emmène ses gosses (9) en vacances.

Pour ceux qui aimeraient en savoir plus, ou pour notre ami Yann qui vient de s’installer à Montréal, vous pourrez trouver ici un lexique assez détaillé des mots ou expressions québécoises les plus usitées.

(1) code PIN, (2) cookies, (3) dépliant ou flyer, (4) WC, (5) poubelles, (6) pick-up, (7) petit-déjeuner, car à midi au Québec on dîne et le soir on soupe, (8) addition, (9) testicules


En franchissant la rivière des Outaouais, nous sommes passés dans la province de l’Ontario. Même si le Français reste l’une des deux langues officielles, il n’est plus parlé ici que par une minorité de la population. Autant nous remettre à l’Anglais, qui va maintenant nous accompagner jusqu’au sud des États-Unis.

Alors, see you soon !

Ci-dessous la carte du parcours correspondant à cet article et les boutons pour commenter ou vous abonner

68. Cap plein Ouest

Après ce point extrême-oriental de la Gaspésie, nous amorçons un virage à 180° pour débuter une longue traversée du Canada qui devrait nous amener dans la région de Vancouver fin-août début-septembre. Notre GPS nous indique à vue de nez 5 500 km et 58 heures de route, mais ce sera forcément davantage compte-tenu de notre malin plaisir à prendre le chemin des écoliers.

Un trou pas du tout perdu

La petite ville de Percé, à l’Est de la Gaspésie, ne compte guère qu’un peu plus de 3 000 habitants, mais elle accueille 20 fois plus de touristes en saison, tous venus voir en priorité le trou dans la falaise qui lui donne son nom. La falaise est maintenant séparée du continent, mais ça n’a pas toujours été le cas. Lorsque Jacques Cartier est passé dans le coin en 1534, il a décrit une seule avancée et trois trous. Les assauts de la mer combinés aux alternances gel/dégel en hiver arrachent chaque année 300 tonnes de roches à la falaise et rendent ses abords dangereux. Nous nous sommes contentés de l’observer de loin, en prolongeant même le plaisir une nuit entière grâce au camping situé pile en face. Cerise sur le gâteau, nous avons observé le matin aux jumelles moult baleines venues prendre leur petit déjeuner dans la baie.


L’anti Robin des bois

Tout près du joli port de pêche de l’Anse à Beaufils, au sud de Percé, se trouve le Magasin Général de la compagnie Robin. Ce Robin-là était un immigré de Jersey et de ce fait parlait très bien l’Anglais et le Français. Il a ainsi pu embobiner les francophones du Québec alors sous domination anglaise en les enrôlant dans la pêche à la morue. M. Robin possédait les bateaux et revendait la morue. Il rémunérait ses pêcheurs en avoirs, utilisables seulement dans les « magasins généraux » …appartenant bien entendu au magnat jersiais. Inutile de dire que M. Robin faisait aussi crédit, entraînant ses ouvriers dans des spirales infernales où l’aîné de la famille devait aller pêcher à son tour pour éponger les dettes du père. Après le moratoire sur la fin de la surpêche à la morue, ces boutiques ont périclité. Mais pour l’histoire, celle-ci a été remise sur pied et aménagée comme autrefois. Pour les touristes, les vendeurs en habits d’époque font l’article de leurs produits, mais heureusement, plus rien n’est à vendre sinon ce baratin.


Retour en Acadie

Quelques mois après la Louisiane, nous retrouvons les Acadiens à Bonaventure, au Sud de la Gaspésie, une de leurs premières destinations après qu’ils aient été chassés de leur Acadie primitive par les Anglais. On se souvient que ces émigrants du centre-ouest de la France avaient fondé une colonie en Nouvelle-France au début du XVIIème siècle, dans un territoire transféré ensuite à l’Angleterre puis reconquis par le Canada. Grâce à une forte résilience et une forte natalité aussi (jusqu’à 25 enfants par famille !) ils ont su se reconstruire et reconquérir peu à peu leurs territoires perdus. 80% des habitants de Bonaventure sont Acadiens. Le drapeau bleu-blanc-rouge orné d’une étoile jaune (représentant la vierge Marie) qui flotte dans la ville aux côtés du drapeau Québécois en témoigne.


Tous à couvert !

Non, ce n’est pas une mauvaise blague sur ce qu’endurent les Ukrainiens, c’est juste l’histoire de quelques ponts couverts croisés sur notre route. Au Québec, il s’en est construit plus de 1 500 au cours du XIXème siècle, principalement pour décupler leur longévité par rapport aux ponts classiques en raison de la sévérité du climat. On dit aussi qu’ils étaient idéaux pour dissimuler les amoureux… Ils étaient dotés d’une construction robuste, de type ferme pour la charpente et de madriers entrecroisés pour les parois. Quelques 90 de ces ponts sont encore présents et pour beaucoup en service. Nous en avons d’ailleurs traversé un, à la fois pour le fun et pour aller régler quelques cartes postales peintes par l’épouse d’un gentil monsieur qui nous a raconté l’histoire du petit village où il habite, de l’autre côté du pont.


Ventes de garages à gogo

Le marché de l’automobile se porte mal, pourrait-on penser à voir fleurir ainsi ces multiples pancartes au bord des routes. Mais ce n’est pas ce que l’on croit. La cause est un phénomène de société au Québec appelé « Le grand déménagement ». Curieusement, la plupart des baux d’habitation expirant au 30 juin, la grande majorité des Québécois qui déménagent le font le 1er juillet. Cela vient d’une loi de 1750 qui imposait alors pour les premiers baux une échéance au 1er mai. Bien plus tard, le 1er mai est devenu le 1er juillet pour ne pas perturber l’année scolaire des enfants. Plus aucune loi n’impose quelque date que ce soit aujourd’hui, mais les habitudes ont la dent dure. Mais alors, pourquoi vend-t-on tous ces garages fin juin ? Eh bien parce qu’une « vente de garage » en québécois est l’équivalent de nos « vide-greniers ».


Apparences trompeuses

Le forfait mobile Free est très prisé des voyageurs qui se rendent en Amérique du Nord, car il offre, outre la gratuité des communications et textos depuis ce sous-continent, 25 Go de données cellulaires en mobilité, ce qui est tout à fait compétitif par rapport à d’autres forfaits européens voire locaux. Mais comme les autres opérateurs français, Free ne possède pas d’antennes en Amérique et doit donc sous-traiter avec des opérateurs locaux. Et nous avons eu la mauvaise surprise de constater qu’en Gaspésie, pourtant une région francophone et très touristique du Canada, la couverture de l’opérateur partenaire de Free, Rogers, est quasi inexistante. Vous pourrez constater cela sur les cartes ci-dessous, répertoriant les antennes des 4 opérateurs historiques canadiens.

Bien sûr on peut trouver des antennes Wi-Fi çà et là, dans les restaurants ou les musées, mais ce n’est pas pareil. Pour nos visites touristiques par exemple, nous avons besoin d’avoir un peu d’internet pour trouver quelques informations actualisées par rapport à nos guides papier, notamment en termes d’heures d’ouvertures. Nous avons dû acheter un forfait local, chez l’opérateur Telus, bien plus présent en Gaspésie. Cela dit, pour le triple de notre forfait Free, nous avons obtenu trois fois moins de données cellulaires. Mais nous avons pu nous connecter, c’était le principal. En tout cas, mieux vaut toujours se renseigner lorsque l’on part dans un pays censé être couvert par son opérateur sur la réalité de la couverture de son relais local.


De mon point de vue…

celui du Mont St Joseph, à Carleton, méritait le déplacement. Surtout pour son panorama sur la Baie des Chaleurs et son barachois, une sorte de lagune fermée par deux bandes de sable, l’une hébergeant le plus beau camping de Gaspésie, l’autre une colonie de hérons. On trouve aussi au sommet une petite chapelle au toit tout bleu surmonté d’une Sainte-Vierge curieusement emprisonnée dans un grillage.


Faire de la pluie un évènement positif

Au cours de ces 2 semaines en Gaspésie, nous aurons profité de 4 ou 5 jours de beau temps, pas plus. En raison de la pluie torrentielle, nous avions décidé de remettre à plus tard la visite des réputés Jardins de Métis, sachant que nous les croiserions de nouveau à la fin de notre boucle. Mais le moment venu, la pluie est toujours présente. A croire qu’elle n’a pas quitté les lieux depuis notre passage. Heureusement, la météo annonce une petite accalmie vers les 15h, alors que le parc ferme à 17. Nous attendons patiemment toute la matinée, et nous précipitons vers l’entrée dès le premier rayon de soleil réapparu. Les Jardins de Métis ont été aménagés par Mme Elsie Reford, une bourgeoise montréalaise venue se mettre au vert chaque été sur un campement de pêche. Associant les fermiers et guides de pêche de la région pour les transformer en jardiniers, surmontant des conditions climatiques extrêmes (et je ne parle pas de la pluie bien sûr), elle parvient à planter plus de 3000 espèces dans un environnement initialement forestier, nous offrant de beaux jardins à l’anglaise. Nous y avons trouvé des fleurs magnifiques et surtout sublimées par cette récente pluie. Les photos parlent d’elles-mêmes. Admirez les gouttelettes qui perlent partout, les superbes pavots bleus de l’Himalaya, les pivoines aux couleurs éclatantes et le jardin sauvage d’épilobes avec leur camaïeu de pourpre.


C’est une maison blanche… accrochée à la ravine

Rien à voir avec sa consœur bleue, celle-ci a une tout autre histoire. Nous sommes rendus à Chicoutimi, de nouveau sur la rive Nord du fleuve St Laurent, et même plus précisément sur la rive Sud de son affluent la rivière Saguenay. En 1996, des pluies exceptionnelles dans la région ont provoqué un débordement de tous les barrages hydro-électriques, et des torrents monstrueux ont envahi les villes en aval. Ainsi à Chicoutimi, toutes les maisons du centre ont petit à petit été emportées par les eaux. Toutes sauf une restée fièrement debout au milieu du déluge. Tout simplement parce que sa propriétaire de 79 ans avait, avant d’être évacuée, déposé une rose sur la statue de Ste Anne qui trônait dans son salon. Mais pourquoi (diable) les autres n’y avaient-ils pas pensé ?!


Pas lol du tout

Ces inondations de 1996, auxquelles la petite maison blanche a survécu, ont fait beaucoup de victimes, générant dans la foulée quelques monuments commémoratifs. Cette « Pyramide des Ha! Ha! » est l’un d’entre eux. Elle est faite d’un intéressant assemblage de 3000 panneaux routiers d’alerte, dont le pouvoir réfléchissant nocturne doit rendre un bel effet lorsque les phares des véhicules l’éclairent. Nous y étions le matin, nous n’avons pas pu vérifier. Ha! Ha! est le nom de la rivière qui a débordé ici. L’étymologie n’est pas claire mais n’a rien à voir avec l’onomatopée liée au rire. Heureusement, car il n’y avait pas de quoi !


Lol par contre

Suite logique aux panneaux d’avertissements, je vous en livre deux autres, photographiés à peu d’intervalle, l’un dans les toilettes d’un magasin de bricolage, l’autre près d’un barrage. Je me demande si le second ne répond pas à la question mystérieuse que semble soulever le premier. Vous en pensez quoi ?


Le village-fantôme de Val Jalbert

C’était la grande époque des pulperies, ces usines de pâte à papier du tout début du XXème siècle. Dans ce site idéal cumulant une forêt abondante pour la matière première, un torrent pour transporter les troncs et une cascade pour fournir l’énergie nécessaire, une usine performante a été installée en moins de 18 mois. Afin d’attirer les ouvriers, un village a été construit avec des facilités rares à l’époque : eau courante et électricité. 25 ans plus tard, 80 maisons abritaient 950 personnes. L’année d’avant la crise économique de 1929, la demande s’était déjà affaiblie et l’usine dut fermer. Les familles partirent les unes après les autres et le site resta abandonné pendant près d’un siècle avant que l’on ne lui redécouvre une valeur historique. Certaines maisons ont été restaurées, ouvertes à la visite avec leur mobilier d’époque, pour certaines transformées en chambres d’hôtes, tandis que d’autres s’effondrent tranquillement, envahies par la nature. Il en résulte un certain charme et nous avons adoré cette balade dans ce site magnifique.


Nous sommes dans la région du lac St Jean, encore calme malgré la saison touristique en cours. Mais les deux jours qui viennent vont être encore plus tranquilles. Nous allons rejoindre le Val d’Or par une route en pleine nature où les stations-services – si cela peut être un repère – sont espacées de plusieurs centaines de kilomètres. A bientôt si nous ne nous perdons pas !